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Publié le 8 Avril 2017

En préparation de la nouvelle production de Don Carlos qui sera donnée l'automne prochain sur la scène de l'Opéra Bastille, dans sa version originale des répétitions parisiennes de 1866, afin de célébrer les 150 ans de sa création, cet article est une réécriture plus précise et complète de l'article Du Don Carlos de Paris (1866) au Don Carlo de Modène (1886) rédigé en 2007 sur le même sujet.

Don Carlos est l'une des oeuvres qui a connu le plus de remaniements dans l'histoire de l'opéra.

Giuseppe Verdi travailla sur ce projet commandé par l'Opéra de Paris pour l'exposition universelle de 1867, sur la base d'un scénario qu'il reçut en juillet 1865.

Il composa la musique entre 1865 et 1867, à partir d'un livret français de Joseph Méry et Camille du Locle. Toutefois, en 1872, il procéda aux premières retouches de la partition.

C'est, par la suite, à partir de 1882 qu'il révisa considérablement son chef d'oeuvre avec la collaboration de Charles Nuitter, chargé de retravailler le livret en langue originale française.

Les Versions de Don Carlos des répétitions parisiennes de 1866 à la version d'Antonio Pappano de 1996

Il existe au moins cinq versions bien identifiées de Don Carlos (Don Carlo pour les traductions en italien), et le présent article a pour objectif de rendre compte le plus clairement possible de l’ampleur des changements qui l'ont traversé. On distingue principalement :

- La version parisienne en cinq actes des répétitions parisiennes de 1866

- La version parisienne en cinq actes de la première représentation du 11 mars 1867

- La version napolitaine en cinq actes du 02 décembre 1872, traduite en italien

- La version milanaise en quatre actes du 10 janvier 1884, traduite en italien

- La version de Modène en cinq actes du 29 décembre 1886, traduite en italien

A cette époque, la version parisienne des répétitions ne fut jamais jouée publiquement dans sa totalité, mais elle fut traduite intégralement en italien par Achille de Lauzières, dès 1866.

Une version fut ainsi créée le 4 juin 1867 au Covent Garden de Londres à partir de la traduction italienne d' Achille de Lauzières, avec la suppression de l'Acte I et du ballet, et l'ajout de multiples remaniements qui anticipèrent de fait les décisions que Giuseppe Verdi prendra dès 1882. Mais elle était loin d'être satisfaisante.

La version parisienne du 11 mars 1867, traduite en italien, eut finalement un accueil triomphal à Bologne le 27 octobre 1867.

Quant à la version de Naples, elle comportait principalement un ajout au duo Philippe / Rodrigue sur la base de nouveaux vers directement écrits en italien par Antonio Ghislanzoni.

Le graphique qui suit représente de manière synthétique le découpage en actes des 5 principales versions de Don Carlos (1866, 1867, 1872, 1884 et 1886), auxquelles est ajoutée celle que créa Antonio Pappano au Théâtre du Châtelet le 01 mars 1996, sous la direction de Stéphane Lissner. Cette dernière version composite est principalement basée sur les versions parisiennes de 1866 et 1867, mais incorpore également des éléments écrits pour les versions de 1872 et 1884.

Le fond orange désigne les passages écrits en 1866 et non modifiés à la création de 1867

Le fond rose clair désigne les passages écrits en 1866 qui disparurent dès le 11 mars 1867

Le fond vert désigne le ballet qui n'apparut qu'à partir de la répétition du 24 février 1867

Le fond gris désigne les passages qui furent réécrits pour la version de Naples (1872)

Le fond rouge désigne les passages qui furent coupés pour la version de Naples (1872)

Le fond rouge foncé désigne les passages qui furent réécrits pour la version de Milan (1884)

Le fond bleu désigne les passages totalement nouveaux dans la version de Milan (1884).

Le fond bleu ciel est utilisé pour les coupures de la version Pappano de 1996

Les Versions de Don Carlos des répétitions parisiennes de 1866 à la version d'Antonio Pappano de 1996
Les Versions de Don Carlos des répétitions parisiennes de 1866 à la version d'Antonio Pappano de 1996
Les Versions de Don Carlos des répétitions parisiennes de 1866 à la version d'Antonio Pappano de 1996
Les Versions de Don Carlos des répétitions parisiennes de 1866 à la version d'Antonio Pappano de 1996
Les Versions de Don Carlos des répétitions parisiennes de 1866 à la version d'Antonio Pappano de 1996

La version la plus complète sur le plan dramaturgique est celle de 1866. Elle comprend huit passages qui seront supprimés au cours des dernières semaines précédant la première représentation du 11 mars 1867. Ces passages sont :

- La rencontre d’Elisabeth et des bûcherons dans la forêt de Fontainebleau (Acte I)

- L'air 'J'étais en Flandres' de Rodrigue (Acte II) lors de ses retrouvailles avec Don Carlo

- Un passage du duo de Philippe et Rodrigue (Acte II)

- Une brève reprise du chœur du début de l'Acte III où sera inséré le ballet 'La Pérégrina'

- Une courte introduction orchestrale à l'arrivée de la Reine à l'acte IV

- Le duo Elisabeth et Eboli 'J’ai tout compris' (Acte IV) où Eboli avoue à Elisabeth sa liaison avec le roi.

- Le duo Philippe II et Don Carlo 'Qui me rendra ce mort'  (Acte IV)

- Un échange entre Elisabeth et Eboli au cours de l'émeute (fin Acte IV)

Durée approximative : 3H45

 

La version parisienne officielle est celle de la première du 11 mars 1867.

Selon les conventions de l'époque, la création devait inclure un ballet.

Verdi compensa les airs supprimés depuis les répétitions par l’ajout de deux passages :

- Une brève introduction du chœur des chasseurs (Acte I)

- Le Ballet de la Reine (Acte III)

L’émeute finale de l’acte IV fut par ailleurs abrégée, et totalement supprimée dès la seconde représentation.

Durée approximative : 3H40. C’était encore trop long, et quelques coupures supplémentaires (l'émeute de la fin de l'Acte IV) eurent lieu dès la seconde représentation pour permettre aux parisiens de rentrer sûrement chez eux le soir.

 

La nouvelle version réécrite par Giuseppe Verdi et Charles Nuitter, traduite en italien par Angelo Zanardini, est celle de 1884

A plus de 70 ans, Verdi dédia en effet à Milan une version en 4 actes.

Par rapport à la version parisienne de 1867, les passages suivants furent supprimés :

- L’Acte I de Fontainebleau

- L’introduction et les chœurs de l’Acte III devenu Acte II

- Le ballet de la Reine (Acte III devenu Acte II)

Les passages suivants furent alors réécrits avec une meilleure expressivité musicale :

- Le duo Rodrigue et Don Carlo (Acte II devenu Acte I)

- Le duo Philippe II et Rodrigue (Acte II devenu Acte I)

- La scène et quatuor dans le bureau du roi (Acte IV devenu Acte III)

- Le duo Elisabeth/Eboli (Acte IV devenu Acte III) supprimé en 1867 et partiellement rétabli et réécrit.

- La scène d’émeute (Fin Acte IV devenu Acte III) supprimée après la première de 1867

- Le duo Don Carlo et Elisabeth (Acte V devenu Acte IV)

- L’intervention de Philippe II et de l’Inquisiteur (Acte V devenu Acte IV)

Les passages suivants, totalement nouveaux, furent enfin créés pour cette version :

- La romance de Don Carlo (Acte I, ancien Acte II),  inspirée de l'air 'Je l'ai vue' du premier acte de la version parisienne, qui rappelle les événements survenus au cours de l’acte de Fontainebleau dorénavant supprimé.

- Le prélude de l’Acte II (ancien Acte III)

Durée approximative : 3H00

 

La version 5 actes en italien, basée sur la version de Milan, est celle de Modène (1886)

Verdi n’y a pas participé.

