Publié le 18 Juin 2008

Louise (Gustave Charpentier)

Répétition générale du 17 juin 2008 à l’Opéra Bastille

 

Louise Mireille Delunsch
Julien Gregory Kunde
La Mère Jane Henschel
Le Père Alain Vernhes
Un noctambule, le marchand d’habits Luca Lombardo

Direction musicale Patrick Davin
Mise en scène André Engel
Chef des chœurs Alessandro Di Stefano

 

La manière dont les œuvres se répondent cette saison à l’Opéra National de Paris évoque un tissu musical complexe à travers lequel les thèmes se croisent.
Cardillac se situait à la croisée des motifs de l’Opéra Allemand, de l’Opéra du XXème siècle et de la ville de Paris, et donc André Engel retrouve avec « Louise » la capitale française, ses toits décidément toujours aussi fréquentés, l’Opéra contemporain français bien entendu et à nouveau la condition d’une femme qui vit chez son père.

 

                                           Mireille Delunsch (Louise)

Il paraît que l’on y entend un fleuve wagnérien chatoyant de délicatesses dignes de Massenet, et pourtant l’atmosphère du bonheur parental au second tableau vaut assurément la sereine euphorie du duo de Roméo et Juliette imaginé par Berlioz.

Patrick Davin n’a alors de cesse de dépeindre les lignes mélodiques en accordant un soin immense à l’harmonie avec les chœurs sans que la scène de fête n’en devienne assourdissante.
Ce transport en est d’autant plus appréciable que le livret peine à passionner.

En Gregory Kunde, Louise trouve un Julien mature, un homme peut être plus solide que poète, mais qu’elle sait pouvoir suivre les yeux fermés, alors qu’Alain Vernhes, d’apparence père tranquille, offre un grand moment de théâtre lorsque sa colère éclate.

Mireille Delunsch (Louise)

Mireille Delunsch (Louise)

Sans trop de surprise, Mireille Delunsch joue magnifiquement ce rôle de jeune fille un peu gauche et rêveuse,  Jane Henschel est toujours aussi impeccable dans les rôles de femmes fortes et dirigistes, et, avec ses petits airs de fils idéal, Luca Lombardo offre une générosité d'âme évidente.

« Louise » fait écho à « La Bohème ». Alors qu'il y a deux ans l’atelier d’artistes de l’opéra de Puccini comportait une affiche de «Cardillac », Gerard Mortier nous rappelle cette fois de ne pas oublier d’aller voir l’Affaire Makropoulos l’année prochaine.
Au passage de la station de métro "Montmartre", un irrésistible sens du message subliminal en somme!

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Publié le 13 Juin 2008

Genèse de l’œuvre

 

A la seconde moitié du mois de mai 1854, la composition des « Vêpres siciliennes » n’a pas avancée.

Verdi loue alors pour l’été une maison de campagne à Enghien près de Paris.

 

Mais un évènement va considérablement le retarder : La Cruvelli, qu’il a choisi pour chanter le rôle d’Hélène, disparaît sans aviser personne, alors qu’elle doit participer à une représentation des « Huguenots ».

Pendant plus d’un mois il est impossible de la trouver. Le scandale est énorme.

Elle revient le 20 novembre, s’excuse, et réussit même à remporter le public à sa faveur.

 

Roqueplan doit cependant démissionner, et les répétitions n’avancent pas mieux avec son successeur, Crosnier.

Verdi se plaint que Scribe ne fait aucune des rectifications nécessaires au livret. Mais ce qu’il ignore est que ce livret est un tripatouillage du « Duc d’Albe », écrit pour Donizetti, et qui ne sera représenté en Italie qu’en 1882.

 

Le 26 janvier 1855, Victor-Emmanuel II et Cavour engagent le Piémont dans la guerre de Crimée au côté des Anglais et des Français pour soutenir la Turquie contre la Russie.

Cette opération est destinée à racheter le renom de l’armée savoyarde après ses défaites face à l’Autriche.

