Giovanna d'Arco au Théâtre des Arts de Rouen
Publié le 19 Octobre 2008
Giovanna d‘Arco (Giuseppe Verdi)
Représentation du 18 octobre 2008 au Théâtre des Arts de Rouen
Giovanna Guylaine Girard
Carlo VII Jean-François Borras
Giacomo Victor Torres
Mise en scène Stephan Grögler
Direction musicale Oswald Sallaberger
Cécilium Bérangère Quentin de Gromard
Rarement jouée pour cause de livret aussi éloigné de la vérité historique que de la pièce de Schiller (voir l’article sur la genèse de « Giovanna d‘Arco »), la musique du septième opéra de Verdi est pourtant un mélange de marches entraînantes et de mélodies aux ambiances pastorales qui auraient du faire de cette œuvre une référence populaire.
En espérant seulement que la mise en scène du Théâtre des Arts n’en fera pas une exaltation nationaliste ce dont notre époque n’a sûrement pas besoin.
Alors premier constat, l’ambiance de l’Opéra de Rouen respire de décontraction.
Très coloré dans ses choix vestimentaires, représentatif de tous les âges de la vie, il y a dans ce public un esprit serein et vif que l’on ne ressent pas dans tous les théâtres.
La scène privilégie la largeur dans un cadre au format cinémascope 2.70:1 à la « Ben Hur ».
Et dès que la musique démarre, on comprend dans quel style l’ouvrage va être dirigé. Avec beaucoup de rondeur et de volonté de créer un corps homogène entre l’orchestre, les chœurs et les solistes, Oswald Sallaberger se donne les moyens de révéler en toute transparence tous les motifs instrumentaux.
La manière dont les instruments se détachent en solo est très appréciable et il y a même une innovation : l’insertion dans une loge de côté d’un Cécilium, instrument typique de Normandie ressemblant de loin à un violoncelle et dont l’archer active en fait un soufflet qui permet de tirer de la caisse des harmonies proches de celui de l’accordéon.
Les sonorités jouent sur une certaine nostalgie d’une époque où la vie investissait la campagne française.
En revanche le tempo est un petit peu trop placide pour être entièrement à la hauteur des élans épiques de la partition.
En Jeanne d’Arc, Guylaine Girard défend du mieux qu’elle peut un rôle dont elle n’a pas toute l’envergure dramatique et la souplesse vocale, cependant, elle a le souci de la musicalité en évitant toute tessiture tendue.
Du coup elle est la plus crédible au IIIème acte qui la repositionne en jeune fille attachée à son père.
Les expressions de Victor Torres sont d’ailleurs assez touchantes car son timbre dégage une douceur humaine qui l’éloigne de la représentation dure que l’on peut avoir au premier abord du personnage paternel.
Quand à Jean-François Borras, il campe un Charles VII sensible et sentimental, chant parfois fébrile mais agréable et sans tension également.
La mise en scène de Stephan Grögler ressemble à du Francesca Zambello (Guerre et Paix, le Trouvère) c’est à dire une sorte de reconstitution historique avec des moyens bien sûr plus limités et bien moins de savoir faire dans les déplacements des foules.
En fait le seul élément frustant de la soirée sera la taille du chœur, sous dimensionnée pour une œuvre à laquelle aura été sacrifié le sensationnel au profit d’une naïveté qui rend la représentation attachante.
Guylaine Girard qui avait remplacé Mireille Delunsch dans Louise cette saison à Bastille, reviendra avec Gerard Mortier au New York City Opera dans les rôles de l’Ange (Saint François d’Assise) et de Mélisande (Pelléas et Mélisande).