Publié le 15 Août 2024

Tristan und Isolde (Richard Wagner – Munich, le 10 juin 1865)
Représentation du 04 août 2024
Bayreuther Festspiele

Isolde Camilla Nylund
Tristan Andreas Schager
König Marke Günther Groissböck
Brangäne Christa Mayer
Kurwenal Olafur Sigurdarson
Melot Birger Radde
Ein Hirt Daniel Jenz
Ein Steuermann Lawson Anderson
Junger Seemann Matthew Newlin

Direction musicale Semyon Bychkov
Mise en scène Thorleifur Örn Arnarsson (2024)
Orchester der Bayreuther festspiele
Nouvelle production

                                         Olafur Sigurdarson (Kurwenal)

 

Metteur en scène islandais connu de plusieurs scènes du sud et du centre de l’Allemagne, Wiesbaden, Hanovre, Kassel, Karlsruhe, Augsbourg, où il a déjà réalisé des relectures de trois ouvrages de Richard Wagner, ‘Lohengrin’, ‘Siegfried’ et ‘Parsifal’, Thorleifur Örn Arnarsson suscite beaucoup d’intérêt à l’occasion de la nouvelle production de ‘Tristan und Isolde’ à Bayreuth.

Pourtant, à l’issue du spectacle, le scepticisme est de rigueur.

Camilla Nylund (Isolde) et Andreas Schager (Tristan)

Camilla Nylund (Isolde) et Andreas Schager (Tristan)

Certes, il conçoit un univers visuel où les jeux de lumières latéraux et d’arrière scène isolent le centre de la scène d’un horizon noir sans contour, ce qui crée une impression d’intériorité et d’enfermement oppressante.

Des cordages descendent des cintres afin d’évoquer, au premier acte, la forme stylisée d’une voile dominant un pont de navire sans limites, noyé dans les brumes, puis, au second acte, Tristan et Isolde se retrouvent dans la cale du navire qui a accosté en Cornouailles – son arrivée issue de l’ombre, en fin du premier acte, est impressionnante –, lieu qui se trouve chargé d’un tas d’antiquités, meubles, animaux empaillés, globes terrestres, miroirs, statues, peintures, qui renvoient à l’idée d’un passé révolu, mais qui, paradoxalement, engendrent aussi un sentiment de vide, car toute vie en est absente.

Et au dernier acte, le navire a totalement implosé, ses bribes se sont étalées sur la scène, et Tristan se meurt sur un petit monticule d’objets, une île déserte qui est aussi son univers désolé et désillusionné.

Camilla Nylund (Isolde) et Christa Mayer (Brangäne)

Camilla Nylund (Isolde) et Christa Mayer (Brangäne)

On en resterait là, et nous aurions une scénographie très esthétique qui cadre bien avec une vision d’un amour qui, par essence, aspire à la mort. Mais le fait de présenter au premier acte Isolde en princesse écrivant à l’encre noire, sur son immense robe blanche rayonnante au sol, son histoire passée en Irlande avec Tristan, ajoute une touche introspective et bovaryste vaine, qui ne laisse plus qu’aux chanteurs le soin d’exprimer les sentiments du cœur.

On comprend donc surtout que c’est cette quête philosophique qui tue finalement les deux amants, et on peut même se demander si Tristan et Isolde ne font pas que ressasser tout au long des trois actes un amour qui a connu son apogée en Irlande, et qui, dorénavant, les emprisonne dans un monde qui les déconnecte de la vie.

Thorleifur Örn Arnarsson ne construit cependant aucune dramaturgie forte et ne développe aucune expressivité marquée qui permette d’animer les relations, et lorsqu’il s’y risque, il modifie certains gestes attendus, tel celui de Tristan qui rejette le filtre à l’acte I, mais qui le boit au II au lieu de se battre avec Melot. A quoi bon ces modifications sans grand sens?

Andreas Schager (Tristan) et Camilla Nylund (Isolde)

Andreas Schager (Tristan) et Camilla Nylund (Isolde)

Dans la fosse d’orchestre, Semyon Bychkov est de retour après cinq ans d’absence, lui qui dirigeait ici même ‘Parsifal’ en 2018 et 2019. Sa lecture est lente et hypnotique, évanescente mais avec de l’envergure qui permette d’appuyer le drame. Étant donné que la mise en scène limite l’action et la gestuelle, cette belle ligne envoûtante s'avère très adaptée à un parti pris symbolique, et l’on peut saisir avec un peu d’attention avec quelle finesse les miroitements de vents tissent des voiles sonores irréels aussi bien que les cordes. Il est même un peu dommage d’entendre la tension monter en puissance au moment du retour d’Isolde dans la scène finale, alors que rien ne précipite véritablement autour de Tristan.

Andreas Schager (Tristan) et Camilla Nylund (Isolde)

Andreas Schager (Tristan) et Camilla Nylund (Isolde)

Tristan, Andreas Schager l’a dans la peau depuis 12 ans lorsqu’il interprétait le rôle pour la première fois à l’occasion du projet ‘Wagner’ mené par le théâtre néo-baroque de Minden situé près de Hanovre. Incomparable avec cette attitude de solide gaillard au chant souriant, il compose un Tristan viril dans le médium, délicat quand il le faut, avec un éclat franc et oscillant dans les grands moments d’exclamation, et, surtout, est mu par une générosité incandescente qui peut lui faire prendre une posture très entière, comme au final du second acte lorsqu’il est confronté à Melot. Il y gagne aussi la sympathie inconditionnelle du public.

Mais ce soir là, dans le troisième acte où il a pourtant toute l’endurance requise, son volontarisme démonstratif déborde à plusieurs reprises de façon trop libre, donnant l’impression qu’il ne tient plus la bride. On apprendra trois jours plus tard qu’il souffre d’une inflammation des voies respiratoires, et sera remplacé en cours de représentation le 06 août, sans conséquence pour les représentations suivantes.

Camilla Nylund

Camilla Nylund

Camilla Nylund, elle, est une Isolde plus récente, rôle qu’elle appréhende avec une très grande maturité. Son chant Hyalin s’épanouit majestueusement en ayant la résistance d’un cristal fragile, et elle ne se départit jamais d’une grande noblesse de posture. Au côté de son partenaire, elle paraît moins puissante, mais le duo d’amour sera mené avec une belle communion, ainsi que le Liebestod chanté d’un souffle respirant qui en contrôle la plénitude.

Cette représentation permet aussi de découvrir que Christa Mayer, animée par un sens mélodramatique attachant, exprime en Brangäne un lyrisme plus profilé que pour Fricka ou Waltraude.

Olafur Sigurdarson, le formidable Alberich de ce même Ring, est un solide Kurwenal mais dont on ne sent pas de véritable affect avec Tristan, et le Roi Marke de Günther Groissböck, qui mélange sombre douceur souffrante et intonations menaçantes, manque de présence écrasante, sans que l’on ne mesure bien l’impact de l’absence de dramaturgie sur cette impression.

Semyon Bychkov

Semyon Bychkov

Rôles secondaires irréprochables mais maintenus dans l’ombre, excepté le Melot très confiant de Birger Radde, il ressort tout de même de ce spectacle trop guindé l’impression qu’une reprise du jeu de tous les solistes est nécessaire de façon à renforcer leurs interactions et permettre à l’auditeur d’être pris par une théâtralité qui le convainque mieux.

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Publié le 11 Août 2024

Der Fliegende Holländer (Richard Wagner – Dresde, le 02 janvier 1843)
Représentation du 01 août 2024
Bayreuther Festspiele

Daland Georg Zeppenfeld
Senta Elisabeth Teige
Erik Eric Cutler
Mary Nadine Weismann
Der Steuermann Matthew Newlin
Der Holländer Michael Volle

Direction musicale Oksana Lyniv
Mise en scène Dmitri Tcherniakov (2021)
Orchester der Bayreuther festspiele

 

Depuis sa création en juillet 2021, la production du ‘Vaisseau Fantôme’ par Dmitri Tcherniakov s’est imposée comme une des grandes lectures scéniques de l’œuvre de jeunesse de Richard Wagner, si bien qu’elle se revoit avec le même émerveillement.

Il faut dire que, sur la forme, le travail entrepris par le metteur en scène russe pour détailler minutieusement non seulement les comportements des protagonistes principaux, mais également les moindres individualités des chœurs qui participent à la vie du village, contribue à un réalisme captivant auquel le public international de Bayreuth n’est pas toujours habitué.

Georg Zeppenfeld, Elisabeth Teige, Oksana Lyniv et Michael Volle

Georg Zeppenfeld, Elisabeth Teige, Oksana Lyniv et Michael Volle

Ce ‘Vaisseau Fantôme’ est construit comme un véritable roman policier comportant, en ouverture, une scène énigmatique racontant l’histoire d’une femme amoureuse d’un homme, Daland, qui l’aime pour un temps avant de la rejeter violemment. Et par mimétisme, tout le village, y compris la morale de l’église, l’exclut également, ne lui laissant d’autre choix que de se suicider sous les yeux de son petit garçon. 

Nourri et piégé par la colère et le ressentiment, ce garçon a grandi et est de retour dans son village d’origine pour y accomplir sa terrible vengeance. C’est cependant au spectateur de s’interroger sur les motivations de cet homme en apparence affable, sociable, qui vient se mêler à la vie villageoise, et qui rencontre avec intérêt Senta, la fille du marchand. Toutefois, Dmitri Tcherniakov laisse de subtils indices, notamment lors du dîner chez Daland où la servante Mary, présentée ici comme sa femme légitime, semble de plus en plus troublée comme si elle détectait que quelque chose cloche.

Le dénouement final est tout aussi brillamment mis en scène avec ce temps laissé au spectateur pour comprendre qui sont ces hommes qui accompagnent le Hollandais, avant que n’éclate de toute part la violence. Il faut ajouter que grâce à un savant assemblage de maisons et bâtiments mobiles, les lieux changent en permanence de configuration sans rompre la fluidité de la musique, tout en donnant une atmosphère pastel à la situation scénique.

