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Publié le 13 Novembre 2023

L’Or du Rhin (Richard Wagner – Munich, 22 septembre 1869)
Représentation du 05 novembre 2023
Théâtre Royal de La Monnaie de Bruxelles

Wotan Gábor Bretz
Donner Andrew Foster-Williams
Froh Julian Hubbard
Loge Nicky Spence
Fricka Marie-Nicole Lemieux
Freia Anett Fritsch
Erda Nora Gubisch
Alberich Scott Hendricks
Mime Peter Hoare
Fasolt Ante Jerkunica
Fafner Wilhelm Schwinghammer
Woglinde Eleonore Marguerre
Wellgunde Jelena Kordić
Flosshilde Christel Loetzsch

Direction musicale Alain Altinoglu
Mise en scène Romeo Castellucci (2023)
Dramaturgie Christian Longchamp
Orchestre symphonique de la Monnaie

Coproduction Gran Teatro Del Liceu (Barcelone)

La nouvelle Tétralogie mise en scène par Romeo Castellucci, 32 ans après celle d’Herbert Wernicke qui avait marqué la fin du mandat de Gerard Mortier avec Sylvain Cambreling à la direction orchestrale, est un évènement après tant d’absence, d’autant plus qu’il s’agit d’un cycle qui va afficher 8 représentations par épisode, le nombre le plus élevé de l’histoire du Théâtre de La Monnaie, et donc atteindre un rayonnement conséquent sur le public régional et international.

Et évidemment, avec un plasticien qui aime introduire une imagerie mystique dans ses visions, on sait d’avance qu’il faudra se laisser aller à la beauté des choix esthétiques issus de l’histoire de l’art humaine sans forcément percuter immédiatement sur le sens qui leur est donné.

Et à la vue de ce premier volet, la sensibilité générale qui s’en dégage est une profonde empathie pour la souffrance humaine et son désir de trouver dans l’adoration des Dieux une consolation qui n’est qu’illusoire.

Scott Hendricks (Alberich) et Gábor Bretz (Wotan)

Scott Hendricks (Alberich) et Gábor Bretz (Wotan)

Après le claquement glaçant d’un immense anneau tournoyant sur scène et qui s’immobilise, le monde naît dans le noir de la fosse d’orchestre où seul le subtile point vert lumineux de la baguette du chef guide les musiciens dans leur longue montée des flots du Rhin, une noirceur sereine sous tension.

Alberich, vieilli, décharné et attaché à une poutre de métal, interpelle dans l’ombre les filles du Rhin, trois danseuses et trois interprètes prises elles aussi dans des noirceurs abyssales, et lorsque le nain réussit à prendre l’or, l’univers des Dieux apparaît dans toute sa blancheur immaculée, recouvert de fresques et de statues antiques, alors qu’une marée humaine se tord sous leurs pieds, puis sous les pierres monumentales qui l’écrase, comme dans certaines imageries bibliques.

Gábor Bretz (Wotan) et Marie-Nicole Lemieux (Fricka)

Gábor Bretz (Wotan) et Marie-Nicole Lemieux (Fricka)

Cette vision de la déchéance humaine sur laquelle règne Wotan est à mettre en regard avec l’émancipation d’Alberich qui, sorti des bas-fonds, se rebiffe dans l’espoir d’entraîner la chute de l’ordre établi et de prendre sa place.

L’apparition des géants venus, en tenues de travailleurs, réclamer leur salaire pour la construction de la résidence des Dieux, est exploitée de façon à infantiliser les commanditaires, en les doublant par des adolescents. Mais hormis le fait que cette scène ajoute à l'étrangeté de la situation, elle a surtout pour conséquence de placer les géants, les chefs des travailleurs, au dessus de leurs donneurs d'ordres.

Personnage le plus burlesque de ce prologue, Loge doit autant à la personnalité bonhomme et charnelle de Nicky Spence qu’à la liberté expressive que lui accorde Romeo Castellucci, qui a tendance à peu valoriser la gestuelle des dieux et des nymphes, une incarnation vivante qui le place en position de commentateur distancié de l'action.

