Articles avec #concert tag

Publié le 27 Mai 2021

Quatuor Van Kuijk - Felix Mendelssohn-Bartholdy (1809-1847)
Concert du 26 mai 2021
Théâtre des Bouffes du Nord

Quatuor à cordes en la mineur Op.13 (octobre 1827 – première à Paris le 14 février 1832)
Quatuor à cordes en ré majeur Op.44 No.1 (juillet 1838 – première à Leipzig le 16 février 1839)

Nicolas Van Kuijk violon
Sylvain Favre-Bulle violon
Emmanuel François alto
Anthony Kondo violoncelle

Point de départ d’une intégrale qui réunira les sept quatuors à cordes et les quatre pièces pour quatuor de Felix Mendelssohn pour aboutir à l’édition d’un double CD chez Alpha Classics en 2022, les deux quatuors présentés par l’ensemble Van Kuijk au Théâtre des Bouffes du Nord, au moment où reprennent les concerts en public, accompagnent le sentiment de renaissance qui traverse cet instant.

Nicolas Van Kuijk et Sylvain Favre-Bulle (Violons)

Nicolas Van Kuijk et Sylvain Favre-Bulle (Violons)

Sylvain Favre-Bulle ne se prive pas de présenter ces deux pièces avec la joie sincère du plaisir des retrouvailles. La première, le Quatuor à cordes en la mineur Op.13, qui est en fait le second quatuor écrit par Mendelssohn, porte en elle la marque de la mort de Beethoven qui fut le déclencheur émotionnel et la condition de sa composition en 1827. Et la seconde, le Quatuor à cordes en ré majeur Op.44 No.1, est un hommage au Prince Oscar de Suède que le musicien rencontra pour la première fois au musée Städel de Frankfurt en 1837.

Loin de réduire ces deux œuvres à une interprétation formelle, le Quatuor Van Kuijk induit en elles une énergie puissante, la vigueur acérée d’une sève qui rend le bois si vivant et éruptif, et toutes les nuances de sensation colorent une musique, depuis le moelleux bondissant du violoncelle au panache grandiose d’un premier violon au métal étincelant. Une forte densité de matière, un plaisir ludique décontracté et précis dans les jeux de correspondance entre interprètes, une vivacité d’entrelacs dont il est parfois difficile de différencier les instruments et particulièrement les couleurs sombres du second violon et de l’alto, se lisent ainsi une tendresse et une bienveillance heureuse qui accrochent et stimulent l’auditeur au point de le perdre dans des paysages captivants.

Nicolas Van Kuijk, Sylvain Favre-Bulle, Emmanuel François, Anthony Kondo

Nicolas Van Kuijk, Sylvain Favre-Bulle, Emmanuel François, Anthony Kondo

Et en bis, un arrangement spécialement réalisé pour le Quatuor Van Kuijk (Jean-Christophe Masson – 2016) de l’insouciante mélodie pour voix et piano composée par Francis Poulenc pour la soprano et actrice Yvonne Printemps, « Les Chemins de l’amour », laisse un dernier trait d’âme imprégner l’atmosphère du théâtre pour revenir à la vie parisienne.

Voir les commentaires

Publié le 25 Avril 2021

Syrael (Jan Krejčík - 2010)
Représentation du 23 avril 2021
Centre culturel tchèque de Paris

18, rue Bonaparte, Paris 6e

 

Artiste lyrique Marie Verhoeven
Compositeur et musicien Jan Krejčík

Percussions Manon Duchemann
Vidéo Daniel Touati et Dominique Defontaines

 

Le 23 avril 1616, trois grands écrivains disparurent le même jour : Shakespeare à Stratford-upon-Avo, Cervantès à Madrid, et Garcilaso de la Vega à Tolède. C’est ce jour qui depuis 1995 célèbre chaque année le plaisir de la lecture, et c’est pourquoi le Centre culturel tchèque de Paris a choisi le vendredi 23 avril 2021 pour inaugurer sa nouvelle bibliothèque.

A cette occasion, l’Ensemble Rés(O)nances de Marie Verhoeven est à nouveau invité pour interpréter une pièce du compositeur tchèque Jan Krejčík, qui fut créée à l’Auditorium national de musique de Madrid le 27 mai 2010.

Syrael est une partition musicale d’une durée de 15 minutes qui évoque la légende d’un être artificiel inventé par Edward Kelley, un occultiste prétendant avoir des dons de communication avec les esprits, lors de son séjour au Château de Prague à la fin du XVIe siècle.

Marie Verhoeven et Jan Krejčík

Marie Verhoeven et Jan Krejčík

On trouve ainsi dans la conception de cette œuvre contemporaine une composante alchimique qui manipule et fusionne des enregistrements de la voix de la chanteuse lyrique avec sa voix réelle exprimée en direct, et une autre composante visuelle, jouant avec des apparitions, qui fait appel à des projections vidéographiques (réalisation Daniel Touati et Dominique Desfontaines) sur un tissu transparent.

Les moyens musicaux s’appuient donc sur des instruments classiques, percussions, claviers, xylophone, mais également des moyens informatiques et électroniques utilisés comme des instruments qui permettent de réaliser des effets spéciaux sonores en temps réel.