Nadine Weissmann et le Chœur - Photo : Enrico Nawrath

Nadine Weissmann et le Chœur - Photo : Enrico Nawrath

Ce spectacle devient ainsi un miroir de la lâcheté humaine – la manière insoutenable dont Daland se débarrasse de son amante -, du conformisme social et de l’esprit grégaire – la façon dont les individualités se fondent dans le groupe pour leur propre survie -, et montre que l’individu peut faire plier une société hypocrite et la détruire, mais au prix de sa vie. Le rire final de Senta peut se comprendre par la révolte que lui inspirait aussi ce monde qu’elle subissait.

Sur le plan purement musical, l’interprétation est aussi d’un très haut niveau. D’emblée, c’est une tempête qui emporte le spectateur dans un allant mêlé de fureur qui montre que la cheffe d’orchestre ukrainienne Oksana Lyniv a musclé son discours depuis 2021, comme si elle avait intégré à sa direction la puissance ravageuse du Hollandais. Les cuivres dramatisent considérablement mais créent aussi des lignes de fuites saisissantes parcourues d’une vivacité ardente, et l’agilité reste de mise, les mouvements se faisant toujours avec une fluidité d’une très grande élégance. 

Elisabeth Teige (Senta), Georg Zeppenfeld (Daland) et Michael Volle (Le Hollandais) - Photo : Enrico Nawrath

Elisabeth Teige (Senta), Georg Zeppenfeld (Daland) et Michael Volle (Le Hollandais) - Photo : Enrico Nawrath

En Holländer, Michael Volle s’impose avec sa voix large d’une superbe éloquence et d’une longue vibrance, et son phrasé d’une grande incisivité. Sa carrure impressionnante est adoucie par un regard d’apparence affable dont il joue avec malice pour ensuite faire apparaître un visage inflexible et animal. La confrontation avec un autre grand chanteur wagnérien tel Georg Zeppenfeld est passionnante à suivre, tant la fausse connivence entre les deux hommes est jouée avec un humour caché qui se ressent fortement.

Invitée à Bayreuth depuis seulement deux ans, Elisabeth Teige construit très rapidement une présence qui devient habituelle sur la colline verte. En Senta, elle retrouve un rôle qu’elle a abordé il y a près de dix ans à l’opéra d’Oslo, et elle lui rend à la fois une impertinence et un lyrisme mélancolique qui teinte sa voix embrunie.

Elisabeth Teige (Senta) et Nadine Weismann (Mary) - Photo : Enrico Nawrath

Elisabeth Teige (Senta) et Nadine Weismann (Mary) - Photo : Enrico Nawrath

Eric Cutler, son partenaire qui incarne Erik, le fiancé conventionnel, oppose un tempérament convaincant, à la fois farouchement volontaire et souffrant, avec toutefois beaucoup plus d’instabilité dans les expressions aigus qui l’obligent à forcer. 
Mais l’élocution est facile. Il a le sens du drame dans la peau, et cela se ressent très directement.

Et dans le rôle de Mary, bien que Nadine Weismann donne beaucoup de contenance à son personnage au rôle réhaussé par la production, les déperditions en teintes vocales sont telles qu’elles affaiblissent aussi sa vigueur.

Quant à Matthew Newlin, en pilote, il se montre impliqué, avec une coloration plutôt mate.

Eric Cutler, Elisabeth teige, Michael Volle, Nadine Weismann et Georg Zeppenfeld

Eric Cutler, Elisabeth teige, Michael Volle, Nadine Weismann et Georg Zeppenfeld

Chœurs splendides, aussi bien la partie féminine, enjouée et espiègle, que la partie masculine dans la terrible confrontation finale d’une impétuosité percutante, l’intelligence dramaturgique et l'engagement total d'une équipe artistique vouée à la vision géniale de Dmitri Tcherniakov portent ainsi Bayreuth à son meilleur, pour le plaisir de tous!

 

A relire : Der Fliegende Holländer (Zeppenfeld-Grigorian-Cutler-Prudenskaya-Lundgren-Lyniv-Tcherniakov) Bayreuther Festspiele 2021

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Publié le 8 Août 2024

Der Ring des Nibelungen (Richard Wagner - 1849/1876)
Bayreuther Festspiele 2024
28 juillet - Das Rheingold
29 juillet - Die Walküre
31 juillet - Siegfried
02 août - Götterdämmerung

Direction Musicale Simone Young
Mise en scène Valentin Schwarz (2022),  Dramaturgie Konrad Kuhn
Décors Andrea Cozzi, Costumes Andy Besuch
Lumières Reinhard Traub, Video Luis August Krawen

Wotan Tomasz Konieczny            Brünnhilde Catherine Foster
Siegmund Michael Spyres                         Sieglinde Vida Miknevičiūtė
Siegfried Klaus Florian Vogt             Hagen Mika Kares
Loge John Daszak                                      Alberich Olafur Sigurdarson
Erda Okka von der Damerau            Gunther Michael Kupfer-Radecky  
Hunding Georg Zeppenfeld                           Mime Ya-Chung Huang
Fasolt Jens-Erik Aasbø                                  Fafner Tobias Kehrer
Fricka  / Waltraute (Götterdämmerung) / Schwertleite Christa Mayer
Freia / 3. Norn Christina Nilsson         Rossweisse / 1.Norn Noa Beinart
Grimgerde / Flosshilde Marie Henriette Reinhold      Woglinde Evelin Novak 
Siegrune  / 2. Norn Alexandra Ionis            Waltraute Claire Barnett-Jones
Wellgunde Natalia Skrycka               Gutrune Gabriela Scherer
Helmwige Dorothea Herbert                   Froh Mirko Roschkowski
Gerhilde Catharine Woodward        Ortlinde Brit-Tone Müllertz
Waldvogel Alexandra Steiner            Donner Nicholas Brownlee 

Créé à l’été 2022, le ‘Ring’ mis en scène par Valentin Schwarz devrait être celui qui aura connu le plus faible nombre de cycles de l’histoire du Festival de Bayreuth (mis à part celui de Richard Wagner qui ne connut que 3 cycles l’année de sa création en 1876), car avec seulement 8 cycles programmés en 3 ans, il devrait atteindre pour sa dernière saison en 2025 un total de 10 cycles, bien moins que les 12 (Peter Hall) à 16 cycles (Patrice Chéreau, Franz Castorf) des productions précédentes.

Catherine Foster, Simone Young et Klaus Florian Vogt

Catherine Foster, Simone Young et Klaus Florian Vogt

Néanmoins, le metteur en scène allemand a retravaillé depuis 2022 certains points de manière à rendre plus lisible une trame qui place au cœur du Ring l’obsession mortifère de Wotan pour s’assurer une descendance. L’Or du Rhin est donc initialement identifié comme un enfant maléfique dont s’empare Alberich, et que cherche à récupérer Wotan – il s’agira de Hagen -. Il lui échappera, mais toute la dramaturgie montre comment ce chef de clan familial va se focaliser sur la recherche d’un autre espoir.

La mort de Fafner, personnage présenté comme l’ancêtre commun à Alberich et Wotan, devient le point de départ des destins divergents de Siegfried et de Hagen, qui se retrouveront plus tard chez Gunter et Gutrune, nouveaux riches dégénérés.

Siegfried, représenté ici comme un homme conventionnel enlisé dans une vie bourgeoise avec Brünnhilde qui ne lui convient plus, se laisse prendre par ce milieu perverti lors d’une soirée costumée qui fait écho au film ‘Eyes wide shut’ de Stanley Kubrick - la scène festive et d'orgie n'était pas montrée en 2022 -, et l’échec total de Wotan, apparaissant pendu, est cette fois clairement souligné lors de la conclusion finale du ‘Crépuscule des Dieux’.

Même si le développement théâtral est conséquent, il sert un scénario librement inspiré de la Tétralogie qui n’en approfondit aucun des thèmes.

Ces retouches n'empêcheront pas Valentin Schwarz d'essuyer beaucoup de huées à la fin de ce premier cycle 2024, mais le soutien apporté par une autre partie du public montre que cette appréciation est très nuancée selon les attentes de chacun.

Andrea Cozzi (Décors) et Valentin Schwarz (Mise en scène)

Andrea Cozzi (Décors) et Valentin Schwarz (Mise en scène)

Pour cette reprise, on retrouve le Wotan de Tomasz Konieczny et l’Alberich de Olafur Sigurdarson présents dès la création. Si le premier dégage une vraie personnalité avec des moments de fureurs impressionnants, ses changements d’intonations ternissent parfois des passages plus subtils. ‘Siegfried’ est néanmoins le volet qui le montre à son meilleur, comme si le Wanderer menait un baroud d’honneur avec une très grande détermination.

Face à lui, le baryton islandais dessine à nouveau un chef des Nibelungen (ces derniers sont cependant absents de la vision de Schwarz) toujours aussi impactant, avec un métal dans la voix qui accroche et lui donne une dimension impressionnante, un véritable monstre de volonté à la hauteur de Wotan.

D’ailleurs, Nicholas Brownlee, distribué dans le rôle de Donner, montre dans ‘Rheingold’ qu’il a lui aussi la présence et l’ampleur d’un Wotan, ce que Vienne et Munich pourront apprécier très prochainement.

Parmi les rôles n’intervenant qu’épisodiquement, se font aussi remarquer John Daszak (Loge) avec sa grande clarté déclamatoire qui ravit par son aisance expressive, Ya-Chung Huang qui joue un inhabituel Mime humain et affectif avec son timbre lyrique et légèrement ombré, la Freia irradiante et dramatique de Christina Nilsson, l’Erda très homogène et imperturbable, sans noirceur prononcée, d’Okka von der Damerau, la Gutrune repentie à cœur ouvert de Gabriela Scherer, ou bien la première norne de Noa Beinart, aux graves fortement résonnants.