 

Dans ce contexte, le livret des « Vêpres siciliennes » a tout pour ne plaire à personne (Verdi compris), aussi bien aux Français à cause du massacre final, qu’aux Italiens en raison de la trahison des patriotes siciliens.

 

La première représentation a lieu le 13 juin 1855 à la salle Le Peltier lors de l’Exposition universelle de Paris.

On accourt de Lombardie et du Piémont pour donner à l’évènement l’importance d’une démonstration politique.

L’œuvre est bien accueillie et se maintient pour une cinquantaine de soirées.

 

Verdi se charge alors de la traduction italienne qui est représentée à Turin et à Parme en décembre 1855 sous le titre de « Giovanna di Braganza » en changeant les circonstances historiques pour se référer à un évènement de l’histoire du Portugal.

 

Ce n’est qu’en 1861, quand les Italiens auront retrouvé leur indépendance politique que « I Vespri siciliani » seront redonnées avec le livret original.

 

Les Vêpres siciliennes

 

Entre 1047 et 1090, les Normands conquièrent le sud de l’Italie et la Sicile.

Si l’empereur Hohenstaufen Frederic Barberousse échoue à prendre contrôle de l’Italie lors de la célèbre Battaglia di Legnano en 1176, son fils Henri VI réussit à se faire couronner roi de Sicile en 1194, après la mort du roi Normand Tancrède de Lecce.

 

Frederic II, fils d’Henri, tente de consolider les positions du Saint Empire Germanique en Italie mais, face à l’hostilité de la Papauté et des villes Lombardes (trame historique d’ Oberto), son règne se finit sur un échec.

Sa dynastie s’éteint en 1266, date à laquelle son fils, Manfred Ier de Sicile, est tué par Charles d’Anjou avec le soutien du Pape Urbain IV.

 

Le gouvernement odieux de Charles sur la Sicile entraîne la révolte des Siciliens le lundi de Pâques 1282, au moment où l’on sonne les vêpres. Des milliers de Français de Sicile sont massacrés.

 

Le chancelier de la couronne d’Aragon, Jean de Procida, a en effet noué des contacts avec les Gibelins de Siciles (opposants au Pape) pour le compte du Roi d’Aragon.

Pierre III le Grand est marié à la fille de Manfred. Il envoie donc une flotte aragono-catalane à Palerme pour en chasser les Français.

 

De plus, l’empereur d’Orient, Michel VIII Paléologue, inquiet des visées de Charles sur l’Empire Byzantin, est contacté par des siciliens.

Il ne participe cependant pas directement aux opérations.

 

Le bilan politique de cette longue tension politique et du carnage final est le rattachement du Royaume de Sicile à l’Aragon.

 

L’argument du livret de Verdi relate, de façon imaginaire, la manière dont Procida aurait attisé les tensions entre Français et Siciliens à Palerme (en réalité, il n'était plus présent en Sicile à cette période).

 

Un Sicilien, Henri s’éprend de la duchesse Hélène. Mais le patriotisme du jeune homme est contrarié lorsqu’il apprend qu’il est le fils de Montfort, gouverneur de l’Ile.

Il intervient lui-même pour sauver son père d’une tentative d’assassinat commanditée par Procida à l’occasion du bal du gouverneur français.

Henri reconnaît publiquement sa filiation, ce qui permet de libérer les conspirateurs et Hélène.

Cependant, Procida les informe qu’un navire rempli d’armes attend dans le port.

Au signal des cloches célébrant l’union entre Henri et Hélène, les siciliens se soulèvent et le massacre commence.