Jan Krejčík

Jan Krejčík

L’œuvre se décompose ainsi en trois parties. Dans la première, de vifs murmures et sons pulsés se répondent dans le silence de la salle, et alors que l’image ombrée et sertie de lumière du compositeur apparaît en chef d’orchestre au centre de l’installation - qui est basée sur une vidéo enregistrée il y a plus de 8 ans -, la musique s’étoffe, gagne en intensité, tout en restant synchrone de sa gestique.

Jan Krejčík joue lui même les sonorités électroniques, Manon Duchemann les percussions, et la tension qui s’accroît suggère un acte de création ou d’effort par la violence.

Marie Verhoeven

Marie Verhoeven

Puis, dans la seconde partie, l’auditeur se trouve en état d’apesanteur, comme s’il s’était libéré de quelque chose, et l’immatérialité de ce moment devient purement vocale à travers les modulations arrangées par le musicien qui s’atténuent quand les variations des appels étranges que chante la mezzo-soprano se dessinent au premier plan. L’image du chef d’orchestre disparaît progressivement, et les formes en filigrane d’une femme au visage blanc fantomatique se révèle à travers le mystère sonore. L’impression est à la fois hypnotique et troublante, et les sons parfois fortement ténus.

Et une fois la scène d’apparition évanouie, la dernière partie s’achève en une brève conclusion aux sonorités délicates afin de préserver l’état d’esprit songeur du spectateur.

Syrael (Rés(O)nances-Marie Verhoeven-Jan Krejčík) Centre culturel tchèque de Paris

Il s'agit ici d'un exemple de concordance parfaite entre des techniques spectrales utilisées pour créer des effets sonores irréels, une technique vidéo fine qui respecte le mouvement de la musique, et un thème qui fait référence au surnaturel.

 

Lire aussi : Eau de Kupka (M.Verhoeven-J. Krejčík) Centre culturel tchèque

Voir les commentaires

Publié le 23 Octobre 2020

Concertos pour clavier  (Johann Sebastian Bach – 1736 / 1739)
Concert du 23 octobre 2020
Auditorium de Radio France

Concerto pour clavecin en ré mineur, BWV 1059
Concerto pour clavecin en fa majeur, BWV 1057
Concerto pour clavecin en ré mineur, BWV 1052
Concerto à deux claviers en ut mineur, BWV 1060

Ensemble Café Zimmermann

Dans une lettre écrite le 28 octobre 1730 à Georg Erdmann, consul de Russie à Gdansk, Johann Sebastian Bach exprimait son désabusement à Leipzig, qu’il avait rejoint après un passage heureux à la cour du Prince Leopold d’Anhalt-Cöthen. Il n‘occupait pas de fonctions aussi importantes qu’il le pensait et trouvait les autorités peu portées sur la musique.

Mais le décès du recteur de la ville entraîna une amélioration de sa situation, et Bach délaissa les compositions d’église pour se consacrer pleinement au Collegium Musicum, un petit ensemble qui se réunissait au Café Zimmermann de la rue Sainte-Catherine.

Concertos pour clavier de Bach par Café Zimmermann – Auditorium de Radio France

Ce lieu à l’esprit convivial a inspiré en 1999 le nom d’un ensemble créé par la claveciniste Céline Frisch et le violoniste Pablo Valetti, "Café Zimmermann". Cet ensemble a depuis enregistré d’août 2000 à mai 2010 une magnifique série d’enregistrements des concerts à plusieurs instruments de Bach, tous réunis dans un coffret en six volumes édité par le label Alpha Productions.

Il plane donc une grande impatience sur cette première soirée de concertos pour clavier donnée à l’auditorium de Radio France à un horaire avancé, et enregistrée par France Musique.

Carole Cerasi et Céline Frisch (de dos)

Carole Cerasi et Céline Frisch (de dos)

Trois des huit concertos pour un seul clavecin sont au programme, le BWV 1059 en ré mineur, dont il n’existe qu’un court fragment de la main de Bach, le BWV 1057 en fa majeur, qui est une adaptation du 4e Concerto brandebourgeois BWV1049 composé en 1721, et le BWV 1052 en ré mineur dont Bach a donné plusieurs versions.

L’acoustique de l’auditorium semble créer un espace un peu trop large pour la formation chambriste, mais un halo lumineux focalise chaleureusement toute l’attention sur l’ensemble, et la part belle est faite au clavecin et à sa superbe marqueterie finement ornée de motifs floraux.

Concertos pour clavier de Bach par Café Zimmermann – Auditorium de Radio France

Céline Frisch et Carole Cerasi alternent d’un concerto à l’autre, diffractant un enchantement sonore scintillant et feutré, une pétulance heureuse qui engendre un sentiment diffus de légèreté dont on a tant besoin en ce moment.

Les instrumentistes, violons, alto et violoncelles, répondent à cette allégresse avec un toucher caressant qui affine les phrasés avec une souplesse bienveillante où l’esprit domine le corps. Il y a même des jeux de correspondance subtilement bondissants entre les violoncelles et le clavecin qui se révèlent accrocheurs par la douceur qui les anime.