Georg Zeppenfeld est bien sûr impeccable en Hunding, parlant comme il chante avec un mélange d’autorité et d’humanité inimitable, Christa Mayer donne de l’ampleur à Fricka et Waltraude avec des couleurs chamarrées mais qui la mûrissent trop, et Mika Kares a une noblesse de tessiture diaphane qui tranche avec les Hagen plus anguleux et caverneux entendus dans ce rôle, ce qui le rend insaisissable mais peu inquiétant.

Klaus Florian Vogt (Siegfried) - Photo : Enrico Nawrath

Klaus Florian Vogt (Siegfried) - Photo : Enrico Nawrath

Mais ce Ring opère un véritable renouvellement grâce à quatre chanteurs d’exception; ‘Die Walküre’ est en premier lieu l’occasion de découvrir un nouveau couple Siegmund / Sieglinde sous les traits de Michael Spyres et de Vida Miknevičiūtė. Le baryténor américain, qui s’est illustré principalement dans les répertoires mozartien, rossinien et français du XIXe siècle, fait une prise de rôle wagnérienne inattendue. Il faut reconnaître qu’il ne manifeste aucune difficulté - et se montre même plutôt démonstratif -, assoit un timbre velouté assez inhabituel dans ce rôle, mais utilise aussi son habileté à changer soudainement de couleur vocale, sans altérer pour autant ses propres qualités de souplesse, ce qui rend sa personnalité un peu instable. Aucun problème de puissance dans le Festspielhaus, son interprétation chaleureuse lui vaudra un accueil tout autant chaleureux.

Malheureusement, en en faisant un paumé marginalisé, Valentin Schwarz n’a pas le bon goût de le soigner physiquement, alors que ce chanteur mérite une tout autre mise en valeur scénique.

En Sieglinde, la soprano lituanienne Vida Miknevičiūtė offre un portrait vocal qui a le même caractère déchirant que celui de Christina Nilsson en Freia, mais avec encore plus d’intensité et de complexité de couleurs. Par rapport à sa Chrysothémis de Salzburg en 2021, elle a gagné en consistance et soyeux sans rien perdre de ses facultés percutantes mêlées à une fragilité sous-jacente.

Michael Spyres (Siegmund) et Vida Miknevičiūtė (Sieglinde) - Photo : Enrico Nawrath

Michael Spyres (Siegmund) et Vida Miknevičiūtė (Sieglinde) - Photo : Enrico Nawrath

C’est dans la mise en scène de Frank Castorf que le public de Bayreuth a pu assister à l’envol de Catherine Foster dans le rôle de Brünnhilde. Depuis son second acte encore trop prudent en 2013, à son incarnation pleine et assurée en 2014, la soprano britannique a acquis une envergure qui en jette plein la vue. Superbe rayonnement vibrant excellemment projeté, aigus faciles avec style, elle manifeste une légère incertitude uniquement au final du 3e acte de ‘Siegfried’ sans en altérer la force exaltante, pour achever sur un ‘Götterdämmerung’ éclatant avec une touchante sensibilité de timbre.

Quant à Klaus Florian Vogt, lui qui fit sa prise de rôle de Siegfried au printemps 2023 à Zurich, il forme avec Catherine Foster un duo éblouissant. Comme très souvent dans les opéras wagnériens, toute la beauté, la grâce et la puissance de ce magnifique chanteur s’épanouissent dans les derniers actes de ‘Siegfried’ et ‘Götterdämmerung’, où il est le seul à pouvoir faire retentir sa voix d’un éclat d’or tout en dégageant une candeur poétique inouïe.

Tous deux vont au bout de leur rôle, et les voir donner autant avec une telle sensibilité vous emplit d'une joie chevillée au corps.

Catherine Foster (Brünnhilde) et Klaus Florian Vogt (Siegfried)

Catherine Foster (Brünnhilde) et Klaus Florian Vogt (Siegfried)

Si la réussite musicale de ce ‘Ring’ permet de pallier à la déception scénique, elle le doit beaucoup à la distribution réunie à cette occasion, mais aussi à la direction musicale de Simone Young qui est probablement la plus grande surprise de cette reprise.

Assistante de Daniel Barenboim au Festspielhaus en 1991 et 1992, à l’occasion du Ring de Harry Kupfer, la cheffe d’orchestre australienne révèle qu’elle a Bayreuth dans le sang. A travers une lecture splendide qui unifie la complexité d’écriture avec un excellent sens dramatique et de l’élan pour les chanteurs, elle porte l’Orchestre du Festival à son meilleur, faisant vivre les lignes wagnériennes avec une grande clarté, riche en couleurs et mouvements expressifs, donnant de la puissance aux cuivres avec une belle souplesse, et, surtout, faisant de la musique une peinture de caractères qui se fond idéalement à l’éloquence de chacun des solistes.

Le plus bel exemple de ce travail se trouve dans le 3e acte de ‘Götterdämmerung’ où la solennité qu’elle exprime se déroule avec un naturel saisissant sans virer à la grandiloquence, dégageant ainsi un fort sentiment humain.

Simone Young

Simone Young

L’accueil en délire que lui réserve le public pour ce grand voyage merveilleux qui transcende la narration scénique l’a manifestement beaucoup touchée, et Bayreuth n’oubliera pas aussi bien sa joie que celle qu’elle a su apporter à tous, artistes et spectateurs enchantés.

 

Le lien vers le compte rendu Der Ring des Nibelungen (Meister - Schwarz) Bayreuth 2022

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Publié le 31 Juillet 2024

Wagner und Zeitgenossen - Romantisches Feuerwerk für Cello und Klavier
Concert du 28 juillet 2024
Kammermusiksaal
Steingraeber & Söhne – Bayreuth

Paul Juon Marches Op.8 (1899)
Johannes Brahms Regenliedsonate Op. 78/1 (1879)
Richard Wagner Romanze E-dur - Nach dem Albumblatt (1861)
Gioachino Rossini Une larme (1858)

Violoncelle Tatjana Uhde
Piano Lisa Wellisch

En ce début de l’édition 2024 du Festival de Bayreuth, la maison Steingraeber & Söhne (fabricant de piano à Bayreuth depuis 1852), accueille dans sa salle de musique de chambre spécialement aménagée deux jeunes artistes qui se connaissent bien puisqu’elles ont enregistré en 2021 un premier album, ‘Märchenbilder’, deux ans après leur première rencontre en cette même ville.

Tatjana Uhde (Violoncelle) et Lisa Wellisch (Piano)

Tatjana Uhde (Violoncelle) et Lisa Wellisch (Piano)

Originaire de Freiburg, Tatjana Uhde fait dorénavant partie de l’orchestre de l’Opéra national de Paris en tant que deuxième violoncelle solo, et retrouve chaque l’été l’orchestre du Festival de Bayreuth, alors que Lisa Wellisch, qui a étudié à Stuttgart avec le mari de Tatjana, vit à Eckersdorf, et mène une carrière de pianiste indépendante.

Le programme qu’elles proposent en ce dimanche matin relie plusieurs pièces du romantisme allemand issues d’auteurs contemporains de Richard Wagner, créées pour instrument à cordes (violon, violoncelle ou contrebasse) et piano, qui se trouvent ainsi unifiées par la tessiture du violoncelle qui représente une même voix humaine parcourue d’émotions changeantes.

Le déroulement du concert se fait à rebours du temps sur 40 ans, puisque l’on part de 1899 pour finir en 1858.

Brahms Wagner Rossini (Uhde Wellisch) Steingraeber Haus – Bayreuth

Paul Juon, compositeur suisse d’origine russe, acheva ses études à Berlin à la fin du XIXe siècle où il composa ses premières œuvres. ‘ Marches’ est une pièce qui porte en elle une certaine légèreté insouciante et une composante mélodique qui n’est pas sans évoquer, en seconde partie, le charme des compositions de Tchaïkovski. La résonance du violoncelle de Tatjana Uhde est emplie d’un son vibrant très dense, avec de la matière même dans l’aigu, que le geste de la musicienne assouplit de manière à raviver des impressions passées qui deviennent fortement présentes.

Au piano, Lisa Wellisch offre une image stoïque de maîtrise et d’attention à sa partenaire, et pourtant, les sonorités sont, elles, chargées d’une intense noirceur cristalline, et ce romantisme pétri de chair bien ancrée sera dominant tout au long du récital.

Tatjana Uhde (Violoncelle) et Lisa Wellisch (Piano)

Tatjana Uhde (Violoncelle) et Lisa Wellisch (Piano)

La célèbre sonate ‘Regenlied’ de Johannes Brahms, composée originellement pour le violon, sur la rive nord de Wörthersee à la frontière de l’Italie et de l’Autriche, s’enchaîne très naturellement avec son premier mouvement enjoué et virtuose. Et c’est dans l’adagio central que le moelleux du violoncelle se révèle le plus feutré en nous emmenant au cœur de ces impressions qui mêlent nostalgie et sentiment de plénitude.

Dans le même esprit, parée des couleurs du violoncelle, la Romanze de Richard Wagner gagne en profondeur et montre aussi quelle finesse d’aigu il est possible d’atteindre avec cet instrument, et c’est sur une œuvre très mélancolique, ‘Une larme’, composée pour contrebasse par Gioachino Rossini, lorsqu'il revint vivre à Paris, que se conclut ce voyage à la fois incisif et inspirant.

Tatjana Uhde (Violoncelle) et Lisa Wellisch (Piano)

Tatjana Uhde (Violoncelle) et Lisa Wellisch (Piano)

Loin d’accentuer la noirceur mélancolique inhérente à cette pièce, Tatjana Uhde la teinte d’une forme d’espérance, et la prégnance de ces interprétations fortes entendues en cette fin de matinée vaut aux deux musiciennes une reconnaissance très marquée et chaleureuse devant un public venu faire salle comble. 