Cette version restaure, à la version de Milan 1884, l’acte I de Fontainebleau tel qu’il fut écrit en 1867 et traduit en italien. La Romance de Don Carlo (Acte II) est de fait supprimée et le récitatif 'Au couvent de St-Just' rétabli.

Durée approximative : 3H20

Discographie/Filmographie

La version studio de référence du Don Carlo de Modène (1886)  est celle dirigée par Solti (1966 chez Decca) avec Carlo Bergonzi, Renata Tebaldi, Nicolai Ghiaurov, Dietrich Fischer-Dieskau, Grace Bumbry, Martti Talvela.

 

 

Insurpassé depuis plus de 40 ans!

 

 

La version live de référence du Don Carlos Parisien est celle dirigée par John Matheson (1976 chez Ponto, puis Opera Rara) avec Joseph Roleau, Andrée Turp, Robert Savoie, Richard Van Allen, Edith Tremblay, Michèle Vilma.

Des chanteurs inconnus mais très engagés.

Les actes I, II, IV et V sont ceux de 1866 mais l’acte III (avec le ballet) est celui de 1867.

C’est donc la version parisienne la plus complète qui soit!

En 1993, James Levine enregistre en studio (Sony) une version de Modène inédite.

Avec la traduction du Ier acte de 1866 (et non plus 1867) nous avons ici une version révisée en italien.

Michael Sylvester, Dolora Zajick et Samuel Ramey y sont par ailleurs excellents, mais Ferruccio Furlanetto est encore un peu trop jeune pour Philippe II.

15 ans plus tard à Paris, le constat est clair : c'est l'un des plus grands interprètes actuels de Philippe II.

En 1996, le Châtelet monte la version parisienne avec un casting prestigieux (Karita Mattila, Roberto Alagna, Thomas Hampson, Jose van Dam, Waltraud Meier) sous la direction d'Antonio Pappano.

A y regarder de plus près, cette version est un peu trafiquée. C'est une version basée sur celle de 1866, mais avec le premier acte de 1867 et de nombreuses coupures et retouches à partir du texte français des versions de Naples et Milan.

 

Le DVD est un achat obligatoire rien que pour la beauté de l’ensemble.

 

Le 25 octobre 1970, le Staatsoper de Vienne lâche sur scène Franco Corelli, Gundula Janowitz, Shirley Verrett, Eberhard Waechter et le duo Inquisiteur/Philippe II du siècle : Martti Talvela/Nicolai Ghiaurov.

Sous la direction de Horst Stein, la version IV actes de 1884 trouve une interprétation intense dans un son live très correct (stéréo) qu'au moins 5 labels proposent à l'écoute (Rodolphe, Myto, Opera d'Oro, Gala, Orfeo d'Or).

 

Pour aller plus loin, revenir à la rubrique Histoire de l'Opéra

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Publié le 25 Février 2010

Genèse de l’œuvre

Après la troisième représentation d’"Otello", Verdi rend visite aux directeurs de la Scala et leur confirme qu’il est à la recherche d’un bon livret d’opéra bouffe. Il rentre ensuite à Sant’Agata.

Voué dorénavant aux œuvres de charité, le compositeur acquiert en 1888, à Milan, un vaste terrain sur lequel il envisage de construire une Maison de repos pour les musiciens.

Au cours de l’été 1889, Boito lui envoie son livret inspiré des "Joyeuses commères de Windsor" et d’"Henri IV". Verdi lui répond qu’il travaille maintenant à faire prendre corps à ce « Falstaff ».
Le décès de son camarade de conservatoire oblige cependant Boito à reprendre sa charge au conservatoire de Parme, à la joie de Verdi qui croit au bien qu’il y fera.

En pleine période vériste, Boito apporte la réduction pour chant et piano du "Rêve d’Alfred Bruneau". Verdi trouve de bonnes intentions à cet ouvrage mais il n’est que médiocrement attiré par le vérisme.
C’est en septembre 1892 qu’il apprend au librettiste que "Falstaff" est enfin terminé.

Le 9 février 1893, huit jours après la création de la "Manon Lescaut" de Puccini à Turin, "Falstaff" est représenté pour la première fois à la Scala de Milan.
Considéré par la Strepponi comme un exemple de comédie musicale moderne italienne, le modèle auquel rattacher le mieux Falstaff est le chef d’œuvre de Cimarosa, "I Matrimonio segreto".
Le succès est triomphal, bien que la musique soit trop inhabituelle, discrète et recueillie, et que le chant se plie aux intentions du discours parlé.

Le temps presse, alors Boito commence en secret à préparer une réduction du "Roi Lear".
Verdi retouche quelques passages de "Falstaff" (le concertato du second acte et le final de la première partie du troisième acte), et révise la traduction française pour l’Opéra Comique à Paris.
Il se remet ensuite à un "Te Deum" pour double chœur, achevé en 1896.

Au printemps 1897, il reste cependant à Gênes car la Strepponi tombe gravement malade. Elle s’éteint le 16 novembre. 

Malgré les réticences de Verdi, Boito obtient l’autorisation d’exécuter les "Pezzi sacri", quatre pièces sacrées dont le Te Deum est la dernière. L’accueil à Paris, le 7 avril 1898, est très heureux.

Mais cette année là, face aux émeutes contre la hausse des prix, le général Bava Beccaris fait tirer sur la foule à Milan. Le Roi Humbert Ier le décorera malgré tout, et le payera de sa vie le 29 juillet 1900 à Monza, assassiné par l’anarchiste Gaetano Bresci.
Verdi se demande avec angoisse à quoi sert le sang versé pour l’unification de la terre italienne, si ses fils sont ennemis entre eux ?

Au début 1901, Verdi reçoit les vœux de l’archevêque de Milan, ce qu’il prend pour un mauvais présage. Le 21 janvier, une attaque d’hémiplégie paralyse son côté droit. Il meurt le 27 janvier.

Le 27 février, une foule de 300.000 personnes suit dans Milan le cortège, portant les deux dépouilles du couple Verdi-Strepponi, vers la crypte de la Maison de repos pour les musiciens.

Falstaff

En 1328, le ralliement du Comte Louis Ier de Flandre à la France pousse les Anglais à réagir en coupant les exportations de laine et en accueillant les tisserands flamands. La pression fiscale française s’accentuant, la Flandre se révolte en 1337.

Philippe VI confisque alors la Guyenne au Roi Edouard III d’Angleterre. La guerre est déclarée et durera 116 ans (guerre de cent ans).

Jusqu’en 1364, les Anglais conquièrent une grande partie de la France, puis sont repoussés par Charles V jusqu’en 1380.

A la mort d’Edouard III, la chute des revenus pousse Jean le Gand, puis Richard II, à lever de nouvelles taxes.
Les secousses sociales et politiques deviennent très violentes, et le Duc de Hereford met fin au règne de Richard, en 1399, pour se faire couronner Roi sous le nom d‘Henri IV.
Des révoltes s’en suivent. Elles sont réprimées sévèrement.

Les vues politiques d’Henry, le fils d’Henri IV, divergent largement de celles de son père, et, en 1411,  le roi abdique au profit d’Henry V.

Avant son accès au trône, Henry était lié d’amitié avec Sir John Oldcastle, leader Lollard qui contestait l’ordre social et religieux.

Mais en 1414, le soulèvement Lollard est écrasé par Henry V. Ce mouvement annonce cependant les idées de la Réforme protestante.

Quand Shakespeare créa la pièce "Henry IV", le compagnon du Prince Hal (le futur Henry V) fût nommé Sir John Oldcastle. Son nom changea plus tard pour devenir Sir John Falstaff, du fait de la valeur politique de OldCastle, et de la puissance de ses descendants.

