Histoire de l'Opéra, vie culturelle parisienne et ailleurs, et évènements astronomiques. Comptes rendus de spectacles de l'Opéra National de Paris, de théâtres parisiens (Châtelet, Champs Élysées, Odéon ...), des opéras en province (Rouen, Strasbourg, Lyon ...) et à l'étranger (Belgique, Hollande, Allemagne, Espagne, Angleterre...).
Leonard Bernstein / Jake Heggie / John Adams
Concert du 23 février 2023
Auditorium de Radio France
Leonard Bernstein (1918-1990) : Candide, ouverture (1956) Jake Heggie (né en 1961) : Camille Claudel : Into The Fire (2012) John Adams (né en 1947 ) : Harmonielehre (1985)
Mezzo-soprano Joyce DiDonato
Direction musicale Pierre Bleuse Orchestre National de France
Cette soirée du 23 février 2023 restera sans doute inoubliable pour le public de l’auditorium de la Maison de la Radio et de la Musique au point que l’on peut déplorer qu’une plus grande publicité n'ait été faite pour ce concert 100 % américain qui méritait une salle comble.
Sous forme de mise en bouche, l’étincelante ouverture de ‘Candide’ de Leonard Bernstein est d’emblée une bouffée d’optimisme à l’effervescence bien rythmée qui laisse la plénitude du son s’épanouir, ce qui permet à Orchestre National de France d’offrir une première démonstration de l’ampleur de ses couleurs.
Joyce DiDonato
Magnifique et vêtue d’une robe aux reflets grenats et prompte à entrer dans les états d’âme recueillis de Camille Claudel, Joyce DiDonato fait une entrée chaleureuse et émue, sous les applaudissements du public mais aussi de Pierre Bleuse, car elle s’apprête à offrir à l’assistance, en première pour la France, son interprétation d’’Into The Fire’ dont elle avait assurée la première mondiale 11 ans plus tôt, le 04 février 2012, au Herbst Theater de San Francisco.
A ce moment là, Jake Heggie avait composé cet hommage à la muse de Rodin pour un quatuor à cordes, une forme plus intime et introspective que la version orchestrale jouée ce soir, dont l'arrangement fut achevé trois ans plus tard pour le Berkeley Symphony, en décembre 2014.
Sur des textes de Gene Scheer, auteur et compositrice américaine, les huit poèmes symphoniques racontent l’absence, l’attachement, le manque et des étreintes évanouies de la sculptrice, jusqu’au délire paranoïaque et la solitude de l’asile psychiatrique.
Joyce DiDonato et Pierre Bleuse
L’amateur d’opéra ne peut s’empêcher de reconnaître, dès la première pièce intitulée ‘Rodin’, des réminiscences de la scène de la tour de ‘Pelléas et Mélisande’ qui reviendront à plusieurs reprises dans les autres passages. Le texte est d’ailleurs très explicite, peut-être par hasard, dans ‘La petite châtelaine’, lorsque sa mère évoque ses sorties la nuit par la fenêtre de la tour.
Mais on pense aussi au sentimentalisme du ‘Werther’ de Massenet dès le début, ou bien, dans ‘Shakuntala’, à un orientalisme mauresque où Joyce DiDonato fait une démonstration d’ornementations nuancées et de colorations passionnées d’une intensité fabuleuse. La tension corporelle qui l’anime atteint son paroxysme à ce moment précis.
Joyce DiDonato
Et puis il y a aussi ces évanescences minimalistes qui évoquent les compositions de Philip Glass dans ‘The Gossip’, puis un retour, dans l’épilogue, à ce mélange subtil de romantisme et de symbolisme présent au début.
Cette très belle musique aux tissures délicates fait voyager, mais aussi fait progressivement remonter des émotions profondes dans un esprit de sérénité très mystérieux.
Applaudissements nourris, galvanisés par un spectateur, assis au parterre, très enthousiaste qui cherche à entraîner avec lui toute la salle, cette première partie est autant un hommage à Jake Heggie qu’à une artiste aussi merveilleuse et bienveillante que Joyce DiDonato.
L'Orchestre National de France
Changement d’atmosphère en seconde partie, où Pierre Bleuse va se lâcher et électriser l’Orchestre national de France surmonté par une impressionnante rangée de percussions et de vibraphones.
‘Harmonielehre’ fut créée le 21 mars 1985 au Davies Hall de San Francisco. Cette symphonie en trois mouvements est née d’un rêve de John Adams, ce qui autorise pleinement l’auditeur à laisser courir son imagination sur une musique de conception minimaliste, mais qui s’ouvre sur des paysages grandioses et une ampleur d’où peuvent surgir des accélérations rythmiques qui catalysent une énergie phénoménale.
Pierre Bleuse
Le chef d’orchestre français, qui dirigera l’Ensemble intercontemporain à partir de la saison prochaine, est impressionnant d’enthousiasme. Sens inné de la tension physique, drainé par une exaltation quasi hallucinée, il fait ressortir l’étrange dimension wagnérienne de l’œuvre d’autant plus aisément que l’Orchestre National de France en a l’envergure.
A plusieurs moments, le sentiment d’être aspiré dans un univers cosmique vertigineux devient très intense, et cette sensation nous fait perdre tous nos repères quand l’ivresse sonore l’emporte. Et visiblement, les musiciens sont eux-mêmes subjugués par ce véritable monstre musical qu’ils engendrent, respectant la complexe mécanique musicale tout en faisant s'enchevêtrer les multiples nappes sonores avec un art de la fusion splendide.
Un concert dont on sort estomaqué et heureux d’avoir été aussi submergé par une telle impression de grandiose et d’excès.
L’annonce de la saison 2023/2024 était très attendue car l’institution américaine a été beaucoup plus ébranlée par la crise sanitaire que les établissements européens du fait que son modèle économique ne repose pas sur un système de subventions publiques directes, et qu’elle a du subir 18 mois de fermeture consécutifs jusqu’à la saison 2021/2022. La fréquentation est passée de 73 % avant crise à 61 %, et la billetterie s’est effondrée de plus de 40 millions de dollars (1).
Mais Peter Gelb est bien décidé à prouver que l’opéra a un avenir et qu’il peut y amener une nouvelle génération d’amoureux d’art lyrique. En effet, cette saison a montré que le public, et le plus jeune en particulier, ne court pas après les anciennes productions classiques et démodées et s’intéresse surtout aux thèmes qui le touchent plus directement. Les 40 % de fréquentation observés pour la production de ‘Don Carlo’ (1) par David McVicar sont un constat cinglant pour ceux qui croient sérieusement que ce genre de spectacle traditionnel peut plaire au grand nombre. (1) Radio Classique 27/12/2022 :New York : Le Met Opera mise sur des œuvres plus contemporaines pour enrayer la baisse de fréquentation
Anthony Davis’s “X: The Life and Times of Malcolm X,” - New-York Times
18 spectacles, 6 nouvelles productions, 13 compositeurs dont 6 contemporains.
Avec 191 représentation lyriques au cours de la saison 2023/2024 et 18 spectacles lyriques (dont 6 nouvelles productions), le MET réduit considérablement la voilure. C’est 15% de spectacles et 10% de représentations en moins que la saison 2022/2023. Et sur 5 ans, la baisse est de 30% de spectacles et 15% de représentations en moins.
Toutefois, 13 compositeurs différents sont représentés, dont 6 sont contemporains et toujours vivants, et c’est le grand pari de cette saison qui offre 25 % de ses soirées à des ouvrages créés après 1980, ‘X: The Life and Times of Malcolm X’ d’Anthony Davis (1985), ‘Florencia en el Amazonas’ de Daniel Catán (1996), ‘Dead Man Walking’ de Jake Heggie (2000), ‘El Niño’ de John Adams (2000), ‘Fire shut up in My bones‘ de Terence Blanchard (2019) – premier opéra d’un compositeur noir présenté au MET en 2021 - et ‘The Hours’ de Kevin Puts (2022).