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Publié le 23 Juillet 2024

Elizabeth Costello - Seven Lectures and Five Moral Tales (Nowy Theatr, 11 avril 2024)
Représentation du 16 juillet 2024
Festival d’Avignon

Artistes du Nowy Theatr  Mariusz Bonaszewski, Magdalena Cielecka, Andrzej Chyra, Ewa Dałkowska, Bartosz Gelner, Małgorzata Hajewska-Krzysztofik, Maja Ostaszewska, Ewelina Pankowska, Jacek Poniedziałek, Magdalena Popławska

Artistes invités  Jadwiga Jankowska-Cieślak, Maja Komorowska, Hiroaki Murakami

Mise en scène Krzysztof Warlikowski (2024)
Décor et costumes Małgorzata Szczęśniak
Lumière Felice Ross
Collaboration artistique Claude Bardouil
Video et animations Kamil Polak
Musique Paweł Mykietyn
Dramaturgie Piotr Gruszczyński

 

Textes basés sur les œuvres de John Maxwell Coetzee ‘Elizabeth Costello’ (2003), ‘Slow Man’ (2005), ‘Moral Tales’ – dont sont tirés des extraits de 'Woman Grows Older', 'Vanity', 'The Glass Abattoir' – (2017) et une interview de J.M. Coetzee par Soledad Costantini (2018)

Extraits musicaux  ‘Symphony N°2’ de Pawel Mykietyn, ‘First Six Months of Love’ de Michelle Gurevich

Coproduction: Schauspiel Stuttgart, Festival d’Avignon, Théâtre de Liège, La Colline – théâtre national, Les Théâtres de la Ville de Luxembourg, Athens Epidaurus Festival, Malta Festival Poznań 2024

Pour la première fois, Krzysztof Warlikowski dédie intégralement un de ses spectacles à un auteur contemporain qui compte énormément pour lui depuis au moins une quinzaine d’année, John Maxwell Coetzee, romancier sud-africain installé à présent à Adélaïde, qui reçut le prix Nobel en 2003.

Ce dernier a imaginé un personnage, Elizabeth Costello, écrivaine invitée à des colloques dans le monde entier pour recevoir des récompenses pour ses œuvres, voix par laquelle il développe librement des idées destinées à bousculer la société bien-pensante. Elizabeth Costello fait l’objet d’un livre qui lui est entièrement consacré - ‘Elizabeth Costello’ (2003) -, mais elle apparaît aussi dans des ouvrages ultérieurs - ‘Moral Tales’ (2017) -.

Jadwiga Jankowska-Cieślak, Andrzej Chyra (le singe), Jacek Poniedziałek, Mariusz Bonaszewski, Hiroaki Murakami et Ewelina Pankowska (Photo Magda Huecke)

Jadwiga Jankowska-Cieślak, Andrzej Chyra (le singe), Jacek Poniedziałek, Mariusz Bonaszewski, Hiroaki Murakami et Ewelina Pankowska (Photo Magda Huecke)

A l’occasion de trois de ses pièces – ‘(A)pollonia’ (Avignon, 2009), ‘La Fin’ (Odéon, 2011) et ‘Phèdre(s)’ (Odéon, 2016), Krzysztof Warlikowski avait préalablement inséré la parole d’Elizabeth Costello dans ses réflexions. Elle devient dorénavant le personnage central de sa dernière création qui signe son retour au Festival d’Avignon après 11 ans d’absence et le souvenir de ‘Kabaret warszawski’ (2013).

Pas moins de cinq actrices et un acteur incarnent cette femme aux multiples visages, Jadwiga Jankowska-Cieślak (La conférencière de ‘Réalisme’), Małgorzata Hajewska-Krzysztofik (La conférencière du paquebot des mers du sud du ‘Roman en Afrique’), Maja Ostaszewska (la jeune Elizabeth dans ‘Le problème du mal’), Ewa Dałkowska (La grand-mère de ‘Vanité’ et ‘Une femme en train de vieillir’), Maja Komorowska (la suppliante dans ‘La Porte’), et Andrzej Chyra (Elizabeth dans ‘L’Homme ralenti’).

Hiroaki Murakami, Krzysztof Warlikowski et Magdalena Cielecka

Hiroaki Murakami, Krzysztof Warlikowski et Magdalena Cielecka

Krzysztof Warlikowski construit la première partie de sa pièce, la plus longue et la plus difficile, principalement sur les récits d’’Elizabeth Costello’ et sa vie de conférencière, et dédie la seconde partie, plus courte, à des thèmes de deux ouvrages ultérieurs, ‘Slow Man’ et ‘Moral Tales’, qui confrontent le déclin de l’énergie existentielle aux traits de la vieillesse.

Le décor de Małgorzata Szczęśniak, d’une épure géométrique réglée au millimètre près, représente, côté cour, une cage transparente sertie d’un cadre d’un beau bois foncé pouvant pivoter pour être présentée soit de face, soit sur toute sa longueur.

Un petit salon, sobre, se tient sur la gauche, surmonté d’un grand écran téléviseur, et sur le mur côté jardin s’étirent des toilettes, lieu intime très prégnant dans la symbolique warlikowskienne mais qui découle pourtant bien d’une scène du ‘Problème du mal’. Cette estrade servira un peu plus loin d’étrange lieu de conférence.
Au sol, de larges cercles concentriques – il faut être un peu en hauteur pour bien les voir – donnent l’impression que la cage de verre flotte sur les eaux et qu’elle se situe au centre du champ de force du pôle sud.

Mariusz Bonaszewski, Magdalena Popławska, Bartosz Gelner et Jadwiga Jankowska-Cieślak (Photo Magda Huecke)

Mariusz Bonaszewski, Magdalena Popławska, Bartosz Gelner et Jadwiga Jankowska-Cieślak (Photo Magda Huecke)

La pièce commence par une installation vidéo de Philippe Parreno qui présente un esprit virtuel, Ann Lee, issu du marché numérique, destiné à animer des êtres redessinés par leurs créateurs. Le spectateur est de suite interpelé afin de différencier la simulation de la vie, d’une part, et les qualités qui font qu’un être humain est pleinement humain, d’autre part.

Puis, débute la présentation de J.M Coetzee et de son personnage d’Elizabeth Costello lors d’une remise de prix. L’écrivain est incarné par Mariusz Bonaszewski qui lui ressemble de par sa tenue et ses cheveux blancs, bien qu’il paraisse de carrure plus massive, et Jadwiga Jankowska-Cieślak se livre, dans son beau costume vert-émeraude, à un hypnotisant numéro de captation du public, douée qu’elle est d’une déclamation en polonais extrêmement séduisante.
Sur un divan, son fils prévenant, sous les traits de Bartosz Gelner, joue aussi les séducteurs.

A la différence du livre qui, par son style clair et bien rythmé, interpelle de son écriture le lecteur, c’est ici la manière d’être de chacun, et la façon de regarder l’autre et de s’exprimer avec vérité, qui crée l’illusion du réel à partir du réel. 

Hiroaki Murakami, Ewa Dałkowska, Maja Ostaszewska, Magdalena Cielecka, Maja Komorowska, Jacek Poniedziałek, Ewelina Pankowska, Bartosz Gelner et Andrzej Chyra

Hiroaki Murakami, Ewa Dałkowska, Maja Ostaszewska, Magdalena Cielecka, Maja Komorowska, Jacek Poniedziałek, Ewelina Pankowska, Bartosz Gelner et Andrzej Chyra

Krzysztof Warlikowski introduit le personnage du singe, évoqué en début de roman, pour ajouter au doute. Celui ci peut aussi bien être un double de l’auteur ou du metteur en scène, silencieux et observateur, un miroir de la cause animale qu’Elizabeth Costello va défendre en rapprochant la cruauté des abattoirs et les horreurs de la Shoah, et peut être autrement une figure qui questionne l’humanité, puisque ce singe inspire aussi, par son comportement, la bienveillance et un naturel non altéré. 

Et toute la première partie s’appuie sur le texte pour brouiller la distinction entre l’humain et l’animal en cherchant à faire perdre pied au spectateur. Il y a, par exemple, cette grande conférence où les protagonistes sont installés latéralement le long d’une grande table tout en déjeunant, sans regard direct vers le public. Leur discussion est filmée et projetée sur le fond de scène, si bien que c’est une image virtuelle qui est regardée. Qu’est donc l’homme lorsqu’il est en représentation? Une parole qui lui appartient? Une imitation?  Le décalage entre le repas et la réflexion sur la nécessité de montrer aux gens ce qu’est la violence d’un abattoir, en proposant d’en construire un totalement en verre, est au centre de la question de la duplicité humaine.

Ewelina Pankowska, Andrzej Chyra et Maja Ostaszewska (Photo Magda Huecke)

Ewelina Pankowska, Andrzej Chyra et Maja Ostaszewska (Photo Magda Huecke)

Le problème du mal est approfondi à travers une séquence où la jeune Elizabeth Costello, échappant à un agresseur rencontré par hasard, réussit à se réfugier dans les toilettes pour laisser éclater sa douleur. Maja Ostaszewska joue de manière bouleversante un saisissant sens de l’urgence.

L’homme est un loup pour l’homme, et défile ensuite un sombre et inquiétant travelling sur un champ recouvert de moutons, rassemblés de manière serrée, ce qui dit tout du regard que certains hommes peuvent porter sur d’autres hommes qui seront leurs victimes, image qui renvoie aussi à leur mentalité grégaire et suiviste qui rappelle une célèbre image du film de Luis Buñuel, ‘L’Ange Exterminateur’

Il s’agit bien sûr d’une autre illustration de la menace de la Shoah telle que Krzysztof Warlikowski l’aborde dans nombre de ses spectacles, y compris dernièrement dans ‘Le Grand Macabre’ qui vient d’ouvrir le festival lyrique de Munich.

