Cet article propose un récapitulatif détaillé, et pourtant simplifié, de la genèse des Contes d'Hoffmann, et afin de rendre compte facilement de la constitution des différentes versions possibles de l’œuvre, une représentation graphique de certaines versions de référence est utilisée à titre d'illustration. L'ensemble des éléments réunis ne prétendent pas à l'exhaustivité, et toute remarque où complément de la part des lecteurs sera pris en compte.
Patricia Petibon (Giulietta) et Michèle Losier (Nicklausse) - ms Warlikowski 2019 - version Kaye
L'écriture de la première version des Contes d'Hoffmann
Les Contes d’Hoffmann est un opéra qui ne connaît aucune version officielle, son compositeur n’ayant pu achever l’orchestration, après de multiples remaniements, avant de disparaître quelques mois avant la première.
Jacques Offenbach avait eu connaissance de la création au Théâtre de l’Odéon, le 21 mars 1851, d’un drame fantastique de Jules Barbier et Michel Carré.
Mais c’est uniquement une fois devenu le directeur du Théâtre de la Gaité Lyrique en 1873 qu’il commença sa collaboration avec Jules Barbier pour adapter Les Contes d’Hoffmann à la scène lyrique. Il avait auparavant créé sa première œuvre romantique Die Rheinnixen (Les fées du Rhin) sur un livret de Charles-Louis-Etienne Nuitter au Hoftheater de Vienne (l’Opéra impérial), le 04 février 1864.
Sa première version des Contes d’Hoffmann écrite pour Baryton s’apprêtait à entrer en répétition en 1877, mais la faillite le 5 janvier 1878 d’Albert Vizentini, son successeur à la direction de la Gaîté Lyrique (devenu Théâtre Lyrique), l’obligea à reporter le projet.
Doris Soffel (La Voix) - ms Carsen 2016 - version Oeser / Choudens
L'évolution de l'ouvrage après la première audition en 1879
Le 18 mai 1879, Jacques Offenbach organisa dans son appartement du Boulevard des Capucines une audition de neuf extraits de son opéra devant 300 invités, ce qui ravit Fritz von Jauner, directeur du Hoftheater, et Léon Carvalho, le directeur de l’Opéra Comique où avaient été créés La Damnation de Faust et Carmen.
Les mois suivants, le compositeur travailla à l’adaptation de sa partition pour de nouvelles tessitures (ténor pour Hoffmann, soprano colorature pour les quatre rôles féminins).
Si les actes d’Olympia et d’Antonia ne différaient guère du drame de Barbier, les actes de Giulietta et Stella donnèrent lieu à de nombreux remaniements. Dans les premières versions, l’opéra se terminait sur l’air de la muse « des cendres de ton cœur ». Mais ensuite, les auteurs firent réapparaître la Muse comme au prologue, avant de supprimer l’apothéose finale.
Au printemps 1880, Offenbach et Barbier envisagèrent la suppression du personnage de la Muse. Offenbach imaginait également un duo entre Stella et Hoffmann, mais n’en laissa aucune version définitive.
Durant l’été 1880, Jacques Offenbach demanda conseil à Henri Meilhac et Ludovic Halévy, les librettistes de ses opérettes créées au Théâtre des variétés. Il supprima de lui même l'air de Nicklausse « Vois sous l’archet frémissant ».
Les répétitions débutèrent le 11 septembre 1880, mais Offenbach, qui avait achevé la partition chant et piano de son opéra, mourut le 05 octobre 1880.
Ernest Guiraud, ancien prix de Rome, fut désigné pour achever l’orchestration de la partition. Il n’y ajouta aucune note et acheva la version avec récitatifs (destinée à être jouée dans les maisons lyriques internationales, dont Vienne) en y intégrant du matériau d’Offenbach.
La Barcarolle fut ainsi exécutée le 18 novembre 1880 lors du concert organisé par Le Figaro pour l’inauguration du buste du musicien.
