Publié le 15 Juillet 2023
Le Concert de Paris au Champ-de-Mars
Concert du 14 juillet 2023
Champ-de-Mars - Paris
Hector Berlioz – La Damnation de Faust : « Marche Hongroise »
Giacomo Puccini – Turandot : « Nessun dorma » [Francesco Demuro]
Edith Piaf : « La Vie en rose » [Pretty Yende]
Georges Bizet – Carmen : « Habanera » [Stéphanie d’Oustrac]
Michel Legrand : « Les Moulins de Mon coeur» [Maîtrise de Radio France]
Jules Massenet – Thaïs : « Voici donc la terrible cité » [Ludovic Tézier]
Edouard Lalo : « La Symphonie espagnole » [Vilde Frang]
Francesco Cilea – Adriana Lecouvreur: « Io son l’umile ancella » [Ermonela Jaho]
Igor Stravinsky – Petrouchka : « Danse russe » [Orchestre National de France]
George Gerschwin – Porgy & Bess : « Summertime » [Marie-Laure Garnier]
Georg Friedrich Haendel – Le Messie – « Hallelujah » [Chœur de Radio France]
Grazyna Bacewicz : « Ouverture » [Orchestre National de France]
Sergueï Rachmaninov – Rhapsodie sur un thème de Paganini : « Variation XVIII : Andante cantabile » [Daniil Trifonov]
Wolfgang Amadeus Mozart : « Ave Verum Corpus » [Maîtrise de Radio France]
Jules Massenet – Thaïs : « duo final » [Ludovic Tézier et Ermonela Jaho]
Camille Saint-Saëns – Samson et Dalila : « Bacchanale » [Orchestre National de France]
Giuseppe Verdi – Don Carlo : « Dio che nell'alma infondere » [Francesco Demuro et Ludovic Tézier]
Jacques Offenbach – Les Contes d’Hoffmann : « Barcarolle » [Stéphanie d’Oustrac et Ermonela Jaho]
Ludwig von Beethoven – Symphonie n°9 : « Final» [Orchestre et Chœur de Radio France]
Hector Berlioz / Claude Joseph Rouget de Lisle – La Marseillaise (couplets n°1 et 2)
Avec Ermonela Jaho, soprano, Marie-Laure Garnier, soprano, Stéphanie d’Oustrac, mezzo-soprano, Francesco Demuro, ténor, Pretty Yende, soprano, Ludovic Tézier, baryton, Vilde Frang, violon, Daniil Trifonov, piano
Direction musicale Cristian Măcelaru
Chœur et Maîtrise de Radio France
Orchestre National de France
Initié en 2013 par Bertrand Delanoë, pour sa dernière année en tant que maire de la ville de Paris, le Concert de Paris célèbre en 2023 ses dix ans, et propose un programme de deux heures au cours duquel seront interprétées une vingtaine de pièces lyriques, instrumentales et chorales par six chanteurs lyriques, deux solistes, le Chœur et la Maîtrise de Radio France, tous portés par l’Orchestre national de France sous la direction de Cristian Măcelaru.
Et comme chaque année, le concert s’ouvre par la ‘Marche hongroise’, pièce entraînante extraite de l’ouverture de ‘La Damnation de Faust’ d’Hector Berlioz, un opéra créé le 06 décembre 1846 à la seconde salle Favart de l’Opéra Comique de Paris, et qui résonne en ce 14 juillet parisien avec le défilé militaire, ainsi que par son thème popularisé en 1966 par le film de Gerard Oury, ‘La Grande Vadrouille’.
La grande scène de répétition au Palais Garnier où Louis de Funès incarnait le chef d’orchestre (imaginaire) Stanislas Lefort, est, en effet, restée inoubliable dans toutes les mémoires.
Ce soir, et en avant concert, le jeune pianiste sud-coréen Hyuk Lee, lauréat du concours international Long-Thibault 2022, se produit seul sur la scène du concert pendant 20 minutes.
Puis, Stéphane Bern, accompagné d’Ermonela Jaho et de Marie-Laure Garnier, lauréate du concours Voix des Outre-Mer 2019, présente le concert rediffusé en direct sur France Télévisions.
Des centaines de milliers de personnes venues seules, en famille ou entre amis, sont installées depuis des heures sur les pelouses du Champ-de-Mars, ce qui rend ce rendez-vous très intéressant afin de vivre la manière dont tout le monde va partager ces moments de musique classique joués en direct.
Il faut toutefois savoir que, contrairement aux téléspectateurs, le public présent n’entend pas la présentation des différents airs.