Małgorzata Hajewska-Krzysztofik (Photo Magda Huecke)

Małgorzata Hajewska-Krzysztofik (Photo Magda Huecke)

L’être humain ainsi décrit n’est donc sûrement pas sympathique, mais des images d’un troublant onirisme ponctuent également ce discours, comme lorsque l’image d’Elizabeth Costello, incarnée cette fois par Małgorzata Hajewska-Krzysztofik, se dépouille et se dissout sur fond de neiges en Antarctique – car l’impact de la présence humaine sur le climat est aussi suggérée sur scène -.

En seconde partie, le spectateur peut se projeter plus directement et se sentir plus immédiatement touché, puisque les thèmes de la perte des moyens physiques et de la dépendance au cours de la vie sont au cœur de la préoccupation de l’auteur. On y voit Ewa Dałkowska jouer le rôle d’une femme qui cherche à sauver la face devant ses enfants qui voient bien qu’elle aura besoin d’assistance un jour. 
Ses petits enfants sont masqués, comme pour signifier que l’expérience de la vie n’a pas encore forgé leur personnalité.

Magdalena Cielecka et Mariusz Bonaszewski (Photo Magda Huecke)

Magdalena Cielecka et Mariusz Bonaszewski (Photo Magda Huecke)

Cette petite scène de famille réunie et attendrissante, mais aussi angoissante, se déroule dans la cage translucide, alors que, côté jardin, on assiste à une poignante scène de ‘Slow man’ où Paul, un homme unijambiste, se raccroche à une femme, scène dont Elizabeth Costello est en fait l’autrice. Un jeu torturé et déboussolé y est représenté dans tout son désespoir.

C’est cependant le visage de l’actrice polonaise Maja Komorowska qui marque définitivement la dernière partie, car elle exprime dans la voix et le regard la charge tragique des souffrances du passé et des sentiments saisis à vif. Elle dessine ainsi un portrait humain d’une grande puissance impressive. L’actrice, âgée de 87 ans, a une capacité extraordinaire à transmettre un vécu, si bien qu’à l’entendre le cœur se serre instinctivement. Jamais, dans le théâtre français, vous ne pourrez voir cela.

Bartosz Gelner, Mariusz Bonaszewski, Maja Komorowska, Magdalena Popławska, Andrzej Chyra et Maja Ostaszewska

Bartosz Gelner, Mariusz Bonaszewski, Maja Komorowska, Magdalena Popławska, Andrzej Chyra et Maja Ostaszewska

Finalement, elle se décide à traverser la porte, ouverte par le singe attentionné, ce qui laisse donc imaginer qu’Elizabeth Costello a choisi par elle même, et de façon très réfléchie, le moment de quitter le monde en toute liberté. ‘Les étoiles sont des traces de lumière vieilles de millions d’années’.

Krzysztof Warlikowski, Magdalena Cielecka et Małgorzata Hajewska-Krzysztofik

Krzysztof Warlikowski, Magdalena Cielecka et Małgorzata Hajewska-Krzysztofik

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Publié le 14 Juillet 2024

Ukrainian Freedom Orchestra – Keri-Lynn Wilson - 9e de Beethoven – St Eustache
Bucha Lacrimosa (Victoria Vita Poleva) et Symphonie n°9 (Ludwig van Beethoven)
Concert du 12 juillet 2024
Eglise Saint-Eustache, Paris

Victoria Vita Polevá
Bucha Lacrimosa (Bonn, le 29 août 2022)
Violon Marko Komonko

Ludwig van Beethoven
Symphonie n°9 (Vienne, le 7 mai 1824)
Olga Bezsmertna (soprano), Nataliia Kukhar (mezzo-soprano), Valentyn Dytiuk (ténor), Andrii Kymach (baryton-basse)

Yuri Shevchenko
We are! / paraphrase sur le thème de l’hymne national d’Ukraine (Kyiv, le 26 février 2022)

Direction musicale Keri-Lynn Wilson
Ukrainian Freedom Orchestra
Chœur uni Ukranien Symbole et Chœur de l’Armée Française

Sous le haut patronage de Madame Olena Zelenska, Première dame d’Ukraine, et de Madame Anne Hidalgo, Maire de Paris
Concert organisé en partenariat avec la ville de Paris, l’Ambassade d’Ukraine et avec le soutien du Ministère de l’Europe et des Affaires Étrangères

Peu après le début de l’agression russe contre l’Ukraine, le 24 février 2022, le New-York Metropolitan Opera et le Grand Théâtre de Varsovie (Teatr Wielki) réunirent des musiciens ukrainiens, réfugiés de guerre pour certains, afin de fonder l’Ukrainian Freedom Orchestra.

The Ukrainian Freedom Orchestra, Chœur uni Ukranien Symbole et Chœur de l’Armée Française

The Ukrainian Freedom Orchestra, Chœur uni Ukranien Symbole et Chœur de l’Armée Française

Destiné à défendre l’art ukrainien et à redistribuer les bénéfices des concerts aux victimes de l’invasion, l’orchestre initia sa première tournée d’été le 28 juillet 2022, sous la direction de la cheffe d’orchestre canado-ukrainienne Keri-Lynn Wilson, artiste ardemment engagée, avec cœur et détermination, dans cette action de résistance, et inspiratrice de ce projet.

Cette année, c’est l’église Saint-Eustache de Paris, lieu d’inhumation de Jean-Philippe Rameau, qui donne le coup d’envoi de la troisième tournée internationale de l’ensemble qui se poursuivra à Varsovie, Londres, New-York et Washington.

Ukrainian Freedom Orchestra Keri-Lynn Wilson 9e Beethoven St Eustache

Au creux de cet édifice dont la première pierre fut posée en 1532, plus de 300 ans après la première paroisse, le sentiment d’intimité créé par la nef centrale entourée d’un double bas-côté est puissant, malgré sa hauteur vertigineuse.

Après un court discours introductif de la part de Vadym Omelchenko, ambassadeur d’Ukraine, et d’Arnaud Ngatcha, adjoint à la Maire de Paris en charge de l'Europe, des relations internationales et de la francophonie, le chœur, qui réunit chanteurs ukrainiens de la capitale et choristes de l’Armée Française, s’installe en premier, suivi des musiciens. Sont présents parmi les premiers rangs d’honneur, Peter Gelb, directeur du New-York Metropolitan Opera et époux de Keri-Lynn Wilson, et Alexander Neef, directeur de l’Opéra national de Paris.

Keri-Lynn Wilson

Keri-Lynn Wilson

Le concert ouvre avec ‘Bucha Lacrimosa’, pièce de Victoria Vita Polevá créée suite au massacre perpétré par les Russes au nord-ouest de Kyiv au début de la guerre. Les accords finement aigus du violon solo, Marko Komonko, flottant au dessus de l’évanescence orchestrale, évoquent la légèreté d’une âme slave qui finit par être rattrapée par la menace.

La rythmique devient de plus en plus stridente, et les vents assombrissent l’atmosphère jusqu’à ce qu’une fureur d'une lourdeur d'acier, fortement martelée par Keri-Lynn Wilson, balaye la clarté insouciante initiale, pour ne laisser place qu’à un dernier souffle abattu qui s’évanouit dans le silence.

La compositrice remerciera avec beaucoup de gratitude tous les musiciens pour cette interprétation très forte, sous le regard heureux et bienveillant de la cheffe d’orchestre.

The Ukrainian Freedom Orchestra, Chœur uni Ukranien Symbole et Chœur de l’Armée Française

The Ukrainian Freedom Orchestra, Chœur uni Ukranien Symbole et Chœur de l’Armée Française

Puis, la pièce centrale, la ‘9e symphonie’ de Beethoven, poème en musique universellement célèbre qui fête ses 200 ans d’existence, développe son premier mouvement avec un dramatisme d’emblée implacable. A plusieurs reprises se fera entendre un alliage de cordes et de cuivres à l’explosivité éclatante, alors que le sentiment d’harmonie s’installe très rapidement dans l’acoustique de cette église qui instille inévitablement un certain sentiment d’irréalité.

Contrebasses et violoncelles manœuvrent puissamment, mais le détail des phrases les plus vivaces se dissout également du fait du temps de réverbération qui règne à l'intérieur du transept.

Keri-Lynn Wilson

Keri-Lynn Wilson

Chaleur et luminosité de fin de jour irriguent l’ensemble de l’interprétation dont le troisième mouvement, un très bel adagio, prend en ce lieu tout son pouvoir de suspension temporelle, les mélodies des vents se réfléchissant avec enchantement à travers la complexité architecturale des volumes de l’édifice.

Andrii Kymach (Baryton-Basse)

Andrii Kymach (Baryton-Basse)

Le tant attendu final choral prend une tournure plus politique à travers un ’Ode à la Joie’ qui remplace ‘Freude’ par ‘Slava’, et réinterprète en ukrainien la partie chantée des quatre solistes.

Le chant de l’ensemble des chœurs reste très doux, porté par l’élégance de Keri-Lynn Wilson, et les accents slaves des chanteurs (Olga Bezsmertna, Nataliia Kukhar, Valentyn Dytiuk et Andrii Kymach) transmettent un esprit qui est un véritable appel à embrasser le cœur de tout un peuple.

Keri-Lynn Wilson et l'ensemble des musiciens

Keri-Lynn Wilson et l'ensemble des musiciens

Ovation sans retenue de la part des auditeurs, grand moment de joie pour tous les artistes, nous aurons aussi la chance d’entendre en bis l’adaptation de l’hymne national d’Ukraine que composa Yuri Shevchenko, désormais décédé, quelques jours après le début de l’invasion, ‘We are !’, une mélopée traversée de réminiscences nostalgiques.

