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Publié le 12 Novembre 2010

Otello (Rossini)
Version de concert du 11 novembre 2010
Théâtre des Champs Elysées

Otello John Osborn                                  Iago Jose Manuel Zapata
Desdemone Anna Caterina Antonacci    Emilia José Maria Lo Monaco
Elmiro Marco Vinco                                 Le doge de Venise, le gondolier Tansel Akzeybek
Rodrigo Dmitry Korchak                         Lucio Fabrice Constans
Iago Jose Manuel Zapata
Emilia José Maria Lo Monaco

Direction Musicale Evelino Pìdo              Orchestre et Choeurs de l'Opéra de Lyon

José Maria Lo Monaco (Emilia) et Anna Caterina Antonaci (Desdemone)

José Maria Lo Monaco (Emilia) et Anna Caterina Antonaci (Desdemone)

Les quelques spectateurs qui murmuraient, au cours des discussions qui transforment les foyers du théâtre en petits salons mondains, que l’Otello de Rossini serait plus proche de Shakespeare que ne l’est l’Otello de Verdi, ont du rapidement revoir leur appréciation.

Si l’on exclut la chanson du Saule et le meurtre de Desdemone par Otello, l’ouvrage de Rossini se rapproche plutôt d’une situation bourgeoise, finalement toujours aussi actuelle, où un père tente de convaincre sa fille de ne pas épouser un étranger, noir de surcroît, et de lui préférer un fils de bonne famille bien plus convenable.

L’introspection haineuse d’Elmiro se change, en présence de sa précieuse enfant, en une ode à son amour de père, sur lequel il demande à sa fille de faire reposer toute sa confiance et de ne pas suivre l’instinct de son propre cœur.

Que l’hypocrisie humaine emprunte, pour masquer un sentiment négatif, un autre sentiment en apparence honorable est un mécanisme dangereux bien connu.

Dans cet esprit là, la simple représentation de cet opéra en version de concert, sans la moindre mise en espace, nous convie à l’atmosphère austère d’un enterrement où règnent vestes et robes noires.

Dmitry Korchak (Rodrigo)

Dmitry Korchak (Rodrigo)

Et la distribution contient un lot de surprises et de découvertes totalement inattendues.

Dmitry Korchak avait laissé un bon souvenir à l’Opéra Bastille lors de la reprise de l’Elixir d’Amour à l’automne 2007, même si le timbre avait paru plutôt banal, et moins marqué dans Demofoonte.

Ce soir, le personnage de Rodrigo est apparu non pas comme un prétendant de pâle figure, mais comme un amoureux plein de fougue, sanguin, auquel les fins traits de visages féminisent pourtant l’allure, et la voix de Dmitry, dense, projetée en hauteur avec parfois un peu de rudesse, a tenu le choc face à une écriture qui transcende les expressions viriles en aigus surhumains.

John Osborn, Otello plus névrosé, révèle lui aussi de grands passages violents et de subtiles sentiments passés en voix de tête, avec aussi des moments plus faibles, lorsque le Maure s’exprime dans une tonalité sombre.

Les chanteurs semblent véritablement choisis pour leur adéquation au caractère vocal des différents rôles, car il y a dans la voix de Jose Manuel Zapata le tempérament affirmé, même dans la simple déclamation, qui donne une dimension sûre et dirigiste à Iago, alors que le style doux et angélique de Tansel Akzeybek fait du gondolier un rêveur en souffrance.

Evelino Pìdo

Evelino Pìdo

Plus sommaire, Marco Vinco laisse le personnage d’Elmiro vivre dans ses bassesses spirituelles, alors que la tragédienne que l’on aime, en Anna Caterina Antonacci, apparaît enfin au final du second acte, comme pour se libérer du poids de ce monde masculin qui la sclérose depuis le début. Ses regards froids et l’élégance de sa silhouette ne découvrent cependant pas la petite faille qui devrait faire vaciller la force de sa droiture dans « assisa a’pie d’un salice », et nous toucher bien plus.