Benjamin Bernheim : Roméo et Juliette (2024)
Le répertoire italien (Puccini et Verdi) et français (Bizet et Gounod) préservé
Mais le grand répertoire italien préserve ses fondamentaux avec 30 % des représentations dédiées à Giacomo Puccini (‘La Bohème’, ‘Tosca’, ‘Turandot’ et la plus rare ‘Rondine’) et 17 % à Giuseppe Verdi (‘Rigoletto’, 'La Forza del Destino' et ‘Un Ballo in Maschera’).
Dans un tel contexte, le répertoire français s’en sort très bien puisque deux ouvrages ‘Carmen’ (Nouvelle production mise en scène par Carrie Cracknell) et ‘Roméo et Juliette’ de Gounod couvrent 12 % des soirées, alors que Richard Wagner se maintient avec un seul ouvrage, ‘Tannhäuser’, dans une très ancienne production d’Otto Schenk, totalement dépassée aujourd'hui.
Oksana Lyniv : Turandot (2024)
Le répertoire 1900-1980 allemand, tchèque et anglais, les œuvres baroques et les ouvrages russes absents
Quant à Mozart, il ne sera joué que dans une version réduite et familiale de ‘La Flûte enchantée’, et le répertoire classique pourra cependant compter sur la reprise d’’Orfeo ed Euridice’ de Gluck pour être pleinement défendu. Et les œuvres baroques, généralement assez rares dans cette immense salle de 3700 places, sont absentes cette saison.
Mais aucun ouvrage allemand, tchèque, autrichien ou britannique de la période 1900-1980 ne sera représenté (exit Richard Strauss, Alban Berg, Leos Janacek, Kurt Weill ou Benjamin Britten qui constituent habituellement 8 % du répertoire du MET), et il est trop tôt pour dire si l’absence du répertoire russe sera amenée à se prolonger en raison de la guerre en Ukraine, car Peter Gelb indiquait bien en avril 2022 que « il est ridicule que des artistes soient écartés parce qu’ils sont russes et le fait que certains orchestres et compagnies d’opéra annulent le répertoire russe est une erreur. Cela envoie exactement le mauvais message. Les grands chefs-d’œuvre russes ne sont pas responsables de Poutine. Nous annulons Poutine, pas Pouchkine. Nous n’allons donc pas modifier nos plans pour la représentation du répertoire russe. » (2)
Yannick Nézet-Séguin : Dead Man Walking, Florencia en el Amazonas, La Forza del Destino, Roméo et Juliette
4 ouvrages en 4 langues différentes dont 3 nouvelles productions dirigées par Yannick Nézet-Seguin
Avec l’enthousiasme qu’on lui connaît, Yannick Nézet Séguin conduira 4 spectacles dont 3 nouvelles productions, ‘Dead Man Walking’ (Nouvelle production mis en scène par Ivo van Hove), ‘Florencia en el Amazonas’ (Nouvelle production mise en scène par Marie Zimmerman) , La Forza del Destino (Nouvelle production mise en scène par Marius Trelinski en co-production avec le Teatr Wielki–Polish National Opera) et ‘Roméo et Juliette’.
A ces 3 nouvelles productions s’ajoutent celles d’‘El Niño’ mis en scène parLileana Blain-Cruz et conduite par Marin Alsop, ‘X: The Life and Times of Malcolm X’ mis en scène par Robert O’Hara et dirigée par Kazem Abdullah (coproduction Detroit Opera, Lyric Opera of Chicago, Opera Omaha, et Seattle Opera), et 'Carmen’ mis en scène par Carrie Cracknell sous la direction de Daniele Rustioni.
Et si l’on s’intéresse aux artistes français, seul 3 seront mis en valeur, Clémentine Margaine dans ‘Carmen’, Benjamin Bernheim dans ‘Roméo et Juliette’ et Roberto Alagna dans ‘Turandot’.
La Force du destin - Mise en scène Marius Trelinski - New-York Times
Pour rendre compte du travail du MET sur sa recherche de diversité d’origine et de genre des artistes qu’il souhaite représenter, il suffit alors de regarder les visages des distributions qui montrent le niveau de volontarisme pour cette ouverture au monde d’aujourd’hui.
Même s’il on n’adhère pas à la politique artistique des dernières décennies du MET qui mettait l’accent sur les voix et non la recherche de spectacles signifiants et intelligents, il faut souhaiter que la vision de Peter Gelb soit la bonne, car elle replace New-York à l’avant-garde, ce qui pourrait amplifier l’effet d’entraînement en Europe, et notamment à Paris où les choses bougent malgré une frange conservatrice du public.
9 productions du MET en direct au cinéma en HD
Samedi 21 octobre 2023 - 12h55 (EST) : Dead Man Walking
Samedi 18 novembre 2023 - 12h55 (EST) : X: The Life and Times of Malcolm X
Samedi 09 décembre 2023 - 12h55 (EST) : Florencia en el Amazonas
Samedi 06 janvier 2024 - 12h55 (EST) : Nabucco
Samedi 27 janvier 2024 - 12h55 (EST) : Carmen
Samedi 09 mars 2024 - 12h55 (EST) : La Forza del Destino
Samedi 23 mars 2024 - 12h55 (EST) : Roméo et Juliette
Samedi 20 avril 2024 - 12h55 (EST) : La Rondine
Samedi 11 mai 2024 - 12h55 (EST) : Madame Butterfly
Le détail de la saison 2023/2024 du MET peut être consulté sous le lien suivant : On Stage 2023–24.
A écouter également, la très intéressante conversation entre Peter Gelb et Jim-Zirin (février 2023) sur les défis du MET, son engagement dans la guerre en Ukraine et les enjeux pour attirer de nouveaux passionnés. Peter Gelb se dit être un optimiste prudent.
Conversation entre Jim Zirin et Peter Gelb sur l'avenir du MET (Février 2023)
Achille in Sciro (Francesco Corselli – Real Colisea del Buen Retiro de Madrid, 8 décembre 1744) Représentation du 19 février 2023
Teatro Real de Madrid
Lycomède Mirco Palazzi
Ulysse Tim Mead
Deidamia Francesca Aspromonte
Teagene Sabina Puértolas
Achille / Pyrrha Gabriel Díaz
Arcade Krystian Adam
Néarque Juan Sancho
Direction musicale et clavecin Ivor Bolton
Mise en scène Mariame Clément (2020) Orquesta Barroca de Sevilla
Chœur titulaire du Teatro Real de Madrid Coproduction Theater an der Wien
Œuvre reconstituée par l’Instituo Complutense de Ciencas Musicales (ICCMU) – Édition critique de Alvaro Torrente
En introduction du livret distribué au public venu assister à ’Achille in Sciro’ de Francesco Corselli, Gregorio Marañon, le président du Teatro Real, rappelle que, le 17 mars 2020, la première de cette recréation fut douloureusement suspendue à cause de l’épidémie de covid-19.
Gabriel Díaz (Achille / Pyrrha) et Francesca Aspromonte (Deidamia)
3 ans plus tard, cet opéra créé sous le règne de Philippe V, petit fils de Louis XIV, peut être enfin redécouvert. Francesco Corselli est un compositeur italien qui naquit à Piacenza en 1705 et écrivit son premier opéra ‘La venere placata’ pour Venise en 1731. Il intégra la cour d’Espagne en 1734 où il composa un grand nombre d’œuvres religieuses, puis présenta en 1738, à l’occasion du mariage de l’Infant Charles III et de Marie-Amélie de Saxe ,‘Alessandro nelle Indie’, son premier opéra qui soit basé sur un texte de Métastase.