Grande fierté et grande unité se dégagent de l’Ukrainian Freedom Orchestra, l’âme de ce concert en fait toute son humble puissance!

Le site de l'Ukrainian Freedom Orchestra.

The Ukrainian Freedom Orchestra - Eglise Saint-Eustache, 12 juillet 2024

The Ukrainian Freedom Orchestra - Eglise Saint-Eustache, 12 juillet 2024

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Publié le 7 Juillet 2024

Le Grand Macabre (György Ligeti – Stockholm, le 12 avril 1978)
Représentations du 28 juin et 01 juillet 2024
Münchner Opernfestspiele 2024
Bayerische Staatsoper

Chef der Geheimen Politischen Polizei (Gepopo)
           Sarah Aristidou
Venus Sarah Aristidou
Amanda Seonwoo Lee
Amando Avery Amereau
Fürst Go-Go John Holiday
Astradamors Sam Carl
Mescalina Lindsay Ammann
Piet vom Fass Benjamin Bruns
Nekrotzar Michael Nagy
Ruffiack Andrew Hamilton
Schobiack Thomas Mole
Schabernack Nikita Volkov
Weißer Minister Kevin Conners
Schwarzer Minister Bálint Szabó
Refugees (Chorsoli) Isabel Becker, Sabine Heckmann, Saeyong Park, Sang-Eun Shim

Direction musicale Kent Nagano
Mise en scène Krzysztof Warlikowski (2024)               
      Kent Nagano
Décors et costumes Małgorzata Szczęśniak
Lumières Felice Ross
Vidéo Kamil Polak
Chorégraphie Claude Bardouil
Dramaturgie Christian Longchamp, Olaf Roth

Né au sein d’une famille juive hongroise le 28 mai 1923, György Ligeti étudia en Roumanie à Cluj-Napoca. Il désirait devenir scientifique, mais les lois antisémites nazis contrarièrent ce projet.

Il connut le travail forcé sous ce régime et perdit son père et son frère dans les camps de concentration. Sa mère survivra à Auschwitz, mais il devra fuir Budapest en 1956 au moment de la révolution hongroise qui sera écrasée par Staline.

Michael Nagy (Nekrotzar)

Michael Nagy (Nekrotzar)

Réfugié à Vienne puis à Cologne, il étudie la musique d’avant-garde et commence à composer. Il connaît son premier véritable succès avec ‘Atmosphères’ (1961), une pièce orchestrale d’une durée de 9 mn qui sera par la suite popularisée en 1968 à travers le film de Stanley Kubrick ‘2001, A Space Odyssey’ dont elle fera l’ouverture.

Sa créativité engendre par la suite nombre de concertos pour orchestre ou instrument seul, ainsi que des pièces chorales – le célèbre ‘Lux Aeterna’, autre composition utilisée dans ‘2001’ -, et ce sens pour le développement de textures denses et surnaturelles combinées à des sonorités mécaniques inspirera nombre de musiciens.

Le Bayerische Staatsoper, lundi 01 juillet 2024

Le Bayerische Staatsoper, lundi 01 juillet 2024

De 1974 à 1977, il compose son unique opéra ‘Le Grand Macabre’ d’après la pièce de Michel de Ghelderode ‘La balade du Grand Macabre’ (1934), qui connaîtra sa première le 12 avril 1978 à l’Opéra Royal de Stockholm, en suédois – le compositeur souhaitait que l’ouvrage soit interprété dans la langue du pays qui l’accueille -. Bien qu’amalgame d’inspirations diverses, la musique décrit un univers ayant son identité propre. 

La première à l’Opéra de Paris aura lieu trois ans plus tard, le 23 mars 1981.

Ouverture du 'Grand Macabre' - ms Krzysztof Warlikowski

Ouverture du 'Grand Macabre' - ms Krzysztof Warlikowski

György Ligeti crée par la suite, en 1996, une version révisée en langue anglaise qui réduit les passages parlés et retravaille la structure orchestrale. Cette nouvelle version sera mise en scène en 1997 par Peter Sellars au Festival de Salzbourg sous la direction de Esa-Pekka Salonen, en coproduction avec le Théâtre du Châtelet (une coproduction Gerard MortierStéphane Lissner, si l'on peut dire ainsi), et c’est celle-ci qui est jouée pour la première fois à l’opéra d’État de Bavière à l’occasion de l’ouverture du Festival lyrique d’été 2024.

Salle du Bayerische Staatsoper, lundi 01 juillet 2024

Salle du Bayerische Staatsoper, lundi 01 juillet 2024

Pour mettre en scène cet ouvrage difficile à interpréter, vocalement et musicalement, Serge Dorny a choisi Krzysztof Warlikowski qui en est à sa septième production munichoise depuis ‘Eugène Onéguine’ donné le 31 octobre 2007 sous la direction du chef d’orchestre américain Kent Nagano, lorsque ce dernier était directeur musical de l’institution.

Avec ‘Le Grand Macabre’, les deux artistes en sont dorénavant à leur quatrième collaboration en incluant ‘The Bassarids’ (Salzbourg, 2018) et ‘A Quiet Place’ (Palais Garnier, 2022).

Benjamin Bruns (Piet vom Fass)

Benjamin Bruns (Piet vom Fass)

Le décor monumental représente une salle d’accueil de réfugiés aux murs gris comprenant plusieurs larges fenêtres quadrillées de barreaux donnant une impression de grande froideur. Cette salle prendra de plus en plus la forme d’une salle de sport.

Dès l’ouverture, un écran longitudinal descend des cintres pour montrer à contre-jour l’arrivée de personnes dans ce centre où un gardien vérifie l’identité de chacun. Ce gardien, vêtu d’un long manteau noir, n’est autre que Nekrotzar qui annonce la fin du monde. Visage de mort, blanc blafard et les yeux cernés de noir, cette symbolique se retrouve sur tous les personnages qui incarnent une autorité policière. 

Seonwoo Lee (Amanda) et Avery Amereau (Amando)

Seonwoo Lee (Amanda) et Avery Amereau (Amando)

Éprises de narcissisme, le visage bandé par une opération de chirurgie esthétique traduisant leur désir de jeunesse éternelle afin de contrer l’arrivée de la mort, Amando et Amanda livrent une charmante danse d’amoureuses.

Krzysztof Warlikowski superpose les scènes selon un art du contrepoint théâtral qui lui est propre. Ainsi, au même moment que la première scène menée par Nekrotzar et l’ivrogne Piet se développe, les personnages principaux de la seconde scène, Astradamors et Mescalina, se préparent à l’exposition de leur relation sadomasochiste qui, une fois passée au premier plan, joue avec beaucoup d’humour sur les interprétations sexuelles qui tendent à accentuer l’identité homosexuelle du jeune astronome.

Sarah Aristidou (Gepopo), Bálint Szabó (Schwarzer Minister) et Kevin Conners (Weißer Minister)

Sarah Aristidou (Gepopo), Bálint Szabó (Schwarzer Minister) et Kevin Conners (Weißer Minister)

Une cage grillagée se plante en plein centre de la scène pour constituer une zone d’enfermement. 

Au fur et à mesure de la représentation, devient ainsi sensible, en trame de fond, l’expérience que connut Ligeti face aux régimes autoritaires avec leurs tribunaux administratifs chargés de sélectionner les personnes et de les enfermer, ce qui se produira dans cette production lorsque le prince Go-Go passera sous l’influence de deux ministres et du chef de la police, Gepopo.

Scène d'ouverture de 'Melancholia' de Lars von Trier

Scène d'ouverture de 'Melancholia' de Lars von Trier

Les impressions musicales, mélange de brusqueries et d’atmosphères métalliques, se retrouvent dans cette conception visuelle acerbe, mais l’équipe de production révèle aussi un rapport très poétique à l’univers par sa manière de présenter l’imminence de la catastrophe planétaire sous des lumières bleu nuit-orangé impressives (Felice Ross), toujours magnifiquement alliées à la musique surnaturelle de Ligeti, à travers un choix de vidéos montrant un astre incandescent tournant sur lui-même, ou bien en reprenant l’ouverture du film de Lars von Trier ‘Melancholia’ (2011mettant en scène la collision entre une planète gigantesque et la Terre.

Sam Carl (Astradamors) découvrant l'arrivée de la Comète

Sam Carl (Astradamors) découvrant l'arrivée de la Comète

Il y a ainsi l’apocalypse engendrée par une catastrophe stellaire – on peut d’ailleurs voir, à travers la scène des enfants écoutant Astradamors autour de son écran d’ordinateur, une référence à l’envie originelle de Ligeti de devenir scientifique, ce qui apparaîtra sous force de témoignage du compositeur en fin de spectacle -, mais il y a aussi l’apocalypse engendrée par la démesure et la folie humaine, l’holocauste, bien sûr, tout autant que les guerres dévastatrices des grands conquérants tels Gengis-Khan ou Napoléon.

Scène de la mort de Nekrotzar et de l'apocalypse

Scène de la mort de Nekrotzar et de l'apocalypse

Krzyzstof Warlikowski et Kamil Polak font défiler au moment de l’impact irrépressible une série d’extraits de plusieurs films muets issus de l’entre-deux-Guerres où naquit Ligeti, ‘Faust’ (Murnau), ‘Napoléon (Gance), ‘Les Dix Commandements’ (DeMille), ‘Sodom und Gomorrha’ (Curtiz), tous fascinants par leur imagerie poétique, ainsi que la scène finale de ‘Theorem’ (Pasolini) qui montre l’anéantissement de l’homme dans le désert.

En aparté, on peut remarquer qu'Abel Gance fut l'auteur en 1931 d'un film de transition entre le muet et le parlant intitulé 'La fin du monde', sur une musique d'Arthur Honegger et d'après le roman éponyme de l'astronome et écrivain français Camille Flammarion (1893), dont le thème du passage d'une comète, qui croise la trajectoire de la Terre en l'évitant de justesse, suscitant des scènes d'orgie, rejoint totalement l'histoire du 'Grand Macabre'.

