Histoire de l'Opéra, vie culturelle parisienne et ailleurs, et évènements astronomiques. Comptes rendus de spectacles de l'Opéra National de Paris, de théâtres parisiens (Châtelet, Champs Élysées, Odéon ...), des opéras en province (Rouen, Strasbourg, Lyon ...) et à l'étranger (Belgique, Hollande, Allemagne, Espagne, Angleterre...).
Pelléas et Mélisande (Claude Debussy)
Représentation du 18 juin 2010
Opéra Comique
Pelléas Phillip Addis
Mélisande Karen Vourc’h
Golaud Marc Barrard
Arkel Markus Hollop
Geneviève Nathalie Stutzmann
Yniold Dima Bawab
Un médecin Luc Bertin-Hugault
Un berger Pierrick Boisseau
Direction Musicale Sir John Eliot Gardiner Orchestre Révolutionnaire et Romantique Chœur Accentus
Mise en scène Stéphane Braunschweig
Karen Vourc'h (Mélisande)
De la mise en scène de Pierre Médecin en 1998, le souvenir des filets d’eau qui plongeaient derrière l’orchestre, alors que Pelléas (William Dazeley) et Mélisande (Anne-Marguerite Werster) se roulaient dans ce flux continu, est resté si fort, que la peur de la déception accompagne la nouvelle production de l’Opéra Comique.
Nouvellement directeur du Théâtre de la Colline, Stéphane Braunschweig a ouvert sa première saison en dirigeant deux pièces d’Henrik Ibsen, Rosmersholm et la Maison de Poupée. Il y est notamment question du rapport de l’homme à son enfermement social.
Karen Vourc'h (Mélisande) et Phillip Addis (Pelléas)
Ce n’est donc pas une surprise de retrouver cet univers de claustration au château de Golaud. Des planches de bois recouvrent sol et murs comme si nous étions à l’intérieur d’un cercueil, même si le metteur en scène pousse un peu loin la fatalité de cette condition en allongeant l’enfant de Mélisande dans une couveuse en verre.
Les lumières sont particulièrement vives avec un souci de suivre fidèlement les descriptions des ambiances qui sont faites par les personnages, le vert des eaux stagnantes dans les souterrains, l’éclat du clair de Lune, l’allusion à l’incendie de la maison d‘un aveugle.
Hors de ce milieu maladif, la relation entre Pelléas et Mélisande est vue comme le passage du plaisir du monde imaginaire de l’enfant - le bateau, le phare qui devient une tour du château, le ballon rouge - à la découverte de l’inconnu féminin - la grotte, la fontaine, le trou noir.
C’est visuellement très évocateur sur ce plateau elliptique et incliné qui attire les corps vers le vide obscur situé à l’un de ses foyers.
Phillip Addis (Pelléas)
Mais l'on arrive à une limite du spectacle qui, à force de clarifications indéniablement très réfléchies, en dissout le mystère, sans flirter un instant avec l’amour sombre et stellaire de Tristan et Iseult.
Les couleurs orchestrales sont d’ailleurs en parfaite adéquation avec le parti pris scénique. Contrastées et riches en détails, Sir John Eliot Gardiner leur donne un caractère cru qui nous maintient à terre.
Toute la poésie se concentre alors sur un personnage : Pelléas. La jeunesse et les accents clairs et mélancoliques de Phillip Addis, ses airs égarés et l’élégance sobre de son être lui donnent une présence belle par son naturel.
Petit animal blessé, Karen Vourc’h se glisse dans le personnage fragile de Mélisande avec une diction fine, mais sans noirceur profonde.
Le monde de mort, hors duquel se situe la touchante Dima Bawab dans le personnage enfantin d’Yniold, s’articule autour de quatre voix bien particularisées; Marc Barrard imagine Golaud au fond d’un abattement vital, taciturne, plus monotone que les douleurs funestes de Nathalie Stutzmann, Luc Bertin-Hugault tient la stature digne du médecin, alors que Markus Hollop entraîne Arkel dans un chant pathétique et déclinant.
Leoncavallo, Pizzetti, Di Chiara Mélodies et Canzone
Bis :
Mozart Voi che sapete(Le Nozze di Figaro)
Rossini Tanti affetti in tal momento(La Donna Del Lago)
Piano David Zobel
Joyce DiDonato
Quelle belle manière que de conquérir les cœurs dès le début du concert, charmante, souriante, et pleine d'humour, en commençant par remercier les auditeurs pour leur respect du silence après le premier air du cycle Arie antiche, telle l'institutrice qui distribue ses bons points aux élèves bien sages.