Dans la pièce du dramaturge Elisabéthain et l’Opéra de Verdi, il ne reste presque plus rien des origines chevaleresques de Falstaff, devenu un bouffon qui vit de vol et de débauche.

Ne disposant plus d’un seul sou, Sir John Falstaff est persuadé de pouvoir se refaire en séduisant deux riches bourgeoises, Alice Ford et Meg Page.
Il écrit à chacune d’elles une lettre d’amour.
Cependant, les deux amies se rendent compte qu’elles ont reçu la même missive, et décident de se venger.
Bardolfo et Pistola, deux acolytes auxquels Falstaff doit de l’argent, informent Ford des menaces qui pèsent sur lui, et eux aussi décident de se venger.

Se présentant chez Alice Ford, Falstaff est vite informé par Mrs Quickly que Ford arrive également (en fait il est même persuadé de la complicité de sa femme). Il a tout juste le temps de se réfugier dans un panier de linge sale, et finit dans la Tamise au retour d’Alice Ford.

Par l’intermédiaire de Mrs Quickly, Falstaff reçoit une invitation d’Alice sous le chêne de Herne, travesti en Chasseur Noir.
Il va être à nouveau victime d’une farce, mais également Ford qui voulait marier sa fille Nannetta au docteur Caïus. Elle est heureusement unie à son amoureux, Fenton.
Le chœur final s'achève sur l'air "Tout dans le monde est une farce".

L'ouvrage précédent Otello

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Rédigé par David

Publié dans #Verdi

Publié le 8 Janvier 2010

Genèse de l’œuvre

Le 22 mai 1873, l’écrivain Alessandro Manzoni meurt. Il est un des symboles littéraires majeurs du Risorgimento et du romantisme italien. Verdi lui dédie la Messa da Requiem, et le conseil municipal de Milan accepte de décréter des cérémonies solennelles pour le premier anniversaire de sa mort.
Un des conseillers s’est particulièrement rangé à la requête de Verdi : Arrigo Boito.

A la fin d’octobre, Escudier et du Locle font savoir au compositeur que l’Opéra de Paris, rue Le  Peletier, vient d’être détruit par un incendie. Verdi s’en afflige.
L’année d’après, bon contribuable, Verdi entre au Sénat.

Débute une période de voyages artistiques en Europe, Requiem et Aïda à Paris (1875-1876), puis des visites en Allemagne, Hollande et Belgique.
En 1878, Victor-Emmanuel, Pie IX et Solera meurent, « Ils meurent tous, tous! » s’angoisse Verdi.

Au milieu de l’année 1879, Franco Faccio, directeur de la Scala, emmène Boito chez Verdi, et trois jours après, le compositeur a entre les mains une esquisse d’Othello.
Mais Verdi n’est pas encore prêt pour composer un nouvel opéra. Ricordi lui propose donc de retoucher Simon Boccanegra.
Tant d’endroits vont être modifiés, que l’opéra est entièrement remis à neuf. La déclamation est plus mélodique, et les morceaux ont plus d’unité.

Le 24 mars 1881, Simon Boccanegra est représenté à Milan avec succès.

Cette révision l’inspire alors pour reprendre Don Carlo, et en supprimer les pesanteurs. Mais contrairement à Simon Boccanegra, « nouveau » au vrai sens du terme, il s’agit d’une seconde édition écourtée.

Représenté le 10 janvier 1884 à la Scala, les critiques en racontent à peu prêt n’importe quoi.
« Pauvres artistes … esclaves d’un public la plupart du temps ignorant (et c’est un moindre mal), capricieux et injuste», voilà ce que pense le compositeur de sa condition.

Mais l’attente de ce que tout le monde nomme « Iago » dure depuis plus de cinq ans. Il faut à Verdi toute l’année 1885 pour achever la composition d’Otello, et toute l’année 1886 pour revoir la partition.

La date du 5 février 1887 est fixée pour la première. Critiques, éditeurs, compositeurs affluent du monde entier à Milan. L’émerveillement est total.
Verdi a réussi à faire du discours parlé et du discours chanté une même chose.

Otello

En 1489, 26 ans après le décès de son époux Jacques II Roi de Chypre, Catherine Cornaro (d’origine vénitienne) renonce à la couronne du Royaume, afin qu’il devienne une possession de la République de Venise.

Depuis la quatrième croisade (1202-1204), Venise bénéficie du partage de l’Empire Byzantin par la constitution d’un empire colonial regroupant des ports et des îles de la mer Égée, le long de la voie commerciale jusqu’à Constantinople.
A la fin du XVième siècle, cet empire est donc à son apogée, bien que la découverte du Cap de Bonne Espérance par Vasco de Gama en 1498 ne fait plus de Venise un intermédiaire incontournable pour échanger avec l’Orient.

Dans les années qui suivent, la République résiste habilement aux luttes hégémoniques de la France et de l’Espagne en Italie. En revanche sur mer, l’Empire turc devient une menace de plus en plus pressante.

En 1522, Soliman le Magnifique, « Le Grand Turc », prend Rhodes après un siège de cinq mois.
Les manœuvres se poursuivent en Hongrie jusqu’à ce que Vienne soit menacée en 1529 et 1532.

Au cours de l’année 1537, l’installation des Turcs sur la côte albanaise effraye l’Italie entière, ce qui déclenche la guerre avec Venise. La flotte ottomane est repoussée de Corfou, et en 1540 un traité de paix offre des conditions avantageuses aux marchands vénitiens.

Le déclin se précipite en 1570 lorsque les Ottomans débarquent à Chypre et pillent Nicosie.
Le 04 octobre 1571, la citadelle de Famagouste tombe, et la garnison vénitienne est massacrée.
Mais trois jours après, la Sainte Ligue, dirigée par les Vénitiens et les Espagnols, défait de manière effroyable la flotte turque à Lépante (Naupacte) en détruisant 260 navires sur 300 et en tuant 30000 hommes.
Le célèbre écrivain espagnol, Miguel de Cervantès, participe à la bataille.
Venise est cependant ruinée, et ne pouvant plus commercer avec l’Orient elle reconnaît aux Ottomans la possession de Chypre en 1573.

La trame du livret d’ « Otello » se déroule à Famagouste au début du XVIième siècle à l’apogée de son rayonnement.
Otello, gouverneur maure de Chypre, a succédé à Montano. En pleine tempête, il revient au port après avoir défait les Turcs. En nommant Capitaine Cassio, Otello s’attire le ressentiment de son enseigne Iago.

Afin de se venger, ce dernier initie méticuleusement une intrigue, qui va se développer au gré des improvisations et des circonstances.
Il part du sentiment amoureux du jeune Roderigo vis à vis de Desdemone, femme d’Otello, pour lui faire croire que Cassio est son rival. La bagarre provoquée entraîne la destitution de Cassio du grade de Capitaine.
Iago lui suggère alors de solliciter Desdemone afin d’apaiser Otello, tout en alertant par la suite celui ci que Desdemone le trompe avec Cassio. 
Il fait croire à Otello que sa femme a offert son mouchoir à Cassio (mouchoir récupéré à l’insu d’Emilia, la femme de Iago).

Alors que la jalousie s'insinue progressivement, Iago organise une entrevue avec Cassio, afin qu’il lui parle de sa nouvelle maîtresse. Iago s’arrange pour faire croire à Otello que Cassio parle de Desdemone. Le général Maure sombre dans une folie criminelle et assassine sa propre femme, quand en même temps Cassio tue Roderigo. La vérité est dévoilée, et alors que Iago s’enfuit, Otello se poignarde.

La suite Falstaff

L'ouvrage précédent Aïda

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Rédigé par David

Publié dans #Verdi

Publié le 4 Août 2009

Genèse de l’œuvre

Après la création triomphale de Don Carlos (traduction italienne de la version de Paris) à Milan le 25 mars 1868, s’en suit un épisode polémique.