Michael Nagy (Nekrotzar)

Michael Nagy (Nekrotzar)

Car le cataclysme a bien lieu – la manière dont le décor se recouvre d’une noirceur macabre le long des grilles est d’un très grand impact dramatique -, et à la toute fin, trois astronautes ayant découvert les restes de cette planète récupèrent le seul souvenir de tous ces gens que nous avons vu enfermés, puis revenir affublés de masques d’animaux fantomatiques, une émouvante collection de photographies de familles.

Lindsay Ammann (Mescalina) et Sam Carl (Astradamors)

Lindsay Ammann (Mescalina) et Sam Carl (Astradamors)

A travers le costume laid et dénudé de Nekrotzar, puis de Mescalina, au second acte, le grotesque insiste également sur l’obsession de la détérioration des corps, et c’est donc une réflexion sur l’angoisse de la vieillesse qui est renforcée dans ce spectacle en renvoyant férocement chaque individu à sa finitude.

Il y a donc quelque chose de particulièrement savoureux, mais aussi de malicieux de la part du directeur du théâtre, à programmer ‘Le Grand Macabre’ en ouverture de festival, lorsque le public munichois vient parader dans ses plus beaux effets. Il faut d’ailleurs souhaiter que la personne qui a fait un malaise au parterre, lors de la seconde représentation, au paroxysme de la brutalité musicale qui démultipliait les effets hystérisés du chef de la police, s’en est bien remise depuis.

John Holiday (Go-Go)

John Holiday (Go-Go)

Virevoltant sur leurs chaises à roulettes, comme en apesanteur, Go-Go et Piet semblent passés dans un autre monde, et les trois gardes qui les rejoignent révèlent, sous leurs tenues de policiers d’état, des vêtements résilles qui les érotisent. La perspective de la mort est ainsi faussement dédramatisée à travers un grand cocktail partagé à l’avant scène, en montrant en arrière plan ce qu’il reste de tous ceux qui ont disparu par la faute des régimes politiques, comme si le destin de l’homme n’était que dérisoire.

Scène finale

Scène finale

Pour un chanteur, travailler avec Krzysztof Warlikowski ne consiste pas seulement à s’intégrer dans une dramaturgie originale qui fait très souvent se croiser plusieurs histoires personnelles et parfois plusieurs niveaux temporels, mais également à étoffer sa propre manière d’incarner sur scène afin de conserver cet acquis dans le temps. Et c’est pour cela que beaucoup d’artistes apprécient de s'en remettre avec ce metteur en scène qui les fait se dépasser.

Ainsi, ceux qui ont connu Benjamin Bruns en Pilote du ‘Vaisseau Fantôme’ (Bayreuth, 2012), en Tamino (Vienne, 2015) ou bien Lohengrin (Munich, 2024) seront surpris du jeu absolument clownesque qu’il imprime à Piet, avec une expressivité sardonique mêlée de clarté adoucie.

Sarah Aristidou (Gepopo)

Sarah Aristidou (Gepopo)

La même sidération s’impose face à Sarah Aristidou, soprano franco-chypriote née à Paris mais surtout connue en Allemagne où elle chante régulièrement Zerbinette à Frankfurt et Berlin, tout en se passionnant pour la musique contemporaine, qui se retrouve dorénavant à interpréter les rôles de Vénus et du Chef de la Police après les avoir abordés à la Maison de la Radio et de la Musique, en français, en décembre 2023. 

Non seulement son agilité vocale fait merveille, mais elle tire aussi des sonorités formidablement malléables et puissamment effilées dans les aigus, tout en leur donnant un métal consistant d’une grande souplesse avec des glissandi surnaturels, en se livrant à un jeu qui peut se révéler assez acrobatique, notamment avec l’utilisation du cheval d’arçons. Cette soirée est autant importante pour elle que pour le public qui n’a pas manqué de lui transmettre, au rideau final, ses fortes impressions.

Salut final

Salut final

Autre voix assez atypique, celle du contre-ténor américain John Holiday a une capacité à glisser de la clarté baroque à une étrange vocalité purement féminine qui ajoute une ambiguïté considérable à son personnage, accrochant en permanence l’auditeur par les changements de représentations mentales qu’il engendre naturellement. Il joue ainsi le rôle d’un homme politique qui vire au portrait d’un enfant gâté qui fuit ses responsabilités en envoyant au front médiatique ses deux ministres.

Baryton d’origine hongroise né à Stuttgart, Michael Nagy donne de l’épaisseur à Nekrotzar tout en suggérant une mélancolie désabusée qui fait penser à celle d’Amfortas. Son personnage, qui évolue de l’inquiétant au grotesque maladif, évoque pas son évolution esthétique glauque un rapport morbide à la mort.

Krzysztof Warlikowski avec en arrière-plan Avery Amereau et Sam Carl

Krzysztof Warlikowski avec en arrière-plan Avery Amereau et Sam Carl

En parallèle, la contralto Lindsay Ammann et le basse-baryton Sam Carl mettent beaucoup de vivacité et de drôlerie dans la peinture décomplexée de la relation entre l’astronome et sa femme, jouée avec beaucoup de présence.

Enfin, il y a une concordance idéale dans la fusion sensuelle des timbres des deux amants incarnés par Seonwoo Lee et Avery Amereau, Bálint Szabó et Kevin Conners sont deux ministres aux très grands talents de comédiens, et Andrew Hamilton, Thomas Mole et Nikita Volkov forment un groupe de trois soldats cerbériques aux profils de grands gaillards espiègles.

Kent Nagano, avec en arrière plan Sarah Aristidou, Sam Carl et Michael Nagy

Kent Nagano, avec en arrière plan Sarah Aristidou, Sam Carl et Michael Nagy

En grand défenseur des œuvres contemporaines, Kent Nagano impressionne beaucoup par sa maîtrise d’un orchestre d’une telle complexité, engageant les musiciens dans une théâtralité sans ambages dans les passages les plus violents – le paroxysme étant atteint dans la scène délirante de l’officier de la police secrète -, avec une très grande densité du son, mais aussi avec un soin merveilleux accordé à l'immatérialité des tissures orchestrales. La nature chaotique de la musique est aussi très bien contrôlée de manière à ce qu’elle respire avec le jeu des solistes, les jaillissements des cuivres sont toujours éclatants, et le sentiment d’unité du spectacle en est renforcé.

Seonwoo Lee, Krzysztof Warlikowski et Avery Amereau

Seonwoo Lee, Krzysztof Warlikowski et Avery Amereau

Avec une telle lecture d’ensemble, ce ‘Grand Macabre’ immerge l’auditeur dans le génie artistique de György Ligeti autant que dans son histoire personnelle, et montre à quel point celle-ci recouvre des résonances avec notre monde et ses images inquiétantes.

Kent Nagano, John Holiday, Felice Ross et Claude Bardouil

Kent Nagano, John Holiday, Felice Ross et Claude Bardouil

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Publié le 2 Juillet 2024

Elektra (Richard Strauss – Dresde, le 25 janvier 1909)
Représentation du 30 juin 2024

Münchner Opernfestspiele 2024
Bayerische Staatsoper

Klytämnestra Violeta Urmana
Elektra Elena Pankratova
Chrysothemis Vida Miknevičiūtė
Aegisth John Daszak
Orest Károly Szemerédy
Der Pfleger des Orest Bálint Szabó
Die Vertraute Natalie Lewis
Die Schleppträgerin Seonwoo Lee
Ein junger Diener Kevin Conners
Ein alter Diener Martin Snell

Direction musicale Vladimir Jurowski
Mise en scène Herbert Wernicke (1997)

 

Créée le 27 octobre 1997 au Bayerische Staatsoper, et reprise plusieurs fois au Festival de Baden-Baden où fut enregistré un DVD en 2010, la production d'’Elektra’ dans la mise en scène d’Herbert Wernicke (1946-2002) est un très bel exemple de lecture universelle d’une œuvre qui marque la première collaboration entre Richard Strauss et le dramaturge Hugo von Hofmannsthal.

Violeta Urmana (Klytämnestra)

Violeta Urmana (Klytämnestra)

Le décor sépare en deux l’espace d’avant scène de la scène centrale par un immense panneau rectangulaire frontal et incliné pouvant pivoter sur lui même pour révéler le grand escalier du palais mycénien édifié en arrière plan.

La symbolique des couleurs des costumes est très explicite également, le blanc pour la virginité et l’aspiration au mariage de Chrysothemis, le noir pour la nature dépressive et vindicative d’Elektra, le rouge pour la puissance sexuelle et la nature criminelle de Klytämnestra.

Les lumières qui filtrent le long des arêtes du mur mobile central prennent également des teintes qui s’alignent sur les intentions en jeu, le tout dégageant une épure fort lisible.

Vida Miknevičiūtė (Chrysothemis)

Vida Miknevičiūtė (Chrysothemis)

Elektra rumine ses pensées sur une estrade en bois où elle pourra planter sa hache au moment du meurtre du couple royal, et lorsque Orest apparaît depuis la loge située côté jardin pour rejoindre ensuite sa sœur, le temps qu’il prend à ajuster le manteau royal abandonné par sa mère, et que Chrysothemis avait refusé de porter au grand dam d’Elektra, laisse transparaître le conflit intérieur du jeune homme entre lien de parenté, envie de vengeance, conscience du mal et ambition personnelle.

Les meurtres respectifs des amants se dérouleront derrière les murs, et alors que nous assistons à l’avènement d’Orest, Elektra met fin à ses jours. Un nouvel ordre est établi.

