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Publié le 1 Janvier 2023

Le Lac des Cygnes (Tchaïkovski – Bolshoi de Moscou, 4 mars 1877) 
Représentations du 22 et 31 décembre 2022
Opéra Bastille
Première historique le 15 octobre 1964 à l’Opéra de Vienne 
Production remaniée pour le ballet de l’Opéra National de Paris le 20 décembre 1984

Odette/Odile Valentine Colasante
Le Prince Siegfried Paul Marque
Rothbart Jérémy-Loup Quer
La Reine Lucie Fenwick 
Le pas de trois Bianca Scudamore
                        Naïs Duboscq
                        Andrea Sarri

Chorégraphie de Rudolf Noureev 
d’après Marius Petipa et Lev Ivanov
Décors Ezio Frigerio
Costumes Franca Squarciapino
Lumières Vinicio Cheli
Orchestre de l’Opéra national de Paris
Direction musicale Vello Pähn

 

 

Le 'Lac des cygnes' est la première musique de ballet commandée à Tchaïkovski. Elle fut donnée pour la première fois au Théâtre Bolchoï de Moscou le 4 mars 1877 dans une chorégraphie de Julius Wenzel Reisinger
La création véritable du 'Lac des cygnes' dans la chorégraphie de Marius Petipa et Lev Ivanov – devenue la version de référence – date cependant du 27 janvier 1895, soit deux ans après la disparition du compositeur. 

Paul Marque (Siegfried) et Valentine Colasante (Odette)

Paul Marque (Siegfried) et Valentine Colasante (Odette)

Comme pour 'La Belle au bois dormant', ce sont les Ballets Russes de Diaghilev qui montrèrent pour la première fois – à Londres, en 1911 – la version de Petipa-Ivanov revue par Fokine, avec Mathilda Kschessinksa et Vaslav Nijinski
Le 'Lac des cygnes', dans sa version intégrale, n’entrera d’ailleurs au répertoire du Ballet de l’Opéra de Paris qu’en 1960, dans la version de Vladimir Bourmeister que le Théâtre du Châtelet avait accueilli en 1956.

Jérémy-Loup Quer (Rothbart) et Paul Marque (Siegfried)

Jérémy-Loup Quer (Rothbart) et Paul Marque (Siegfried)

Quand Noureev entreprend sa propre version de l’ouvrage intégral (créée en octobre 1964 à l’Opéra de Vienne), il se base sur la chorégraphie de Marius Petipa et Lev Ivanov, étoffe le rôle du Prince, et surtout développe sa psychologie par des fantasmes qui l’entraînent à sa perte, en courant éperdument après l’illusion d’une femme-cygne. Il ajoute également au premier acte une variation pour Siegfried sur la musique de l’adante sostenuto du pas-de-trois.

Valentine Colasante (Odette)

Valentine Colasante (Odette)

Vingt ans plus tard, il améliore à nouveau cette version à l’occasion de son entrée au Palais Garnier, le 20 décembre 1984, en renforçant le personnage de Rothbart dans le pas de trois du troisième acte, et dans le duo final avec le Prince. L’éclairage est également mis sur la ‘Danse des coupes’ du premier acte interprétée uniquement par 16 garçons dont l’esprit de liberté inspire Siegfried.

Pour cette première, Charles Jude remplace Rudolf Noureev, souffrant d’une fatigue musculaire.

Paul Marque (Siegfried)

Paul Marque (Siegfried)

Enfin, après un bref retour de la version Bourmeister à l’Opéra Bastille en 1992, la version Noureev est adaptée au vaste espace de cette scène et connaît une première resplendissante le 09 décembre 1994 avec Charles Jude en Prince.

A cette occasion, José Martinez incarne pour la première fois ce noble romantique lors de deux soirées, à l’âge de 25 ans.

Paul Marque (Siegfried) et Jérémy-Loup Quer (Rothbart)

Paul Marque (Siegfried) et Jérémy-Loup Quer (Rothbart)

25 ans, c’est aussi l’âge de Paul Marque qui incarne le Prince en ce soir de Réveillon du Nouvel An 2023. L’unique danseur étoile prévu pour cette reprise est absolument magnifique, mû par une douceur caressante qui insuffle tous ses gestes, y compris en fin de soubresauts ou bien lorsqu’il relève les cygnes un par un au dernier acte. 