Wilhelm Schwinghammer (Fafner) et Ante Jerkunica (Fasolt)

Wilhelm Schwinghammer (Fafner) et Ante Jerkunica (Fasolt)

Toutefois, le point culminant de la soirée est atteint au retour du Nibelheim, lorsque Wotan et Loge ramènent Alberich dans l'univers blanc et lumineux des Dieux. Ils font vivre au nain une véritable scène de torture, recouvrant de liquide noir la nudité de Scott Hendricks, un des artistes à qui La Monnaie doit parmi ses plus fortes incarnations, tout en restant attaché à l'anneau fabriqué au préalable dans les entrailles de la terre. Les poses et les traces au sol qui en résultent ont un effet esthétisant qui contribuent à la fascination de cette scène saisissante.

Mais de sa main noire, Alberich a le temps de faire porter sa malédiction sur l'anneau et le visage de Wotan, alors que deux crocodiles géants descendent des cintres - on ne peut s'empêcher de penser à Frank Castorf qui les utilisaient aussi dans 'Siegfried' au Festival de Bayreuth - pour révéler la véritable nature des géants dont l'un, Fasolt, finira écrasé par l'un des deux reptiles.

Scott Hendricks (Alberich)

Scott Hendricks (Alberich)

La très belle scène finale est également marquante par la manière dont l'Or du Rhin, un immense rond pleinement doré, se découvre sur un mur blanc, puis s'abat au sol sans que l'on ne voit ensuite se creuser un puits noir, surmonté d’étoiles à neuf branches semblant plonger à l'intérieur, dans lequel les dieux, un par un, iront se jeter de dos et bras écartés lors de la montée au Walhalla qui annonce en fait une descente aux enfers pour eux.

Ce final évoque d'ailleurs beaucoup celui du 'Dialogues des Carmélites' de Francis Poulenc, mais avec une valeur inversée.

L’Or du Rhin (Altinoglu Castellucci Hendricks Spence Bretz Lemieux) La Monnaie

La lecture et les couleurs qu’adjoignent Alain Altinoglu et l'Orchestre symphonique de La Monnaie privilégient une énergie sombre fortement dominée par la coloration expressionniste et puissante des bois et des vents qui s’allie chaleureusement à la structure des cordes lumineuses, mais avec de l'épaisseur. Tous les motifs solo sont par ailleurs harmonieusement dessinés avec soin.

Cette unité d’ensemble appuie ainsi un discours fortement théâtral et très prenant, avec un petit effet de huis-clos probablement du à la configuration de la salle du Théâtre.

Anett Fritsch (Freia)

Anett Fritsch (Freia)

Hormis Jelena Kordić (Wellgunde) qui fait ses débuts sur la scène de La Monnaie, tous les chanteurs ont déjà été invités sur ces planches au moins une fois par le passé, certains depuis plus de 10 ans tels Andrew Foster-Williams, Julian Hubbard, Marie-Nicole Lemieux - la vétérane depuis son premier récital interprété il y a exactement 22 ans -, Anett Fritsch, Nora Gubish, Scott Hendricks (inoubliable Macbeth dans la mise en scène de Krzysztof Warlikowski) et Ante Jerkunica. Ils seront tous reconduits sur les autres volets qui les font intervenir.

Gábor Bretz n’a pas encore la cinquantaine mais a toujours une apparence très jeune. A l’image du Coppelius qu’il incarnait sur cette scène il y a quatre ans, il offre une personnalité assez claire, vocalement, et visiblement fort traversée par le doute – Romeo Castellucci le fait s’agenouiller devant la statue d’un Bouddha décapité au moment de sa malédiction -.

C’est avec grande impatience que l’on attend de voir comment il va ajouter de la profondeur à Wotan dans les deux premières journées du Ring.

Nora Gubish (Erda)

Nora Gubish (Erda)

Marie-Nicole Lemieux n’a aucun mal à imposer une Fricka sévère avec son timbre aux couleurs nocturnes, et Anett Fritsch offre une fougue à Freia qui précipite un fort sentiment d’urgence.