Joyce DiDonato explore l'amplitude d'un programme distinctif de ses traits vocaux.
Les airs anciens mettent en valeur la légèreté pure, alors que l'expressivité s'installe dès les Cinq mélodies italiennes.
Et là, le personnage se colore, et réapparaissent ces vibrations qui lui donnent un caractère singulier.
L'air de Desdemone, Assisa a' pie d'un salice, sera l'un des bijoux de la soirée, tout comme Tanti affetti in tal momento, pour ceux qui ne pourront aller écouter ses coloratures dans La Donna del Lago au Palais Garnier.
Elle se permet même de subtiles variations dans Voi che sapete.
Il y a également cet art de projeter la voix, puis de la réduire comme dans un simple mouvement de rappel.
Joyce DiDonato (Air de Desdemone)
Cette générosité, en art comme dans les mots, et cette spontanéité avec laquelle elle clame au public qu'il est son plus beau cadeau, sont un souffle d'amour.
La Donna del Lago (Rossini)
Représentation du 14 juin 2010
Palais Garnier
Giacomo V (Uberto) Juan Diego Florez (14 juin) Javier Camarena (10 juillet)
Elena Joyce DiDonato (14 juin) Karine Deshayes (10 juillet)
Duglas d’Angus Simon Orfila
Rodrigo di Dhu Colin Lee
Malcolm Groeme Daniela Barcellona
Albina Diana Axentii
Serano Jason Bridges
Direction Musicale Roberto Abbado
Mise en scène Lluis Pasqual
Décors Ezio Frigerio
Daniela Barcellona (Malcom)
Coproduction avec le Teatro Alla Scala (Milan) et le Royal Opera House (Londres)
La production scénique conçue par Lluis Pasqual et Ezio Frigerio, sous l'impulsion de Nicolas Joel, prête tellement à sourire que l'on ne s'attardera pas dessus.
Disons qu'elle a l'avantage de fournir un environnement lumineux sombre et coloré propice à la détente, et permet de se concentrer sur la musique sans nécessité de suivre l’intérêt dramatique de l’œuvre.
Le livret de La Donna del Lago s’articule autour d’un flot d’angoisses amoureuses et d’exaltations de l’esprit guerrier. Et à l’écoute des airs, on surprend notre imaginaire à faire apparaître des personnes verdiens au milieu des chœurs vaillants.
Le plus évident est Otello, lorsque Rodrigo entre triomphalement sur scène 'Eccomi a voi', mais Elena prend aussi des accents d’Odabella quand elle manifeste sa détresse (scène 7 par exemple).
La veine mélodieuse de l’ouvrage, attachante dans les duos et trios, chante des sentiments authentiques où l’amour, chez chacun des protagonistes, en est le socle, même lorsque l’instinct violent s’exacerbe.
Joyce DiDonato (La Dame du Lac)
Les deux distributions prévues pour Elena et Giacomo V vont permettre, à l’identique de la reprise des Capulets et Montaigus en 2008, une mise en valeur à la fois des chanteurs et de leur écriture vocale.
Le favori des dames, Juan Diego Florez, est d’un point de vue stylistique suffisamment étincelant, phrasant avec beaucoup de charme, et endurant pour être considéré comme un des plus justes interprètes rossiniens de notre époque.
Mais, les nombreux passages tendus de la partition le poussent souvent à assécher la fraîcheur de son timbre. Il se révèle également un acteur sensible et très conventionnel.
Joyce DiDonato (La Dame du Lac)
Les couleurs vocales de Joyce DiDonato, plus diverses, se déclinent le long d’une ligne de chant vibrant de manière très stimulante, et en émergent même des expressions presque animales.
Sa féminité s'épanouit dans la grâce de coloratures magnifiquement déroulées, bien que son tempérament de feux soit trop bridé par le personnage idéalisé qui nous est présenté.
En terme d’alliage vocal, la matière prend plus naturellement avec le jeune roi (Cielo! In qual’estasi) qu’avec Malcolm (O sposi, o al tenebro regno).
Car Daniela Barcellona se situe dans un format plus large et dramatique. Elle n’avait d’ailleurs pas fait autant impression en Romeo avec Ruth Ann Swenson en 2004.
