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Publié le 5 Juillet 2014

Nous ne sommes que bouche (Cassandres Cie)
Variations sur « Une souris verte » pour cor anglais, soprano, comédienne et musique électroacoustique
Représentation du 03 juillet 2014
Galerie Talmart (Paris 4ème)

Avec Marie Soubestre (Soprano), Sylvain Devaux (Cor anglais), Dorothée Daffy (Voix)

Compositeur / Arrangeur Greg Beller
Mise en scène Dorothée Daffy
Compagnie Les Cassandres

 

 

 

                                                                                                        Sylvain Devaux (Cor anglais)

 

Entrer à l’intérieur de la Galerie Talmart située le long du cloître Saint-Merri c’est s’immerger dans l’univers glaçant du conflit syrien et des massacres d’Alep : un tableau situé sur la gauche représente un mur de pierre visé par des bombes guidées, des blocs de savon évoquent les restes du bombardement, et des visages d’anges qui grimacent les yeux bandés parlent d’eux-mêmes.

Marie Soubestre (Soprano), Sylvain Devaux (Cor anglais), Dorothée Daffy (Récitante) et, en arrière plan à la toute gauche, Greg Beller (Compositeur)

Marie Soubestre (Soprano), Sylvain Devaux (Cor anglais), Dorothée Daffy (Récitante) et, en arrière plan à la toute gauche, Greg Beller (Compositeur)

Et lorsque l’on rejoint le sous-sol où va se dérouler le nouveau spectacle de la Compagnie Les Cassandres, le léger malaise de cet univers clinique se prolonge car, non seulement le sol de la scène est recouvert de plumes au creux desquelles les trois comédiennes et comédien dorment lovés, mais en plus, chacun est invité à porter un masque chirurgical.
Ce masque, pour celui qui le porte, lui donne le sentiment de dissimuler partiellement ses réactions, et donc le met finalement à l’aise.

Au cours de cette courte pièce d’une demi-heure, le spectateur se trouve face à ces trois jeunes aux talents complémentaires dont les expressions respectives vont quelque peu l’interloquer, le fasciner ou bien le faire rire.

Car nous assistons à l’émergence d’une humanité au milieu des restes d’un chaos animal - ceci dit bien douillet – et l’on peut imaginer qu’un metteur en scène tel Calixto Bieito aurait recouvert tout le monde de boue pour accentuer le sordide de la situation.
 

Dorothée Daffy n’a cependant pas cherché de telles extrémités. Elle-même récitante, elle raconte une histoire de la naissance de l’âme, chante une variation enfantine et plutôt cruelle sur « Une souris verte », alterne ses déclamations avec Marie Soubestre, qui, à la toute fin, fait passer son soprano du bruitage à l’éclosion de la beauté du chant.   « Remember me », une des plus belles plaintes pathétiques du XVIIème siècle (Henry Purcell), émerge enfin.

Quant à Sylvain Devaux, balbutiant de premiers sons mélancoliques avec son cor anglais auquel l’amateur d’opéra associe naturellement le solo du 3ième acte de Tristan et Isolde, il offre une leçon de technique et un accompagnement musical magnifique sur l’air final. Par ailleurs, il y a quelque chose de touchant dans sa fragilité d’être.


                                                                                             Dorothée Daffy (Comédienne/Metteur en scène)


Mais on ne se rend pas toujours compte des effets électroacoustiques créés par Greg Beller. Ceux-ci se fondent tant dans l’atmosphère vocale, que le spectacle prend un pouvoir méditatif qui pousse chacun d’entre nous – de par la disposition circulaire des auditeurs tout autour des acteurs – à également admirer les visages de chacun pour déceler les réactions engendrées par la tension de la pièce.

Une expérience de l’étrange, de l’humour et de la musique pour lier dans un instant des regards très différents.

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