Deux autres fortes personnalités prédominent cependant au cours de ce prologue, le Loge de Nicky Spence et l’Alberich de Scott Hendricks. Le premier est d’une aisance dansante assez originale avec beaucoup de clarté d’accents, mais aussi dans le regard, qui lui permettent de faire vivre un esprit lucide et impertinent très accrocheur, alors que le second est d’une noirceur expressive qui engage tout le corps de l’interprète, ce qui en fait un des sommets interprétatifs parmi les rôles les plus forts du baryton texan.

Nicky Spence (Loge)

Nicky Spence (Loge)

Quant aux deux géants, Fasolt et Fafner, ils trouvent en Ante Jerkunica et Wilhelm Schwinghammer deux impressionnants interprètes très difficiles à différencier du fait que le metteur en scène les fait mimer le chant de leur frère respectif pour mieux les confondre.

Et en Erda, Nora Gubisch apporte une dignité d’une très grande sagesse, peu inquiétante, afin de donner le maximum de portée spirituelle à la déesse de la terre.

Andrew Foster-Williams et Julian Hubbard rendent beaucoup de simplicité humaine à Donner et Froh, et ‘Siegfried’ permettra de voir comment Peter Hoare va dessiner les traits les plus torturés de Mime

Enfin, loin d’incarner des filles éthérées et inaccessibles, Eleonore Marguerre, Jelena Kordić et Christel Loetzsch assoient au contraire des personnages féminins très présents.

Nicky Spence, Gábor Bretz, Alain Altinoglu, Scott Hendricks, Marie-Nicole Lemieux

Nicky Spence, Gábor Bretz, Alain Altinoglu, Scott Hendricks, Marie-Nicole Lemieux

Il faudra désormais attendre la première journée, ‘La Walkyrie’, programmée en janvier prochain, pour voir quels degrés d’unité et de continuité Romeo Castellucci va insuffler à la ligne de ce Ring, et quels seront les éléments de correspondance entre chaque épisode.

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Publié le 12 Février 2018

Die Gezeichneten (Franz Schreker)
Représentation du 10 février 2018
Komische Oper Berlin

Adorno Joachim Goltz
Tamare Michael Nagy
Lodovico Jens Larsen
Carlotta Ausrine Stundyte
Alviano Peter Hoare
Guidobald Adrian Strooper
Menaldo Ivan Turšić
Michelotto Tom Erik Lie
Gonsalvo Denis Milo

Direction musicale Stefan Soltesz
Mise en scène Calixto Bieito (2018)

Peter Hoare (Alviano) et Ausrine Stundyte (Carlotta)

Pour l'anniversaire des cent ans de la création des Stigmatisés, le Komische Oper de Berlin porte sur scène une nouvelle production de l’œuvre la plus connue de Franz Schreker en la livrant au regard saillant et sans indulgence de Calixto Bieito, un de ces metteurs en scène qui n'a pas peur de porter au cœur du théâtre des problématiques sociales crues, surtout quand il s'agit de montrer à quel point la dignité humaine peut subir les pires oppressions de la part de ceux qui détiennent le pouvoir.

Die Gezeichneten (Hoare-Stundyte-Nagy-Soltesz-Bieito) Komische Oper Berlin

Il choisit ici de représenter Alviano, un riche génois difforme qui a créé une île paradisiaque dans l’idée de dépasser les souffrances infligées par sa maladie, sous les traits d'un homme affectivement déséquilibré, en proie à une attirance sexuelle pour les enfants.

C'est donc ce qui se passe sur cette île, utilisée par des notables de la ville pour y organiser des orgies, qui est au cœur du sujet.

Pousser à ce point l'interprétation en confrontant le spectateur à la violence de cette folie déforme incontestablement la structure dramatique originelle de l’œuvre, mais la radicalité théâtrale avec laquelle ce point de vue est analysé pour aboutir à une conclusion qui fait sens est d'une telle vérité psychologique, que tout se comprend sans qu'il n'y ait besoin de se rattacher au texte.

Ausrine Stundyte (Carlotta)

Ausrine Stundyte (Carlotta)

Des visages d'enfants, parfois tuméfiés, s'affichent en grand de toute part. En avant scène, Alviano se débat avec ses souffrances, une poupée à la main, alors que des hommes attachent et attirent des jeunes hors du plateau.