Il y en aura cinq autres dont ‘Achille in Sciro’ qui fut d’abord mis en musique par Antonio Caldara en 1736, pour Vienne, puis par Dominico Natale Sarro pour l’inauguration de Teatro san Carlo de Naples le 4 novembre 1737.
Sur ce même texte, Francesco Corselli composa une nouvelle musique destinée à célébrer le mariage de l’Infante d'Espagne Maria Teresa Rafaela avec le Dauphin Louis de France (fils de Louis XV), et la création eut lieu au Real Colisea del Buen Retiro de Madrid, le 8 décembre 1744.
Tim Mead (Ulysse)
L’œuvre ne fut plus reprise en Espagne par la suite. Dans sa volonté de mettre en valeur une partie du patrimoine musical espagnol, le Teatro Real de Madrid lui offre ainsi un magnifique écrin dans une mise en scène et une interprétation musicale qui la servent très bien.
Métastase s’est inspiré d’un épisode qui n’est pas relaté dans l’Iliade mais bien plus tard par le poète napolitain Stace (40-96) à travers son épopée inachevée ‘Achilleis’, qui devait raconter l’enfance d’Achille jusqu’à la Guerre de Troie.
Il s’agit d’une réflexion enjouée sur le dilemme entre l’engagement amoureux et la conquête vers la gloire que l’environnement et la hiérarchie sociale font peser sur les hommes.
Francesca Aspromonte (Deidamia)
Thétis, Néréide et mère d’Achille, sachant que son fils mourra lors de la prise de Troie, l’envoie à la cour du Roi de Skyros, Lycomède, déguisé en femme de la cour sous le nom de Pyrrha (‘La rousse’ en grec ancien). Il tombe amoureux de la fille du Roi, Déidamie, mais l’arrivée d’Ulysse sur l’île va aboutir au dévoilement du travestissement du guerrier grec.
Dans sa première partie, l’œuvre produit un complexe mélange de sexes et de genres dans un esprit de mascarade inhérent à l’époque baroque, et l’on peut même voir dans cette production de Mariame Clément un chanteur incarnant un homme déguisé en femme, Achille, embrasser furtivement une chanteuse incarnant un homme, Teagene.
Sabina Puértolas (Teagene)
Pour la petite histoire, cette légende d’Achille fut pour la première montée en opéra sous le titre ‘La finta pazza’ par Francesco Sacrati (Bologne, 1641), qui est considéré comme le premier opéra qui fut joué en France en 1645, à la salle du Petit Bourbon, à l’initiative du Cardinal Mazarin.
Quelques années plus tard, Giovanni Legrenzi composa également pour le Teatro di Santo Stefano de Ferrare, en 1663, ‘L’Achille in Sciro’.
C’est dire que ce thème a parcouru l’histoire de l’opéra baroque pendant un siècle jusqu’à l’ultime version de Francesco Corselli en passant même par le dernier opéra de Georg Friedrich Haendel, ‘Deidamia’, écrit pour Londres en 1741.
Francesca Aspromonte (Deidamia)
Pour son retour sur la scène du Teatro Real de Madrid où il interprétait ‘La Calisto’ de Cavalli en mars 2019, l’Orquesta Barroca de Sevilla rend à la musique de Corselli toute sa fougue, augmentée par une caractérisation très affûtée des instruments à vent, le poli des cuivres sonnant avec clarté et pureté, notamment. Les nombreux aria da capo ne sont pas sans laisser une impression de répétition, et il manque dans l’écriture de longues plages de respiration, ces magnifiques largo qu’Haendel, par exemple, savait composer.
Mais l’esprit est à l’action et à l’optimisme, et Ivor Bolton s’avère être un efficace maître du tempo et de enchevêtrement théâtral et musical. L’écoute de cette belle pâte sonore, nourrie et vivante, est par ailleurs un plaisir entêtant de l’instant qui dynamise l’intériorité de l’auditeur.
Dans le rôle principal, Gabriel Díaz assure le remplacement de Franco Fagioli, souffrant, et apporte une coloration ample et sombre à Achille qui évoque un fort sentiment mélancolique et dépressif. L’endurance de ce jeune chanteur sévillan est fortement mise à l’épreuve et s’avère solide pour surmonter ses nombreux airs.
Tim Mead, en Ulysse, bien que lui aussi guerrier, fait ressentir une tendresse un peu lunaire. Il n’a pas autant à chanter que Gabriel Diaz, mais il est assez séduisant de constater que ses interventions invitent à la rêverie. Le contraste entre ce qu’évoquent ces deux chanteurs et les personnages mythologiques qu’ils représentent est absolument déroutant.
Juan Sancho (Néarque) et Gabriel Díaz (Achille / Pyrrha)
Émouvante, excellente actrice, et douée d’une fraîcheur de timbre charmante qui s’apprécie dans les moments les plus délicats, Francesca Aspromonte colore de multiples états d’âme Deidamia, à la fois femme amoureuse, heureuse de vivre, mais aussi qui aspire à une grande liberté d’être.
Cela permet aussi à Sabina Puértolas de s’affirmer en Teagene comme une étourdissante technicienne, à manier les trilles et la vélocité expressive qui déploient ainsi un personnage vaillant et d’apparence sans peur. Autant Francesca Aspromonte est d’approche mozartienne, autant la soprano espagnole est totalement impliquée dans la tonalité baroque, avec des petites intonations assombries, et fait preuve d’un panache à l’effet très réussi.
Gabriel Díaz (Achille / Pyrrha), Tim Mead (Ulysse) et Krystian Adam (Arcade)
Deux ténors se présentent comme les reflets d’Achille et Ulysse. Néarque, le tuteur du premier, est interprété par Juan Sancho, chanteur à l’abatage certain qui a des qualités déclamatoires très expressive, mais Krystian Adam décrit un Arcade, le confident du second, plus posé, au timbre plus riche qui prend encore plus possession de la salle.
Enfin, Mirco Palazzi incarne un Lycomède adouci mais avec une élocution peu contrastée, ce qui rend son personnage trop monotone.
Non sans un certain opportunisme, Mariame Clément insiste sur la dimension ‘queer’ de cet opéra baroque, et fait beaucoup appel à des coloris et des lumières dans les teintes rose-orangé, sans virer au kitsch pour autant. Elle choisit le cadre d’une grotte, qui évoque beaucoup la grotte de Vénus de Louis II Bavière, surtout lorsqu’ Ulysse approche de Skyros en barque. La présence une jeune aristocrate royale du XVIIIe siècle fait pencher pour l’interprétation d’un rêve dans un lieu qui sert de refuge.
Mariame Clément imprime un excellent rythme et beaucoup d’effets de surprise dans la gestion des apparitions des divers protagonistes, en faisant de cet opéra une brillante comédie de bon goût. Elle donne au chœur – qui n’a que trois interventions - une présence vivante et naturelle, et on voit qu’il s’agit d’une metteur en scène qui sait diffuser dans son spectacle sa propre personnalité avec finesse.
Gabriel Díaz, Francesca Aspromonte, Ivor Bolton, Gabriel Díaz et Sabina Puértolas
Pour montrer comment l’œuvre bascule de la confusion des genres inhérente à l’esprit du XVIIe siècle à un nouvel humanisme classique, des reproductions de statues sont insérées dans le décor, et une saisissante proue de navire apparaît au moment où l’heure du départ approche. On serait tenté de voir en Deidamia une autre Didon qui en veut à celui qui la quitte, mais ici, la rancœur est très passagère, et l’acceptation que le devoir est le plus fort est significatif de la morale que Corselli souhaitait présenter à la cour royale.
