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Arnold Schönberg – Quatuor à cordes – Pierrot Lunaire (dm Ph.Jordan) Garnier
Publié le 26 Octobre 2015
Arnold Schönberg (Quatuor à cordes n°2 - Pierrot Lunaire)
Concert du 25 octobre 2015
Palais Garnier
Quatuor à Cordes n°2, op.10 (1908)
Violons Frédéric Laroque, Vanessa Jean
Alto Laurent Verney
Violoncelle Aurélien Sabouret
Pierrot Lunaire, op.21 (1912)
Violon Frédéric Laroque
Alto Laurent Verney
Violoncelle Aurélien Sabouret
Flûte et Piccolo Catherine Cantin
Clarinette Véronique Cotter-Dumoulin
Clarinette Basse Bruno Martinez
Piano François Frédéric Guy
Soprano Caroline Stein
Direction musicale Philippe Jordan
Alors que les représentations de Moïse et Aaron viennent de débuter à l’Opéra Bastille depuis quelques jours, les solistes de l’Opéra National de Paris consacrent par un doux dimanche d’automne une soirée à l’univers musical d’Arnold Schönberg. Nous sommes transportés peu avant la Grande Guerre, au moment où le compositeur s’apprête à dépasser sa passion pour l’art de Richard Wagner et Richard Strauss, et se dirige vers l’écriture atonale révélatrice des sentiments angoissés d’une époque surgie du romantisme national.
Partition du Quatuor à cordes n°2
Dans la première pièce, le Quatuor à Cordes n°2, baignée par les lumières blafardes du grand lustre du Palais Garnier, les vibrations passionnées du violoncelle d’Aurélien Sabouret créent une tension permanente par les résonances qu’elles entretiennent avec notre propre puissance vitale. Les deux violons de Frédéric Laroque et Vanessa Jean et l’alto de Laurent Verney se répondent sur le ton de la fantaisie. Et au troisième mouvement, le violoncelliste au visage si malicieux jusqu’à présent, prend une gravité un peu sur jouée mais qui s’accorde avec ce climat de plus en plus triste et vrai.
Caroline Stein, voix technique et légère sans pathos, est alors comme une étincelle vitale qui s’amuse des effets mécaniques d’un langage musical plus espiègle que n'est ce texte profond et désespéré.
Après l’entracte, la salle s’éteint pour ne laisser que quelques projecteurs illuminer le vieux parquet en bois, les fonds des loges de côté restant, eux aussi, allumés.
Le ciel de Paris peu avant Pierrot Lunaire
Clarinettes, flûte, piccolo et piano ont rejoint la scène et Philippe Jordan apparaît dans un état de concentration sereine. En fin mélodiste, il harmonise joliment d'un simple geste l’ensemble tout en conservant la plus grande part de son attention à la soprano. Les maladies de l’âme que drainent partition et poèmes du Pierrot Lunaire donnent dans cette interprétation une sensation de chaleur inattendue de la part du compositeur. Et Caroline Stein raconte ces égarements avec une intelligence qui semble en surplomber les affects douloureux.
Il n’est pas habituel de voir un public aussi nombreux assister à un concert de musique de chambre dans une salle aussi grande, et d’avoir le sentiment que la vie musicale parisienne débute cette saison avec une vitalité qui donne de la joie pour les jours qui vont suivre.