L'ensemble Café Zimmermann

L'ensemble Café Zimmermann

Puis, en dernière partie, deux claviers sont disposés face à face par l’équipe de techniciens en charge de régler précisément le positionnement des instruments et le dispositif de prise de son pour la radio.

L’un des trois concertos pour deux clavecins composés par Bach, le BWV 1060 en ut mineur, constitue ainsi l’apothéose finale de ce concert. Céline Frisch et Carole Cerasi sont entraînées dans un jeu étourdissant et épatant au son miroitant qui provoque le même plaisir que l’on peut avoir à observer à travers un instrument le scintillement précieux d’amas d'étoiles.

Beaucoup de sourires au salut final en réponse à un public ravi.

Voir les commentaires

Publié le 11 Octobre 2020

Petite Messe solennelle (Gioacchino Rossini - 1864)
Concert du 10 octobre 2020
Palais Garnier

Soprano Liliana Faraon
Alto Blandine Folio-Peres
Ténor Vincent Morell
Baryton Bernard Arrieta

Direction musicale José Luis Basso
Chœurs de l’Opéra national de Paris

Piano Alessandro Di Stefano, Philippe Reverchon
Orgue Filipos Rizopoulos

                                                      Liliana Faraon

Par ces deux soirées dédiées à la Petite Messe solennelle de Gioacchino Rossini, la série de concerts programmée au Palais Garnier donne l’occasion aux Chœurs de l’Opéra de Paris de devenir pour un week-end l’unique cœur rayonnant de la scène à travers une œuvre qui, subtilement, allie intimité interprétative et réminiscences de l’univers opératique.

Cette œuvre tardive de Rossini fut composée au cours de l’été 1863 depuis sa résidence de Beauséjour, qui faisait partie d’un ensemble de villas fondé par Le Père Lachaise à Passy.

José Luis Basso, Blandine Folio-Peres, Philippe Reverchon (de dos), Bernard Arrieta, Vincent Morell

José Luis Basso, Blandine Folio-Peres, Philippe Reverchon (de dos), Bernard Arrieta, Vincent Morell

Dédiée au Régent de la Banque de France, le Comte Alexis Pillet-Will, la dernière œuvre d’importance de Rossini fut créée le 14 mars 1864 dans la chapelle privée de la Comtesse Pillet-Will, mais ne connut sa première publique que trois mois après la mort du compositeur, le 24 février 1869, dans une salle bien connue de l’Opéra, la salle Ventadour, où était installé le Théâtre des Italiens. Et c’est dans cette même salle que le Stabat Mater de Rossini connut auparavant sa première en 1842.

Pour la représentation de ce soir, une parfaite symétrie est dessinée sur scène avec en son centre l’orgue flanqué de part et autre de deux pianos, des solistes féminines d’une part, et des solistes masculins d’autre part, et du chœur disposé autour d’eux, les femmes inspirant un sentiment de distinction fascinant par leur allure théâtrale.

Petite Messe solennelle (Choeurs de l'Opéra national de Paris - dm José Luis Basso) Palais Garnier

Dès le Kyrie, le chœur fait entendre une montée tout en nuances de la première prière, les divers timbres se fondant avec une belle homogénéité tout en restant dans une interprétation très intérieure et recueillie, soignant et filant avec une extrême finesse les fins de pages.

On retrouve cette même homogénéité chez les deux solistes masculins, Bernard Arrieta et Vincent Morell, et tout deux délivrent un chant naturel avec un sens du legato agréable qui contient aussi une part de tension bien affirmée. Et ce moelleux particulièrement prononcé pour le ténor résiste même au redoutable ‘Domine Deus’, où des petites clartés charmantes émergent de ce fondu onctueux inaltérable.

Au premier plan, Bernard Arrieta et Vincent Morell

Au premier plan, Bernard Arrieta et Vincent Morell

Les deux solistes féminines, Liliana Faraon et Blandine Folio-Peres, forment un couple qui évoque beaucoup plus l’univers lyrique avec ce qu’il porte en contrastes et d’oppositions de caractères.

Leurs voix se marient bien dans le ‘Qui Tollis’, où il est impossible de ne pas penser au duo de Lisa et Pauline du premier acte de La Dame de Pique de Tchaïkovski, et la suite révèle l’éclat mature et l’irrésistible tendresse de la soprano roumaine, alors que sa partenaire fait entendre des noirceurs inquiétantes d’une complexité accrocheuse.

On remarque d’ailleurs au cours de la représentation des gradations vocales qui ressortent parmi le chœur depuis les touches les plus éthérées en arrière plan aux timbres les plus corsés en avant scène qui font vivre l’ensemble et changer les points d’attention de l’auditeur.

 Liliana Faraon, Blandine Folio-Peres et Philippe Reverchon (de dos)

Liliana Faraon, Blandine Folio-Peres et Philippe Reverchon (de dos)

Et José Luis Basso, minutieusement attentif à cet équilibre fragile entre les subtilités piquées et les cadences des deux pianos qui impriment une intention confiante au déroulé de la musique, et la cohérence de l’ensemble vocal, préserve l’atmosphère humble d’une œuvre chambriste par nature.