La démonstration qu’il s’agit d’un ouvrage qui sonne comme un adieu tout en sourire à une certaine époque est tout à fait convaincante, et de plus, il enrichit notre regard sur une légende qui a longtemps nourri l’histoire de l’opéra italien avant que de nouvelles formes musicales ne prennent la suite.
Concerto pour clavecin*, flûte, hautbois, clarinette, violon, et violoncelle (Manuel de Falla - Barcelone, 1926)
Pulcinella (Igor Stravinsky - Opéra de Paris, 1920 – réarrangement en suite, 1922)
El Retablo de Maese Pedro (Manuel de Falla - Version de concert à Sevilla, 23 mars 1923, et Version scénique à Paris - Hôtel de Polignac, le 25 juin 1923)
Représentation de concert du 18 février 2023
Teatro Real de Madrid
Maese Pedro Airam Hernández
Don Quijote José Antonio López
Trujamán Héctor López de Ayala Uribe
Direction musicale Pablo Heras-Casado Mahler Chamber Orchestra
Claveciniste Benjamin Alard * Clave donado generosamente por Rafael Puyana al Archivo Manuel de Falla
Pour le centenaire de la création d’El Retablo de Maese Pedro’ (Les Tréteaux de Maître Pierre), le Teatro Real de Madrid présente, pour une seule soirée, un programme qui rend hommage à l’admiration du compositeur espagnol envers Igor Stravinsky, qu’il rencontra pour la première fois en France en 1916.
Pablo Heras-Casado et le Mahler Chamber Orchestra
En effet, après la Première Guerre mondiale, et dans un mouvement de prise de distance avec les influences nationalistes, Stravinsky développa une écriture néoclassique. Manuel de Falla fut lui aussi inspiré par ce style moins débordant et d’apparence plus rationnel auquel il se consacra dès qu’il s’installa à Grenade en 1920.
Le programme de ce soir qui rapproche le ‘Concerto pour clavecin’, la suite ‘Pulcinella’ d’Igor Stranvinsky et ‘El Retablo de Maese Pedro’, tous trois composés après 1920, amène l’auditeur à se laisser imprégner par cette sensibilité musicale née dans l’entre Deux-Guerres.
Héctor López de Ayala Uribe (Trujamán) et Airam Hernández (Maese Pedro)
Pour le 'Concerto pour clavecin, flûte, hautbois, clarinette, violon, et violoncelle', Pablo Heras-Casado a disposé les musiciens de façon à ce que le claveciniste soit placé à l’avant, auprès de lui, les 5 autres solistes étant disposés en cercle tout autour d’eux.
L’atmosphère est intime et détendue, et les sonorités pleines et chaleureuses font sentir la matière même des bois dans un esprit un peu ancien. Le très agréable délié du clavecin – instrument légué par Rafael Puyana (1931-2013), le dernier élève de Wanda Landowska, célèbre claveciniste que connut Manuel de Falla -, ne prend pas l’avantage et s’insère dans l’exécution d’ensemble dont la rythmique, d’apparence un peu mécanique et bien réglée, respire la joie de vivre, au lieu d’accentuer la sévérité des tempi.
Le hautboïste moscovite Andrey Godik se distingue aussi par la noblesse et la fluidité de son souffle.
On retrouve cette approche humble qui cultive le goût pour l'authenticité dans l’interprétation de la suite de ‘Pulcinella’, suite symphonique qu’arrangea Igo Stravinsky à partir de sa propre musique de ballet ‘Pulcinella’, elle même dérivée de la transposition de partitions de Pergolese (‘Il Flaminio’, ‘Lo frate ‘nnammorato’, ‘Luce degli occhi miei’, ‘Sinfonia for cello and basso’), de sonates de Domenico Gallo, du ‘concerto armonico n°2’ de Unico Wilhelm van Wassenaer, de suites pour clavecin de Carlo Monza, et même d’un air italien d’Alessandro Parisotti.
Pablo Heras-Casado fait corps avec les musiciens du Mahler Chamber Orchestra afin de dépeindre des lignes légères et heureuses, où la poésie rêveuse des bois – un second hautbois s’est substitué à la clarinette du concerto pour clavecin – et la clarté solaire des cuivres offrent les baumes les plus empreints de douceur.
José Antonio López (Don Quijote)
Et en seconde partie, le clavecin de Benjamin Alard, délicat interprète de Bach, retrouve sa place au sein de l’orchestre pour jouer ‘El Retablo de Maese Pedro’, donné en version de concert comme lors de sa création à Séville le 23 mars 1923.
Le livret, offert gratuitement par le Teatro Real, reproduit en couleurs le programme de la création scénique parisienne qui eut lieu le 25 juin 1923 dans le salon musical de l’Hôtel de la Princesse Edmund de Polignac, situé aujourd’hui avenue Georges Mandel face à l’ancien appartement de Maria Callas.
A Paris, Henri Casadesus était le joueur de Harpe et de Luth, et Wanda Landowska, la claveciniste. Cette dernière écrivit d’ailleurs un très beau texte sur les éclairs rythmiques et le ruissellement flamboyant du ‘Roi des instruments’.
Pablo Heras-Casado
Ce petit opéra s’inspire des XXVe et XXVIe chapitres de la seconde partie du ‘Don Quichotte’ de Miguel Cervantes, et raconte l’histoire, à travers un théâtre de marionnettes, de la délivrance de Mélisandre détenue par les Maures d’Espagne à Sansueña (ancien nom de Saragosse).
En spectateur captivé, Don Quichotte, confondant théâtre et réalité, finit par détruire les marionnettes pour sauver sa dulcinée.
Le rôle du narrateur, Trujamán, est incarné par l’un des petits chanteurs de la JORCAM, Héctor López de Ayala Uribe, à la voix haute et agile très piquée, qui instille candeur et pureté, celui de Maese Pedro est chanté par Airam Hernández, ténor au timbre franc et clair, et celui de Don Quichotte est confié à José Antonio López, doté de colorations sombres et ambrées homogènes tout en restituant une caractérisation relativement sage.
José Antonio López, Héctor López de Ayala Uribe, Airam Hernández, et en arrière plan, Pablo Heras-Casado et Benjamin Alard
Les tissures orchestrales sont un fin alliage de cordes et de patine cuivrée au raffinement enjôleur, des cadences palpitantes soutiennent l’articulation du chant, et, à défaut de représentation scénique, la vitalité expressive des musiciens participe à l’effervescence grisante insufflée par cette pièce qui ne dure qu'une demi-heure.
On ressort ainsi de ce concert avec un sentiment de plénitude souriante, et une compréhension plus approfondie des influences musicales qui traversent ces trois ouvrages. Par sa précision, son sens de l’équilibre serein et son élégance de geste, Pablo Heras-Casado démontre à nouveau la valeur qu’il représente pour le Teatro Real de Madrid.
Lucia di Lammermoor (Gaetano Donizetti – 28 septembre 1835, Naples)
Répétition générale du 16 février et représentations du 28 février et 04 mars 2023
Opéra Bastille
Lucia di Lammermoor Brenda Rae
Lord Enrico Ashton Mattia Olivieri
Sir Edgardo di Ravenswood Javier Camarena
Lord Arturo Bucklaw Thomas Bettinger
Alisa Julie Pasturaud
Raimondo Bidebent Adam Palka
Normanno Eric Huchet
Mise en scène Andrei Serban (1995)
Direction musicale Aziz Shokhakimov
Créée sur la scène Bastille le 26 janvier 1995, pour les débuts à l’Opéra national de Paris de Roberto Alagna, la production de ‘Lucia di Lammermoor’ mise en scène par Andrei Serban est la seule avec celle de ‘Madame Butterfly’ imaginée par Robert Wilson a avoir traversé le temps depuis le mandat de Pierre Bergé.
