Eclipse totale de soleil en Argentine (San Juan) du 02 juillet 2019
Publié le 8 Juillet 2019
Eclipse de soleil du mardi 02 juillet 2019 dans la région du Cuyo (Argentine)
Circonstances de l’éclipse totale de soleil
L’éclipse totale de soleil qui vient de traverser en fin de journée une partie du Chili et de l’Argentine sur une distance de 1300 km et une largeur de 140 km est la réplique de l’éclipse du 21 juin 2001 qui avait parcouru l’Angola, la Zambie, le Zimbabwe, le Mozambique et Madagascar.
Elle est la seconde des trois éclipses qui, en 3 ans, de 2017 à 2020, auront touché les régions méridionales de l’Amérique du Sud.
Cette année, la trajectoire de l’éclipse traçait une route de près de 8000 km au-dessus de l’Océan Pacifique Sud sans rencontrer aucune population insulaire significative, puis, a offert son spectacle crépusculaire aux habitants proches des grandes villes de La Serena et Coquimbo, au Chili, et San Juan, Rio Cuarto et le Sud de Buenos Aires, en Argentine.
Présentation de la région du Cuyo
La région de Cuyo est une zone géographique située dans le centre-ouest de l’Argentine. Appelée en Mapudungun, la langue des indiens Mapuches, « Cuyùm puùlli » qui veut dire « terre de grès » ou « pays de déserts », elle possède un relief montagneux avec peu de végétation.
L’Argentine est le 5e producteur de vin mondial et la région du Cuyo détient près de 70% des vignobles. Mais seule une faible partie de la production (5%) est dédiée à l’exportation.
Les vins les plus réputés proviennent de Mendoza, près du site où fut créée la première colonie permanente de la région en 1561. Puis, San Juan apparut en 1562, et, en 1598, la première pierre de San Luis fut posée.
La région maintint des relations économiques avec le Chili tout en restant isolée de l’est, mais, en 1884, l’achèvement du chemin de fer transcontinental, via le col d’Uspallata, permit de rompre cet isolement du reste de l’Argentine.
C’est à l’ouest de Mendoza que l’on trouve le plus haut sommet argentin, l’Aconcagua, qui atteint 6 962m, et, plus au nord de San Juan, une chaine de sommets de 5000 à 6000 m se dresse le long de la frontière chilienne au-dessus d’une vallée de haute altitude.
Enfin, le Cuyo se situe sur l’un des points de jonction de la plaque de Nazca (pacifique sud) qui s’enfonce sous la plaque sud-américaine. Le 15 janvier 1944, à 20h52, la ville de San Juan fut secouée par un tremblement de terre qui fit plus de 100 000 morts, la plus importante catastrophe que connut l’Argentine à ce jour.
Route vers le point d’observation
Pour observer l’éclipse depuis l’Argentine, il fallait choisir un lieu qui offrit la durée d’éclipse la plus importante possible, et c’est donc à proximité de la frontière chilienne que la recherche se concentra afin de disposer d’une hauteur suffisante du Soleil par rapport à l’horizon.
Le village de Bella Vista (345 habitants) se situant sur la ligne de centralité à 1945 m d’altitude, face au Cerro de la Majadita (6266m), s’avérait le plus évident, mais sa relative proximité avec la grande ville de San Juan (453 000 habitants en incluant la périphérie), en fit un pôle d’attraction majeur.
En effet, tout au long des 180 km de route s’élevant à travers les Sierras arides de Talacasto et du Tigre, des panneaux indiquaient cette petite localité, et le nombre de véhicules présents dès le matin sur le trajet indiquait que Bella Vista ne serait probablement pas un lieu de solitude et de recueillement idéal.
C’est donc peu avant le village, à une dizaine de kilomètres sur la route 149 qui redescendait avec une vue fantastique sur la chaîne des Andes, que le point de vue paraissait bien meilleur aussi bien en terme de tranquillité que de qualité esthétique.
Il faut en effet avoir en tête que même à une dizaine de kilomètres de la ligne de centralité, on ne perd qu’une à deux secondes de temps d’éclipse, et 5 secondes à 20 km de celle-ci.
Observation de l’éclipse
A 16h15, dans un ciel parfaitement bleu et sans le moindre nuage, un vent du sud se leva 10 mn avant le début de la phase partielle.
Et à 16h26, une échancrure de la Lune sur le bord solaire devint visible. Aucune tâche solaire ne trahissait une quelconque activité significative à la surface de notre étoile.
Au sol, quelques arbustes, des touffes de végétation dorées et nombre de roches ferreuses en forme de parallélépipèdes formaient des structures harmonieuses de premier plan qui, dans le dernier quart-d ‘heure, à partir de 17h20, révélaient des contrastes assombris à présent que la baisse de luminosité devenait sensible.
Mais l’ombre arrivait ce soir à 12 000 km/h, si bien que si celle-ci atteignit le sol chilien à 17h38mn et 10s, 1 mn 30s plus tard, à 17h39mn et 40s, elle était déjà sur Bella Vista.
A une telle vitesse, l’irrésistible apparition de l’anneau solaire et du diamant se dilua rapidement dans le ciel, laissant moins de prise sur cet instant si irréel au moment où tout bascule, et la forme particulière de l’ombre très allongée et en biais par rapport à sa trajectoire offrit le spectacle de montagnes plongées dans l’ombre vers le sud, mais encore éclairée au nord, une dissymétrie qui ajouta à l’étrangeté du moment.
L’apparition de la couronne se fit dans un silence absolu, quelques observateurs isolés se trouvaient dans la zone nord-ouest de Bella Vista, et se révéla d’emblée moins brillante et plus classique dans sa forme que celle observée au Wyoming en 2017, effet probablement dû à la faible hauteur su Soleil (12°).
Mais la vision de cet arc en ciel de couleurs à l’horizon ouest sur lequel se détachaient les sommets plombés par le Soleil noir reste d’une force impressive indépassable.
Il fallait choisir entre observer la couronne et les lumières du paysage ou bien chercher à observer les protubérances plus présentes en fin d’éclipse, c’est cependant le spectacle grandiose qui l’a emporté, mais sans le sentiment d’urgence ou d’excitation qui habituellement accompagne ce moment d’exception.
Après l’éclipse
Une fois la totalité passée, les lumières d’or et d’argent qui se reflétaient sur la chaîne de montagnes depuis la Majadita jusqu’à las Tortolas retrouvèrent leur charme ambré de fin de jour, alors que l’on pouvait suivre le croissant de Soleil reprendre sa forme circulaire d’origine.
Le spectacle n’était cependant pas fini. Sur le retour, et alors que le Soleil venait de se coucher, le ciel prit une teinte mauve d’une douceur somptueuse, un émerveillement qui laissa place, de nuit, aux inévitables embouteillages causés par les milliers d’observateurs revenant du même endroit à travers l’unique route de montagne qui descendait sur San Juan.
Il s’agissait de la dernière éclipse totale de la décennie, et l’Argentine sera à nouveau le cadre de la première éclipse totale de la prochaine décennie, le 14 décembre 2020, un millier de kilomètres plus au sud, aux frontières de la Patagonie.