Voir les commentaires

Publié le 4 Octobre 2020

Suite pour orchestre n°2 et concertos brandebourgeois (Johann Sebastian Bach - 1721)

Concert du 03 octobre 2020
Palais Garnier

Johann Sebastian Bach
Suite pour orchestre n°2
Concertos brandebourgeois n°3
Concertos brandebourgeois n°6
Concertos brandebourgeois n°5

Direction musicale Philippe Jordan
Orchestre de l’Opéra National de Paris

                                      Philippe Jordan

Second concert dédié aux ouvrages composés par Johann Sebastian Bach lorsqu’il eut rallié la cour du Prince Leopold d’Anhalt-Cöthen, nous retrouvons à nouveau les musiciens de l’Orchestre de l’Opéra de Paris et Philippe Jordan, tous réunis pour faire chanter la musique du célèbre compositeur baroque.

Philippe Jordan

Philippe Jordan

Depuis la reprise des représentations musicales au Palais Garnier, les musiciens se sont en effet voués dans un premier temps au répertoire du XVIIIe siècle, dont la technicité et la variété d’écritures leur permettent de préparer en douceur la reprise des spectacles lyriques prévus en fin d’année.

En comparaison avec le premier concert Bach joué une semaine plus tôt, les œuvres réunies ce soir donnent plus d’importance à la diversité des couleurs et des textures des cordes, ainsi qu’à la diversité de composition des ensembles orchestraux.

Par ailleurs, on n’entend plus les cuivres, mais le clavecin atteint un sommet virtuose dans le concerto brandebourgeois n°5.

Contrebasses

Contrebasses

Avec un sourire rayonnant et complice, Philippe Jordan entraîne d’abord l’orchestre dans les rythmes dansants et les effets de nuances d’une très grande finesse de la Suite n°2, dont l’interprétation bénéficie de la relation harmonieuse manifeste entre le directeur musical et les artistes de l’orchestre.

Une instrumentiste est magnifiquement mise en valeur, Claude Lefebvre, qui joue de la flûte traversière en dépeignant une joie douce et mélancolique teintée de charmants effets d’effleurements, et, inévitablement, la badinerie finale crée un subtil émois chez l’auditeur qui inconsciemment semble l’avoir toujours connu.

Les musiciens à la fin du concerto n°6, dont Laurent Verney et Jean-Charles Monciero (Altos) à gauche

Les musiciens à la fin du concerto n°6, dont Laurent Verney et Jean-Charles Monciero (Altos) à gauche

Le concerto brandebourgeois n°3 est ensuite un formidable ensemble de cordes vivaces enivrant qui fait entendre très distinctement les variations de matière et de brillance entre chaque groupes d’instruments, avec ce même sentiment de souplesse et de chaleur qui embrasse la totalité du concert de ce soir.

Puis, le concerto n°6 est celui qui convoque le moins d’archets et semble revenir au dénuement le plus simple, comme une quintette, en faisant la part belle au jeu de deux altos, interprétés par Laurent Verney et Jean-Charles Monciero.

Les sonorités à la fois âpres et lumineuse émanent d’une technique passionnante à suivre, qui parfois recherche des noirceurs névrotiques absolument saisissantes de complexité.

Philippe Jordan saluant les musiciens à la fin du concerto n°5, dont Claude Lefebvre (flûte) et Jacopo Raffele (Clavecin)

Philippe Jordan saluant les musiciens à la fin du concerto n°5, dont Claude Lefebvre (flûte) et Jacopo Raffele (Clavecin)

Enfin, le concerto n°5 permet de retrouver le souffle feutré de Claude Lefebvre marié au son dansant d’un violon, mais, surtout, ce concerto est celui qui fait passer au premier plan un instrument jusque là resté discret,le clavecin.

C’est ici toute la virtuosité de Jacopo Raffele qui est mise à l’épreuve, et il y a un moment absolument magique lorsque Philippe Jordan fait petit à petit se rejoindre l’agilité piquée de la flûtiste et l’agilité sourde du claveciniste en atténuant progressivement le son comme si l’on se dirigeait vers une fin qui, soudainement, reprend son envol pour se concentrer par la suite sur le dynamisme aérien et nonchalant du claveciniste.

Philippe Jordan

Philippe Jordan

Un très beau concert, riche en couleurs, d’une très grande profondeur interprétative, et dont le plaisir lisible des musiciens et du directeur musical contribue également au plaisir des spectateurs.

Voir les commentaires

Publié le 27 Septembre 2020

Suite pour orchestre n°3 et concertos brandebourgeois (Johann Sebastian Bach - 1721)

Concert du 26 septembre 2020
Palais Garnier

Johann Sebastian Bach
Suite pour orchestre n°3
Concerto brandebourgeois n°1
Concerto brandebourgeois n°4
Concerto brandebourgeois n°2

Direction musicale Philippe Jordan
Orchestre de l’Opéra National de Paris

 

                  Philippe Jordan et Olivier Rousset

Après Vienne Mozart composa ses trois dernières symphonies, les musiciens de l’Orchestre de l’Opéra de Paris emmènent le public du Palais Garnier à la cour du Prince Leopold d’Anhalt-Cöthen, quelque part entre Leipzig et Magdebourg.

Johann Sebastian Bach a rejoint cette principauté depuis 1717, là où son génie est mieux reconnu qu’à Weimar. Profondément croyant, le musicien dédie la richesse d’instrumentation de ses compositions à Dieu, mais également aux nobles qui apprécient son travail.