A l’époque, cette production n’avait pas manqué de s’attirer les critiques perplexes des esprits conventionnels qui regrettaient l’absence de romantisme inhérent à la nouvelle de Walter Scott, ‘La Fiancée de Lammermoor', qui se déroule originellement au creux des collines de Lammermuir situées au sud-est d’Edimburg.
Pourtant, 28 ans plus tard, elle démontre à quel point elle était en avance sur son temps.
Brenda Rae (Lucia di Lammermoor) et Javier Camarena (Sir Edgardo di Ravenswood)
Au centre d’une arène militaire totalement fermée par des murs circulaires très élevés, son atmosphère oppressante tend à déposséder la jeune fille de sa liberté d’être, malgré sa faculté à vivre dans l'imaginaire du rêve, parmi tous ces hommes qui s’entraînent de manière athlétique. Un peu plus en hauteur, les notables en complets et hauts-de-forme noirs surveillent que les attentes sociales qui pèsent sur Lucia soient bien atteintes. Les enchevêtrements de passerelles, tréteaux, cordes et échelles dentées ne font qu’accentuer l’impression stressante du décor.
Et de voir ce monde masculin se faire complice d'un tel système oppressif peut induire un sentiment de révolte constant chez l’auditeur, même si quelques moments de poésie, entretenus par des lueurs bleu-nuit et mauve afin d’occulter la tristesse de l’enceinte, sont préservés.
C’est dire à quel point la modernité du sujet, toujours actuelle dans certains milieux sociaux, est mise en évidence et passe bien avant les évocations brumeuses et romantiques du livret original.
Mattia Olivieri (Lord Enrico Ashton)
Pour cette huitième reprise, le rôle-titre est confié à Brenda Rae qui, jusqu’à présent, n’avait fait qu’une brève apparition au Palais Garnier, le 28 octobre 2012, en chantant à l’avant-scène le rôle d’Anne Trulove dans ‘The Rake’s Progress’ d'Igor Stravinsky, en remplacement d’Ekaterina Siurina qui était souffrante.
Sa vocalité s’inscrit véritablement dans une esthétique moderne et virtuose, avec suffisamment de souplesse, au service d’une expression affinée qui va de pair avec un jeu très fouillé. S’appuyant sur des couleurs de voix claires et complexes aux vibrations ombrées, et des variations aiguës soudainement puissantes, elle dépeint un personnage vivant aux instincts sauvages. En première partie, c’est cette recherche d’expressivité théâtrale qui est mise en avant – son langage corporel saisissant semble traduire toutes les distorsions qu’elle vit -, ainsi que les coups d’éclats vocaux qui prennent un aspect spectaculaire, mais les passages plus intériorisés ont tendance à trop se fondre dans le tissu orchestral.
Cependant, à partir du meurtre d’Arturo Bucklaw, sa folie délirante révèle un art très cristallin et nuancé, tout en maîtrise dans les suraigus qui lui permettent de décrire une féminité intime mais brisée. Son isolement désespéré n'en est que plus poignant.
Brenda Rae (Lucia di Lammermoor)
Chaleureux, aux intonations mêlant voix d’ange et virilité mélancolique, Javier Camarena n’impose pas une personnalité démonstrative, mais plutôt une forme de fierté tendre qui sera fortement secouée au moment de la révélation de l’acte de mariage entre Lucia et Bucklaw. Le timbre est d’une très agréable homogénéité, même dans les moments de grande tension, rayonnant et crépusculaire dans le grand air final d’Edgardo chanté en suspension au moment où il invoque sa propre tombe.
Mattia Olivieri (Lord Enrico Ashton) et Brenda Rae (Lucia di Lammermoor)
En Lord Ashton, Mattia Olivieri fait des débuts très accrocheurs à l’Opéra national de Paris. Ce jeune baryton italien a, certes, une très belle allure, mais fait surtout découvrir un chant racé, un mordant très franc, et une grande assurance alliée à une impulsivité où une animalité sous-jacente est dangereusement à la manœuvre. Excellent acteur, ombreux et inflexible, la noirceur dont il s’imprègne n’est pas teintée d’ironie et traduit un esprit ferme. Dans son échange avec Lucia, il fait d’ailleurs très bien ressortir la terreur qui anime Ashton à l’idée de disparaître socialement si elle ne se marie pas avec Bucklaw.
Brenda Rae (Lucia di Lammermoor)
Autre participant à la perte de Lucia, Raimondo, le chapelain, est lui aussi insoutenable par sa manière de se présenter comme un représentant de Dieu. Adam Palka lui prête un jeune timbre de basse d’une grande noblesse qui se renforce au cours de la représentation. Cette couleur subtilement fumée est parfaite pour suggérer la destinée funèbre qui attend l’héroïne.
Enfin, les rôles secondaires ont tous une personnalité bien démarquée, Eric Huchet qui tire sur le portrait de caractère pour Normanno, Thomas Bettinger qui donne un faux charme à Lord Arturo Bucklaw, personnage tout à fait inconsistant, et Julie Pasturaud qui fait résonner en Alisa de beaux graves bien corsés.
Aziz Shokhakimov
Pour sa première dans la fosse Bastille, le jeune chef d’orchestre ouzbek Aziz Shokhakimov, nouveau directeur musical de l’Orchestre philharmonique de Strasbourg depuis la saison 2021/2022, imprime un style tonique qui marie harmonieusement les timbres des vents, cordes et percussions afin de préserver un éclat luxueux à la matière sonore. Le lyrisme des instruments solistes est superbement mis en valeur (hédonisme des accords de harpe, délié nostalgique du hautbois) dans un esprit sensuel et attentif qui veille à la cohésion d’un ensemble où les chœurs bien chantants représentent la société oppressive dominante tapie dans les hauteurs en attendant le drame.
Javier Camarena et Brenda Rae (Répétition générale)
Bien mieux qu’une œuvre qui ne serait que prétexte à exhalations belcantistes, cette production de ‘Lucia di Lammermoor’, confiée à des interprètes signifiants, démontre totalement sa portée universelle, sous une forme qui accentue l'effet glaçant d'un système de négation de la liberté féminine poussée à son extrême.
Eric Huchet, Javier Camarena, Aziz Shokhakimov, Ching-Lien Wu (cheffe des chœurs), Brenda Rae et Mattia Olivieri
Complément du 28 février 2023 : à l'issue de la représentation du 28 février 2023 jouée devant une salle pleine, Javier Camarena, pourtant annoncé souffrant, ce qui se ressentait peu, et Brenda Rae ont reçu un accueil dithyrambique de la part du public après une incarnation poignante et d'un formidable raffinement vocal.
Javier Camarena et Brenda Rae au rideau final de Lucia di Lammermoor, le mardi 28 février 2023.
Les difficultés financières qui s’accumulent au cours de la saison 2022/2023 à la suite de l’épidémie de covid, aggravées par la crise énergétique (Martin Ajdari, le directeur général adjoint de l’Opéra national de Paris, relève que les dépenses énergétiques de l’institution sont passées de 1,6 M€ en 2019 à 4,1 M€ en 2022, et que ce sera encore plus en 2023)(2), ont déjà obligé plusieurs opéras français à annuler des spectacles. C’est le cas de l’Opéra national du Rhin qui a annulé la version scénique du ‘Conte du Tsar Saltan’, et de l’Opéra national de Montpellier Occitanie qui a reporté les ‘Scènes du Faust de Goethe'.(1)
Le rapport sur la politique de l’Art lyrique en France piloté par Caroline Sonrier a par ailleurs souligné en 2021 que ‘L'écart des financements entre Paris et les régions, et l’absence d’opéra national de région à l’Ouest et au Nord de la France nécessite des rééquilibrages. La mise en place d’un nouveau label unique selon des critères simplifiés pourrait aussi permettre un élargissement et une meilleure représentation du réseau sur le territoire’(3).
