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Publié le 2 Juillet 2012

L'Amour des trois oranges (Sergueï Prokofiev)
Représentation du 23 juin 2012
Opéra Bastille

Le Roi de Trèfle Alain Vernhes
Le Prince Charles Workman
La Princesse Clarice Patricia Fernandez
Léandre Nicolas Cavallier
Trouffaldino Eric Huchet
Pantalon Ignor Gnidii
Tchélio Vincent Le Texier
Fata Morgana Marie-Ange Todorovitch
Linette Carol Garcia
Nicolette Alisa Kolosova
Ninette Amel Brahim-Djelloul
 La Cuisinière Hans-Peter Scheidegger
Sméraldine Lucia Cirillo
Farfarello Antoine Garcin

Direction musicale Alain Altinoglu
Mise en scène Gilbert Deflo (2005)                            Marie-Ange Todorovitch (Fata Morgana)

L'Amour des trois oranges est l'œuvre lyrique la plus accessible au très jeune public de par la série de péripéties loufoques, l'adaptation en français du livret d'origine, et l'inventivité ironique de la musique.

On se souvient encore des rires des enfants invités par Gerard Mortier à la répétition générale précédant la création de ce spectacle, ils rendaient aussi vivants le parterre et les balcons que ne l'étaient la scène et la fosse d'orchestre.
Et lorsque l’on y assiste en compagnie d’un enfant, on en adopte alors le regard rajeuni et insouciant qui rénove notre

Eric Huchet (Trouffaldino)

Eric Huchet (Trouffaldino)

De fait, la mise en scène conçue par Gilbert Deflo est sans nul doute la meilleure dont dispose l'Opéra de Paris de sa part, et pour cause, ce régisseur a tendance à se laisser guider uniquement par la musique, singulièrement stimulante par ses contrastes rythmiques et ses changements de couleurs dans cet opéra.
Sa connaissance de la Commedia dell'Arte italienne y rencontre également un univers où s'accomplir, avec numéros de cirque, déguisements multicolores, et effets pyrotechniques.

Le Prince prend ainsi un regard de Pierrot, pour lequel Charles Workman aura marqué le rôle jusqu'à aujourd'hui avec sa gestuelle légère et ample, son timbre blessé mâtiné de blanc, et quelques fissures vocales qui n'en réduisent en rien l'authenticité.

Charles Workman (Le Prince) et Amel Brahim-Djelloul (Ninette)

Charles Workman (Le Prince) et Amel Brahim-Djelloul (Ninette)

Comme tout le monde y retrouve - des spectateurs aux chanteurs - la légèreté de l‘enfance, l'ensemble de la distribution interagit avec naturel et amusement.
Elle est variée en couleurs depuis le Tchélio sonore de Vincent Le Texier - avec bien peu d'efforts d'élocution – à la toute fragile Amel Brahim-Djelloul, et se distingue un chanteur, Eric Huchet, jusqu'à présent limité à des rôles mineurs, qui aura montré sa capacité à imposer une présence physique et vocale très assurée.

Sous la direction transparente et bien équilibrée, mais un peu trop sage, d'Alain Altinoglu, l'opéra s'achève sur le grand éclat de la célèbre Marche, reprise volontairement pour voir défiler une dernière fois chanteurs et comédiens, et finir sur une note festive et énergique bienvenue.

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Publié le 20 Avril 2011

Pelléas et Mélisande (Claude Debussy)
Version concert du 17 avril 2011
Théâtre des Champs Elysées

Pelléas Simon Keenlyside
Mélisande Natalie Dessay
Golaud Laurent Naouri
Geneviève Marie-Nicole Lemieux
Arkel Alain Vernhes
Yniold Khatouna Gadelia
Le Médecin Nahuel di Pierro

Direction musicale Louis Langrée
Orchestre de Paris

 

                                                Laurent Naouri (Golaud)

Après  Parsifal et  Ariane et Barbe-Bleue, c’est avec une version concert de Pelléas et Mélisande que s’achèvent ces quelques jours consacrés, au hasard du calendrier, à Wagner et son influence dans la musique française.

Sous la direction de Louis Langrée, les musiciens de l’Orchestre de Paris livrent une lecture rigoureuse et compacte qui, au fil de soirée, gagne en limpidité.
Si dans les passages les plus vivants la poésie se défait sensiblement, la profondeur de la musique, lorsqu’elle travaille les mouvements les plus sombres, devient flot mystérieux et inquiétant, et cela particulièrement lorsque Golaud intervient.

Or, Laurent Naouri est a lui seul, immensément, naturellement, et en toute évidence, l’interprète choc de la représentation. Il chante magnifiquement, le verbe est précis, superbement lié et détaché à la fois, sur fond d’un timbre mûr et que l'on pourrait croire affectueux au premier abord.

Alors évidemment Simon Keenlyside joue sur deux registres, des étincelles d’innocentes clartés et une assurance virile, Natalie Dessay trouve une lumineuse présence dans "Mes long cheveux descendent jusqu’au seuil de la tour", mais nulle subtile mélancolie ou sentiment d'urgence ne traverse ce duo par ailleurs tenu à distance sur scène. Rien ne se passe en fait.
Même Alain Vernhes paraît trop attentif à soigner son chant.

Ceci est cependant un avant goût de la passionnante confrontation qui s’annonce la saison prochaine entre le Teatro Real de Madrid (L.Naouri-Y.Beuron-C.Tilling direction S.Cambreling) et l’Opéra de Paris (V.Le Texier-S.Degout-E.Tsallagova direction P.Jordan) , le chef d’œuvre de Debussy devant y être représenté dans la même mise en scène de Bob Wilson.