Rodrigo Calveyra et Nicolas Rosenfeld (Flûtes à bec) et Olivier Rousset (Hautbois)

Rodrigo Calveyra et Nicolas Rosenfeld (Flûtes à bec) et Olivier Rousset (Hautbois)

Et c’est auprès de cette cour qu’il compose entre 1717 et 1723 la Suite n°3 en Ré majeur, une sarabande en cinq mouvements, dont la forme rythmée et l’impression de joie cadrée avec sérieux correspondent si bien à l’allure majestueuse de Philippe Jordan qui impulse à son orchestre vigueur et liant du phrasé musical.

L’air si célèbre du second mouvement devient le moment où le sentiment d’intimité réveuse se délie au son sinueux et doré des étirements des violons, dans une ambiance feutrée où respirations de l’auditeur et des musiciens se rejoignent, avant que les accords royaux des trompettes ne résonnent à nouveaux.

L'orchestre de l'Opéra national de Paris

L'orchestre de l'Opéra national de Paris

En 1718, lorsque Bach accompagna pour la première fois le Prince Leopold aux eaux de Carlsbad, cité thermale située à la pointe est de la Tchéquie, il est probable qu’il y rencontra le Margrave de Brandebourg auquel il dédiera, trois ans plus tard, ses six Concertos brandebourgeois.

Trois de ces concertos sont interprétés ce soir, les n°1, 4 et 2, et, après les trompettes de la suite n°3, ce sont de nouveaux instruments solistes qui sont mis en avant, deux cors, deux flûtes à bec, deux hautbois et un premier violon.

Philippe Jordan saluant les solistes (Rodrigo Calveyra, Olivier Rousset, Frédéric Laroque, Jacopo Raffaele, Nicolas Rosenfeld) et l'orchestre

Philippe Jordan saluant les solistes (Rodrigo Calveyra, Olivier Rousset, Frédéric Laroque, Jacopo Raffaele, Nicolas Rosenfeld) et l'orchestre

Le premier violon alterne entre la finesse de traits éthérés et le rugueux d’accords boisés, les deux flûtes – qui sont jouées par deux musiciens de l’Ensemble Cappella Mediterranea sous le regard de Leonardo Garcia Alarcon présent dans la salle – sont splendides d’agilité et de moelleux sonore, charme que complète l’entrain du hautbois d’Olivier Rousset.

Philippe Jordan et Rodrigo Calveyra

Philippe Jordan et Rodrigo Calveyra

En soutien de ce très bon équilibre entre solistes, le clavecin se fait beaucoup plus discret et s’estompe dans le fondu crépusculaire et chaleureux de l’orchestre, d’où émergent des effets dansants et des pulsions entêtantes dans une ambiance recueillie, à la fois fort sage et pourtant d'une joie profonde.

Seconde partie de ce concert le 03 octobre 2020 : Concert Bach : Suite n°2 pour orchestre et concertos brandebourgeois (Philippe Jordan – Orchestre de l’Opéra de Paris) Palais Garnier

Voir les commentaires

Publié le 20 Septembre 2020

Les symphonies n°39 à 41 (Wolfgang Amadé Mozart - 1788)
Répétition et concert du 19 septembre 2020
Palais Garnier

Wolfgang Amadé Mozart
Symphonie n°39, K543
Symphonie n°40, K550
Symphonie n°41, K551

Direction musicale Philippe Jordan
Orchestre de l’Opéra national de Paris

                                                 Philippe Jordan

On se souvient du Concert solidaire qui fut donné le 13 juillet 2020 au Palais Garnier et qui pour nous tous marquait notre retour dans une salle de spectacle après plus de quatre mois de fermeture générale. Au sentiment d’irréalité et d’incrédulité se mélangeait l’émotion de retrouver une salle et un ensemble artistique qui sortait lui aussi d’une phase léthargique inédite.

Philippe Jordan et l'orchestre de l'Opéra national de Paris

Philippe Jordan et l'orchestre de l'Opéra national de Paris

En cette rentrée de septembre, c’est donc avec un plaisir bien plus grand et une joie confiante retrouvée que le premier concert de l’orchestre de l’Opéra National de Paris peut être joué devant un large public.

Le matin même, alors qu’en levant les yeux sur la façade du Palais on pouvait reconnaître en son centre le buste de Mozart surplombant la loggia qui abrite le balcon du Grand Foyer, l’orchestre répétait une dernière fois le programme complet et devait se confronter aux difficultés de réglage des lumières limitées par l’espace de scène à l’avant du parterre.

Mise en place des éclairages lors de la répétition générale

Mise en place des éclairages lors de la répétition générale

Le programme choisi s’inscrit dans la continuité du Concert solidaire puisqu’à la symphonie n°41 déjà jouée en juillet viennent s’ajouter les deux symphonies n° 39 et 40 qui font partie d’un ultime triptyque composé par Mozart au cours de l’été 1788, peu avant qu’il ne réarrange le Messie de Haendel dont la version est jouée au Théâtre des Champs-Élysées au même moment que le concert du Palais Garnier.