La voix n’a pas la pureté de l’ébène, mais elle en a le corps. L’aigu éclate d’urgence, et ses qualités théâtrales lui permettent de combler le vide des intentions scéniques.
Joyce DiDonato (La Dame du Lac)
Et puisque la course aux plus beaux aigus est ouverte, Colin Lee s’y joint avec une pénétrance virile où d’autres ténors se seraient vite étranglés. Pourtant, c’est le jeune roi, bien sous tout rapport, qui le vaincra au combat.
Enfin, Simon Orfila campe un Douglas à la voix de pierre rude et fascinante.
Les représentations du mois de juillet proposent une alternative au couple DiDonato/Florez en confiant les deux rôles principaux à Karine Deshayes et Javier Camarena.
La première, mise en avant par Nicolas Joel pour incarner des premiers rôles, comme ce fut le cas avec Rosine cette saison, et le sera à nouveau dans quelques mois avec Cherubino puis Dorabella, passe du répertoire slave avec Gerard Mortier (Rusalka, l'Affaire Makropoulos), à Rossini et Mozart.
C'est une Elena dramatique et charnelle, la texture vocale s'approche de celle de Daniella Barcellona, et ses soudaines projections, trop agressives pour le rôle, donnent envie de l'entendre dans des personnages où l'expressivité l'emporte sur la légèreté (on pense à Verdi, Fenena par exemple).
Javier Camarena (Giacomo V)
On peut trouver Javier Camarena plus costaud et physiquement moins fin que Juan Diego Florez, il s'agit tout de même d'une incarnation bien plus entière et touchante, dominante et sensuelle, solide dans l'aigu.
A nouveau il offre un duel vocal formidable avec Colin Lee.
N’aurait-il pas fallu diriger avec plus de romantisme et de détails afin d’enrichir l’expressivité du flux orchestral?
Macbeth (Verdi)
Représentation du 13 juin 2010
Théâtre de la Monnaie (Bruxelles)
Macbeth Scott Hendricks
Lady Macbeth Iano Tamar
Banco Carlo Colombara
Macduff Andrew Richards
Malcolm Benjamin Bernheim
Dama di Lady Macbeth Janny Zomer
Servo / Medico / Araldo Justin Hopkins
Direction Musicale Paul Daniel
Mise en scène Krzysztof Warlikowski
Décors et costumes Malgorzata Szczesniak
Dans les mains de Krzysztof Warlikowski, Macbeth fait l’effet d’un sévère coup de poing.
Le théâtre se charge d’une tension qui rend incongrus les applaudissements, car le choc atténue toute distance.
Il y est question de violence, de sang et de la guerre. Le metteur en scène n’a jamais accepté l’idée selon laquelle être un guerrier constitue l’essence d’un homme.
Parfaitement conscient du besoin social d’exutoire dans la représentation de la violence, il ne va en aucun cas offrir ce qu’attend le public en actes sanglants.
Ainsi, au lieu de faire de l’œuvre de Shakespeare, simplifiée par Verdi, un enchaînement de faits causés par l’ambition et la peur de la chute, il trouve dans l’origine du drame le fait que Macbeth revient de la guerre au début de l’histoire.
Et ce sont toutes ces images de mort qui vont créer troubles mentaux et comportements délirants.
Scott Hendricks (Macbeth)
L’opéra est alors un déroulé d’hallucinations jusqu’à la folie la plus profonde, dans lequel Scott Hendricks laissera une trace mémorable. Baraqué, en Marcel, et rasé comme un Marines (Jarhead), le baryton Texan passe de la puissance affirmée aux effondrements dépressifs, le regard fauve tendu vers le public, puis totalement hagard, sans que cela n’affecte son chant.
Cela le stimule même, les intonations rugissent, se sensibilisent, et lorsque, porté dans son élan, le souffle atteint dans de rares occasions ses limites, il achève par des expressions véristes un dernier coup de dent décisif.
C’est à se demander s’il ne dépasse pas les volontés du directeur scénique par un tel travail sur le corps.
Mais une des raisons pour laquelle cet opéra de Verdi est affectionné réside dans le personnage de Lady Macbeth. Masculine et dominatrice, Maria Callas, Shirley Verrett, Leyla Gencer … en ont donné des interprétations de référence.