Stéphane d'Oustrac (La Muse) - ms Carsen 2016 - version Oeser / Choudens
Les dernières répétitions jusqu'à la création
Le 05 janvier 1881 débutèrent les répétitions, une fois remis le livret manuscrit aux autorités de la censure.
Dans ce livret, découvert seulement en 1987 par l'écrivain Joseph Heinzelmann dans le fonds du Théâtre de l'Odéon, l’acte de Giulietta comprenait 3 tableaux et les meurtres de Schlémil et Pitichinaccio. A la fin, Hoffmann repoussait Stella qui partait avec Lindorf, alors que le poète entonnait un dernier couplet de Kleinzach.
Ce livret montra un état très différent de celui de la création. Rien ne dit qu’il correspondit d'ailleurs à l’état du livret lu par Jules Barbier en juillet 1880. Il fournit cependant au musicologue Michael Kaye les dialogues nécessaires pour la version de l’acte de Giulietta répété avant la création à l’Opéra Comique le 10 février 1881. Mais le musicologue réintégra aussi les récitatifs de Guiraud et les morceaux abandonnés ou inachevés par Offenbach. L’épilogue est néanmoins un assemblage de différentes esquisses dont un chœur supplémentaire des étudiants à capella et un fragment de duo avec Stella.
Au cours de ces répétitions, de nombreux changements eurent lieu. Les couplets de la Muse du prologue furent remplacés par un mélodrame, et son apparition se limita à un rôle parlé. Le trio des yeux fut totalement coupé.
Le 01 février, l’acte de Venise fut exécuté, et pourtant, Léon Carvalho le supprima peu après en réutilisant les passages les plus emblématiques dans les autres actes. Le duo du reflet fut repris pour Stella à l’épilogue, la romance d’Hoffmann « Oh Dieu de quelle ivresse » également, et la Barcarolle fut chantée au début de l’acte d’Antonia.
Le rôle de la Muse et de Nicklausse furent enfin séparés, et les coupures furent consignées dans la première édition d’Antoine Choudens.
Anne Sofie von Otter (Nicklausse) - ms Marthaler 2014 - version Oeser
Les représentations de l’œuvre après la création
Le 07 décembre 1881, Les Contes d’Hoffmann fut représenté au Ringtheater de Vienne sans la grande scène de jeu, avec une seule rencontre entre Giulietta et Hoffmann, et finit sur le meurtre de Schlémil avec inversion de l’acte de Giulietta et Antonia.
Guiraud et Barbier, qui avaient assisté à la répétition de l'acte de Venise peu avant la première à Paris, avaient en effet constaté que l'acte joué dans son intégralité ne fonctionnait pas théâtralement. Le lendemain, le Ringtheater fut détruit par un incendie.
L’acte de Giulietta sans récitatifs fut représenté à Hambourg le 20 septembre 1882, puis avec récitatifs au Wilhelm Städtisches Theater de Berlin en 1884.
Le 25 mai 1887, ce fut au tour de la salle Favart II de disparaître dans les flammes.
En 1904, Raoul Gunsbourg, directeur de l’Opéra de Monte-Carlo, produisit une nouvelle version qu’il vendit aux éditions Choudens (5e édition – Choudens 1907) à partir des manuscrits d’Offenbach transmis par les héritiers. Par réaction à la version de Bruxelles 1887, radicale dans ses coupures, il introduisit trois numéros, « Scintille Diamant », sur un texte original et sur une musique d’Offenbach (Le Voyage dans la Lune), transforma la première mélodie de Dapertutto en air pour Coppélius « J’ai des yeux », pour remplacer le trio des yeux, puis un septuor (sans lien avec Offenbach) sur des paroles de Pierre Barbier, le fil du librettiste, et une musique de Gunsbourg orchestrée par André Bloch. Gunsbourg possédait pourtant le final original de Giulietta que même Guiraud ne voulut pas réintégrer.
Cette version connut une première production spectaculaire à Berlin en 1905.