Paul Marque (Siegfried)

Paul Marque (Siegfried)

Très bel artiste à l’élégance classique d’une harmonie très émouvante, ses tours en l’air s’achèvent avec un panache splendide et toujours avec une souplesse de mouvement qui touche au cœur tant il porte en lui l’inspiration romantique dont il a toujours rêvé.

Audace et poésie, Paul Marque fait honneur à l’esprit ce de grand ballet auquel il unit une vitalité mélancolique poignante.

Paul Marque (Siegfried) et Valentine Colasante (Odile)

Paul Marque (Siegfried) et Valentine Colasante (Odile)

Le duo qu’il forme avec Valentine Colasante est d’une très grande maturité, et il règne entre eux-deux, dans la rencontre au bord du Lac, une attention à la subtilité des signes et aux traits de douceurs qui rend très humaine leur relation idéalisée. Mouvements des bras à la légèreté gracieuse, sentiment d’intériorité très marqué, la danseuse étoile aux origines italiennes fait vivre un vrai portrait de femme très concentrée, sûre de sa technique et de la profondeur qu’elle exprime.

Jérémy-Loup Quer (Rothbart) et Paul Marque (Siegfried)

Jérémy-Loup Quer (Rothbart) et Paul Marque (Siegfried)

Il est alors passionnant de voir comment ce naturel se transforme, dans le rôle du Cygne noir, en tempérament joueur, plus virtuose et athlétique, et comment elle s’allie au personnage de Rothbart pour entrer dans un rôle de séduction provocante, mais sans introduire une rupture trop nette entre ses deux personnalités de femmes. Lorsqu’elle est Odile dans les bras de Siegfried, on retrouve aussi un vrai personnage entier et éclatant. Mais le grand éclat de rire dans un impressionnant mouvement de courbure est impitoyable pour le Prince.

Jérémy-Loup Quer (Rothbart)

Jérémy-Loup Quer (Rothbart)

Avec son allure très effilée, Jérémy-Loup Quer, tout juste nommé premier danseur en novembre dernier, impressionne par la célérité de sa danse, notamment dans le grand pas de trois du troisième acte. Sous ses traits, Rothbart est d’une grande jeunesse, et c’est donc le faux-ami du Prince qui est ici mis en avant. Car ce personnage complexe intègre de nombreuses facettes construites au fur et à mesure que Rudolf Noureev a développé sa chorégraphie. Il peut apparaître comme une figure paternaliste dominante, ou comme un être au caractère aiguisé avec des lignes de fuites très aériennes tel que le dessine ce jeune danseur gracile.

La danse des coupes

La danse des coupes

Mais le ‘Lac des Cygnes’ c’est aussi des danses entraînantes, polonaise, mazurka, valse, très bien rendues par le corps de ballet, avec beaucoup d’allant, des ensembles de cygnes aux grandes gestes synchronisés et qui inspirent un très grand sentiment de sérénité dans une lueur bleutée prégnante, ainsi que des pas de trois où Andrea Sarri se fait remarquer par sa robustesse et la solidité de sa technique qui lui permettent une impétuosité alerte fort accrocheuse.

Andrea Sarri

Andrea Sarri

Il y a exactement 30 ans que Vello Pähn a dirigé son premier ‘Lac des Cygnes’, version Bourmeister, sur la scène Bastille. En ce soir de 31 décembre, il imprègne la musique d’un très agréable moelleux, sans perdre en tonicité, qui s’allie à merveille au duo formé par Paul Marque et Valentine Colasante. Très attentif aux nuances, au mariages des teintes cuivrées et des cordes, sa lecture draine un éclat crépusculaire d’une grande profondeur sur une rythmique mesurée. 

Paul Marque (Siegfried) et Valentine Colasante (Odette)

Paul Marque (Siegfried) et Valentine Colasante (Odette)

Les cors sont légèrement couverts, les vents subliment la poésie qui émane de la délicatesse des danseurs solistes, et il y a aussi ce magnifique passage du premier violon, aux vibrations irrésistiblement déchirantes qui se muent ensuite en une brillante virtuosité céleste. Un frémissement inoubliable, qui montre comment ce grand spectacle livré aux mains de grands artistes peut préserver toute sa force émotionnelle à travers des décennies. 