Or, un autre opéra vient d’annoncer sa fermeture pour 6 semaines, à partir du 1er avril 2023, afin de préserver sa saison 2023 / 2024, l’Opéra de Rouen Normandie, la facture d’énergie ayant augmenté de 450 000 euros.
Pour bien comprendre l’importance de cette structure et sa position très particulière sur le territoire, la carte ci-dessous, élaborée lors de l’analyse du rapport de Caroline Sonrier(Analyse et réflexions à propos du rapport 2021 sur la politique de l’art lyrique en France), montre que hors de la région parisienne, les opéras nationaux en région sont tous situés dans le sud et à l’est, et qu’au nord et à l’ouest, seuls les opéras de Lille et de Rouen bénéficient du statut de Théâtre lyrique d’intérêt national, ce qui leur permet de recevoir une subvention de la part de l’État, mais plus faible que celle des opéras nationaux.
Et l’Opéra de Rouen, dirigé par Loïc Lachenal, est la seule structure du nord-ouest de la France à disposer de son propre orchestre (40 musiciens), en plus d’ateliers de costumes et de décors. Le tableau ci-dessous compare quelques éléments budgétaires et de performances de l’Opéra de Rouen à d’autres opéras nationaux en région selon le Rapport sur les Opéras en Région édité par le Ministère de la Culture en 2018(4).
Rouen
Nancy
Strasbourg
Montpellier
Bordeaux
Lyon
Budget
14 M€
15 M€
21 M€
22 M€
28 M€
36 M€
Subventions totales
10,5 M€
13 M€
16 M€
20 M€
20 M€
29 M€
dont subvention d'Etat
1,5 M€
3 M€
5 M€
3,2 M€
4,7 M€
6 M€
Spectateurs
90 000
62 000
100 000
74 000
165 000
115 000
Levers de rideau
100 + 30 (tournées)
125
155
190
200
200
dont spectacles lyriques
20 à 25%
45%
55%
27%
10%
50%
ETP permanents
100
165
315
210
335
300
ETP non permanents
50
45
105
215
115
105
Bien que ne faisant pas partie des opéras nationaux en région, l’Opéra de Rouen est comparable à l’Opéra national de Lorraine (Nancy) avec un nombre bien plus important de spectateurs (45 % en plus). Mais le nombre de rideaux lyriques reste un peu trop faible pour être véritablement reconnu comme opéra national.
Et pourtant, obtenir ce statut lui permettrait de voir sa subvention étatique passer de 1,5 M€ à plus de 3 M€, et donc de consolider sa structure et d’accroître à la fois son rayonnement et sa capacité de production.
L’autre particularité de l’opéra de Rouen est qu’il est le seul où la région représente plus de 75 % de l’apport en subvention, ce qui traduit l’une de ses vocations à opérer des tournées régulières dans des villes telles Evreux, Vernon, Condé-sur-Vire ou Petit-Caux.
La métropole de Rouen participe donc peu en comparaison des autres métropoles du territoire au soutien de son opéra, mais le maire, Nicolas Mayer-Rossignol, souligne qu’il y a d’autres structures à Rouen qui sont intégralement soutenues par la ville. La tension entre le conseil régional et le maire est donc accrue par ce contexte budgétaire.
L’excellente performance de rayonnement de l’Opéra de Rouen mise en rapport avec son budget (plus de 90 000 spectateurs pour 10,5 millions d’euros de subventions) et son positionnement unique dans le nord-ouest de la France justifient donc un intérêt prioritaire de la part du Ministère de la Culture afin de ne pas laisser seules la région et la ville de Rouen décider du sort d’une structure dont l’existence est sollicitée et appréciée par les habitants de la Normandie.
Sinon, la réduction de son activité ne lui permettrait plus de répondre à une demande qui existe pourtant bien, au vu des chiffres de fréquentation rendus publics.
Addendum : le vendredi 10 février 2023, le Ministère de la Culture a annoncé qu'une rallonge de 200.000 euros était allouée à l'Opéra Rouen Normandie, et, dans la foulée, la métropole a débloqué 300.000 euros supplémentaires.
Didon et Enée / Erwartung (Henry Purcell / Arnold Schönberg, 1689 / 1909)
Représentations du 29 janvier et 01 février 2023
Bayerische Staatsoper - Munich
Didon et Enée
Didon Ausrine Stundyte
Enée Günter Papendell
Belinda Victoria Randem
Vénus Rinat Shaham
La Magicienne Key'mon W. Murrah
La première Sorcière Elmira Karakhanova
Erwartung
Une femme Ausrine Stundyte
Direction musicale Andrew Manze
Mise en scène Krzysztof Warlikowski (2023)
Décors et costumes Małgorzata Szczęśniak
Lumières Felice Ross
Vidéo Kamil Polak
Chorégraphie Claude Bardouil
Dramaturgie Christian Longchamp et Katharina Ortmann
Bayerisches Staatsorchester
Extra choeur du Bayerische Staatsoper Opernballett der Bayerischen StaatsoperAaron Amoatey, Erica d'Amico, Ahta Yaw Ea, Amie Georgsson, Moe Gotoda, João da Graca Santiago, Serhat Perhat, The Thien Nguyen
Avec intermède de Paweł Mykietyn
Serge Dorny, le directeur de l'Opéra de Munich, aime rapprocher l'opéra baroque de l'opéra moderne. Cela s'est traduit l'année dernière au festival Ja, Mai où Monteverdi et Haas ont été joués au cours de la même soirée.
Ausrine Stundyte (Didon)
C'est dans ce même esprit qu'il a proposé à Krzysztof Warlikowski de monter deux œuvres célèbres d'Henry Purcell et Arnold Schönberg en les fondant dans le même spectacle.
Cet alliage est rare mais pas inédit, car Christian Tombeil, directeur du Théâtre d'Essen jusqu'en 2023, a mis en scène le diptyque 'Didon et Énée / Erwartung' lors d'une première très appréciée le 20 mai 2007 au Théâtre de Krefeld.
Mais l'écart musicologique est cette fois beaucoup plus important, puisqu'il va s'agir de passer d'un orchestre baroque à un grand orchestre symphonique.
Toutefois, les rôles de Didon et de La Femme sont interprétés ce soir par la même soprano, Ausrine Stundyte, que le metteur en scène connaît bien depuis'Lady Macbeth de Mzensk'(Paris - 2019) et 'Elektra'(Salzburg - 2020).
Ausrine Stundyte (Didon)
Le décor de Małgorzata Szczęśniak est unique et représente, côté cour, une grande pièce d'une maison surélevée, scindable en deux parties, et côté jardin, une forêt matérialisée par quelques troncs d'arbres dressés sur la scène, et qui seront complétés par une impressionnante vidéo grand large en arrière plan.
L' univers d''Erwartung' est donc en place dès le début de la représentation, imprégnant ainsi fortement l'atmosphère de 'Didon et Énée'.
Dans cette première partie, Didon est dépeinte comme une femme victime d'hallucinations mentales, paranoïaque, alors que sur scène s'interpénètrent le présent et ses pensées imaginaires.
Key'mon W. Murrah (La Magicienne) et Elmira Karakhanova (La première Sorcière)
Une voiture, phares allumés tels un regard lumineux, arrive au domicile de Didon avec à son bord Enée, Belinda et la seconde femme (dénommée Vénus ici). Ils semblent n'être là que pour l'assister, alors qu'elle est en proie à des tourments. Mais lorsqu'ils repartent, des silhouettes sombres aux yeux bien marqués se dessinent depuis la forêt.