En 1911, l’acte de Venise réapparut enfin à la salle Favart III de l’Opéra Comique.
Puis, en 1976 fut jouée au Volksoper de Vienne la version de Fritz Oeser, musicologue auquel le chef d’orchestre Antonio de Ameida avait confié 1250 pages manuscrites de Barbier et Offenbach sur leur travail de 1877 à 1880.
Cette édition marqua le retour du double personnage de la Muse et Nicklausse de 1879. Furent réédités « Vois sous l’archet frémissant », l’apothéose finale avec chœur, le trio des yeux, les couplets de la Muse au prologue, la chanson originale de Dapertutto, l’arrivée de Stella et la reprise de la chanson de Kleinzach. Il ajouta des variantes pour d’autres airs, comme les couplets de Nicklausse au Ier acte. Si le prologue et les deux premiers actes furent achevés, celui de Venise et de l’épilogue restèrent à l’état fragmentaire. Il modifia la dramaturgie et intégra de nombreux passages empruntés à Die Rheinnixen.
C’est en 1984 que furent enfin découverts 46 manuscrits en provenance d’un château ayant appartenu à Raoul Gunsbourg. A partir de ces pages qui couvrent la quasi-totalité des coupures réalisées lors des répétitions de 1881, Michael Kaye établit une nouvelle édition critique qui réintroduisit le Trio des yeux, la scène de jeu et la chanson de Giulietta dans leur version définitive de 1880. Cette version fut jouée pour la première fois à Los Angeles en 1988, et fut enregistrée par Jeffrey Tate et Kent Nagano.
Puis en 1993, on retrouva le final de l'acte de Giulietta (144 mesures) du livret de la censure. L’ensemble chœur et soli donnait une vrai conclusion mais il ne s’intégra pas aux récitatifs (Guiraud, Barbier et Gunsbourg l’avaient écarté pour reconstruire l’acte de Venise). L’acquisition de ce manuscrit en 2002 sera la base d’une nouvelle édition de Jean-Christophe Keck.
Enfin, en février 2016, Jean-Christophe Keck découvrit les partitions d’orchestre du prologue et de l’acte d’Olympia qui vinrent compléter l’ensemble des matériaux réunis au fil des décennies.
Jodie Devos (Olympia) - ms Carsen 2020 - version Oeser / Choudens
La constitution de 9 versions possibles des Contes d'Hoffmann
Afin de rendre lisible les différentes évolutions identifiées des Contes d’Hoffmann, les graphiques qui suivent cherche à détailler quelques versions éditeurs, versions récentes enregistrées ou bien jouées sur scène, et même une version imaginée de 1880, afin que chacun puisse avoir une image assez précise, mais sans doute simplifiée, de l’évolution de cet opéra fantastique. 9 versions sont ainsi comparées.
A la suite de ce tableau comprenant un nombre relativement important de codes couleurs, afin de faciliter les comparaisons version par version, l'esprit de chacune de ces versions est rendu avec les principaux éléments qui les caractérisent.
Version de Jacques Offenbach d’avant le 05 octobre 1880
Il s’agit de l’état de la partition et des intentions parfois rejetées par l’auteur avant l’entrée aux premières répétitions pour l’Opéra de Comique.
Elle comprend deux romances de Nicklausse « Oh ! Rêve de joie » et « Vois sous l’archet frémissant » et un air « Voyez-là sous mon éventail », le duetto Nicklausse/Hoffmann, le premier air de Dapertutto « Répands tes feux ».
L’épilogue, qui n’est resté qu’à l’état d’esquisse, intègre un chœur d’ étudiants « Folie ! Oublie tes douleurs ! », le double chœur « A nous ton vin ! », un duetto Stella/Hoffmann, et la sublime apothéose finale de la Muse « Des cendres de ton cœur ! ».
Pourtant, tous ces passages auront disparu dans le livret de la censure précédant la création.
Version du livret de la censure de janvier 1881
Il s’agit de l’état de la partition accompagnant le livret accepté par la censure avant les dernières répétitions de janvier et février 1881 à l’Opéra Comique.