Iano Tamar (Lady Macbeth)
Or, dans l’approche de Krzysztof Warlikowski, elle est créature féminine qui aime son homme et agit par amour pour lui, ce qu’expriment les nuances sombres et sensuelles d’Iano Tamar. Si elle n’est pas enceinte, seul Macbeth en est responsable.
L’image monstrueuse de la Lady est cependant trop forte pour ne pas regretter, à l’encontre du concept scénique, plus d’expirations amples et longues.
Iano Tamar (Lady Macbeth)
Masqués - les sorcières -, handicapés - les apparitions -, les enfants constituent l’univers hallucinatoire de Macbeth.
Leur mystère imprègne les scènes les plus inattendues dont trois particulièrement : la portée solennelle du cercueil de Duncan, la séance désordonnée de divination du futur de Macbeth autour d‘une table, et surtout l’empoisonnement de ses propres enfants par Lady MacDuff pour leur éviter les souffrances d’un sort plus violent.
L'enterrement de Duncan. A gauche, Carlo Colombara (Banco)
Les références cinématographiques vont de la scène d’ouverture d’Apocalypse Now dans la chambre d’hôtel, à des images d'un film américain noir et blanc de Nicholas Ray (They live by night) ouvrant sur des scènes d'un couple en fuite, des visions nocturnes, des visages d’enfants en rapport avec la situation qui se joue sur scène.
Certains trouveront étrange le couple d’hommes qui danse tendrement lorsque Macbeth pleure sur le corps de sa femme le non sens de sa vie (Pieta, rispetto, amore!), mais c’est une habitude de Krzysztof Warlikowski. Et l’on peut y voir l’image d’une romance ratée, comme simplement une représentation du beau par rapport à l‘horreur des meurtres, qui, pourtant, ne suscite jamais autant de gêne.
Scott Hendricks (Macbeth) et Iano Tamar (LadyMacbeth)
Volontairement, aucun meurtre n’est franchement montré. De retour de sa fuite, MacDuff, la hache à la main, est devenu un nouveau Macbeth. Le coup final sera donné derrière le rideau.
L’art de filmer les visages des invités lors du banquet autour d’un repas de famille, de faire intervenir des personnages issus de l’imaginaire et de créer une multitude d’éclairages micro-scène par micro-scène, sont à nouveau les empreintes constantes d’un savoir faire.
Troisième apparition.
D’une certaine manière, la déstructuration lente de Macbeth semble suivre un processus identique à celui du Roi Roger, tel que Warlikowski l’a mis en scène à Paris en 2009.
Il ne reste plus qu’un homme nu et perdu, à nouveau une référence à Théorème (Pasolini).
L’intégralité de cet univers ne peut être restitué, mais l’on se sent vite débordé par tant d’énergie en jeu, et la musique de Verdi n’en est pas un élément secondaire.
Musicalement bien meilleure que la version de 1847, on ne joue plus que la version révisée parisienne de 1865.
Krzysztof Warlikowski en utilise même la musique de ballet, partiellement au IIIième acte (ce qui n’est pas courant, car à Paris il n‘a pas été repris dans les récentes mises en scène de Phyllida Loyd et de Dmitri Tcherniakov), et totalement avec le chœur des Sylphes.
Quel dommage qu’il ait alors supprimé le chœur des sorcières, juste avant la lecture de la lettre, car celui ci est en revanche toujours restitué. Il nous prive, de manière injustifiée, d’un passage plein d‘élan.
Pour se rattraper, il rétablit le dernier air de Macbeth « Mal per me che m’affidai » de la version de 1847.
Benjamin Bernheim (Malcom)
Nous sommes dans un univers mental, alors pour rendre plus saisissant les voix qui résonnent dans la tête du criminel, les chœurs sont disposés tout en haut des galeries latérales du théâtre. L'effet de claustration fait prise.
Ce spectacle ne serait pas complet sans les partenaires d’Iano Tamar et de Scott Hendricks.
Viril, mais sans le charme de l’accent italien, Andrew Richards est le seul qui réussisse à arracher des applaudissements pendant la représentation, car son air s‘y prête plus facilement.
Iano Tamar (Lady Macbeth)
Benjamin Bernheim joue un Malcom jeune et vaillant avec un beau timbre bien clair, et Carlo Colombara complète avec Janny Zomer une distribution très homogène.
Dirigeant avec sens du théâtre, Paul Daniel et l’orchestre de la Monnaie ne sont pas pour rien dans cette réussite d’ensemble. Il en ressort une vigueur et une cohérence qui à aucun instant ne nous fait revenir dans une sorte d’exécution de routine.