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Publié le 24 Janvier 2010

Werther (Massenet)
Représentation du  23 janvier 2010
Opéra Bastille

Werther Jonas Kaufmann
Albert Ludovic Tézier
Charlotte Sophie Koch
Sophie Anne-Catherine Gillet
Le Bailli Alain Vernhes
Schmidt Andreas Jäggi

Direction musicale Michel Plasson
Décors et lumières Charles Edwards
Mise en scène Benoît Jacquot

 

Sophie Koch (Charlotte) et Anne-Catherine Gillet (Sophie)

La saison précédente, la mise en scène de Jürgen Rose faisait de l’univers mental de Werther, obsessionnel et torturé, le centre de l’ouvrage. Le poète était présent en permanence.

Ne pouvant reprendre ce spectacle reparti pour Munich, Nicolas Joël a choisi de monter la production de Benoît Jacquot, créée à Londres en 2004.

Werther ne nous apparaît plus vu de l’intérieur, mais tel que le perçoit Charlotte, une incarnation du poète sensible et intériorisé.

Jonas Kaufmann (Werther)

Jonas Kaufmann (Werther)

Les émois de la jeune fille, dont la force croissante ne lui permet pas de les maîtriser dans le temps, sont subtilement exprimés par des regards détournés, des gestes de repli trahissant la sensibilité au contact physique, et Benoît Jacquot semble très attentif à l’imaginaire féminin.

Cela est d’autant plus facile que Jonas Kaufmann projette une vision parfaite du sombre amoureux, triste mais sans violence apparente. A chacun de considérer à quel point cette image reflète sa propre perception du personnage…

On peut trouver les deux premiers actes ennuyeux, il y a une convergence de retenue entre le style de la direction d’orchestre et le poids des convenances sociales qui se ressent sur le jeu d’acteurs, mais les deux suivants, par leur nature plus dramatique, rappellent l’atmosphère tchékhovienne d’Eugène Onéguine dans la mise en scène de Dmitri Tcherniakov.

Jonas Kaufmann (Werther)

Jonas Kaufmann (Werther)

Théâtralement, le geste reste convenu, les poses sont prises avec un calcul trop apparent, cependant la profondeur humaine que fait vivre la voix de Sophie Koch suffit à nous laisser impressionné.

Anne-Catherine Gillet assume simplement la naïveté de Sophie, et Ludovic Tézier est ici glacial.

Avec un goût pour l'illustration contemplative, les décors en perspective de Charles Edwards couvrent les saisons du printemps à l’hiver.

Jonas Kaufmann (Werther) et Sophie Koch (Charlotte)

Jonas Kaufmann (Werther) et Sophie Koch (Charlotte)

Lente, claire, ne laissant aucun détail s‘échapper trop loin de la masse homogène, la direction de Michel Plasson vire à une noirceur plaintive et discrète à la fois.

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Publié le 18 Juin 2008

Louise (Gustave Charpentier)

Répétition générale du 17 juin 2008 à l’Opéra Bastille

 

Louise Mireille Delunsch
Julien Gregory Kunde
La Mère Jane Henschel
Le Père Alain Vernhes
Un noctambule, le marchand d’habits Luca Lombardo

Direction musicale Patrick Davin
Mise en scène André Engel
Chef des chœurs Alessandro Di Stefano

 

La manière dont les œuvres se répondent cette saison à l’Opéra National de Paris évoque un tissu musical complexe à travers lequel les thèmes se croisent.
Cardillac se situait à la croisée des motifs de l’Opéra Allemand, de l’Opéra du XXème siècle et de la ville de Paris, et donc André Engel retrouve avec « Louise » la capitale française, ses toits décidément toujours aussi fréquentés, l’Opéra contemporain français bien entendu et à nouveau la condition d’une femme qui vit chez son père.

 

                                           Mireille Delunsch (Louise)

Il paraît que l’on y entend un fleuve wagnérien chatoyant de délicatesses dignes de Massenet, et pourtant l’atmosphère du bonheur parental au second tableau vaut assurément la sereine euphorie du duo de Roméo et Juliette imaginé par Berlioz.

Patrick Davin n’a alors de cesse de dépeindre les lignes mélodiques en accordant un soin immense à l’harmonie avec les chœurs sans que la scène de fête n’en devienne assourdissante.
Ce transport en est d’autant plus appréciable que le livret peine à passionner.

En Gregory Kunde, Louise trouve un Julien mature, un homme peut être plus solide que poète, mais qu’elle sait pouvoir suivre les yeux fermés, alors qu’Alain Vernhes, d’apparence père tranquille, offre un grand moment de théâtre lorsque sa colère éclate.

Mireille Delunsch (Louise)

Mireille Delunsch (Louise)

Sans trop de surprise, Mireille Delunsch joue magnifiquement ce rôle de jeune fille un peu gauche et rêveuse,  Jane Henschel est toujours aussi impeccable dans les rôles de femmes fortes et dirigistes, et, avec ses petits airs de fils idéal, Luca Lombardo offre une générosité d'âme évidente.

« Louise » fait écho à « La Bohème ». Alors qu'il y a deux ans l’atelier d’artistes de l’opéra de Puccini comportait une affiche de «Cardillac », Gerard Mortier nous rappelle cette fois de ne pas oublier d’aller voir l’Affaire Makropoulos l’année prochaine.
Au passage de la station de métro "Montmartre", un irrésistible sens du message subliminal en somme!

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