Verdi n’accepte pas sa nomination de la Couronne d’Italie, à cause de lettres ou de déclarations gouvernementales jugeant mal l’art musical italien.
Son devoir de citoyen le conduit également à s’opposer à la création du théâtre lyrique de Busseto, jugé trop coûteux. 
L’inauguration se fera donc sans lui le 15 août 1868.

Fin décembre, Verdi entreprend de changer le final de La Forza del Destino afin de pouvoir jouer l’ouvrage à la Scala de Milan.
Il supprime tous les meurtres de la première version, excepté la mort de Leonora, et retouche en plus l’action et la musique du troisième acte.
Le 27 février 1869, La Forza del Destino ainsi remaniée, pour la première fois à Milan affronte le public. Le succès est très grand.

Pendant ce temps, Camille Du Locle, lorgnant sur la direction du Théâtre Lyrique, propose régulièrement à Verdi des livrets. Son attention se porte sur un « programme égyptien » anonyme.
Le librettiste l’avertit qu’au cas où il l’accepterait, l’œuvre devrait être représentée au Théâtre Italien du Caire.

Verdi entretient une correspondance active pour connaître les circonstances historiques et géographiques, les us et coutumes de l’Egypte antique, qui seront le cadre de « Aïda ».
Il envisage même l’emploi de certains instruments anciens de ce pays.

L’ouvrage va être conçu dans le fracas de la guerre déclarée par la France à l’Allemagne le 17 juillet 1870.
Arrivent les terribles journées de la bataille de Sedan qui voient l’encerclement des troupes françaises. Verdi termine le second acte à ce moment là, la fameuse marche des trompettes notamment.

Il est cependant impossible de monter Aïda en janvier 1871, Paris est assiégée et les décors et costumes y sont bloqués.

Verdi en profite pour retoucher la partition et poursuivre les pourparlers pour représenter Aïda à la Scala.
C’est seulement la veille de Noël, le 24 décembre 1871, que Aïda est créée au Caire. Succès triomphal.

Verdi enchaîne avec les répétitions pour la Scala, et l’ouvrage y est représenté le 08 février 1872.
Il est appelé à l’avant scène 32 fois, dont 8 à la fin.
Parme, Padoue puis Naples lui réservent le même accueil, et pour Paris, il faut attendre le 22 avril 1876.

Aïda

La trame d’Aïda ne permet pas de situer exactement l’époque du livret. Thèbes a un rôle majeur, donc nous sommes entre -2000 et -1000, et comme la Nubie (ancienne Ethiopie) n’est pas encore totalement annexée, la situation politique semble se situer avant -1500.
La présence du temple de Vulcain à Memphis est un faible indice car il fût construit par le premier pharaon, Ménès, vers -3000 (Herodote, "L'enquête", Livre II Euterpe).

Cependant, Otto Weinreich (philologue), puis Mary Jane Phillips-Matz (biographe), ont émis l’hypothèse que les origines d’Aïda se trouvent dans les Ethiopiques d’Heliodore, dont le récit se situe vers -500.

Ce fût l’une des œuvres les plus lues dans l’Antiquité, et elle inspira des écrivains du XVIième siècle.
Cervantès écrit en 1617 son œuvre posthume, « Persiles y Sigismunda », revivifiant ainsi les Ethiopiques, au goût de l’époque pour les histoires de pirates.
Henry Desmarest compose par la suite une tragédie lyrique, « Théagène et Chariclée », représentée sans succès à l’Académie Royale de Musique le 12 avril 1695.

Le roman du poète phénicien relate l’histoire de Théagène, noble Thessalien descendant d‘Achille, et de Chariclée, descendante de la maison royale d’Ethiopie et du dieu du soleil Hélios.

Blanche, la jeune fille est confiée au prêtre Chariclès par sa mère, craignant les soupçons injustifiés de son époux, et devient prêtresse d’Artémis à Delphes.

La rencontre avec Théagène déclenche un coup de foudre, et les deux amants s’enfuient pour l’Egypte.
Capturés et séparés par des pirates, ils se retrouvent par miracle à Memphis.
Théagène est devenu l’esclave du satrape d’Egypte, Orondate.

Mais la femme de ce dernier et sœur du Roi de Perse, Arsace, tombe amoureuse du jeune Grec.
Jalouse de l’amour qui le lie à Chariclée, elle le fait emmurer vivant, et tente de faire juger et brûler celle qu’ il aime.
Tous deux sont épargnés par le châtiment, s’échappent, puis sont capturés par le Roi d’Ethiopie, Hydaspes.
Après sa victoire sur les Egyptiens, le monarque décide d’offrir le jeune couple en sacrifice.

Les origines royales de la princesse éthiopienne et la force athlétique du Thessalien les sauvent de la mort, et la fin s’achève de manière heureuse.  
 

Les similarités avec l’histoire d’Aïda deviennent évidentes, bien que livret de Verdi soit un drame conventionnel et improbable pour l'époque (le choix entre Amnéris et Aïda est un dilemme bourgeois classique).

L’histoire débute à Memphis.
Radames, courageux soldat égyptien, est épris d’Aïda, esclave éthiopienne, fille du roi d‘Ethiopie Amonasro.
Jalouse, la princesse Amnéris, obtient les aveux de l’amour de la jeune femme pour celui qui va vaincre les armées éthiopiennes à Thèbes.

De retour de la guerre, il obtient la libération des prisonniers, mais le Roi d’Egypte lui offre la main de sa fille.
Une ruse d’Amonasro, fait prisonnier lors de la bataille de Thèbes, lui fait par la suite révéler involontairement ses plans d’attaques, ce dont est témoin Amnéris.
Le Roi s’échappe avec sa fille, tandis que Radames est arrêté.

Il ne renonce pas à Aïda pour autant, et pour cela est condamné à être enterré vivant.
La princesse éthiopienne le rejoint dans son caveau pour y mourir avec lui.

La suite Otello

L'ouvrage précédent Don Carlos

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Rédigé par David

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Publié le 12 Juillet 2009

Genèse de l’œuvre

Après un passage à Paris, Verdi revient à Sant’Agata fin 1863 où il passe l’hiver à s’ennuyer, sans volonté aucune de reprendre ses travaux de composition.

L’année 1864 est une année de réflexion. Verdi ne veut toujours pas laisser Paris monter « La Forza del Destino » telle qu’elle est. Mais le 16 octobre, Escudier propose au nom de Carvalho (directeur du Théâtre Lyrique) de traduire Macbeth.
Seulement, 17 ans ont passé depuis la création, et Verdi y trouve maintenant des morceaux qui manquent de caractère.

Il lui faut donc reprendre l’air de Lady Macbeth acte II, rajouter un ballet, refaire la vision et le trio Macbeth acte III, refaire le début de l’acte IV ainsi que le final en supprimant la mort en scène de Macbeth.

La première de Macbeth a lieu le 21 avril 1865 au Théâtre Lyrique de Paris, et Verdi va vite comprendre qu’il n’a pas réussi son remaniement, la création de l’Africaine de Meyerbeer à l’Opéra, une semaine après, l’éclipsant totalement.

Pourtant, il reçoit dans la foulée une commande de l’Opéra appuyée par Escudier.
Verdi en profite pour mettre définitivement un terme à sa carrière politique en appuyant la candidature de Giuseppe Piroli pour représenter Busseto.

Fin novembre, Verdi et sa femme quittent Sant’Agata pour Paris.

Le compositeur s’accorde avec Emile Perrin (le directeur) sur le choix de Don Carlos, et Joseph Mery est choisi pour faire la réduction de la pièce de Schiller.

Il décède au cours de son travail, et c’est donc son gendre Camille du Locle qui reprend la tâche.