Carlotta, elle, n'est plus une artiste peintre, mais une femme atteinte de nymphomanie. Le portrait qu'elle dessine de celui qui la fascine est cependant découpé au couteau sur un fond uniforme, sous forme d'un contour anguleux.

Die Gezeichneten (Hoare-Stundyte-Nagy-Soltesz-Bieito) Komische Oper Berlin

Au fur et à mesure que le mystère se désépaissit, ce jeu d'échanges entre Alviano et Carlotta laisse place à la représentation de l'île enchantée, un univers où des jouets gigantesques, train qui tourne en boucle et peluches inertes multicolores, évoquent les manques affectifs des hommes et leur compensation par leurs déviances sexuelles. Les enfants ne sont plus que des objets à fantasmes.

La rivalité entre Alviano et Tamare ne fait plus sens selon ce propos, et c'est Carlotta elle même qui tue ce dernier, comme un exutoire au traumatisme qu'elle a connu dans sa jeunesse et qui l'a totalement déséquilibrée. Un meurtre pour vengeance d'un viol.

Michael Nagy (Tamare)

Michael Nagy (Tamare)

Ausrine Stundyte, athlétique et puissamment féline, use de sa voix expressive et sauvage, pleine et sensuelle dans la tessiture médiane, pour incarner sans ambages la présence et les pulsions sexuelles de cette héroïne écorchée. Elle connaît déjà bien Calixto Bieito depuis Tannhäuser et Lady Macbeth de Mzensk à l'opéra des Flandres, et c'est sur une nouvelle production de cette Lady de Chostakovitch qu'elle retrouvera Krzysztof Warlikowski la saison prochaine pour faire ses débuts à l'Opéra de Paris.

Michael Nagy (Tamare)

Michael Nagy (Tamare)

Les rôles masculins, eux, ont tous de ce vérisme musical que revendique Schreker et qui donne une tonalité froide et perçante à leur chant, et parmi eux, Peter Hoare s'investit totalement avec un sens de l'urgence glaçant. Il faut véritablement une forte capacité d'effacement de soi pour pousser aussi loin ce jeu de torpeurs misérables.

Mais finalement, peu le différencie de Michael Nagy qui, toutefois, a meilleure emprise scénique pour imprimer à Tamare un aplomb viril et inquiétant.

Ausrine Stundyte (Carlotta)

Ausrine Stundyte (Carlotta)

Et loin de reproduire la luxuriance fantastique d'Ingo Metzmacher qui dirigeait l'été dernier l'orchestre du Bayerische Staatsoper dans la production des Stigmatisés de Krzysztof WarlikowskiStefan Soltesz propose une lecture plus compacte mais tout aussi complexe, qui sert formidablement l'engagement violemment théâtral des artistes, si bien que l'on se trouve complètement happé par ce délire d'adultes dans un monde d'enfant à en finir profondément estomaqué.

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Publié le 22 Septembre 2014

Anna Nicole (Mark-Anthony Turnage)
Livret de Richard Thomas (2011)
Représentation du 20 septembre 2014
Royal Opera House Covent Garden de Londres

Anna Nicole Eva-Maria Westbroek
Mayor of Mexia Wynne Evans
Virgie Susan Bickley
Daddy Hogan Jeremy White
Aunt Kay Rebecca de Pont Davies
Shelley Loré Lixenberg
Billy Grant Doyle
Stern Rod Gilfry
Blossom Allison Cook
J.Howard Marshall II Alan Oke
Young Daniel Archie Hunter
Teenage Daniel Jason Broderick
Larry King Peter Hoare

Direction musicale Antonio Pappano
Mise en scène Richard Jones (2011)                                Eva-Maria Westbroek (Anna Nicole)

La découverte de la vie d’Anna Nicole à travers l’œuvre musicale de Mark-Anthony Turnage suscite un profond malaise, car s’y entrechoquent des scènes d’une apparente légèreté, désopilantes pour certains spectateurs, et le drame d’une vie entièrement et tragiquement absurde.

Née à Houston en 1967 – elle débute dans la vie comme serveuse puis comme strip-teaseuse -, elle fait la couverture de Playboy à l’âge de 25 ans, et se remarie deux ans plus tard avec un milliardaire plus âgé qu’elle de 67 ans.

Mais lorsque celui-ci meurt un an seulement après leur union, il ne lui laisse rien.

