Publié le 30 Décembre 2021
Anselm Kiefer - Paul Celan
Du 17 décembre 2021 au 11 janvier 2022
Grand Palais Ephémère (RMN)
Visite du 30 décembre 2021
Né en 1920 en Roumanie et mort à Paris dans la nuit du 19 au 20 avril 1970 suite à son suicide dans la Seine probablement depuis le pont Mirabeau, Paul Celan est un poète d’après-guerre qui a profondément inspiré Anselm Kiefer au point que le Grand Palais dédie un espace d’exposition monumental aux œuvres nées de cette fascination pour une âme traumatisée par les heures les plus épouvantables de l’histoire de l’Europe du XXe siècle.
Une vingtaine de tableaux pouvant atteindre 10 mètres de haut sont simplement installés sur des supports à roulettes dans cet immense hangar sombre uniquement illuminés par quelques spots et la lumière naturelle provenant de la façade vitrée du hall.
Leur force prodigieuse repose autant sur le sentiment de petitesse qu’ils nous renvoient que sur la multiplicité des détails perdus dans les perspectives de ces paysages ou espaces en apparence inanimés qui évoquent des champs de bataille dévastés, déshumanisés en plein hiver, parfois de nuit au bord de l’océan, où se mêlent des restes de vêtements humains, des faisceaux de paille ou de blés à la place des corps, et des étoiles qui luisent ou des galaxies qui se devinent.
Matériaux métalliques, gris de plomb, dorés ou cuivrés parsemés de glacis de verre bleutés forment un alliage d'une complexité impressionnante.
Parfois, des images subliminales émergent comme face à ce premier tableau situé à l’entrée et semblant représenter une fontaine aux traits abrupts et précis à la fois, surmontée d’un jet de lumière concentré, qui révèle petit à petit un visage animal en surimpression.
Des textes allemands extraits des poèmes se mêlent aux peintures, mais, du fait qu’ils sont en lien avec la densité picturale, un non germanophone capte de toute façon la noirceur des visions d’horreurs mentales qui sont ainsi restituées.
Et il a y cet avion spectaculaire issu d’un temps révolu, qui supporte sur ses ailes des volumes de pages anonymes pouvant être autant des partitions de musique que, peut-être, des recueils de récits idéologiques ayant menés à la tragédie.
La fascination de la France pour l’Allemagne est également suggérée par le grand tableau Madame de Staël : de l’Allemagne, et si la noirceur de notre époque y trouve des résonances, ce rappel à la mémoire est aussi une façon de mieux apprécier ce qui forme les valeurs de nos vies.
Pour aller plus loin :
Paul Celan : écrire pour rester humain.