 

La suite Simon Boccanegra

L'ouvrage précédent La Traviata 

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Rédigé par David

Publié dans #Verdi

Publié le 8 Juin 2008

Lundi 02 juin 2008 sur TF1 à 02H00

Les Contes d’Hoffmann

Enregistré à Bastille en 2002

Avec N.Shicoff, B.Terfel, D.Rancatore, R.A Swenson, B.Uria-Monzon, N.Gubisch

 

Dimanche 08 juin 2008 sur France 3 à 01H20

Festival d’Aix en Provence 2007

Œuvres de Bartok et Dvorak. Direction Daniel Harding

 

Lundi 09 juin 2008 sur Arte à 22H30 (durée 52 mn)

Musica: Boris Eifman, chorégraphe

Documentaire. Réalisé par Andreas Morell  

 

Mardi 10 juin 2008 sur France 2 à 01H20

Mozart : Bastien et Bastienne suivi de « Mozart à la Lettre »

Par les Petits Chanteurs de Saint-Marc, la maîtrise de la basilique de Fourvière et le Quatuor de Rouen

 

Mercredi 11 juin 2008 sur France 2 à 20H50

Le Sanglot des anges [1/4]

Avec Ruggero Raimondi

 

Dimanche 15 juin 2008 sur France 3 à 23H00 (durée 52 mn)

Baroque Académie, William Christie

Documentaire. Réalisé par Priscilla Pizzato et Martin Blanchard

 

Lundi 16 juin 2008 sur TF1 à 02H30

Stabat Mater de Vivaldi

 

Mardi 17 juin 2008 sur France 2 à 00H40

Réouverture de l'Opéra de Vienne

 

Mercredi 18 juin 2008 sur France 2 à 20H50

Le Sanglot des anges [2/4]

Avec Ruggero Raimondi

 

Jeudi 19 juin 2008 sur Arte à 22H30 (durée 1H30)

Jessy Norman
Documentaire d'André Heller et Othmar Schmiderer (2005)
 

Vendredi 20 juin 2008 sur France 2 à 22H35

Musique au coeur cinq étoiles (Eve Ruggieri)
Avec Mireille Delunsch, Béatrice Uria Monzon, Vivica Geneaux, Nathalie Manfrino
 

Samedi 21 juin 2008 sur Arte à 21H00

Giuseppe Verdi: Rigoletto
En léger différé du Semperoper de Dresde.

Mise en scène de Nikolaus Lehnhoff, direction musicale de Fabio Luisi à la tête de l'excellente Staatskapelle de Dresde.

Avec Juan Diego Florez, Diana Damrau

 

Dimanche 22 juin 2008 sur France 3 à 15H00

Les plus grands Airs d'Opéra

Avec Béatrice Uria-Monzon et Magali Léger

 

Mercredi 25 juin 2008 sur France 2 à 20H50

Le Sanglot des anges [3/4]

Avec Ruggero Raimondi

 

Vendredi 27 juin 2008 sur France 3 à 22H00

Opéra en direct: Zaïde de Mozart. Louis Langrée/Peter Sellars

Avec Ekaterina Lekhina, Sean Panikkar, Alfred Walker, Russell Thomas, Morris Robinson.

 

Dimanche 29 juin 2008 sur Arte à 19H00

Valéry Gergiev dirige Verdi, Stravinksy...
Concert. Théâtre Mariinski de Saint-Pétersbourg, 2006

 

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Rédigé par David

Publié dans #TV Lyrique

Publié le 6 Juin 2008

Iphigénie en Tauride (Gluck)
Représentation du 02 juin 2008

Opéra Garnier
 
 Iphigénie          Mireille Delunsch
 Pylade              Yann Beuron
Oreste              Stéphane Degout
Thoas              Franck Ferrari
Diane               Salomé Haller
Iphigénie          Renate Jett (rôle non chanté)

Direction          Ivor Bolton

Mise en scène Krzysztof Warlikowski

 

« Ce ne sont pas mes productions qui sont scandaleuses mais le public qui fait du scandale! », et c’est avec ce délicieux bon sens que Gerard Mortier défendait il y a encore quelques jours ses choix sur France Musique face à un Lionel Esparza absolument ravi.

                                                                                                   Renate Jett (Iphigénie)

Car Iphigénie en Tauride dans la mise en scène de Krzysztof Warlikowski avait suscité une agitation rare à l’Opéra Garnier en juin 2006, houle de huées massive lors de la première, interrup tions de la représentation, invectives, et nous pouvons imaginer la nature des courriers  qui arrivèrent sur le bureau de la direction de l’Opéra National de Paris à la veille de l’été.