Jérémy-Loup Quer (Rothbart), Paul Marque (Siegfried) et Valentine Colasante (Odette)

Jérémy-Loup Quer (Rothbart), Paul Marque (Siegfried) et Valentine Colasante (Odette)

Charles Jude expliquait ainsi, en 1997, qu’il avait considéré dès le départ que la version du ‘Lac des Cygnes’ de Rudolf Noureev était la meilleure – il ne faut pas oublier qu’en 1984 certains artistes ne croyaient pas qu’elle pourrait s’imposer face à la version Bourmeister -, et le temps lui donne aujourd’hui à nouveau raison avec une évidence incontestable.

La salle de l'Opéra Bastille à l'issue de la représentation du 31 décembre 2022

La salle de l'Opéra Bastille à l'issue de la représentation du 31 décembre 2022

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Publié le 6 Novembre 2022

Mayerling (Kenneth MacMillan – 1978)
Représentations du 26 octobre et 04 novembre 2022
Palais Garnier

Prince Rudolf Mathieu Ganio
Baronne Mary Vetsera Ludmila Pagliero
Comtesse Marie Larisch Laura Hecquet
Princesse Stéphanie Eleonore Guérineau
Empereur Franz Joseph Yann Chailloux
Impératrice Elizabeth Héloïse Bourdon
Mitzi Caspar Bleuenn Battistoni
Princesse Louise Charline Giezendanner
Bratfisch Andréa Sarri
Colonel Bay Middleton Jérémy Loup-Quer (26), Pablo Legasa (04)
Les officiers  Pablo Legasa (26), Nikolaus Tudorin (04), Mathieu Contat, Guillaume Diop et Grégory Dominiak
Katharina Schratt Juliette Mey

Chorégraphie Kenneth MacMillan (1978)
Direction musicale Martin Yates
Compositeur Franz Liszt
Orchestration John Lanchberry
Extraits de Faust Symphonie S108; Héroïde funèbre S102; Waltzes Soirées de Vienne S427; Cinq petites pièce pour piano S192 (2); Valse mélancolique S210; Festklänge, S101; Morceaux en style de danses anciennes hongrois (S737); Sept portraits hongrois, S205 (1-2, 5, 7); Valse oubliée S215/2; Berceuse, S174; Tasso S96; Études d’exécution transcendante S139 (3-4, 11-12); Weihnachtsbaum, S186/7; ‘Csárdas obstiné’ S225/2; Mephisto Waltz No.1 S110/2; Fleurs mélodiques des Alpes S156/2; Consolation S172/1; Ich Scheide S319; Mephisto Polka S217; Vallée d'Obermann S156/4; Die Ideale S106; Danse hongroise S245/4; Funérailles S173/7

Le drame de Mayerling, petit hameau situé au sud-ouest de Vienne, qui s’est déroulé dans la nuit du 29 au 30 janvier 1889, est un sujet passionnant pour sa dimension historique teintée de mystère irrésolu. Il implique l’archiduc héritier de la couronne des Habsbourg, Rodolphe, dont la disparition aura pour conséquence la désignation, 7 ans plus tard, de François-Ferdinand comme héritier du trône impérial, avant qu’il ne soit assassiné à Sarajevo le 29 juin 1914. 

Cette affaire privée est donc un évènement parmi tous ceux qui jalonnent la marche vers le déclin de l’Empire d’Autriche et l’entrée dans la première Guerre Mondiale.

Mathieu Ganio (Prince Rudolf) et Ludmila Pagliero (Mary Vetsera)

Mathieu Ganio (Prince Rudolf) et Ludmila Pagliero (Mary Vetsera)

Le cinéma s’est d’ailleurs emparé assez tôt de cette histoire, d’abord avec la version lumineuse et poétique d’Anatole Litvak, en 1936, qui réunit Danielle Darrieux et Charles Boyer, puis il y eut celle de Jean Delannoy en 1949, ‘Le Secret de Mayerling’, où figurent Jean Marais et Dominique Blanchar, et enfin vint s'imposer la version plus célèbre de Terence Young qui afficha Omar Sharif et Catherine Deneuve en 1968.

Puis, le 14 février 1978, jour de la Saint Valentin, le ballet du Royal Opera House de Londres interpréta une version chorégraphique de ‘Mayerling’ créée par Kenneth MacMillan qui aura connu 146 représentations au 30 novembre 2022 (ce ballet est repris à Londres au même moment qu'il est créé à Paris à l'automne 2022).

