Les Vêpres Siciliennes (Verdi)
Publié le 13 Juin 2008
Genèse de l’œuvre
A la seconde moitié du mois de mai 1854, la composition des « Vêpres siciliennes » n’a pas avancée.
Verdi loue alors pour l’été une maison de campagne à Enghien près de Paris.
Mais un évènement va considérablement le retarder : La Cruvelli, qu’il a choisi pour chanter le rôle d’Hélène, disparaît sans aviser personne, alors qu’elle doit participer à une représentation des « Huguenots ».
Pendant plus d’un mois il est impossible de la trouver. Le scandale est énorme.
Elle revient le 20 novembre, s’excuse, et réussit même à remporter le public à sa faveur.
Roqueplan doit cependant démissionner, et les répétitions n’avancent pas mieux avec son successeur, Crosnier.
Verdi se plaint que Scribe ne fait aucune des rectifications nécessaires au livret. Mais ce qu’il ignore est que ce livret est un tripatouillage du « Duc d’Albe », écrit pour Donizetti, et qui ne sera représenté en Italie qu’en 1882.
Le 26 janvier 1855, Victor-Emmanuel II et Cavour engagent le Piémont dans la guerre de Crimée au côté des Anglais et des Français pour soutenir la Turquie contre la Russie.
Cette opération est destinée à racheter le renom de l’armée savoyarde après ses défaites face à l’Autriche.
Dans ce contexte, le livret des « Vêpres siciliennes » a tout pour ne plaire à personne (Verdi compris), aussi bien aux Français à cause du massacre final, qu’aux Italiens en raison de la trahison des patriotes siciliens.
La première représentation a lieu le 13 juin 1855 à la salle Le Peltier lors de l’Exposition universelle de Paris.
On accourt de Lombardie et du Piémont pour donner à l’évènement l’importance d’une démonstration politique.
L’œuvre est bien accueillie et se maintient pour une cinquantaine de soirées.
Verdi se charge alors de la traduction italienne qui est représentée à Turin et à Parme en décembre 1855 sous le titre de « Giovanna di Braganza » en changeant les circonstances historiques pour se référer à un évènement de l’histoire du Portugal.
Ce n’est qu’en 1861, quand les Italiens auront retrouvé leur indépendance politique que « I Vespri siciliani » seront redonnées avec le livret original.
Les Vêpres siciliennes
Entre 1047 et 1090, les Normands conquièrent le sud de l’Italie et la Sicile.
Si l’empereur Hohenstaufen Frederic Barberousse échoue à prendre contrôle de l’Italie lors de la célèbre Battaglia di Legnano en 1176, son fils Henri VI réussit à se faire couronner roi de Sicile en 1194, après la mort du roi Normand Tancrède de Lecce.
Frederic II, fils d’Henri, tente de consolider les positions du Saint Empire Germanique en Italie mais, face à l’hostilité de la Papauté et des villes Lombardes (trame historique d’ Oberto), son règne se finit sur un échec.
Sa dynastie s’éteint en 1266, date à laquelle son fils, Manfred Ier de Sicile, est tué par Charles d’Anjou avec le soutien du Pape Urbain IV.
Le gouvernement odieux de Charles sur la Sicile entraîne la révolte des Siciliens le lundi de Pâques 1282, au moment où l’on sonne les vêpres. Des milliers de Français de Sicile sont massacrés.
Le chancelier de la couronne d’Aragon, Jean de Procida, a en effet noué des contacts avec les Gibelins de Siciles (opposants au Pape) pour le compte du Roi d’Aragon.
Pierre III le Grand est marié à la fille de Manfred. Il envoie donc une flotte aragono-catalane à Palerme pour en chasser les Français.
De plus, l’empereur d’Orient, Michel VIII Paléologue, inquiet des visées de Charles sur l’Empire Byzantin, est contacté par des siciliens.
Il ne participe cependant pas directement aux opérations.
Le bilan politique de cette longue tension politique et du carnage final est le rattachement du Royaume de Sicile à l’Aragon.
L’argument du livret de Verdi relate, de façon imaginaire, la manière dont Procida aurait attisé les tensions entre Français et Siciliens à Palerme (en réalité, il n'était plus présent en Sicile à cette période).
Un Sicilien, Henri s’éprend de la duchesse Hélène. Mais le patriotisme du jeune homme est contrarié lorsqu’il apprend qu’il est le fils de Montfort, gouverneur de l’Ile.
Il intervient lui-même pour sauver son père d’une tentative d’assassinat commanditée par Procida à l’occasion du bal du gouverneur français.
Henri reconnaît publiquement sa filiation, ce qui permet de libérer les conspirateurs et Hélène.
Cependant, Procida les informe qu’un navire rempli d’armes attend dans le port.
Au signal des cloches célébrant l’union entre Henri et Hélène, les siciliens se soulèvent et le massacre commence.