C’est la quatrième pièce du poète allemand que Verdi adapte, après Giovanna d’Arco, I Masnadieri et Luisa Miller.

De retour en Italie début 1866, Verdi se met à l’œuvre alors qu’une nouvelle tempête est en train de s’accumuler.
En avril 1866, l’Italie s’allie à la Prusse, qui s’apprête à retirer à l’Autriche l’hégémonie dans la confédération des états germaniques. 
Les armées autrichiennes défont les troupes italiennes à Custozza le 24 juin, mais le 3 juillet, les troupes prussiennes écrasent l’Autriche à Sadowa.
La paix de Vienne est signée le 03 octobre 1866, et l’Italie obtient la Lombardie-Vénétie contre le versement de 35 millions de florins.

Début septembre, Verdi est déjà de retour à Paris. Les répétitions commencent et s’éternisent jusqu’à fin février 1867. Le 14 janvier, le père de Verdi meurt, à Busseto, ce qui lui rappelle l’année maudite de 1840.

La répétition générale a lieu finalement le 9 mars.
Le 11 mars 1867, avec une grande solennité, Paris accueille la première représentation de Don Carlos
L’accueil est mitigé pour plusieurs raisons, jalousie des compositeurs français, splendeur froide de l’ouvrage, durée excessive.
Verdi indique quelques coupures à faire pour la seconde représentation, puis plie bagage pour Gênes où il compte retrouver la Strepponi dans leur nouvelle demeure.

Au début du mois de juin, Don Carlos (en italien) est créé au Covent Garden de Londres. Trois passages sont bisés mais ce n’est pas encore un succès.

A la surprise de tous, et après un mois seulement de répétitions (contre huit mois à Paris), Don Carlo (c'est le nom que prend la version italienne) fait un triomphe le 27 octobre 1867 à Bologne.

L’orchestre est dans les mains de Mariani, ce qui fait dire à Verdi : « Vous voyez que j’ai raison de dire qu’une main, seule, mais qui soit puissante et sûre d’elle, peut faire de grands miracles! »

Quelques années plus tard, Verdi va apporter à la partition de Don Carlos de nouvelles idées musicales pour la création milanaise (lire l'article du Don Carlos de Paris au Don Carlo de Modène)

Don Carlos

En 1519, le Roi d’Espagne, Charles Quint, devient Empereur du Saint Empire Germanique.

Il hérite des possessions castillanes, aragonaises, autrichiennes et bourguignonnes.

Son règne va être principalement marqué par la rivalité incessante avec François Ier.

Le 24 février 1525, 6000 Français sont tués lors de la désastreuse bataille de Pavie, où le Roi de France est fait prisonnier.
Charles Quint récupère le Milanais, la Bourgogne ainsi que l’Artois et la Flandre. 

Au total, quatre guerres se seront succédé pour aboutir à la paix de Crépy en Laonnois.

L’Empereur cède la Bourgogne.

Le 16 janvier 1556, fatigué et malade, Charles Quint renonce à l’espoir de restaurer l’unité impériale et abdique en faveur de son fils Philippe II. Il se retire au monastère de Saint Just, où il meurt le 21 septembre 1558.

Les 2 et 3 avril 1559, la paix du Cateau-Cambrésis est signée. Elle marque la fin des guerres d’Italie. Outre des clauses territoriales, le traité engage des mariages princiers, Elisabeth, fille d’Henri II de France, épousera Philippe II, veuf de Marie Tudor, et Marguerite, fille de François Ier, épousera Emmanuel-Philibert, duc de Savoie.

Philippe II est cependant mal considéré en Flandre. L’insurrection qui y apparaît à partir de 1566, est vivement réprimée par le Duc d’Albe. Il installe un régime de terreur, et crée le « Conseil du sang » qui condamne à mort plus de 8000 rebelles.

L’inquisition est également établie aux Pays-Bas, où elle instruit des procès pour hérésie.  

 

« Don Carlos » débute en 1559 après la signature du traité de Cateau-Cambrésis.

Dans la forêt de Fontainebleau, Don Carlos, le fils de Philippe II, rencontre Elisabeth de Valois : ils tombent respectivement amoureux.

Malheureusement, le mariage arrangé entre Philippe II et Elisabeth met fin rapidement à cette idylle.

L’ami d’enfance de Don Carlos, Rodrigue, devient l’homme de confiance de l‘Empereur mais ne peut cacher sa sympathie pour le mouvement de révolte en Flandre face à l’oppression de l’Espagne.

En parallèle, la princesse Eboli, attirée par Don Carlos qui a pris cause pour les Flamands également, découvre les sentiments qui l’unissent à l’Elisabeth, ce qui la conduit à révéler cette relation à Philippe.

La situation devenant extrêmement compliquée pour le Roi, celui-ci recourt à l’Inquisiteur qui voit surtout en Rodrigue, le vrai danger.

L’ensemble de la cour plonge dans le drame lorsque l’inquisiteur fait assassiner Rodrigue, qu’Eboli dévoile sa traîtrise et se retire au couvent, alors que l’inquisiteur et Philippe retrouvent Don Carlos et Elisabeth à Saint Just, avant que le spectre de Charles Quint n’emporte son petit fils dans l'obscurité du monastère.

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Rédigé par David

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Publié le 13 Mars 2009

Genèse de l’œuvre

Les évènements que Verdi a évoqué dans un si grand nombre de ses opéras sont sur le point de s’accomplir.

La guerre tourne à l’avantage décisif des Français et des Piémontais (victoire de Solferino le 24 juin), mais le 12 juillet 1859, Napoléon III propose l’armistice aux Autrichiens.
L’Autriche garde la Vénétie, Cavour démissionne.

L’insurrection des états se poursuit, les plébiscites s’organisent, et Verdi est élu le 4 septembre pour représenter Busseto à l’Assemblée des provinces de l’état de Parme.

Le 21 janvier 1860, Cavour reprend sa place à la tête du gouvernement et aboutit le 24 mars à la signature du traité rattachant l‘Italie centrale au Piémont, tandis que la France reçoit Nice et la Savoie.

Le 11 mai, Garibaldi débarque avec ses « Mille » en Sicile, mate les forces des Bourbons, prend Palerme et entre à Naples en septembre.
La prise du port de Gaète le 13 février 1861 marque la fin du Royaume des Deux-Siciles et de la guerre.

Et donc, le 19 février 1861 le premier parlement Italien s’ouvre avec la présence du député Giuseppe Verdi, élu à Busseto le mois précédent.

Le 17 mars1861, Victor-Emmanuel II est proclamé roi par le parlement italien., mais la Vénétie et les États Pontificaux  restent détachés du royaume.

Entre temps, une proposition pour composer un opéra arrive de Saint Petersbourg.
Verdi suggère « Ruy Blas » mais le Théâtre Impérial refuse le sujet.

L’annonce de la mort de Cavour, en juin, est alors un coup dur pour Verdi. Et malgré cette disposition d’esprit, il signe un contrat avec Saint Petersbourg et se rend en Russie en novembre.

Depuis la fin de l’été, Verdi a en effet choisi le drame de « Don Alvar » de don Angelo di Saavedra, duc de Rivas (poète, dramaturge et homme politique espagnol).
Il y voit une action qui fait intervenir avec la même variété et la même intensité que dans la vie, la douleur et le sourire, la bonté et la haine.

Arrivé dans la « capitale du froid », il doit cependant repousser à la saison suivante la première car la Prima Donna est souffrante et sans remplaçante.

En attendant, Verdi revient en Italie où son amie Mme Maffei lui présente Arrigo Boito qui va lui écrire l’ « Inno delle Nazioni » sur lequel il va pouvoir écrire la cantate qu’il compte proposer pour l’exposition internationale de Londres.

La pièce y est très bien accueillie, mais dès septembre, Verdi et sa femme retournent à Saint-Petersbourg.