Il comprend les dialogues parlés, les préludes orchestrés par Guiraud (Ouverture, Polonaise, Barcarolle), un nouvel air pour Nicklausse 'Une poupée aux yeux d’émail’ et pour Dapertutto ‘Tourne, tourne, miroir’.
Sont également présents le prologue avec les couplets de la Muse, le Trio des yeux, l’acte de Venise avec l’air de Giulietta ‘L’amour lui dit la belle’, les pantomimes et le double meurtre de Schlémil et Pitichinaccio, mais tous ces passages disparaîtront dans les derniers jours précédents la première.
Version de la création du 10 février 1881
A la création, l’acte de Venise est supprimé par Carvalho et l’acte d’Antonia est déplacé à la Sérénissime afin de conserver les décors. La Barcarolle et son entracte sont cependant joués en début d’acte d’Antonia, et la romance d’Hoffmann ‘O Dieu, de quelle ivresse’ ainsi que le duo Giulietta/Hoffmann qui suit sont réutilisés dans l'épilogue.
La Muse et Lindorf se voient attribués des dialogues à la place de leurs premiers airs prévus au prologue, la Romance d’Hoffmann ‘Ah ! Vivre deux’ est avancée en conservant sa version instrumentale en fin d’acte d’Olympia, et l’épilogue débute par un nouveau dialogue.
Version Choudens 1907
Cette version restitue l’acte de Venise écourté en le jouant avant l’acte d’Olympia, et les dialogues de la version de l’Opéra Comique sont remplacés par les récitatifs de Guiraud.
Mais le prologue de la Muse est totalement supprimé, et la grande scène de jeu avec l’air de Giulietta et le meurtre de Pitichinaccio ne sont pas rétablis dans l’acte vénitien. En revanche, l’acte gagne un nouvel air pour la perte du reflet ainsi qu'un septuor avec chœur, et s’achève sur le meurtre de Schlémil.
Le Trio des yeux n’est pas rétabli mais Coppelius a droit à un nouvel air ‘J’ai des yeux’ composé sur la musique de l’ancien air de Dapertutto qui est remplacé par un nouvel air ‘Scintille diamant’.
Quant à l’épilogue, il conserve la romance d’Hoffmann ‘O Dieu, de quelle ivresse’ qui est donc chantée deux fois, en comptant l’acte vénitien.
Au CD, la version d’André Cluytens 1964 est fidèle à cette édition.
Measha Brueggergosman (Giulietta), Eric Cutler (Hoffmann) - ms Marthaler 2014 - version Oeser
Version Oeser 1976
Cette version vise à revenir à l’original des Contes d’Hoffmann de 1880, mais avec les récitatifs de Guiraud et avec les trois quarts de la partitions réorchestrés.
On retrouve donc trois airs de Nicklausse 'Oh ! Rêve de joie' (écrit en 1877 et replacé à l’épilogue par Oeser), ‘Voyez-là sous mon éventail‘ et ‘Vois sous l’archet frémissant’, le duetto Nicklausse/Hoffmann, et le second air de Dapertutto 'Tourne, tourne, miroir'.
Le prologue, avec les couplets de la Muse, et le Trio des yeux sont aussi rétablis.
L’acte vénitien retrouve sa place après celui d’Antonia, mais est totalement reconstruit à partir de la musique des Fées du Rhin. Un nouveau quatuor avec chœur enrichit la scène de jeu, et Giulietta obtient deux nouveaux airs 'Vénus dit à fortune' et ‘Qui connaît donc la souffrance dont mon âme est affligée’, qui se substituent donc à 'L'amour lui dit la belle'.
Toutes les nouveautés de la version Choudens 1907 sont écartées hormis le meurtre final de Schlémil qui est conservé et suivi d’une scène où Giulietta part avec Dapertutto, rejoints tous deux par Pitichinaccio.
