Publié le 3 Avril 2010
Treemonisha (Scott Joplin)
Représentation du 31 mars 2010
Théâtre du Châtelet
Treemonisha Adina Aaron
Monisha Grace Bumbry
Ned Willard White
Remus Stanley Jackson
Zodzetrick Stephen Salters
Direction Musicale Kazem Abdullah
Conception scénographique Roland Roure
Mise en scène et chorégraphie Blanca Li
Adina Aaron (Treemonisha)
Depuis l’arrivée de Jean Luc Choplin en 2006, le Théâtre du Châtelet est devenu un lieu d’ouverture culturelle international en plein centre de Paris.
A une époque dévolue au repli identitaire, cet esprit d’accueil aux arts du monde entier, profondément humaniste, en est une réponse salutaire.
Treemonisha nous confronte à la vie de son créateur, Scott Joplin (1867-1917), pianiste et compositeur noir-américain, ayant du vivre sous domination blanche.
Il créa une œuvre porteuse d’espoir, car le savoir y est vécu comme un moyen d’échapper à tous les obscurantismes, et de devenir un être libre.
Le livret, naïf et très simple, n’en est pas moins touchant, car finalement que nous montre t’on? Un homme (Ned, le père de Treemonisha) qui a baissé les bras et qui boit, sa femme (Monisha) plus forte et qui croit aux anges, leur fille (Treemonisha), guidée par des valeurs sincères, qui refuse le mal comme réponse au mal.
Amusez vous, aujourd’hui, à afficher la sincérité comme valeur, vous récupèrerez au mieux de gentils sourires, au pire un mépris insondable.
A défaut d’un support dramatique consistant, le plaisir à entendre cette œuvre vient de l’ambiance de communion que l’on ressent à voir et à entendre les chanteurs principaux, les chœurs, le chef et l‘orchestre, une vitalité authentique dans les danses telles Aunt Dinah has blowed the horn où les paroles galopent à un rythme entraînant.
Cela a nettement plus d’allure que la farandole joyeuse et folle de la Mireille mise en scène par Nicolas Joel cette saison à l‘Opéra de Paris.
La musique de Scott Joplin hybride des mouvements de cordes mélodieuses, les cadences pimpantes des cuivres, et la nostalgie du banjo dans les chants de cotons, en souvenir des origines africaines.
Puis vient l’émotion à entendre Grace Bumbry, avec l’inévitable croisement des enregistrements passés, les fureurs d’Eboli, les déchirures de Chimène, une énergie vocale encore impactante, un visage si beau, accompagnée par un autre monstre de scène, Willard White, à contre emploi de ses habituels Klingsor, Wotan et Barbe Bleue.
Tous deux forment un couple très naturel dans le rôle des parents de Treemonisha.
La lumière et la rondeur musicale de Adina Aaron, le timbre de Stanley Jackson, si semblable à celui du jeune ténor Paolo Fanale, et les trépidances de Kazem Abdullah parachèvent avec joie un ensemble fait pour extirper les légèretés de l'âme.