Les répétitions commencent et le 10 novembre 1862, la Forza del destino est représentée avec succès au Théâtre Impérial.

Drame bon pour le cirque, a t’on dit, en effet le drame plait aux parterres les plus populaires.
Pour Verdi, la vie a un aspect tragique et burlesque qu’il veut faire pénétrer dans ses opéras. Les hommes, pour lui, sont à la fois féroces et ridicules.

Ensuite, Verdi et La Strepponi se rendent à Madrid, où « La Forza del destino » y est mis en scène par le compositeur avec de grands chanteurs le 21 février 1863.

Six ans plus tard, Verdi en remaniera le livret et la musique pour la création milanaise, peu avant la composition d'Aïda.

La Forza del destino

Depuis le début du XVIIième siècle, l’Espagne est en décadence. Louis XIV en a d’ailleurs profité pour lui prendre une partie de la Flandre ainsi que la Franche-Comté.
Ensuite, la guerre de succession d’Espagne (1701-1714) aboutit à l’intronisation d’un petit fils du Roi Soleil, Philippe d’Anjou, et à la perte de Minorque, Gibraltar, Naples, la Sardaigne et le Milanais.

Mais lors de la Guerre de succession de Pologne (dont Verdi tire son deuxième opéra Giorno di Regno), les Espagnols alliés de la France envahissent le Royaume des deux Siciles, menés par le fils de Philippe, Charles Ier.
Après la victoire sur les Autrichiens le 25 mai 1734 à la bataille de Bitonto, le sud de l’Italie est réintégré à l’Empire espagnol.

Cependant, à la suite du déclenchement de la guerre de Succession d’Autriche (1740), quatre fronts s’ouvrent en Europe (contexte historique de Luisa Miller), dont un en Italie.
Le 10 juin 1746, la défaite à Plaisance des Français et des Espagnols, commandés par Maillol, provoque la prise du Royaume d’Italie par l’Autriche, les Royaumes de Naples et de Sicile restant sous contrôle de la péninsule ibérique.

L’action de « La force du destin » se joue en Espagne et en Italie au milieu du XVIIIième siècle.
A Séville, l’histoire d’amour entre Leonora di Vargas et Don Alvaro tourne au tragique lorsque ce dernier tue accidentellement le père de la jeune fille, le marquis de Calatrava.
Craignant la vengeance de son frère, Carlo, Leonora se réfugie au couvent de Hornachuelos, alors qu’Alvaro s’engage dans l’armée espagnole en Italie, au Sud de Rome.
Il y sauve la vie d’un adjudant qui n’est autre que Carlo, mais ils ne se reconnaissent pas tout de suite. Blessé plus tard lors des combats, Alvaro récupère, mais une fois la vérité révélée, le duel entre les deux hommes est évité de peu. Alvaro, retourne en Espagne.
Cinq ans plus tard, Carlo retrouve son ennemi devenu homme d’église à l’ermitage de Hornachuelos. Cette fois, Alvaro se défend et blesse mortellement Carlo, ne pouvant cependant empêcher ce dernier de poignarder sa propre sœur.

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Rédigé par David

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Publié le 4 Février 2009

Genèse de l’œuvre

A partir de septembre 1857, Verdi travaille à l’argument du nouvel opéra destiné à Naples.

Il est en train de réduire un drame français, que Scribe avait écrit pour l’Opéra il y a plus de vingt ans : Gustave III.

Il charge Somma de lui faire le livret, mais Torelli, l’avertit qu’il ne sera pas possible de maintenir les noms et le lieu de l’action.

Somma est particulièrement en verve, et les échanges avec le compositeur se déroulent vivement et rapidement.

Renommé « La Vendetta in domino », le livret est cependant refusé par la censure.

D’autant plus que le 8 janvier 1858, Napoléon III vient d échapper à un attentat devant l’Opéra de la rue Lepelletier. Orsini, l’un des exécutants, est maintenant en rupture avec Mazzini et souhaite venger l’intervention française de juillet 1849 en Italie (voir les évènements après la création de « La Battaglia di Legnano »).

Impressionné, Napoléon III accepte de rencontrer secrètement Cavour (premier ministre du royaume Piémont Sardaigne) le 21 juillet 1858 dans les Vosges.

Le rapprochement entre états depuis la Guerre de Crimée (voir les évènements qui précèdent la création des Vêpres Siciliennes) se transforme en alliance (accords de Plombières) pour réaliser l’Unification de L’Italie, la France souhaitant récupérer le Comté de Nice et la Savoie.

Pendant ce temps, Verdi propose son livret à Rome qui refuse également de mettre en scène le meurtre d’un souverain.

Jacovacci, son impresario, insiste, fait des démarches, et finalement informe le compositeur le 8 juin que Rome accepte l’argument à la condition qu’il soit déplacé hors d’Europe, en Amérique par exemple.

Le travail de révision reprend, et Verdi encourage comme il peut son poète.

Le Roi Gustave III est remplacé par Riccardo di Norwich, Gouverneur de Boston.

Le titre de l’œuvre est changé en « Un Ballo in maschera » et l’autorisation est finalement accordée en octobre 1858.

Arrive cependant une mauvaise nouvelle de Milan où « Simon Boccanegra » a tourné au fiasco.

Verdi se déclare aucunement surpris de l’inconvenance du public « toujours heureux d’arriver à provoquer un scandale … le public achète le droit de nous siffler ou de nous applaudir. Notre destin est de s’y résigner, voilà tout ! »

Heureusement, la première du Bal Masqué, le 17 février 1859, est une soirée d’enthousiasme délirant comme Rome l’a rarement connu.

Du parterre, des balcons, des loges on crie « Viva Verdi ! » comme lors de la première de La Battaglia di Legnano, et les aspirations du peuple ne semblent plus être loin de devenir réalité : Viva Vittorio Emanuele Re DItalia.

Un mois avant, le 9 janvier, Victor-Emmanuel II avait prononcé devant le parlement du Piémont ces paroles solennelles : « Respectueux des traités, nous ne sommes cependant pas insensibles au cri de douleur qui monte vers nous de tant de parties de l’Italie ».

Et lorsque l’Autriche déclare la guerre à la Sardaigne le 23 avril 1859, la France décide d’honorer son traité d’alliance défensive.

Voyant la tempête s’amonceler, Verdi et la Strepponi quittent Rome et retournent à Sant’Agata, près de Busseto.

Le 26 avril, les troupes autrichiennes entrent au Piémont, et le 29, Victor-Emmanuel II appelle à la lutte pour l’indépendance de la patrie.

Le comte de Cavour lance dans l’air le chant enflammé du Trovatore : « Di quella Pira… ».

Un Ballo in Maschera

En 1721, la Suède perd la Grande Guerre du Nord face à la Russie, la Pologne et le Danemark.

Ne lui reste que la Finlande comme province.

Lors de la Guerre de Sept ans (1756-1763), la Suède ne joue plus qu’un rôle mineur en s’alliant avec la Russie face à la Prusse (voir Luisa Miller pour les évènements du second front Allemand).

Les tensions ne font cependant qu’empirer au Riksdag (Parlement) entre les « Bonnets », partisans de la paix avec la Russie, et les « Chapeaux » plus proches de la France.

Si bien qu’en 1772, la guerre civile menaçant, Gustave III effectue un coup d’état avec le soutien de l‘armée.

Il commence à agir comme un despote éclairé (abolition de la torture, liberté de la presse, liberté du culte) puis se lance dans la guerre contre la Russie (occupée par les Turcs) en 1788.

L’offensive échoue, et pour éviter une révolte des nobles, Gustave III obtient l’appui des autres états au parlement.

Il obtient les pleins pouvoirs et abolit les privilèges de la noblesse.

