L'Amour de Phèdre (Sarah Kane) au Théâtre de Nesle

Publié le 27 Septembre 2009

L’Amour de Phèdre (Sarah Kane)
Représentation du 23 septembre 2009
Théâtre de Nesle

Mise en scène William Astre (Hippolyte)
Le Prêtre Thibaut Turgy
Thésée Marc Dumez
Le Médecin Jean-Marc Plat
La Sœur Florence Wagner
Phèdre Isabelle David

L’idée de m’intéresser à l’œuvre de Sarah Kane provient de l’irruption dans le monde lyrique du metteur en scène Krzysztof  Warlikowski (Iphigénie en Tauride, Le Roi Roger, Parsifal, l’Affaire Makropoulos).
Il a lui même adapté « Purifiés » (Cleansed), une des pièces les plus violentes de la dramaturge britannique.

Si la Tragédie grecque est une dimension essentielle du travail du directeur polonais, c’est pour y remettre les passions humaines comme réels moteurs du drame, plutôt que de reporter la responsabilité des actes sur des forces divines.

Alors pourquoi « Phaedras‘love », au fond de l’exigu sous-sol de pierres du petit Théâtre de Nesle, commence t-il par l’écoute récurrente des faits divers quotidiens? Pourquoi cette violence semble être aussi bien acceptée aux heures de grandes écoutes, alors qu’il faut prendre des pincettes lorsque des sujets comme la nudité ou bien la sexualité sont abordés?

La pièce de Sarah Kane est une confrontation entre des personnages contraints par leurs rôles sociaux (Phèdre, femme mariée - le jeune prêtre, dévolu au Christ), et Hippolyte, jeune homme décadent qui ne devrait rien avoir pour plaire.

Pourtant il les attire. Rien n’est épargné au spectateur de la force de leurs émotions, actes sexuels, lutte physique, rage extériorisée (progressivement Isabelle David passe d’expressions convenues et classiques à un déchaînement passionnel avec lequel nous faisons corps), et rien n’est épargné non plus de la vulgarité d’Hippolyte jusqu’à une mise à nue ensanglantée façon « Grand guignol ».
Il est fascinant de voir comment la clairvoyance désagréable du Prince doit être dure comme le roc, pour percer les fausses idées que les protagonistes se font d'eux mêmes. Ironiquement, il ne peut voir sa propre vérité.

William Astre est l’auteur de cette mise en scène, mais il en est également l’interprète principal.
Pour arriver à cette exposition sensuelle et violente du corps, l’acteur prouve un courage et une volonté d’aller au bout de son personnage qui a de quoi provoquer un vrai choc émotionnel.

La scène finale, où Hippolyte gît nu et prostré près du corps de sa belle-mère morte, ressemble assez étrangement aux dernières images du Roi Roger dirigé par Warlikowski. 

Rédigé par David

Publié dans #Théâtre-Cinéma, #Saison 2009-2010, #Kane, #Paris

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