Puis, le véhicule réapparait entouré cette fois d'une troupe d'artistes insolites accompagnés de Vénus. Dans sa solitude, l'intériorité de Didon se trouve envahie par des angoisses subconscientes.
Car les danses, au nombre de cinq, et les sorcières ont un rôle prédominant dans cet opéra.
Krzysztof Warlikowski fait appel à de jeunes danseurs contemporains, d'origines très différentes, à la fois étranges et d'un fascinant talent à jouer de la souplesse de leurs corps. Ils représentent une force vitale formidable, parfois très sensuelle ou burlesque, qui s'opposent aux troubles morbides de l'héroïne. La magicienne est incarnée par Key'mon W. Murrah, contre-ténor originaire du Kentucky, qui se taille un franc succès avec son chant clair et doucereux, agréablement vibrant. Didon, elle, calfeutrée dans son séjour, appelle à l'aide.
Et alors que, dans le livret original, ces sorcières veulent la destruction de Didon à cause de son statut social, ici elles viennent précipiter le basculement de cette dernière dans la folie.
Victoria Randem (Belinda), Rinat Shaham (Vénus) et Günter Papendell (Enée)
A leur retour, Enée et Belinda constatent l'impossibilité de ramener Didon à la raison, encerclée par les sorcières, si bien que la scène finale, vibrante pour son célèbre 'Remember me', se transforme en un émouvant rituel de mort, sur fond d'éclipse de soleil. Puis, Belinda aide sa compagne résignée à entrer dans un sac de couchage sarcophage - qui porte bien son nom -, afin d'entamer un voyage vers l'au delà inspiré des traditions égyptiennes antiques. Mais un poignard, laissé par Belinda, sera du voyage.
Cette mise en scène d'une résurrection possible traduit, d'une part, les convictions du metteur en scène sur le rapport de la vie à la mort et au temps, mais permet également de créer une transition avec 'Erwartung'.
Ausrine Stundyte (Didon) et Victoria Randem (Belinda)
Dans cette première partie, Victoria Randem, en Belinda, fait sensation avec sa vocalité ambrée, riante et chantante, et participe avec brio à un numéro de danse ondoyant et sensuel. Günter Papendell, en Enée, interprète un homme léger et dragueur mais qui prend aussi les choses au sérieux, et son long chant aux accents plaintifs s'inscrit très bien dans la tonalité baroque de l’œuvre. Rinat Shaham est plus agressive de timbre, mais elle joue aussi avec drôlerie ce qui rend son personnage sympathique.
Elle intervient peu, mais Elmira Karakhanova, en première sorcière au corps filiforme, se révèle très warlikowskienne dans sa manière d'être déjantée.
Key'mon W. Murrah (La Magicienne) et Elmira Karakhanova (La première Sorcière)
Quant à Ausrine Stundyte, si elle n'a pas la sensualité baroque idoine au personnage de Didon, c'est d'abord pour le rôle de composition hors pair qu'on l'apprécie énormément, ainsi que pour les accents d'airain toujours saisissants qui la caractérisent. Et lors de la déploration finale, les fêlures de sa voix dramatique touchent au cœur inévitablement.
Chœur d'une magnifique et apaisante élégie, disposé dans la fosse d'orchestre près des instrumentistes, musiciens insufflant fluidité des lignes et souplesse des jeux de contrastes sous la direction précise et élégante d'Andrew Manze, le tout forme un ensemble prenant auxquels les jeux de lumières colorés réglés par Felice Ross ajoutent leur part d'envoûtement.
Ausrine Stundyte (Didon) et les sorcières
Le voyage vers l’autre monde de Didon se déroule ensuite à travers un rituel d’une dizaine de minutes où les danseurs enchaînent des danses de rue sur une musique spécialement composée par Paweł Mykietyn, le créateur de la plupart des musiques des spectacles de Krzysztof Warlikowski. Sur un rythme lancinant, zébré par la guitare électrique, les spectateurs se laissent prendre par une voix lointaine aux parfums d’orient, et la gestuelle des artistes, harmonieuse et athlétique, laisse transparaître des figures égyptiennes telles que l’on peut en voir sur les monuments ou peintures transmis par cette civilisation.
Cette chorégraphie entrainante, signée Claude Bardouil, a aussi pour fonction de confronter la culture urbaine d'aujourd'hui à ces deux œuvres plus anciennes.
La danse du tunnel vers l'autre monde
En arrière plan, une vidéo filme l’avancée dans un tunnel bariolé de graffitis et de peintures murales, tels des hiéroglyphes modernes. Toutes les couleurs de l’arc-en-ciel sont invoquées, et une lumière au loin suggère l’approche d’un autre monde. Même si l’inspiration est celle d’un ancien rite païen, cette vision d’un au-delà lumineux porte aussi en elle une symbolique chrétienne – on pense beaucoup à l’’Ascension des Âmes et le tunnel de lumière’ de Jérôme Bosch -.
Ahta Yaw Ea
D’ailleurs, Krzysztof Warlikowski évoque aussi ce périple vers la mort dans sa production de ‘Tristan und Isolde’ qui sera reprise cette année à Munich.
Et pendant tout le temps de cette danse hypnotique, l’orchestre symphonique s’installe dans la fosse en toute discrétion.
Ausrine Stundyte (La Femme)
A la fin du voyage, Didon, devenue ‘La Femme’, se relève. Apercevant Enée et Belinda faisant l’amour, elle les tue de deux coups de feu à leur retour. ‘Erwartung’ peut donc commencer, et la maison de l’héroïne se sépare en deux, une partie où se trouvent les corps des deux victimes étant entraînée sur un plateau tournant, alors que la seconde partie reste fixe. Et dans cette seconde pièce, un très beau jeune homme (Serhat Perhat) apparaît, alors que depuis le salon principal ‘La Femme’ est prise de délires et d’angoisses tout en observant cet idéal de sensualité qui la fascine.
Serhat Perhat (Le Jeune Homme)
Ausrine Stundyte porte ce rôle extrême comme elle en a tant incarné à travers Elektra ou Katia Ismailova, c'est à dire instinctive et hallucinée, sa voix traduisant une animalité rauque aux accents ensorcelants.
Il ne s’agit plus d’une course dans la forêt à proprement parler, mais de la mise en scène d’un bouclage mental avec ses coups de sang et ses traits de lumières dans un regard perçant. A travers la relation avec le jeune homme qu’elle rejoint au bout d’un moment, le moteur du désir est puissamment activé comme une échappatoire au sentiment de culpabilité qui la rend folle, et les cerfs qui courent à travers une forêt enneigée dans le très beau film projeté en fond de scène accentuent cette symbolique de la puissance vitale. La force émotionnelle d’Ausrine Stundyte a plus à voir avec le feu éruptif que la torpeur dépressive.
Ausrine Stundyte (La Femme)
L’écriture de Schönberg étire les plaintes et susurrements des paroles de ‘La Femme’, et Andrew Manze se veut plutôt hédoniste dans sa restitution sonore, sans forcer les stridences. L’impression d’ensemble est enveloppante et même charmeuse, si bien que c’est la question du désir qui prédomine tout au long de ce poème symphonique.
Ausrine Stundyte (La Femme) et Serhat Perhat (Le Jeune Homme)
Et pour déstabiliser un peu plus l’auditeur, au tout dernier moment, Enée et Belinda se relèvent et reprennent leur vie quotidienne comme si ‘La Femme’ n’existait pas, alors que cette dernière se suicide avec le couteau qui l’avait accompagné lors du voyage vers l’autre monde. On peut y voir une résonance avec la tentation du suicide que connut Schönberg en 1908 lorsqu’il apprit la liaison entre sa femme et le peintre Gerstl. Ce dernier mettra pourtant fin à ses jours une fois sa relation amoureuse finie.