Pour la saison 2010/2011, les rendez vous avecKrzysztof Warlikowski se passent en décembre à Berlin (The Rake's progress), en février à Paris (La fin.Scénario) et en mai à Madrid (Le Roi Roger).
Der Ring des Nibelungen - Die Walküre (Wagner)
Répétition générale du 28 mai et représentation du 31 mai 2010
Opéra Bastille
Wotan Falk Struckmann (28 mai)
Thomas Johannes Mayer (31 mai) Fricka Yvonne Naef Siegmund Robert Dean Smith Sieglinde Ricarda Merbeth Brünnhilde Katarina Dalayman Hunding Günther Groissböck Gerhilde Marjorie Owens Ortlinde Gertrud Wittinger Waltraude Silvia Hablowetz Schwertleite Wiebke Lehmkuhl Helmwige Barbara Morihien Siegrune Helene Ranada Grimgerde Nicole Piccolomini Rossweisse Atala Schöck
Direction Musicale Philippe Jordan
Mise en scène Günter Krämer
Thomas Johannes Mayer (Wotan) et Katarina Dalayman (Brünnhilde)
Synopsis
Siegmund Pour se protéger du pouvoir de l’anneau qui lui échappe dorénavant, Wotan prend deux mesures : avec l’aide des neufs Walkyries – la plus aimée est Brunnhilde qu’il eut d’Erda – il réunit dans le Walhalla une armée de guerriers pour le défendre ; en même temps, il se met en quête d’un héros libre de toute dépendance envers lui et son engagement rompu. Il croit l’avoir trouvé en Siegmund, le fils que, sous le nom de Wälse, il eut d’une simple mortelle et auquel il donna l’épée magique Notung.
Fricka, gardienne de la morale
Mais Siegmund et Sieglinde, sa sœur jumelle, s’aiment d’un amour incestueux. Fricka, femme de Wotan et gardienne de la sainteté du mariage, demande la mort de Siegmund, ajoutant qu’il ne saurait être le héros désiré par Wotan puisque le dieu le protège. Wotan, faisant taire ses sentiments, décide la mort de Siegmund.
La désobéissance de Brunnhilde
Brunnhilde, prise de compassion pour les jumeaux amants, cherche vainement à sauver Siegmund. Pour la punir de sa désobéissance, Wotan la condamne à être enchaînée en haut du roc des Walkyries, entourée de flammes par le dieu Loge et plongée dans un profond sommeil dont seul un héros, sur lequel Wotan n’a aucun pouvoir, saura l’éveiller.
La naissance de Siegfried
Mais Brunnhilde a pu du moins protéger Sieglinde. Elle lui remet les tronçons de l’épée Notung brisée par la lance de Wotan et prédit que Sieglinde donnera naissance « au plus noble héros du monde ». Sieglinde, errant dans la forêt, se réfugie dans la cave de Mime, le forgeron, et là donne le jour à un fils, qu’elle nomme Siegfried ; avant de mourir, elle le confie à Mime avec les fragments de Notung.
Ricarda Merbeth (Sieglinde)
La volonté de Gunter Krämer, telle qu’elle se dessine dans le prolongement de son travail sur l’Or du Rhin, est de présenter une vision assez littérale de La Walkyrie, proche des recommandations scéniques de Wagner, mais en adoptant un langage visuel prosaïque plus moderne, où s’insinuent quelques symboles inhérents à la République de Weimar.
L’exemple le plus frappant est la reconstitution de l’intérieur du Walhalla, au début du deuxième acte.
Le col de la scène originale avec, en arrière plan, les gorges montagneuses plongeantes, est transfiguré en une grande salle à manger sur laquelle débouche le grand escalier que gravissaient les Dieux dans le Prologue.
L’escalier s’enfonce dans les sous-sols de Bastille, et les créneaux du Palais apparaissent sous forme des lettres gothiques « GERMANIA », la force du relief, qu’achèvent d’installer les jeunes hommes enrôlés dans l’armée de Wotan.
Le grand miroir en suspend, pièce déjà utilisée dans la première partie du Ring, permet de voir les intervenants gravir les marches.
On comprend qu’il sera un élément commun à tous les volets du drame.
La jonction avec la fin de l’Or du Rhin est donc faite.
Il ne s’agit pas d’une vision personnelle renouvelée, elle n‘apprendra rien à ceux qui ont entendu plusieurs versions en salle, mais elle a l‘avantage d‘être très accessible.