Le phrasé est magnifiquement sculpté, les graves toujours aussi expressifs, la virtuosité plus coincée, et les emportements spectaculaires. Celle qui fut Timante dans Demofoonte en 2009 à Garnier, José Maria Lo Monaco, accompagne dignement les angoisses de Desdemone.

Toute l’énergie d’un tel drame repose aussi sur un chef inspirant, dynamique, variant les attentions sur un champ en demi-cercle, de chaque musicien à chaque chanteur, qu’il dirige aussi bien d’un regard clairement posé et de la proximité de la main, sans oublier les larges brassés d’ensemble incluant le chœur.
Evelino Pìdo est ce type de chef, théâtral sans complexe, mais capable ensuite de stabiliser les nappes orchestrales pour les fluidifier.

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Publié le 14 Juin 2009

Demofoonte (Jommelli)
Représentation du 13 juin 2009 (Palais Garnier)

Direction musicale Riccardo Muti
Orchestra Giovanile Luigi Cherubini
Mise en scène Cesare Lievi

Demofoonte Dmitry Korchak
Dircea Maria Grazia Schiavo
Timante José Maria Lo Monaco
Matusio Antonio Giovanni
Creusa Eleonora Buratto
Cherinto Valentina Coladonato
Adrasto Valer Barna-Sabadus
                            

                                           

                               Maria Grazia Schiavo, Riccardo Muti, José Maria Lo Monaco

Il est un peu ridicule de comparer la musique de Jommelli à celle de Mozart (près d‘un demi siècle d‘écart), car c’est avec le point de vue de l’archéologue qu’il faut aller écouter cet ouvrage, et y déceler ce qu’il peut contenir comme constructions harmoniques stimulantes encore aujourd’hui, et surtout pour le siècle de création (1743).

Il est un peu ridicule de comparer la musique de Jommelli à celle de Mozart (près d‘un demi siècle d‘écart), car c’est avec le point de vue de l’archéologue qu’il faut aller écouter cet ouvrage, et y déceler ce qu’il peut contenir comme constructions harmoniques stimulantes encore aujourd’hui, et surtout pour le siècle de création (1743).

D'autant plus que ce Demofoonte est prétexte à un déferlement de sentiments exprimés par des airs étendus, et soutenus par une distribution féminine forte.
Quatre femmes, toutes émotionnellement investies, qui rendent vivants autant que possible Timante - José Maria Lo Monaco lui donne les couleurs et la douleur de celui qui pourrait être le futur Idamante de Mozart-, Dircea - Maria Grazia Schiavo vit sa spontanéité en mélangeant les caractères d’une Suzanne et d’une Fiordiligi -, Creusa - Eleonora Buratto ennoblit expression corporelle et vocale avec une luminosité qui en ferait une Despine luxueuse, Cherinto - Valentina Coladonato sensibilise son chant au point de lui donner un naturel poignant avec ce petit plus d’un bel éclat dans l’aigu.

Les hommes touchent beaucoup moins, Dmitri Korchak impressionne tout de même au second acte à travers un air violent et puissant auquel il ne cède rien.

                                                                                        Eleonora Buratto (Creusa)

Il peut paraître comme cela un peu placide Riccardo Muti - nous lui excusons cette manière solennelle de se faire désirer au début de chaque acte - mais il est le support indispensable à ce spectacle, non seulement par la manière de donner un mélange de rigueur et de gestes caressants aux musiciens, mais aussi par l’accroche que l’on peut lire dans le regard des chanteurs. Il est clairement le maître du plateau.

La mise en scène se distingue par un décor de colonnes orientées dans toutes les dimensions, aussi extravagant que le livret - une histoire où le fils de Demofoonte et la fille de Matusio vont se révéler être des enfants échangés à chaque parent, ce qui permet de lever une malédiction qui obligeait le Roi à sacrifier des jeunes filles chaque année.

José Maria Lo Monaco (Timante)

José Maria Lo Monaco (Timante)

Le niveau théâtral est d’époque, ce qui n’aide pas à prendre tout cela au sérieux, mais même Gerard Mortier n’aurait pu faire accepter au chef italien de diriger un opéra dans une mise en scène à la Emilio Sagi.

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