I due Foscari (Vargas-M.Moore-Feubel) Champs Elysées

Publié le 22 Mai 2011

I due Foscari (Giuseppe Verdi)
Version concert du 21 mai 2011
Théâtre des Champs Elysées

Le Doge Francesco Foscari Anthony Michaels-Moore
Jacopo Foscari Ramon Vargas
Lucrezia Contarini Manon Feubel
Jacopo Loredano Marco Spotti
Barbarigo / Fante Ramtin Ghazavi

Direction musicale Daniele Callegari
Orchestre National de France
Choeur de Radio France direction Alberto Malazzi

 

Manon Feubel (Lucrezia Contarini)

A partir de 1844, le jeune Verdi acquiert un rythme créatif qui le conduit à composer deux ouvrages par an jusqu’à son dernier opéra patriotique, La Battaglia di Legnano.

Sixième opéra du compositeur,  I due Foscari nous immerge dans l’atmosphère triomphante de Venise à son apogée - la république de Gênes, patrie de Simon Boccanegra, est définitivement vaincue -, un demi siècle avant l’amorce de son déclin face, notamment, à la montée de la domination ottomane évoquée dans la tragédie d‘Otello.

La construction dramatique du livret rappelle celle des toutes premières tragédies grecques, le chœur, omniprésent, décrit l’ambiance ou bien souligne l’action, et l’on assiste à une progression de plus en plus oppressante - l’accusation et l’arrestation de Jacopo Foscari,  l’intervention auprès du Doge et la plaidoirie devant le Conseil de Lucrezia, la condamnation à l’exil, la confession du véritable criminel -, qui se conclut par la mort du fils Foscari, et de celle du père après l’élection de son successeur.

Anthony Michaels-Moore (Le Doge Francesco Foscari)

Anthony Michaels-Moore (Le Doge Francesco Foscari)

Daniele Callegari délivre une enthousiasmante lecture, svelte et énergique, inévitablement tonitruante et enlevée quand les solistes et les choristes s’allient aux musiciens pour faire ressortir la puissance vitale qui irrigue la partition.

Comme nous avons pu le constater encore récemment dans Madame Butterfly, Anthony Michaels-Moore n’a rien perdu de sa capacité à incarner une figure morale par le sens qu’il donne à la moindre phrase exprimée avec une émotion palpable, et lisible même sur le visage. Pourtant, il ne bouge quasiment pas. On croirait entendre le vieux Germont.

Cependant, même si des instabilités se manifestent, sa voix contient un grain et une sorte de retenue qui imposent une stature d’homme digne, ému, mais qui vacille en opposant résistance à la machination qui détruit sa vie.

Avec son allure de bon élève, Ramon Vargas restitue superbement la richesse d’un personnage vocalement étoffé, bien que l’impact des aigus soit nettement limité, sans que le drame ne soit aussi profondément sensible que dans l’interprétation d’Anthony Michaels-Moore.

De toute évidence, le Loredano de Marco Spotti possède une assise vocale implacable, et Manon Feubel, dont tout le rôle consiste à apporter l’énergie combative et l’espoir qui manquent aux deux hommes, offre d'amples fulgurances particulièrement bien maîtrisées, et ne semble gênée que dans la célérité des cabalettes.

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