Pas de forêt pour la rencontre de Siegmund et Sieglinde, uniquement une maison stylisée avec des vitres sur lesquelles le mouvement continuel de l’eau de pluie s’écoule, un frêne qui est en fait un tableau (Krämer ne sait quoi faire de cet élément), et un Hunding (Günther Groissböck impitoyable) servi par ses hommes de mains en treillis.
La tessiture médiane de Robert Dean Smith fait de lui un chanteur doué d’un phrasé sensible et tendre, alors que l’assise grave, restreinte, et les décolorations dans les forte privent Siegmund de solidité et d’héroïsme. Robert Dean Smith (Siegmund)
S’ajoutent quelques maladresses gestuelles.
Aucune réserve pour Ricarda Merbeth, Sieglinde Colombine, le charme d’un timbre subtilement flouté, le regard vif, l’infaillibilité des exclamations révélatrices d’un besoin viscéral d’humanité, des qualités qui lui donnent un mystérieux ascendant et une intensité bouleversante au troisième acte.
Malgré cela, pendant tout le premier acte, l’orchestre manque de relief musical, la texture des cordes contient comme une sorte d’épaisseur qui ne crée pas suffisamment un univers immatériel, la retenue y règne, peut être pour ne pas couvrir Dean Smith.
Dans ces conditions, le retentissement final sonne décalé. On en retient le mieux les splendeurs des solistes instrumentaux .
Le verger éclairé par une lune de printemps, dans un onirisme musical à l’origine du duo d’amour de Tristan et Isolde, répond aux nectars des arbres lilas du Walhalla lorsque Brünnhilde vient chercher Siegmund (cet aspect un peu kitsch se dissout cependant dans une atmosphère nocturne d‘où émergent les ruines de la résidence), et à la forêt ravagée par Loge à la scène finale.
Yvonne Naef (Fricka)
L’entrée cérémonieuse de Fricka, par la gauche, en large robe rouge, le feu, la force, le sang, permet à Yvonne Naef de rejouer son rôle de femme victime d’un mélodrame - mêmes attitudes que son Eboli en 2008. Grand aplomb et quelques imperfections vocales laissent entendre des inflexions propres à Waltraud Meier. Elle reviendra s'assurer que Wotan lui a obéi en faisant périr Siegmund.
Dans ce second acte, la rencontre entre Brünnhilde et ce dernier tend le regard du spectateur. Les pommes, au milieu desquelles Sieglinde est en prise obsessionnelle avec ses remords, soulignent la fraîcheur de l’amour des jumeaux.
La Walkyrie les réordonne alors, l’ordre détruit la vie, reconstituant ainsi le cercle céleste, œuvre à laquelle participe Siegmund le temps qu’il ne réalise que sa sœur ne le suivra pas dans la mort.
Katarina Dalayman (Brünnhilde)
En constante progression, la direction musicale prend enfin son envol dans la troisième partie. Les fortissimo se libèrent, Philippe Jordan lâche la bride dans une chevauchée spectaculaire au macabre cru. Les Walkyries, des assistantes qui font un sale boulot, récupèrent les cadavres ensanglantés des héros pour les transformer en sortes d’ectoplasmes.
C’est l’esprit même de l’œuvre, mais Gunter Krämer ne peut ignorer qu’une partie du public a un problème avec la nudité - la honte du corps que son éducation lui a inculqué - et ces femmes qui nettoient des chairs bien fermes donnent une dimension humaine et sensuelle à leurs gestes qui dépasse la situation. Une prise de risque qu’il fallait tenter.
Ricarda Merbeth (Sieglinde) et Robert Dean Smith (Siegmund)
Les filles de Wotan forment un ensemble violent et énergique, et Gerhilde, interprétée par Marjorie Owens, transperce l’air d’exclamations infernales sans ménagement.
La grande scène d’explication, resserrement et simplicité scéniques sur fond noir, ne laisse plus que Brünnhilde et son père face à face.
Avec ses regards de petite fille, Katarina Dalayman lançait des Hoiotoho! Hoitoho! en veux-tu en voilà quand elle rejoignait son père dans la grande salle du Walhalla. Maintenant, son timbre voluptueusement charnel se confronte, selon les représentations, à deux Wotan bien distincts.