On peut sans peine imaginer ce que représentent ces trois symphonies viennoises pour Philippe Jordan, lui qui rejoindra l’opéra de Vienne en début d’année prochaine

L'accord des instruments

L'accord des instruments

D’emblée, son approche de la symphonie n°39 respire la délicatesse du trait et inspire une volonté olympienne d’avancer, avec cet art qu’il a de laisser les sons chantants et déliés des vents s’épanouir généreusement à travers le tissus de cordes. Le chef d’orchestre a manifestement à cœur de travailler à la fois la vigueur et la finesse dynamique des touches musicales. La sonorité d’ensemble est naturellement chambriste – une quarantaine de musiciens sont réunis  sur le plateau - et est favorisée en ampleur par le dispositif scénique.

Cette tonalité sera commune aux deux autres symphonies, mais dans la seconde vient s’ajouter un sens de la sévérité qui vient même rythmer le bien innocent menuet. Il y règne comme un sentiment de mise en garde qui ne veut pas se laisser aller aux tourbillonnements expansifs.

Philippe Jordan s'adressant au public pour manifester la joie de tout l'orchestre d'être là.

Philippe Jordan s'adressant au public pour manifester la joie de tout l'orchestre d'être là.

La dernière symphonie constitue indubitablement l’apothéose du concert, car les qualités déployées au cours des deux premières symphonies surenchérissent ici en exubérance mélodique, et l’on remarque aussi que l’andante cantabile rêveur fait la part belle à l’exposition des motifs de flûte et hautbois plutôt que de romantiser ce passage en amplifiant les pulsations des basses. Les vents et les nuances des cordes renvoient en permanence une énergie lumineuse que nous recevons comme un bien précieux.

Et dans le final, les musiciens semblent se jeter dans une ultime course pour la vie, une bataille heureuse faite pour impressionner et bien affirmer qu’ils sont de retour et prêts à en découdre.

Symbiose avec les musiciens

Symbiose avec les musiciens

Le public l’a bien compris et restitue aux artistes ce même plaisir, sous le regard bienveillant de la ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, du nouveau et élégant directeur, Alexander Neef, qui laisse son corps naturellement vibrer avec la musique, et de Christiane Taubira, une passionnée, elle aussi, des salles de théâtres et d’opéras.

Saluts de Philippe Jordan et de l'orchestre de l'Opéra national de Paris.

Saluts de Philippe Jordan et de l'orchestre de l'Opéra national de Paris.

Voir les commentaires

Publié le 13 Septembre 2020

Quatuor van Kuijk et Suzana Bartal
Concert du 11 septembre 2020
Septembre musical de l'Orne (38ème édition)
Église Saint-Martin de Longny-au-Perche

Ludwig Van Beethoven : Sonate n°14 en do dièse mineur, op.27 n°2 : Sonate au Clair de Lune
Eric Tanguy : Quintette pour piano et cordes
Johannes Brahms : Quintette pour piano et cordes en fa mineur op.34

Piano, Suzana Bartal

Quatuor van Kuijk
Violon, Nicolas Van Kuijk
Violon, Sylvain Favre-Bulle
Alto, Emmanuel François
Violoncelle, Anthony Kondo

                                                                                   L' Église Saint-Martin de Longny-au-Perche

C'est sous le charme des lambris encore peints mais altérés de l'Église Saint-Martin de Longny-au-Perche, un édifice rebâti après la guerre de cent ans et enrichi jusqu'au début du XIXe siècle, que le Septembre musical de l'Orne accueille ce soir la pianiste Suzana Bartal et le jeune Quatuor van Kuijk pour interpréter trois œuvres qui ont en commun d'émaner du sentiment amoureux de leurs compositeurs.

Le Quatuor van Kuijk

Le Quatuor van Kuijk

Suzana Bartal débute seule la soirée par la Sonate au Clair de lune de Beethoven, en adoptant dès les premières mesures un discours fluide et diligent, une dynamique qu'elle va tenir avec la plus grande constance.
Les graves sont sensiblement feutrés, et la mélodie se dessine en invitant au lâcher prise et à la poésie rêveuse. La musique parait comme portée par l'insouciance, et prend une tournure inévitablement démonstrative au cours du presto agitato final propice à l’exercice virtuose, non dénué de coquetterie brillante, sous les doigts de la pianiste.

Sylvain Favre-Bulle (Violon)

Sylvain Favre-Bulle (Violon)

Par ailleurs, les deux plans principaux, solennel d'une part et miroitant d'autre part, sont bien dissociés dans l'espace sonore de la petite église et font bel effet. Néanmoins, l'auditeur attaché aux impressions pathétiques, voir morbides, de cette musique si célèbre aura le sentiment d'un manque fondamental de rapport au destin dans l'intention qui est ici restituée.

Suzana Bartal (Piano), Sylvain Favre-Bulle (Violon) et Emmanuel François (Alto)

Suzana Bartal (Piano), Sylvain Favre-Bulle (Violon) et Emmanuel François (Alto)

Dans la seconde partie du concert, Suzana Bartal est rejointe par le Quatuor van Kuijk pour faire découvrir au public la Quintette pour piano qu'Eric Tanguy, son compagnon à la ville, a créé à l'automne dernier à la salle Cortot à Paris.