Mathieu Ganio (Prince Rudolf) et Laura Hecquet (Marie Larisch)

Mathieu Ganio (Prince Rudolf) et Laura Hecquet (Marie Larisch)

L’entrée au répertoire de l’Opéra de Paris de cette version, dans les décors et costumes issus des ateliers de l’institution parisienne, est donc un grand évènement, salué par le public tous les soirs, parce qu’il permet d’aller à la rencontre d’un profil psychologique noir et très intéressant.

Car la vision que présente Kenneth MacMillan de Rodolphe est celle d’un jeune homme en révolte contre une cour qui l’oppresse, et qui en souffre au point d’être engagé dans une quête suicidaire de la femme avec laquelle il pourra inscrire définitivement leur amour dans la mort.

L’histoire est complexe à suivre et nécessite d’être étudiée en amont, d’autant plus que pas moins de 6 femmes interviennent dans la vie du Prince

Mathieu Ganio (Prince Rudolf) et Héloïse Bourdon (Impératrice Elizabeth)

Mathieu Ganio (Prince Rudolf) et Héloïse Bourdon (Impératrice Elizabeth)

Il y a d’abord Stéphanie, qu’il a épousé mais qu’il n’aime pas, puis Louise, la sœur de sa femme, qu’il courtise par jeu, puis sa mère, l’Impératrice Elisabeth, plus connue sous le nom de Sissi, qui lui témoigne peu d’amour, voir aucun, la Comtesse Marie Larisch, son ancienne amante qui le comprend le mieux, Mizzi Caspar, la courtisane qui refusera de mourir avec lui, et enfin Mary Vetsera qui, elle, va s’éprendre pour lui d’un amour romantique et dangereux qui aboutira au double suicide final.

Ludmila Pagliero (Mary Vetsera)

Ludmila Pagliero (Mary Vetsera)

Dans la première partie, toute la pompe et la lourdeur de la cour impériale sont restituées dans les décors sombres où se devinent les colonnes de portraits de la Hofburg de Vienne. Mathieu Ganio incarne un Prince qui se livre à contre cœur aux règles formelles, et dans sa danse transparaissent des petites faiblesses à respecter le classicisme de la chorégraphie initiale. La relation affective à sa mère qui le dédaigne est poignante, au point de clairement faire apparaître qu’elle est un élément d’explication du comportement destructeur qui va suivre.

Ludmila Pagliero (Mary Vetsera) et Mathieu Ganio (Prince Rudolf)

Ludmila Pagliero (Mary Vetsera) et Mathieu Ganio (Prince Rudolf)

Car à partir du développement de sa relation avec Mary, au second acte, on peut voir le grand tragédien prendre le dessus, se plier à la gestuelle piquée et torturée, et décrire un magnifique portrait d’un homme qui plonge dans le désespoir avec de la détermination et une véritable profondeur.

Il faut dire que Ludmila Pagliero est pour lui une immense partenaire. Tonicité aussi bien dans l’impulsivité que la délicatesse, sens du tragique, perfection du jeu, expressivité de ses torsions, tout est juste dans sa manière de faire vivre Mary et d’en faire une femme forte maîtresse de ses désirs. Une simple robe légère noire suffit à suggérer l’âme de cette femme qui progressivement se révèle.

Eleonore Guérineau (Princesse Stéphanie)

Eleonore Guérineau (Princesse Stéphanie)

Et les autres partenaires de Mathieu Ganio sont tout aussi signifiantes dans leurs rôles respectifs, Eleonore Guérineau dans le très beau solo aux formes galbées qui se mue en duo faussement joyeux pour en révéler sa tristesse quand Stéphanie finit par ployer sous la violence ironique du Prince, Laura Hecquet, qui incarne une femme blessée mais prévenante, conventionnelle et fluide, et guidée par le souvenir d’un bonheur disparu, ou bien la sophistication de Bleuenn Battistoni, nommée première danseuse quelques jours plus tard le 05 novembre, très assurée et déjà excellente comédienne dans la rôle de Mitzi.

Ce qui frappe également, dans cette production, est à quel point l’Impératrice, jouée avec allure par Héloïse Bourdon, est un personnage froid, manipulateur et bien peu sympathique.

Pablo Legasa (Officier hongrois) - représentation du 26 octobre 2022

Pablo Legasa (Officier hongrois) - représentation du 26 octobre 2022

Mais il y a aussi les quatre officiers hongrois qui représentent l’inspiration libérale et libertaire nécessaire à l’équilibre de Rodolphe. Le premier d’entre-eux est incarné pour un soir par Pablo Legasa, splendide de tenue et excellent dans son jeu trouble, et un autre soir par Nikolaus Tudorin, d’une vivacité qui en fait tout son panache.