Toute la stature de Falk Struckmann repose sur une voix puissante, assez claire, comme une carrure forte. Mais qu’il suive des consignes scéniques se voit bien trop.
Ceux qui auront la chance d’entendre Thomas Johannes Mayer vont découvrir en revanche une interprétation plus expressive dans la déclamation, une noirceur plus douce bien que le volume soit moindre, s’effaçant parfois, il est vrai, derrière l’orchestre.
Cependant tout son être est juste. Les tourments que lui crée sa fille se lisent dans les gestes de la main, les mouvements lents de la tête, et Wotan s’humanise.
Le mystère de cet art théâtral, un modèle du genre, peut provenir d’un don naturel ou bien d’une proximité avec des metteurs en scènes dramatiques, mais en tout cas on a envie de dire avec beaucoup d‘émotion : c’est cela, c’est vraiment cela!
L’immolation de Brünnhilde s’achève sur le motif du destin, Erda réapparaît, et plongée dans son sommeil, la jeune Walkyrie voit en rêve prémonitoire tous les êtres de son univers disparaître dans un monde incendié.
Mardi 01 juin 2010 sur Arte à 06H00
Maria Callas à Paris
Mercredi 02 juin 2010 sur Arte à 06H00
Martha Argerich et Yuja Wang à Verbier 2009
Jeudi 03 juin 2010 sur Arte à 06H00
Claudio Abbado dirige les « Concertos Brandebourgeois »
Vendredi 04 juin 2010 sur Arte à 06H00
Vladimir Jurowski dirige Beethoven
Dimanche 06 juin 2010 sur France 3 à 0H40
Le Château de Barbe Bleue (Bartok) et Le Journal d’un Disparu (Janacek)
Enregistré à l’Opéra National de Paris en 2006 (Willard White, Béatrice Uria Monzon, Michael König, Hannah Esther Minutillo)
Dimanche 06 juin 2010 sur Arte à 10H45
Aix en concert : Joseph Haydn par le Quatuor Modigliani et le Quatuor Signum
Dimanche 06 juin 2010 sur Arte à 19H00
Claudio Abbado dirige la symphonie n°2 de Malher
Direct de la Scala de Milan avec Rachel Harnisch et Anna Larsson
Lundi 07 juin 2010 sur Arte à 22H30
Afrique du Sud: Cap sur l´Opéra (Ralf Pleger, 2010)
Dimanche 13 juin 2010 sur Arte à 09H45
Sidi Larbi Cherkaoui : Rêves de Babel
Dimanche 13 juin 2010 sur Arte à 19H15
Cape Festival 2010, festival des voix
Lundi 14 juin 2010 sur Arte à 22H30
Dance for all. Viviane Blumenschein et Elena Bromund (2010)
Dimanche 20 juin 2010 sur Arte à 19H15
Anniversaire Schumann : Concert depuis la Frauenkirche de Dresde.
Direction musicale : Daniel Harding. Staatskapelle de Dresde.
Lundi 21 juin 2010 sur Arte à 22H05
Elektra (Richard Strauss)
Depuis le Festspielhaus de Baden Baden. Direction Christian Thielemann, Mise en scène
Herbert Wernicke.
Avec : Linda Watson (Elektra), Jane Henschel (Clytemnestre), Manuela Uhl (Chrysothemis), René Kollo (Égisthe), Albert Dohmen (Oreste)
Le Choeur philharmonique de Vienne et l’Orchestre philharmonique de Munich
Samedi 26 juin 2010 sur France 3 à 00H05
L'heure de Juan Diego Florez
Samedi 26 juin 2010 sur Arte à 20H40
Le Trésor des Nibelungen (Documentaire)
Dimanche 27 juin 2010 sur Arte à 10H10
Elektra (Richard Strauss)
Depuis le Festspielhaus de Baden Baden. Direction Christian Thielemann, Mise en scèneHerbert Wernicke (Rediffusion)
Dimanche 27 juin 2010 sur Arte à 14H00
Le Trésor des Nibelungen (Documentaire)
Dimanche 27 juin 2010 sur Arte à 19H15
Anniversaire Schumann : Paavo Järvi et la Deutsche Kammerphilharmonie de Brême.
Lundi 28 juin 2010 sur Arte à 22H30
Découvrir un opéra: Ezio de Haendel d´après Métastase (2009)
Mise en scène : Günter Krämer
Direction musicale : Attilio Cremonesi, Avec l’Orchestre de chambre de Bâle.