Et c’est à Francesco Demuro, venu à Paris pour chanter le rôle de Roméo dans ‘Roméo et Juliette’ joué en ce moment à l’Opéra Bastille jusqu’au 15 juillet, de faire l’ouverture de la retransmission.
Il apparaît en cette fin de saison comme un véritable sauveur, car pour ceux qui s’en rappellent, il était allé remplacer Jonas Kaufmann à Londres le 01 juillet dernier dans ‘Werther’, alors qu’il venait, la veille, de faire son entrée sur la scène Bastille.
Et à nouveau ce soir, il remplace au dernier moment le ténor allemand qui a du annuler pour raison de santé.
Seul air de Giacomo Puccini que nous entendrons au cours du spectacle, ‘Nessun dorma’ est interprété avec style et douceur et aussi beaucoup de clarté dans la voix, ce qui en fait un prince très humble et lumineux.
Pretty Yende, qui est la Juliette du ténor italien à l’opéra Bastille, et elle aussi venue au dernier moment pour faire revivre l’immortelle ‘Vie en rose’ d’Edith Piaf avec beaucoup de charme. Elle se permet même de rajouter une splendide coda lyrique à la fin de la chanson.
En Carmen, Stéphanie d’Oustrac se fait énormément plaisir en dépeignant un relief coquin, dangereux et sophistiqué pour la plus célèbre héroïne d’opéra du monde, et Ludovic Tézier, accompagné par un Orchestre national de France particulièrement luxuriant à ce moment précis, déploie avec intensité la stature d’Athanaël avec un air qui raconte comment sa ville d’origine, Alexandrie, l’a perverti.
Puis, l’irrésistible glamour d’Ermonela Jaho, qu’elle ornemente par des mouvements du corps souples et fortement courbés, tout en faisant entendre un timbre d’un velours noir très émouvant, ennoblit Adriana Lecouvreur en en faisant un portrait de diva lyrique de très grande classe.
Et avec ‘Summertime’, et surtout la Marseillaise qu’elle interprétera avec une voix très chaude et profonde en fin de concert, Marie-Laure Garnier impose une ampleur et une attitude plus solennelle, tout en faisant partager à tous son amour pour l’art du gospel.
Ermonela Jaho, Stéphanie d’Oustrac, Ludovic Tézier et Francesco Demuro reviendront ensuite dans des duos de Massenet, Offenbach et Verdi, ce qui nous permettra de profiter des jeux interactifs entre les artistes où se mêlent charme, soutien et confrontation.
Parmi les passages purement orchestraux, une rareté de la compositrice polonaise Grazyna Bacewicz, ‘Ouverture’, est jouée avec une verve trépidante comme s’il s’agissait de raconter une action scénique qui défile sans qu’aucune respiration ne soit possible.
Mais c’est sur la ‘Bacchanale’ de ‘Samson et Dalila’, menée avec un allant enthousiasmant et une très belle coloration, que l’on verra des spectateurs se laisser entraîner par les cadences orientalisantes.
Très forte impression également pour la ‘Rhapsodie sur un thème de Paganini’ de Rachmaninov, éblouissante par l’esprit fusionnel qui lie Daniil Trifonov à Cristian Măcelaru et l’Orchestre national de France.
Quant à Vilde Frang, c’est toute l’élégance d’un geste déterminé qu’elle exprime dans la ‘Symphonie espagnole’ d’Edouard Lalo.
Chœur de Radio France à son meilleur dans la 'Symphonie n°9' de Beethoven, Maîtrise de Radio France douce et apaisante, la rencontre avec un public qui, majoritairement, est peu habitué au répertoire classique, laisse aussi entrevoir qu’il y a forcément une ou plusieurs pièces musicales qui toucheront chacun des auditeurs, tant les styles proposés sont différents.
Hyuk Lee, Daniil Trifonov, Vilde Frang, Pretty Yende, Marie-Laure Garnier, Francesco Demuro, Ermonela Jaho, Cristian Măcelaru, Stéphanie d'Oustrac et Ludovic Tézier
Cette soirée est aussi l'occasion d’une prouesse technique qui se traduit par une qualité de restitution musicale très appréciable en extérieur, et aussi par une grande complexité des jeux d’éclairages, surtout en fin de concert, quand la nuit est tombée. Au final, ce sont 3 260 000 téléspectateurs qui se sont retrouvés sur France Télévisions.
Le grand feux d’artifice final fait ainsi l’effet d’une bouteille de champagne que l’on ouvre pour célébrer haut en couleur ce grand hommage vivant offert à la musique classique.
Il est possible de revoir le Concert de Paris 2023 (jusqu'au 13 avril 2024) sous le lien suivant : le Concert de Paris 2023.