Cette pièce est une véritable entrée en matière pour le quatuor. L'écriture est en effet mordante, éprouve la vigueur des musiciens, et possède une empreinte viscérale qui laisse peu de moments contemplatifs à l'auditeur.  Mais l'harmonie entre les instrumentistes reste prédominante, et le quatuor occupe tout le premier plan, le piano jouant un rôle de soutien au front musical.

Emmanuel François (Alto)

Emmanuel François (Alto)

La dernière partie, la plus conséquente, est dédiée à la relation entre Johannes Brahms et Clara Schumann, et célèbre l'alliance entre l'estime artistique et l'amitié amoureuse, c'est à dire tout ce qui porte au plus haut l'inspiration romantique dans ce qu'elle contient de plus fort et d'exaltant.

Tout au long de la pièce qui se développe sur près de quarante minutes, le jeu d'alternance entre le piano et le quatuor fonctionne bien et instaure un vrai dialogue. Mais dans les instants où ces deux forces musicales devraient s'allier et se renforcer, le piano semble rester dans son monde et moins soutenir la rythmique précise des quatre musiciens.

Emmanuel François (Alto) et Anthony Kondo (Violoncelle)

Emmanuel François (Alto) et Anthony Kondo (Violoncelle)

C'est alors dans cette œuvre majeure que le nouveau violoncelliste du quatuor, Anthony Kondo, artiste qui fut l’un des créateurs du Quatuor Hermès en 2009, et qui a rallié les van Kuijk depuis peu, se fait fort de conforter l’impulsivité de l’ensemble par un allant irrésistible. L’osmose entre les deux violonistes, Nicolas Van Kuijk et Sylvain Favre-Bulle, se pare d’une riche texture prenante et incisive qui arbore des traits gracieux quand l’énergie laisse place à l’apaisement, et l’altiste, Emmanuel François, fond idéalement sa douceur ombrée au jeu de ses partenaires – que de sentiments nostalgiques dans l’Andante! -, ce qui fait que regarder ces musiciens devient aussi important que de les écouter pour percevoir toutes les nuances de l’interprétation.

Nicolas Van Kuijk et Sylvain Favre-Bulle (Violons)

Nicolas Van Kuijk et Sylvain Favre-Bulle (Violons)

Voir les commentaires

Publié le 14 Juillet 2020

Fanfare de cuivres, Œuvres Chorales, Wolfgang Amadeus Mozart
Concert du 13 juillet 2020
Palais Garnier

Fanfare de cuivres

Paul Dukas Fanfare pour précéder « La Péri » (1912)
Richard Strauss Feierlicher Einzug, TrV 224 (1909)

Œuvres chorales

Gabriel Fauré Madrigal, op. 35 (1883)
Camille Saint-Saëns Calme des nuits, op.68 n° 1 (1882)

Wolfgang Amadeus Mozart Les Noces de Figaro (1786) Ouverture, Hai gia vinta la causa (air du Comte Almaviva), Crudel ! Perche finora (duo Susanna / le Comte Almaviva), Deh non vieni tardar (air de Susanna)
Julie Fuchs, Stéphane Degout

Symphonie n°41, Jupiter en ut majeur (K 551) (1788)

Direction Musicale Philippe Jordan
Piano Corinne Durous
Chef des chœurs José Luis Basso
Orchestre et chœurs de l’Opéra national de Paris

Quatre mois après un arrêt brusque de toute représentation publique, et quatre jours après l’Orchestre de Paris, les musiciens de l’Opéra national de Paris connaissent à leur tour la joie émue de retrouver leur directeur musical, Philippe Jordan, sur une scène qu’ils apprécient tant devant un premier public composé d’abonnés, mécènes et amis. Ce même concert sera rejoué le lendemain, cette fois pour un public composé de personnels soignants et de jeunes issus de quartiers défavorisés.

Concert Solidaire (Orchestre et chœurs de l’Opéra de Paris - Fuchs - Degout – dm Jordan) Palais Garnier

Un bref discours de Stéphane Lissner et un mot attentionné à Roselyne Bachelot et Jack Lang, deux fortes personnalités de la Culture en France, nous donne rendez-vous au mois de septembre prochain pour retrouver l’Opéra de Paris dans sa pleine mission de service public, et les premiers musiciens apparaissent ensuite sur le plateau derrière lequel un rideau de Garnier brossé en trompe-l’œil flamboie.

Stéphane Lissner

Stéphane Lissner

Le choix des pièces de ce soir est régi par la nécessité de valoriser les diverses composantes de l’orchestre et de faire entendre leur pleine mesure après plusieurs mois d’arrêt qui risqueraient de fragiliser leur talent artistique.

La Fanfare pour précéder « La Péri » de Paul Dukas permet ainsi d’entendre comment le groupe de cuivres manie les changements de contrastes, la fine agilité et la fusion du son chaud dans un retour à une plénitude sereine.

Philippe Jordan et les musiciens de l'Orchestre de l'Opéra national de Paris

Philippe Jordan et les musiciens de l'Orchestre de l'Opéra national de Paris

L’art du cérémoniel se prolonge ensuite avec l’Entrée solennelle des Chevaliers de l’Ordre de Saint-Jean de Richard Strauss qui permet aux timbales de se joindre à ces réminiscences qui évoquent les appels lointains du Vaisseau Fantôme ou de l’Or du Rhin.

