Jungle book (Robert Wilson-Douglas Wieselman-CocoRosie) Théâtre de la ville
Publié le 23 Octobre 2019

Jungle Book (Robert Wilson)
Représentation du 15 octobre 2019
Théâtre de la ville-Le 13e Art
Hathi, la Narratrice Aurore Deon
Tabaqui, Messua, Kaa Naïs El-Fassi
Mowgli Yuming Hey
Shere Khan Roberto Jean
Le Singe, le Chasseur Jo Moss
Bagheera Olga Mouak
Mère Louve Nancy Nkusi
Baloo François Pain-Douzenel
Père Loup Gaël Sall
Musiciens Takuya Nakamura, Asya Sorshneva, Tez, Douglas Wieselman
Mise en scène Robert Wilson
Direction musicale Douglas Wieselman
Musique et paroles CocoRosie
Coproduction Les Théâtres de la Ville de Luxembourg, Les Nuits de Fourvière – Festival international de la Métropole de Lyon, Düsseldorfer Schauspielhaus, Manchester International Festival, Teatro della Toscana (Florence), deSingel campus international des arts (Anvers), Festspielhaus St. Pölten
Coréalisation Théâtre de la Ville-Paris ; Festival d’Automne à Paris
Prochainement, Robert Wilson célébrera les 50 ans de sa première mise en scène en France, depuis Le regard du sourd (Deafman Glance) qui fut joué au festival de Nancy en 1971.
Il serait bien difficile pour un enfant d’aujourd’hui d’imaginer à travers cette nouvelle version du Livre de la jungle, représentée dans la grande salle de 900 places du « 13e Art », que le réalisateur américain a derrière lui une telle carrière, tant son nouveau spectacle, d’un format relativement court, est empreint de jeunesse, d’effets spontanés parfaitement millimétrés et de simplicité narrative.
Et ce d’autant plus qu’au lieu de s’associer à la troupe du Berliner Ensemble qui lui est si familière, Robert Wilson a recruté de très jeunes artistes, auditionnés parmi 2000 candidatures, pour les former à son univers aux mimiques colorées à la Andy Warhol, où qualités vocales et gestuelles du corps se confondent en une poésie de la joie mélancolique.
La pièce débute par la présentation des principaux personnages, devant le rideau de scène, exaltée par la flamme humoristique d’Aurore Deon, avant que ne se lève un fond bleu luminescent où l’horizon est toujours plus clair que le zénith, comme sous un ciel d’éclipse solaire, une des marques esthétiques et intemporelles du metteur en scène.
Chaque artiste est minutieusement maquillé afin d’évoquer un animal particulier, le noir glamour de la panthère Bagheera porté par le magnifique chant jazzy d’Olga Mouak, les coups de griffes exagérément effilées de Shere Khan (Roberto Jean), les talents d’acrobate de Jo Moss en singe jouant de contorsions fascinantes autour d’un cerceau aérien, et la fragilité expressive et déjantée de Yuming Hey, simplement vêtu de rouge, comédien qui tomba fou de Robert Wilson quand il découvrit Les Nègres et Faust.
Tous ces acteurs jouent et s’engagent physiquement par la danse et ses réminiscences répétitives à outrance, mais chantent également, ce qui en fait des artistes complets et une grande source d’admiration. L’histoire reste cependant simple, Mowgli, un humain, a été élevé par les animaux de la jungle où le danger, sous le regard de Shere Khan, est toujours prégnant, si bien qu’il décide de rejoindre le monde des hommes.
Mais déçu par sa banalité, le jeune enfant revient finalement à son monde d’origine bien qu’imparfait pour lui. Le lien à l’enfance devient une façon de supporter une réalité où l’on ne se sent bien nulle part, et s’insèrent ainsi dans le spectacle quelques images et petites histoires (la chasse aux phoques) qui rappellent le malaise qui lie l’homme et la nature dans sa difficulté à cohabiter.
La musique de CocoRosie, interprétée par le petit orchestre situé à proximité de la scène côté jardin, s’écoute agréablement avec un charme un peu daté, et participe à la totalité d’un excellent divertissement qui, en peu de mots, tente de recréer un attachement à une nature en voie de disparition.