Le 16 mars 1792, lors d’un bal masqué au Palais Royal de Stockholm et malgré une lettre de menace reçue le soir même, Gustave III est tué par Jacob Johan Anckarström, officier issu de la noblesse. Ses conspirateurs portent des masques noirs.

Dans « Un Ballo in Maschera », Gustave III devient Riccardo, le Gouverneur de Boston, et Anckarström devient Renato.

L’un des conspirateurs, le Comte Ribbing (qui sera le père d’Adolphe Leuven, co-directeur de l’Opéra Comique à Paris et ami d’Alexandre Dumas) devient Samuel.

Au parlement, Renato s’inquiète de la menace que représente les conjurés sur la vie du gouverneur.

Ce dernier invite ses courtisans chez la sorcière Ulrica où sans le savoir, la femme de Renato ,Amelia, est venue demander conseil pour se débarrasser de son amour pour Riccardo.

La voyante prédit à ce dernier qu’il sera tué par le premier homme qui lui serrera la main, ce que fait Renato peu de temps après.

Renato surprend alors Amelia dans un cimetière et comprend qu’elle aime le Comte.

Furieux, il décide d’obtenir vengeance en combinant un plan avec plusieurs conspirateurs. Amelia tente bien de prévenir Riccardo, mais lors du Bal Masqué, Renato approche son ami maladroitement désigné par le page Oscar, et le tue.

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Rédigé par David

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Publié le 19 Décembre 2008

Genèse de l’œuvre

Le jour de la création de Simon Boccanegra, Verdi reçoit les envoyés du maire de Rimini pour signer l’engagement de monter au mois d’août 1857 la version remaniée de Stiffelio.

Malgré les vers modifiés par Piave, le troisième acte divisé en deux, l’action transposée au XIIIième siècle, la musique d’Aroldo reste pour une bonne partie celle de Stiffelio.

Par contre, le prêtre est devenu un guerrier, d’une façon toute byronienne, créant quelques invraisemblances comme la citation des paroles de l’évangile.

Le soir du 16 août 1857, l’opéra laisse l’auditoire de Rimini froid.
Cela n’empêche pas les habitants de la ville d’organiser un grand dîner en l’honneur de Verdi, que ce dernier va réussir pourtant à éviter.

Mais l’amour propre des habitants est satisfait : la gloire la plus étincelante de l’art musical italien a dignement inauguré  le théâtre de Rimini.

Aroldo

En 1187, la prise de Jérusalem par Saladin fournit le prétexte à Grégoire VIII pour déclencher la troisième croisade.

Le roi d’Angleterre, Richard Cœur de Lion, se distingue en battant les musulmans à Arsouf, mais ne peut prendre Jérusalem.
Après la signature d’un traité avec Saladin, Richard rentre en terre anglo-saxonne dès octobre 1192

La trame de l’ouvrage de Verdi se situe en Angleterre en 1200, au château du Comte Egberto.
Sa fille, Mina, est mariée à Aroldo, seigneur du château de Kent, de retour de croisade avec Briano l’ermite qui lui a sauvé la vie.
Certains faits rapportés au guerrier, mis en rapport avec la disparition de la bague de sa femme, l’amènent à soupçonner qu’elle le trompe.
Seul Egberto a compris que c’est avec Godvino.  Il signifie à Mina de ne rien dire à Aroldo, de peur que cela ne le tue.

Il est même décidé à se débarrasser lui-même de l’amant, tandis que celui-ci souhaite partir avec celle qu’il aime.
Aroldo apprend la vérité lors du duel entre Egberto et Godvino, qu’il arrive à interrompre.
Malgré tout, il propose à Mina de divorcer, ce qu’elle refuse, jusqu’à ce que son père apparaisse souillé par le sang de Godvino.

Quelques temps plus tard, dans une vallée écossaise, Aroldo rejoint Briano dans son ermitage. Mina et Egberto y arrivent eux aussi.
Le récit de leurs souffrances après l’exil d’Angleterre convainc enfin Aroldo d’accorder son pardon.

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Rédigé par David

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Publié le 27 Septembre 2008

Genèse de l’œuvre

Dans les premiers jours de 1856, Verdi entreprend de retoucher Stiffelio.

Puis en mars, il se rend à Venise pour mettre en scène Traviata et à cette occasion s’oblige à écrire un opéra pour le carnaval de carême 1856-1857.

Il choisit Simon Boccanegra dont il tire le sujet d’un drame de Garcia Gutierrez comme pour Il Trovatore.

Il veut représenter cette fois  les luttes des factions, et faire naître chez les Italiens l’horreur des guerres fratricides. Et cette fois, il menace de ne pas représenter l’œuvre si la censure continue à vouloir toucher au livret.

Francesco Maria Piave se consacre avec soin à la versification du livret, pendant que Verdi se rend à Paris pour les représentations de la version française du Trouvère.

Il y a des variantes avec la version originale, dont l’ajout d’un ballet et la modification du final de l’œuvre, qui est rendu plus vaste pour mieux faire ressortir les sentiments d’Azucena.

Le 12 janvier 1857, Le Trouvère reçoit de larges acclamations à l’Opéra de Paris.

Puis mi-février, Verdi repart à Venise. Il lui reste à composer un acte de son nouvel opéra.

Simon Boccanegra est créé le 12 mars 1857 à la Fenice. Ce n’est pas le succès attendu.

Il y a une recherche d’expression nouvelle par rapport à ses œuvres précédentes, des ressemblances avec le système que défend Wagner, des récitatifs « secs », et la qualité du livret ne permet pas une étroite dépendance entre drame et musique.

Vers mi-juin 1857, Verdi tente à nouveau sa chance à Reggio et cette fois obtient le succès.

Il en informe Vincenzo Torelli, le directeur du Théâtre San Carlo de Naples.

Simon Boccanegra

Au  XIIième siècle et XIIIième siècles, des villes importantes se développent autour des sièges épiscopaux, aux carrefours des grandes voies commerciales.

En Italie, Gênes, Venise, Florence se développent en puissants états commerciaux.

Ainsi, la république de Gênes domine au XIVième siècle un empire maritime qui s’étend en Méditerranée et en Mer Noire.

Mais son principal concurrent, Venise, maîtrisant la Mer Egée, réussit à vaincre la ville Ligurienne d’abord en 1380 pour reprendre la Méditerranée orientale, puis définitivement en 1475, ne lui laissant plus aucun comptoir.

En 1339, la dignité de Doge est créée, et Simon Boccanegra devient le premier doge à vie.

Il doit être issu du parti plébéien et être partisan de l’Empereur (gibelin).

Les familles Grimaldi et Fieschi, du parti guelfes (soutien au Pape), le forcent à abdiquer en 1347, puis à la tête d’une armée, il réussit à rétablir son autorité en 1356.

Il meurt probablement d’empoisonnement en 1362, et c’est Gabriel Adorno qui est élu par le peuple pour lui succéder.

L’œuvre de Verdi débute en 1339. Simon Boccanegra, corsaire au service de Gênes, eut une fille illégitime avec Maria, fille de son ennemi Fiesco.

Mais l’enfant fût enlevée et maintenant, Maria est retrouvée morte. Simon est cependant élu doge par le peuple avec le soutien du conspirateur Paolo Albiani.

Vingt cinq ans plus tard, Simon Boccanegra se trouve pris dans une intrique complexe : Amelia Grimaldi (qui s’avèrera être la fille du Doge) et Gabriel Adorno s’aiment.

Une conspiration redoutable est menée par Paolo Albiani pour pousser les Fieschi et Adorno à se révolter contre Simon, Paolo ne supportant pas que le doge ne lui ait pas accordé la main d’Amélia.

Si le soulèvement échoue, Paolo Albiani réussit cependant à empoisonner Simon qui le condamnera à mort mais pardonnera à tous les autres révoltés.