Enfin, l’épilogue comprend un nouveau monologue de la Muse incluant une adaptation de la romance de Nicklausse 'Oh ! Rêve de joie' et l’apothéose finale ‘Des cendres de ton cœur’ achève l’opéra.
Au CD, la version de Sylvain Cambreling 1988 fait référence. Elle correspond à la version jouée à Bruxelles en 1985, et à celle du Teatro Real de Madrid de 2014, dorénavant hébergée par l’Opéra de Stuttgart.
Les Contes d'Hoffmann - direction Sylvain Cambreling - Version Oeser
Version Nagano 1996 (CD)
En s’appuyant sur la dernière édition de Michael Kaye, Kent Nagano enregistre avec José van Dam, Roberto Alagna, Natalie Dessay, Sumi Jo et Leontina Vaduva une version avec récitatifs qui vise aussi à revenir à l’original des Contes d’Hoffmann de 1880, mais avec un acte vénitien plus proche des intentions du compositeur, et sans l’orchestration opulente d’Oeser.
On retrouve donc deux airs de Nicklausse « Une poupée aux yeux d’émail » et « Vois sous l’archet frémissant », le duetto Nicklausse/Hoffmann, et le second air de Dapertutto «Tourne, tourne, miroir».
Le prologue, avec les couplets de la Muse, et le Trio des yeux sont là aussi rétablis.
L’acte vénitien, introduit par l’entracte orchestral, est placé après celui d’Antonia, intègre la scène de jeu avec l’air de Giulietta « L’amour lui dit la belle », toutefois sans le second couplet, mais le septuor de 1904 est intégré juste avant le meurtre de Schlémil, comme dans la version Choudens. L’acte se finit ainsi sur le meurtre de Pitichinaccio.
Enfin, L’épilogue intègre le chœur d’ étudiants 'Folie ! Oublie tes douleurs !', le double chœur ‘A nous ton vin !’ et l’apothéose finale de la Muse 'Des cendres de ton cœur !', avec la reprise du couplet chanté par Stella 'Adieu je t'abandonne'.
Les Contes d'Hoffmann - direction Kent Nagano - Version Kaye
Version Opéra National de Paris 2000
Le 20 mars 2000, la scène Bastille accueille une nouvelle production des Contes d’Hoffmann mise en scène par Robert Carsen sous la direction de James Conlon avec Janec Lotric, Samuel Ramey, Angelica Kirchschlager et Natalie Dessay. Cette version est une reprise de la version conçue par Jean-Pierre Ponnelle et James Levine pour le Festival de Salzbourg 1981, qui retient le meilleur des versions Choudens et Oeser.
Ainsi, on retrouve donc deux airs de Nicklausse ‘Voyez-là sous mon éventail‘ et ‘Vois sous l’archet frémissant’, le duetto Nicklausse/Hoffmann, le prologue, avec les couplets de la Muse, le Trio des yeux et l’apothéose finale ‘Des cendres de ton cœur’, tous acquis de l'édition Oeser. L’acte vénitien est ainsi situé après celui d’Antonia.
Comme dans la version Choudens, la grande scène de jeu avec l’air de Giulietta et le meurtre de Pitichinaccio sont supprimés, mais l’acte vénitien comprend le nouvel air de la perte du reflet et le septuor avec chœur, pour s’achever sur le meurtre de Schlémil. Par ailleurs, Coppelius chante ‘J’ai des yeux’ et Dapertutto ‘Scintille diamant’.
L’épilogue ne comprend donc pas les apports de l’édition Michael Kaye gravée par Nagano.
Angela Brower (La Muse) et Benjamin Bernheim (Hoffmann) - ms Carsen 2023 - version Oeser / Choudens
Version Minkowski Salle Pleyel 2012
Le 22 novembre 2012, Marc Minkowski dirige à la salle Pleyel une nouvelle édition des Contes d'Hoffmann basée sur les derniers travaux de reconstruction de Jean-Christophe Keck. Il revoit certaines transitions, reprend des récitatifs afin d'améliorer la cohérence de l'action tout en restant au plus proche des intentions initiales de l'auteur. Cette version s'approche de celle de Michael Kaye qui avait servi en 1996 à Kent Nagano, mais intègre quand c'est possible les toutes premières versions des airs abandonnés bien avant la création à l'Opéra Comique. Tout au long de l’œuvre, l'orchestration semble retravaillée, et surtout le final d'origine de l'acte vénitien est rétabli.