Enfin, impeccable de droiture, le Bratfisch très inspiré d’Andréa Sarri fait tout autant grande impression.

La chorégraphie de Kenneth MacMillan atteint sa plus haute vérité expressive dans les grands pas de deux qui donnent beaucoup de force aux fins des 3 actes, d'autant plus qu’ils sont associés au meilleur de la musique de Franz Liszt extraite des ‘Études d’exécution transcendante’. La réorchestration symphonique de John Lanchberry accroit l'ampleur tragique de ces passages, qui résonne avec des sonorités bien connues de la musique de Tchaikovski ou bien de Rachmaninov.

Mathieu Ganio (Prince Rudolf) et Bleuenn Battistoni (Mitzi Caspar)

Mathieu Ganio (Prince Rudolf) et Bleuenn Battistoni (Mitzi Caspar)

On retrouve aussi cette noirceur romantique dans la ‘Faust Symphonie‘, l’ ‘Héroïde funèbre’ et les ‘Funérailles’ qui ouvrent et ferment le ballet sur l’image du corps de Mary amenée vers un cercueil afin d’effacer les traces du drame. 

Mais à d’autres moments, la musique est plus triviale, dans la scène de cabaret par exemple, ce qui engendre une traduction chorégraphique un peu trop illustrative, et à d’autres moments, à l’instar de la scène des cartes, elle devient plus inspirée, alors qu’il ne se passe pas grand-chose sur scène. L’épisode de la partie de chasse qui débute le 3e acte reste par ailleurs très convenu sans qu’il ne soit utilisé de manière déterminante dans le discours dramaturgique.

Et au cœur du second acte, quelques minutes de recueillement sont dévouées à l'écoute d'un des lieder de Franz Liszt 'Ich Scheide', composé en 1860, qui est interprété par une jeune artiste lyrique, Juliette Mey, qui incarne Katharina Schratt, actrice autrichienne qui fut une amie de l'Empereur Franz Joseph.

Juliette Mey (Katharina Schratt) interprétant 'Ich Scheide'

Juliette Mey (Katharina Schratt) interprétant 'Ich Scheide'

Il n’y a donc pas une unité stylistique tout au long du ballet, et Martin Yates tire de la musique de Liszt des sonorités un peu trop rêches sans donner un élan suffisamment enlevé, même si lors de la soirée du 04 novembre l’orchestre a paru plus dense et chaleureux.

Mais un tel sujet est si inspirant que, paradoxalement, l’entrée tardive de ‘Mayerling’ au répertoire de la maison suggère déjà qu’il serait un parfait sujet pour une version moderne de cette histoire, aussi bien sur le plan musical que chorégraphique.

Pablo Legasa, Ludmila Pagliero, Mathieu Ganio et Laura Hecquet

Pablo Legasa, Ludmila Pagliero, Mathieu Ganio et Laura Hecquet

Matinée du 01 novembre 2022

Fortement sollicitant pour les danseuses et danseurs, ‘Mayerling’ est joué tous les soirs , si bien que plusieurs distributions sont prévues.

L’une d’elles fait intervenir dans les deux rôles principaux un couple différent de celui formé par Ludmila Pagliero et Mathieu Ganio, car bien plus jeune, qui réunit Hohyun Kang et Paul Marque.

Hohyun Kang (Mary Vetsera) et Paul Marque (Prince Rudolf)

Hohyun Kang (Mary Vetsera) et Paul Marque (Prince Rudolf)

Le danseur étoile joue un personnage plus fin et élégant dans la gestuelle classique, mais aussi plus dur de tempérament. L’alliage avec la danseuse coréenne, qui a été promue ‘sujet’ à l’issue du concours annuel du corps de ballet qui s’est tenu au Palais Garnier les 4 et 5 novembre, fonctionne à merveille, et Hohyun Kang renvoie une image de pureté dramatique qui éblouit par sa virtuosité.

L’histoire de ce couple gagne ainsi en fraîcheur et spontanéité, ce qui contraste avec la noirceur perverse plus mortifère de leurs aînés.

Paul Marque et Hohyun Kang

Paul Marque et Hohyun Kang

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