C’est l’heure de la réconciliation entre Fiesco et Simon avant que ce dernier ne meure, laissant la succession à Gabriel Adorno.

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Rédigé par David

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Publié le 7 Juillet 2008

Du Don Carlos de Paris (1866) au Don Carlo de Modène (1886)

Don Carlos est l'une des oeuvres qui a connu le plus de remaniements dans l'histoire de l'opéra.

Giuseppe Verdi y travailla de 1865 à 1867 pour l'Opéra de Paris, mais dès 1872, il procéda aux premières retouches, puis, en 1882, remania considérablement son chef d'oeuvre avec la collaboration de Charles Nuitter.

Il existe ainsi pas moins de quatre versions bien identifiées de Don Carlos, et le présent article a pour objectif de rendre compte le plus clairement possible de l’ampleur des changements qui l'ont traversé. Ces versions sont :

- La version française en cinq actes des répétitions générales parisiennes de 1866

- La version française en cinq actes de la première représentation parisienne en mars 1867

- La version italienne en quatre actes de Milan de 1884

- La version italienne en cinq actes de Modène de 1886

Une version italienne fût également créée le 4 juin 1867 à Covent Garden par Achille de Lauzières, qui supprima l'Acte I et le ballet et effectua de multiples remaniements anticipant ainsi les décisions que Giuseppe Verdi prendra en 1882.

Une autre version italienne de la version parisienne, sans coupures cette fois, reçut sa première à Bologne le 27 octobre 1867.

Le graphique qui suit représente de manière schématique le découpage en actes des 4 principales versions de Don Carlos (1866, 1867, 1884 et 1886):

Le fond orange désigne les passages écrits en 1866 et maintenus jusqu'en 1886.

Le fond rose clair désigne les passages écrits en 1866 qui disparurent après 1867.

Le fond vert désigne les passages totalement nouveaux dans la version de 1884.

Le fond hachuré désigne les passages qui furent réécrits en 1884.

Du Don Carlos de Paris au Don Carlo de Modène
Du Don Carlos de Paris au Don Carlo de Modène
Du Don Carlos de Paris au Don Carlo de Modène
Du Don Carlos de Paris au Don Carlo de Modène

La version la plus complète sur le plan dramaturgique est celle de 1866.

Cinq passages seront supprimés avant la première représentation :

- La rencontre d’Elisabeth et des bûcherons dans la forêt de Fontainebleau (Acte I)

- L'air 'J'étais en Flandres' de Rodrigue (Acte II) lors de ses retrouvailles avec Don Carlo

- Le duo Elisabeth et Eboli 'J’ai tout compris' (Acte IV) où Eboli avoue à Elisabeth sa liaison avec le roi.

- Le duo Philippe II et Don Carlo 'Qui me rendra ce mort'  (Acte IV)

- Un échange entre Elisabeth et Eboli (fin Acte IV)

Durée approximative : 3H45

 

La véritable version parisienne est celle de la première en 1867.

Selon les conventions de l'époque, la création devait inclure un ballet.

Verdi compensa alors les airs supprimés depuis les répétitions par l’ajout de deux passages :

- Une brève introduction des chœurs des bûcherons (Acte I)

- Le Ballet de la Reine (Acte III)

L’émeute finale de l’acte IV fut par ailleurs abrégée, et totalement supprimée dès la seconde représentation.

Durée approximative : 3H40. C’était encore trop long, et quelques coupures supplémentaires eurent lieu dès la seconde représentation pour permettre aux parisiens de rentrer sûrement chez eux le soir.

 

La version italienne réécrite par Verdi est celle de Milan en 1884

A plus de 70 ans, Verdi dédia à Milan une version italienne en 4 actes.

Par rapport à la version française de 1867, les passages suivants furent supprimés :

- L’Acte I de Fontainebleau

- L’introduction et les chœurs de l’Acte III devenu Acte II

- Le ballet de la Reine (Acte III devenu Acte II)

 

Les passages suivants furent également réécrits avec une meilleure expressivité musicale :

- Le duo Rodrigue et Don Carlo (Acte II devenu Acte I)

- Le duo Philippe II et Rodrigue (Acte II devenu Acte I)

- La scène et quatuor dans le bureau du roi (Acte IV devenu Acte III)

- Le duo Elisabeth/Eboli (Acte IV devenu Acte III) supprimé en 1867 et partiellement rétabli.

- La scène d’émeute (Fin Acte IV devenu Acte III) supprimée après la première de 1867

- Le duo Don Carlo et Elisabeth (Acte V devenu Acte IV)

- L’intervention de Philippe II et de l’Inquisiteur (Acte V devenu Acte IV)

 

Les passages suivants, totalement nouveaux, furent enfin créés pour cette version :

- La romance de Don Carlo (Acte I, ancien Acte II) qui rappelle les évènements survenus au cours de l’acte de Fontainebleau dorénavant supprimé.

- Le prélude de l’Acte II (ancien Acte III)

Durée approximative : 3H00

 

La version italienne 5 actes est celle de Modène en 1886

Verdi n’y a pas participé.

Cette version restaura, à la version de Milan 1884, l’acte I de Fontainebleau tel qu’il fut écrit en 1867 et traduit en italien. La Romance de Don Carlo (Acte II) fut alors supprimée.

Durée approximative : 3H20

Discographie/Filmographie

La version studio de référence du Don Carlo de Modène (1886)  est celle dirigée par Solti (1966 chez Decca) avec Carlo Bergonzi, Renata Tebaldi, Nicolai Ghiaurov, Dietrich Fischer-Dieskau, Grace Bumbry, Martti Talvela.

 

 

Insurpassé depuis plus de 40 ans!

 

 

La version live de référence du Don Carlos Parisien est celle dirigée par John Matheson (1976 chez Ponto) avec Joseph Roleau, Andrée Turp, Robert Savoie, Richard Van Allen, Edith Tremblay, Michèle Vilma.

Des chanteurs inconnus mais très engagés.

Les actes I, II, IV et V sont ceux de 1866 mais l’acte III (avec le ballet) est celui de 1867.

C’est donc la version parisienne la plus complète qui soit!

 

En 1993, James Levine enregistre en studio (Sony) une version de Modène inédite.

Avec la traduction du Ier acte de 1866 (et non plus 1867) nous avons ici la version italienne intégrale.

Michael Sylvester, Dolora Zajick et Samuel Ramey y sont par ailleurs excellents, mais Ferruccio Furlanetto est encore un peu trop jeune pour Philippe II.

15 ans plus tard à Paris, le constat est clair : c'est l'un des plus grands interprètes actuels de Philippe II.

 

En 1996, le Châtelet monte la version parisienne avec un casting prestigieux (Karita Mattila, Roberto Alagna, Thomas Hampson, Jose van Dam, Waltraud Meier).

A y regarder de plus près, cette version est un peu trafiquée. C'est bien la version de 1867, mais sans le ballet, avec une coupure dans le chœur de l’acte III et la suppression quasi intégrale du final à Saint Just.

En revanche l'air de Rodrigue 'J'étais en Flandres', le duo Elisabeth/Eboli (aveu d'adultère avec le roi) et le final de l'acte IV (déploration de Rodrigue et échange Elisabeth/Eboli) de 1866 sont rétablis.

Le DVD est un achat obligatoire rien que pour la beauté de l’ensemble.

 

Le 25 octobre 1970, le Staatsoper de Vienne lâche sur scène Franco Corelli, Gundula Janowitz, Shirley Verrett, Eberhard Waechter et le duo Inquisiteur/Philippe II du siècle : Martti Talvela/Nicolai Ghiaurov.

Sous la direction de Horst Stein, la version IV actes de 1884 trouve une interprétation intense dans un son live très correct (stéréo) qu'au moins 5 labels proposent à l'écoute (Rodolphe, Myto, Opera d'Oro, Gala, Orfeo d'Or).

 

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