Le prologue comprend les couplets de la Muse, et le Trio des yeux, et l'on retrouve à l'acte d'Olympia le premier air de Nicklausse « Oh! rêve de joie!», suivi de « Voyez-là sous mon éventail », à la place de « Une poupée aux yeux d’émail », ainsi que le duetto Nicklausse/Hoffmann.
L'acte d'Antonia est inchangé (et inclut « Vois sous l’archet frémissant » ), cependant, le remaniement de celui de Giulietta est particulièrement spectaculaire. L'entracte orchestral sur le thème de la Barcarolle n'est pas maintenu, mais Dapertutto chante «Répands tes feux» au lieu de «Tourne, tourne, miroir», et le récitatif où Schlémil annonce avoir ruiné Hoffmann bénéficie d'une orchestration beaucoup plus sombre et lyrique. «Scintille diamant» et le septuor sont bel et bien absents.
La scène de jeu comprend l’air intégral de Giulietta « L’amour lui dit la belle », chantée un ton plus bas et sans les coloratures de la version Nagano, puis est suivie par la rare pantomime écrite sur les réminiscences de cet air virtuose, avant d’enchaîner sur un nouveau récitatif entre Nicklausse et Hoffmann puis un final identique à la version Kaye, mais musicalement totalement révisé et beaucoup plus dramatique, qui s'achève sur la mort de Pitichinaccio.
Quant à l’épilogue, il comprend le chœur d’ étudiants 'Folie ! Oublie tes douleurs !', le double chœur ‘A nous ton vin !’ et l’apothéose finale de la Muse 'Des cendres de ton cœur !', précédée par une version purement instrumentale du monologue.
Pour cette version, Sonya Yoncheva incarne les quatre rôles féminins, et est entourée par John Osborn, Laurent Naouri et Michèle Losier.
Patricia Petibon (Antonia) - ms Warlikowski 2019 - version Kaye
Version La Monnaie de Bruxelles 2019
En décembre 2019, le Théâtre de la Monnaie confie une nouvelle production des Contes d’Hoffmann à Alain Altinoglu et Krzysztof Warlikowski. L’Opéra est transposé dans le monde du cinéma hollywoodien, et la version s’appuie comme Kent Nagano sur l’édition Michael Kaye, mais avec quelques coupures.
On retrouve donc deux airs de Nicklausse « Voyez-là sous mon éventail » et « Vois sous l’archet frémissant », mais pas le duetto Nicklausse/Hoffmann, ni l’air de Dapertutto «Tourne, tourne, miroir».
Le prologue, avec les couplets de la Muse, et le Trio des yeux sont bien présents, mais la première scène entre Hoffmann et Spalanzani de l’acte d’Olympia est coupée.
L’acte vénitien, introduit par l’entracte orchestral, est placé après celui d’Antonia, intègre la scène de jeu avec l’air de Giulietta « L’amour lui dit la belle », mais l’acte se finit à la prise de conscience de la perte du reflet, sans le meurtre de Pitichinaccio.
Enfin, L’épilogue intègre le chœur d’ étudiants « Folie ! Oublies tes douleurs ! », le double choeur « A nous ton vin !» et l’apothéose finale de la Muse « Des cendres de ton cœur ! », mais le monologue de la Muse est remplacé par une scène parlée de remise des Oscars.
Dans cette version, Patricia Petitbon incarne les quatre rôles féminins selon l’idée d’origine d’Offenbach, Michèle Losier joue la Muse et Nicklausse, et Eric Cutler chante Hoffmann.