Eva-Maria Westbroek (Anna Nicole)

Eva-Maria Westbroek (Anna Nicole)

Devenue totalement et désespérément dépendante des shows télévisés, elle crée le « Anna Nicole Show » en 2002, et rien de son déclin ne va échapper aux objectifs des caméras.
Son fils décède à l’âge de 20 ans, et elle le rejoint dans la mort peu de temps après, suite à une overdose de médicaments.

Toute cette vie s’est ainsi construite sur l’instrumentalisation fascinante de son corps et l’amplification artificielle de la forme de sa poitrine à coups d’opérations chirurgicales, au risque d’engendrer des douleurs dorsales insoutenables, qui vont la conduire à la dépression.

Le programme vendu en salle contient par ailleurs un grand article sur la chirurgie des implants mammaires, leurs dangers, et l’attrait physique qu’ils peuvent éveiller.

Eva-Maria Westbroek (Anna Nicole)

Eva-Maria Westbroek (Anna Nicole)

La mise en scène de Richard Jones n’épargne rien du kitsch qui entoure cette femme extravagante, et elle reste dans l’esprit Théâtre musical de l’ouvrage.

Nombre de symboles sont déformés, comme le lit immense de J.Howard Marshall II - le second mari d’Anna Nicole-, l’univers de jouets Walt Disney gigantesques, dont la démesure tranche avec la faille affective immense que vit le petit Daniel au creux de ce couple sordide, et comme ces danseurs tous vêtus de noir, avec des têtes en forme de caméra qui enregistrent tout pour le plaisir des spectateurs de l’époque.

Tirant trop vers la comédie, le directeur reste superficiel, alors qu’il aurait pu noircir ce drame en pointant du doigt fortement le voyeurisme malsain du public qu’Anna Nicole n’a fait qu’exploiter. Comment cette femme peut-elle avoir fait passer le regard des autres avant son propre regard sur elle-même ?

Alan Oke (J.Howard Marshall II), Archie Hunter (Daniel) et Eva-Maria Westbroek (Anna Nicole)

Alan Oke (J.Howard Marshall II), Archie Hunter (Daniel) et Eva-Maria Westbroek (Anna Nicole)

Et l’on peut penser qu’un metteur en scène comme Willy Decker aurait été plus incisif, comme il le fit dans sa mise en scène de Lulu à l’Opéra bastille.

Au lieu de cela, le spectacle est constellé de rires aux éclats d’une partie de la salle, alors que les vidéos de la vie d’Anna Nicole disponibles sur Youtube sont affligeantes, et bien pires que ce que l’opéra ne suggère.

Richard Thomas, le librettiste, n’évite aucune allusion sexuelle, ce que Richard Jones traduit encore plus visiblement sur scène, et l’œuvre débute comme elle se finit par un sensuel « I want to blow you all …». Tout n’est que chair sans sentiment.

Antonio Pappano s’en donne pourtant à cœur joie avec cette musique inspirée du Jazz, cuivrée et rythmée par des percussions entrainantes, où l’écriture vocale se construit plus en décalage avec elle que dans une fusion totale avec les harmoniques orchestraux.
Les chœurs, eux, ont la folie d’une gaité avide de déchéance humaine.

Eva-Maria Westbroek (Anna Nicole)

Eva-Maria Westbroek (Anna Nicole)

Naturellement, Eva-Maria Westbroek s’éclate littéralement dans ce rôle outrancier, et y prend un plaisir certain, si bien qu’elle est d’une crédibilité effarante. Ce chant, peu lyrique, fait que sa voix n’est pas aussi mise en valeur que dans les grands rôles wagnériens, mais on décèle parmi tous ces chanteurs la voix claire et mordante d’Alan Oke, qui compose un J.Howard Marshall II déjanté et presque trop en forme.

Soirée divertissante pour beaucoup, déprimante pour les plus conscients et sensibles, Anna Nicole vaut d’être vu pour se convaincre que cela a existé.

Et l’on ne peut s’empêcher de penser à ce public hilare que des chaines de télévision telles que TF1 dévisagent et filment lors de certaines soirées débiles et consternantes, souvent difficiles à comprendre.

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