Après ces deux premières pièces, Philippe Jordan laisse la scène à José Luis Basso et au chœur qui, nourris applaudissements, vont interpréter deux œuvres intimes et méditatives.

José Luis Basso et le Choeur de l'Opéra national de Paris

José Luis Basso et le Choeur de l'Opéra national de Paris

Le Madrigal de Gabriel Fauré est comme un subtil jeu de correspondance entre voix de femmes et voix d’hommes qui s’entremêlent sur les contradictions de sentiments amoureux fluctuants, au son lancinant du piano, alors que le poème Calme des nuits de Camille Saint-Saëns pousse le chœur dans ses frémissements les plus sensibles.

Le temps de l’opéra s'installe alors avec le retour de l’orchestre pour faire résonner au Palais Garnier des extraits d’un opéra qui n’y a plus été joué depuis avril 2006, Les Noces de Figaro.

L'Orchestre de l'Opéra national de Paris

L'Orchestre de l'Opéra national de Paris

L’art symphonique de Philippe Jordan et son goût pour les mouvements nuancés tout en douceur met en valeur les souffles de vie impertinents des vents à travers l’ouverture la plus emblématique de l’Opéra de Paris depuis l’ère Liebermann, et c’est un Stéphane Degout envahi de la fureur du Comte Almaviva avec mordant et charme suave qui se mêle magnifiquement à l’énergie pimpante des musiciens.

Julie Fuchs s’amuse beaucoup à dominer la situation en opposant au Comte une Comtesse finement lumineuse, d’une idéale tendresse mozartienne, ce qui crée un piquant jeu humoristique entre eux deux.

Julie Fuchs, Philippe Jordan et Stéphane Degout

Julie Fuchs, Philippe Jordan et Stéphane Degout

Puis vient le grand moment symphonique avec la Symphonie N°41, Jupiter, qui, elle aussi, n’avait plus était jouée à Garnier depuis septembre 2006 sous la baguette de Sylvain Cambreling.

Une fougue bienveillante et heureuse, le soin des détails souples et virevoltants, des traits clairs et fluides, cette réunion des instrumentistes dans une gaîté communicative et un final en forme de marche décidée redonnent de l’espoir à tous, et le plaisir de réunir ceux dont la joie intérieure est intimement liée à la vie en ce théâtre.

Julie Fuchs, Philippe Jordan et Stéphane Degout

Julie Fuchs, Philippe Jordan et Stéphane Degout

Voir les commentaires

Publié le 13 Juillet 2020

Le Tombeau de Couperin (Maurice Ravel - 1919) et La Symphonie n°7 (Ludwig van Beethoven - 1813)
Concert du 09 juillet 2020
Philharmonie de Paris

 

Maurice Ravel Le Tombeau de Couperin
Ludwig van Beethoven Symphonie n° 7

Direction musicale Klaus Mäkelä
Orchestre de Paris

 

                                                     Klaus Mäkelä

Tant pour les musiciens que les auditeurs, le long accueil chaleureux et tonitruant, chargé de silences qui signifiaient le manque, la reconnaissance, l’amour et la joie, restera un moment inoubliable.

Laurent Bayle disait que, ce soir, les mesures sanitaires n’avaient permis de réunir qu’environ 1200 spectateurs, c’est-à-dire la moitié de la capacité de la Philharmonie. Néanmoins, le public semblait avoir totalement investi la salle de sa présence physique, tout en faisant résonner ses applaudissements comme s’il y avait le double d'invités.

Musiciens de l'Orchestre de Paris

Musiciens de l'Orchestre de Paris

Mais cette première soirée publique sera aussi celle d’une découverte, l’osmose fusionnelle qui transparaît d’emblée entre l’Orchestre de Paris et son futur directeur musical, Klaus Mäkelä.

Certes, tout se mélange en cette représentation exceptionnelle, l’excitation des retrouvailles, le mouvement entropique qui nait d’un sentiment de libération, et la relation galvanisante entre les musiciens et leur nouveau chef aboutit ainsi à une interprétation ample - comme si le jeune leader était le souffle d’un vent impétueux qui anime les mouvements de houles qui traversent majestueusement le corps de l’orchestre de part en part - et finement détaillée du Tombeau de Couperin, où émerveillent la poésie chantante des vents et les frémissements aériens des cordes suraigües.

Klaus Mäkelä et les musiciens de l'Orchestre de Paris

Klaus Mäkelä et les musiciens de l'Orchestre de Paris

Cette cohésion renforcée par une tonicité agile – on admire l'excellente combinaison des timbales et des bois sombres - se retrouve dans la 7e symphonie de Beethoven, empreinte de théâtralité et de gestuelle frénétique, qui est une véritable invitation à la danse, ce qui se retrouve parfois dans les postures du chef qui engage tout son corps pour contrôler les respirations expansives et contractiles de l’orchestre.

La force d’attraction de cette interprétation vibrante est une promesse pour la rentrée prochaine, et l'espoir d'un retour à  une quasi-normalité dans la façon de vivre ces grands moments de partage qui se prolongent bien après les concerts.

Voir les commentaires