Günter Papendell, Krzysztof Warlikowski, Paweł Mykietyn, Andrew Manze, Małgorzata Szczęśniak, Kamil Polak et Ausrine Stundyte
Ce suicide final signe ainsi la fin des égarements, mais entre temps, les pensées les plus intimes sur la solitude de l’être et les méandres de ses sentiments les plus sombres auront fait leur chemin.
João da Graca Santiago, Amie Georgsson, Serhat Perhat, Moe Gotoda, Erica d'Amico, Ahta Yaw Ea, The Thien Nguyen et Aaron Amoatey
Et du fait que la mise en scène utilise un très vaste espace scénique, il est préférable de l’apprécier avec un peu de distance et de hauteur. D’un point de vue sonore, cela aurait pu sembler problématique dans la première partie baroque de la soirée, cela n’a pourtant pas été le cas, la très bonne acoustique du Bayerische Staatsoper, et ses étonnantes réflexions dans la salle, étant un très précieux atout.
Paweł Mykietyn, Claude Bardouil, Krzysztof Warlikowski et Małgorzata Szczęśniak
Samedi 04 février 2023 sur France 4 à 21h10
Orchestre de l'Opéra de Paris et Gustavo Dudamel : Concert inaugural
Samedi 04 février 2023 sur France 4 à 22h35
Nemanja Radulovic sur le site mégalithique de Carnac
Œuvres de Rimski-Korsakov, Bach, Vivaldi, Kreisler, Bloch et musiques traditionnelles serbes
Dimanche 05 février 2023 sur Arte à 17h30
La Folle Journée de Nantes 2023 - Ode à la nuit
Lundi 06 février 2023 sur Arte à 01h15
La Folle Journée de Nantes 2021 - De Bach à Mozart, la lumière et la grâce
Lundi 06 février 2023 sur Arte à 02h00
La Folle Journée de Nantes 2022 - Schubert, le voyageur
Samedi 11 février 2023 sur France 4 à 21h10
Les clefs de l'orchestre de Jean-François Zygel
Samedi 11 février 2023 sur France 4 à 22h40
Roméo et Juliette (Prokofiev) - Opéra national de Paris - Chr Noureev
Dimanche 12 février 2023 sur Arte à 18h45
La Folle Journée de Nantes 2021 - De Bach à Mozart, la lumière et la grâce
Lundi 13 février 2023 sur Arte à 00h50
"Macbeth" de Verdi à la Scala de Milan
Samedi 18 février 2023 sur France 4 à 21h10
Le carnaval des animaux - Court métrage de Andy Sommer
Samedi 18 février 2023 sur France 4 à 21h40
Les clefs de l'orchestre : Ma Mère l'Oye
Samedi 18 février 2023 sur France 4 à 23h05
Chantons, faisons tapage - Opéra Comique
Dimanche 19 février 2023 sur Arte à 18h40
Féerie Tchaïkovski - Philharmonique de Radio France - dm Mikko Franck
Dimanche 19 février 2023 sur Arte à 23h55
"My Land", un spectacle entre cirque et danse - Sept artistes originaires d’Ukraine
Lundi 20 février 2023 sur Arte à 00h55
Mon pays - Mon pays ? - Des artistes ukrainiens entre l’art et la guerre
Samedi 25 février 2023 sur France 4 à 21h10
Jean Rondeau : Variations Goldberg
Samedi 25 février 2023 sur France 4 à 22h15
Sabine Devieilhe à l'Opéra de Lyon
Dimanche 26 février 2023 sur Arte à 18h45
Julia Fischer et l'Academy of St Martin in the Fields - L'art de l'instant présent
Dimanche 26 février 2023 sur Arte à 23h20
Le secret de Paganini - L’exceptionnelle histoire des cordes de violon
Lundi 27 février 2023 sur Arte à 00h10
Grandbrothers à la cathédrale de Cologne
Lundi 27 février 2023 sur France 4 à 21h10
Musiques en fête - Aux Chorégies d'Orange 2022
Lundi 27 février 2023 sur France 4 à 23h50
Orchestre de l'Opéra de Paris et Gustavo Dudamel : Concert inaugural
Mardi 28 février 2023 sur France 4 à 04h00
Philippe Jaroussky : Faure requiem
Mardi 28 février 2023 sur France 4 à 21h10
Gautier Capuçon : "Un été en France"
Mardi 28 février 2023 sur France 4 à 22h05
Marielle Cafafa, la maestra
Mardi 28 février 2023 sur France 4 à 22h55 Christiane Eda-Pierre, en scène
Mercredi 01 mars 2023 sur France 3 à 20h00
Les Victoires de la Musique Classique 2023
A compléter ultérieurement
Mezzo et Mezzo HD
Mercredi 01 février 2023 sur Mezzo à 20h30
Il Trovatore de Verdi au Gran Teatre del Liceu
Vendredi 03 février 2023 sur Mezzo HD à 21h00
'L'Orfeo' de Monteverdi à l'Opéra Comique de Paris
Samedi 04 février 2023 sur Mezzo à 20h30
'Werther' de Massenet à l'Opernhaus Zürich
Dimanche 05 février 2023 sur Mezzo HD à 21h00
Elektra de Strauss au Metropolitan Opera de New York
Mercredi 08 février 2023 sur Mezzo à 20h30
William Christie dirige 'Titon et l'Aurore' de Mondonville à l'Opéra Comique
Jeudi 09 février 2023 sur Mezzo HD à 19h00 (Direct)
'Arabella' de Strauss au Teatro Real de Madrid
Vendredi 10 février 2023 sur Mezzo HD à 21h00
'Les Contes d'Hoffmann' au Staatsoper d'Hambourg avec Benjamin Bernheim et Olga Peretyatko
Samedi 11 février 2023 sur Mezzo à 20h30
'L'Orfeo' de Monteverdi à l'Opéra Comique de Paris
Samedi 11 février 2023 sur Mezzo à 22h25
'The Perfect American' de Philip Glass au Teatro Real de Madrid
Dimanche 12 février 2023 sur Mezzo HD à 19h00
'Actéon' de Charpentier au Théâtre du Châtelet de Paris
Dimanche 12 février 2023 sur Mezzo HD à 21h00
Luisa Miller de Verdi au Metropolitan Opera
Mardi 14 février 2023 sur Mezzo HD à 19h40
'Actéon' de Charpentier au Théâtre du Châtelet de Paris
Mercredi 15 février 2023 sur Mezzo à 20h30
Hamlet d'Ambroise Thomas à l'Opéra-Comique
Vendredi 17 février 2023 sur Mezzo HD à 21h00
Lulu de Berg au Metropolitan Opera
Samedi 18 février 2023 sur Mezzo à 20h30
Les Boréades de Rameau à l'Opéra de Dijon
Dimanche 20 février 2023 sur Mezzo HD à 21h00
Lulu de Berg au Metropolitan Opera
Mercredi 22 février 2023 sur Mezzo à 20h30
Madama Butterfly de Puccini à l'Opéra Royal de Wallonie-Liège
Vendredi 24 février 2023 sur Mezzo HD à 21h00
La Bohème de Puccini au Metropolitan Opera
Samedi 25 février 2023 sur Mezzo HD à 19h40
'Actéon' de Charpentier au Théâtre du Châtelet de Paris
Samedi 25 février 2023 sur Mezzo à 20h30
Manon Lescaut de Puccini au Gran Teatre del Liceu
Dimanche 26 février 2023 sur Mezzo HD à 21h00 La Bohème de Puccini au Metropolitan Opera
Mercredi 01 mars 2023 sur Mezzo à 20h30
Il Trovatore de Verdi à l'Opéra Royal de Wallonie-Liège
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