Il n’est donc pas inutile de rappeler le contexte de création de ce spectacle. Isabelle Huppert originalement prévue pour mettre en scène Iphigénie se décommanda cinq mois avant la première, ne laissant alors que deux mois à  Krzysztof Warlikowski pour y réfléchir.

Et comme en juillet 2005, le metteur en scène polonais venait de triompher à Avignon avec la pièce Krum,  il possédait déjà une matière lui permettant d’immerger le spectateur dans son univers et de s’intéresser à nouveau à un personnage qui a raté sa vie.

Mireille Delunsch (Iphigénie)

Mireille Delunsch (Iphigénie)

Krzysztof Warlikowski suppose, et il a raison, que le spectateur est intelligent et peut comprendre des dispositifs scéniques rapprochant passé et présent dans un même espace.

C’est ce qu’il fait en présentant Iphigénie comme une vieille dame s’accrochant jusqu’au dernier souffle à sa dignité (habillée en grande classe parmi les personnes âgées d’une maison de retraite) et se remémorant sa vie dramatiquement sacrifiée par sa famille.

Réapparaît alors une seconde Iphigénie, jeune cette fois, jouée en alternance par la soprano ou bien la fantastique actrice Renate Jett que nous avons revu dans Parsifal.

Le point de départ est le mariage d'Iphigénie avec Achille qui finalement n'aura pas lieu, la jeune fille se retrouvant sous l'emprise de Thoas une fois arrivée en Tauride.

Cette vision psychanalytique reconstitue l’enchaînement des pulsions criminelles qui conditionnent la famille des Atrides (meurtres d’Agamemnon par Clytemnestre,  de Clytemnestre par Oreste et enfin d’Oreste par Iphigénie qui sera ici arrêté à temps).

Pour renforcer la violence de cette histoire et son caractère obsessionnel, Krzysztof Warlikowski manie des éclairages aussi bien rouge éclatant que vert crépusculaire.

Mais ce sont avant tout les miroirs semi réfléchissants qui permettent de disloquer le champ théâtral.
Selon l’angle d’attaque des lumières, la salle et l’avant scène se reflètent totalement, ou bien l’arrière scène se superpose aux reflets des glaces, comme nos propres images mentales peuvent interférer.

Yann Beuron (Pylade) et Franck Ferrari (Thoas)

Yann Beuron (Pylade) et Franck Ferrari (Thoas)

Il faut reconnaître que la dimension confuse du dispositif peut égarer un peu le spectateur.

 

Il en ressort des scènes particulièrement malsaines, comme le meurtre de Clytemnestre par Oreste exécuté par un acteur totalement nu et frappant sa mère à chaque fois que le chœur reprend « il a tué sa mère ».

Ce sont également des images de solitude poignante et de vide affectif (Iphigénie tenant son coussin au moment de choisir l’homme qu’elle épargnera), et enfin l’apaisement final après le meurtre de Thoas qui libère la prêtresse d’un poids écrasant.

 

Il y a deux ans, Maria Riccarda Wesseling avait été une Iphigénie adéquate à cette vision et prenait plaisir à chanter dans des postures inhabituelles. Mireille Delunsch se plie également à la volonté de K.Warlikowski mais de manière plus mesurée et plus inégale vocalement dans sa projection sonore. Le timbre accentue un sentiment d’angoisse étriquée.

 

Yann Beuron paraît un peu las mais toujours aussi doux et c’est surtout Stéphane Degout qui porte le duo d’hommes dont la force émotionnelle des dialogues reste scéniquement traitée avec beaucoup de pudeur.

Frank Ferrari est un Thoas absolument parfait par sa noirceur et les réactions de rejet qu’il dégage, et si Ivor Bolton tire des couleurs parfois scintillantes de l’orchestre il se laisse aussi emporter par le drame sans trop penser aux chanteurs.

Lire également le compte-rendu de la reprise du 11 et 14 septembre 2021 Iphigénie en Tauride (Erraught – Ott - Hengelbrock - Warlikowski) Garnier.

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