Elena Pankratova (Elektra)

Elena Pankratova (Elektra)

Le jeu d’acteur reste très sobre, mais Vida Miknevičiūtė offre une jeunesse irradiante à Chrysothémis qui lui vaudra un immense succès au rideau final. La soprano lituanienne possède en effet une projection perçante mais sans dureté avec une très grande solidité de moyen qui exprime une forme d’idéalisme adolescent qui gagne facilement les cœurs.

Károly Szemerédy (Orest)

Károly Szemerédy (Orest)

Sa compatriote, Violeta Urmana, dresse une stature impériale de Klytämnestra, pouvant compter sur une opulence de timbre fascinante, un galbe des graves d’un luxe d’ébène, et un profil des aigus vrillé et très maîtrisé. Son visage et sa gestuelle très expressifs lui donnent dorénavant une force théâtrale saisissante, et ses inflexions vocales tranchées taillent les moindres reliefs de ce caractère prêt à s’effondrer aux pieds de sa fille sous le poids de la culpabilité, avant que la fausse nouvelle de la mort d’Orest ne lui redonne l’espoir de croire qu’elle ne subira aucun châtiment.

C’est toujours un émerveillement de voir comment le talent de cette grande artiste traverse le temps avec une telle densité.

Violeta Urmana (Klytämnestra)

Violeta Urmana (Klytämnestra)

L’ensemble de la distribution présente ce soir ayant déjà été réunie dans cette même production en novembre 2022, Elena Pankratova reprend donc le rôle d’Elektra, et si la puissance de ses aigus et sa longueur de souffle restent mesurées, son chant offre un lyrisme travaillé de fines nuances assez rare dans ce rôle où nombre d’interprètes chargent habituellement l’héroïne de raucités pour en traduire l’animalité blessée. Rien de tout cela ici, c’est la dignité dans la douleur qui est dépeinte avec une certaine douceur, pourrait on dire.

Impressionnant par sa stature inaltérable, Károly Szemerédy est un formidable Orest, doué d’une ligne vocale bellement homogène et de grande classe, et John Daszak décrit un Aegisth avec de l’éclat mais aussi une certaine mesure attendrissante.

Vida Miknevičiūtė (Chrysothemis), Károly Szemerédy (Orest) et John Daszak (Aegisth)

Vida Miknevičiūtė (Chrysothemis), Károly Szemerédy (Orest) et John Daszak (Aegisth)

Mais quel plaisir d'entendre dans cette salle la violence feutrée et la noirceur tristanesque de l’orchestre de l’Opéra de Bavière sous la conduite de Vladimir Jurowski! Ce son fantastiquement noir, d'une noblesse dispendieuse, enveloppe l’auditeur d’une plénitude fabuleuse, et de la fusion des timbres des cordes et des cuivres découle une lave d’une malléabilité fluide et sidérante par la manière dont des traits ardents, des lames rutilantes et clinquantes se cristallisent d’un coup sans altération de leur éclat. L’agilité des musiciens permet de maintenir un excellent rythme théâtralisant avec toutefois un niveau de contrôle qui évite les débordements excessifs, y compris dans les attaques sauvages toujours d’une nette précision.

Vida Miknevičiūtė, Elena Pankratova, Károly Szemerédy, Violeta Urmana, John Daszak et Vladimir Jurowski

Vida Miknevičiūtė, Elena Pankratova, Károly Szemerédy, Violeta Urmana, John Daszak et Vladimir Jurowski

Une interprétation magnifique à tous les niveaux, qui laisse de côté une vision par trop horrifique, pour raconter cette histoire de vengeance familiale à travers une intense somptuosité narrative.

Vida Miknevičiūtė, Elena Pankratova et Violeta Urmana

Vida Miknevičiūtė, Elena Pankratova et Violeta Urmana

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Publié le 30 Juin 2024

TV-Web Juillet-Août 2024 Lyrique et Musique

Chaînes publiques

Vendredi 05 juillet 2024 sur France 5 à 21h10
Opéra de Paris : Roméo et Juliette, Thomas et les autres

Samedi 06 juillet 2024 sur Arte à 03h25
Khachatryan joue Brahms

Samedi 06 juillet 2024 sur France 4 à 22h35
Entre duel et duo - André Manoukian et Jean-François Zygel improvisent sur l'amour

Dimanche 07 juillet sur France 3 à 00h25
Hyuk Lee au Palais Royal

Dimanche 07 juillet sur France 5 à 14h30
Car/Men - Compagnie Les Chicos Mambo

Dimanche 07 juillet 2024 sur Arte à 18h50
Fazil Say et Alain Altinoglu jouent Bach

Lundi 08 juillet 2024 sur Arte à 01h25
Picture a Day Like This (Benjamin) - Festival d'Aix-en-Provence 2023

Mardi 09 juillet 2024 sur France 4 à 21h00
Requiem (Verdi) - Chorégies d'Orange

Mardi 09 juillet 2024 sur France 4 à 22h30
Samson et Dalila - Chorégies d'Orange

Samedi 13 juillet 2024 sur Arte à 22h25
Madama Butterfly (Puccini) - Festival d'Aix-en-Provence 2024

Dimanche 14 juillet 2024 sur France 3 à 00h25
Concert Inaugural de Gustavo Dudamel (Opéra de Paris)

Dimanche 14 juillet 2024 sur Arte à 18h55
Daniil Trifonov interprète Mozart - Concerto pour piano n°25

Dimanche 14 juillet 2024 sur France 2 à 20h40
Le Concert de Paris (direct)

Lundi 15 juillet 2024 sur Arte à 02h45
Barenboim dirige Beethoven - Symphonies n°5 et n°6

Mardi 16 juillet 2024 sur France 4 à 21h00
La Garde Républicaine à Assas

Mardi 16 juillet 2024 sur France 4 à 22h20
Concert Inaugural de Gustavo Dudamel (Opéra de Paris)

Mardi 16 juillet 2024 sur France 4 à 23h45
Concert au Palais princier - Cour d'honneur

Vendredi 19 juillet 2024 sur France 5 à 21h00
L'Olympiade (Vivaldi) - Théâtre des Champs-Elysées - dm Spinosi

Dimanche 21 juillet 2024 sur France 3 à 00h25
La Garde Républicaine à Assas

Dimanche 21 juillet 2024 sur France 5 à 14h30
Requiem (Verdi) - Chorégies d'Orange

Dimanche 21 juillet 2024 sur Arte à 18h40
Eden - Joyce DiDonato chante à Olympie

Lundi 22 juillet 2024 sur Arte à 01h00
Wozzeck (Berg) - Festival d'Aix-en-Provence 2023

Mardi 23 juillet 2024 sur France 4 à 21h00
Möbius Morphosis (Rachid Ouramdane et la Compagnie XY) - Opéra de Lyon

Mardi 23 juillet 2024 sur France 4 à 22h30
Ne me touchez pas (Le parcours de la danseuse et chorégraphe Laura Bachman)

Jeudi 25 juillet 2024 sur Arte à 00h50
Chœur à cœur

Dimanche 28 juillet 2024 sur Arte à 18h55
Le "Ring" du centenaire (Boulez-Chéreau) - Les grands moments de la musique

Dimanche 28 juillet 2024 sur Arte à 20h05
Joséphine Baker - Première icône noire

Lundi 29 juillet 2024 sur Arte à 01h05
Alain Altinoglu et Julia Fischer jouent Debussy et Sibelius

Mardi 30 juillet 2024 sur France 4 à 21h00
Le Concert de Paris 2024

Mardi 30 juillet 2024 sur France 4 à 22h35
Miniatures françaises

Mardi 30 juillet 2024 sur France 4 à 23h35
Requiem (Verdi) - Chorégies d'Orange

Samedi 03 août 2024 sur France 4 à 22h35
Les cercles sacrés (Aldo Brizzi)

Dimanche 04 août 2024 sur Arte à 02h00
And me, I'm dancing too (Mohammad Valizadegan)

Dimanche 04 août 2024 sur France 5 à 14h25
Samson et Dalila (Saint-Saens) - Chorégies d'Orange

Mardi 06 août 2024 sur France 4 à 21h00
Notre Sacre - Le Sacre du printemps (Igor Stravinsky) - Blanca Li, Abd al Malik et David Grimal

Mardi 06 août 2024 sur France 4 à 22h23
Suresnes Cités Danse - Casse-Noisette (Tchaïkovski) - Bianca Li

Dimanche 04 août 2024 sur Arte à 18h10
Riccardo Muti dirige la Missa Solemnis - Festival de Salzbourg 2021

Vendredi 09 août 2024 sur Arte à 22h25
Ludwig van Beethoven : Symphonie n° 9 - Leipzig, Paris, Milan, Vienne

Vendredi 09 août 2024 sur Arte à 23h50
Ode à l'humanité - La "Neuvième" de Beethoven (documentaire)

Dimanche 11 août 2024 sur Arte à 19h00
Rachmaninov au Festival de Lucerne - Mao Fujita, Riccardo Chailly, Lucerne Festival Orchestra

Lundi 12 août 2024 sur Arte à 00h35
Chercheurs d'orgues

Lundi 12 août 2024 sur Arte à 03h10
Peter Doherty et Frédéric Lo - The Fantasy Life of Poetry and Crime

Mercredi 14 août 2024 sur Arte à 02h15
Le West-Eastern Divan Orchestra joue Brahms - Festival de Salzbourg 2021

Vendredi 16 août 2024 sur Arte à 22h40
Les contes d'Hoffmann (Offenbach) - Festival de Salzbourg 2024

Dimanche 18 août 2024 sur France 3 à 00h10
Amor azul

Dimanche 18 août 2024 sur Arte à 18h30
Concert de Prague avec Daniel Hope

Dimanche 18 août 2024 sur Arte à 23h45
Daniel Hope et la musique sud-africaine

Lundi 19 août 2024 sur Arte à 00h40
Bedrich Smetana, un bicentenaire

Jeudi 22 août 2024 sur Arte à 02h05
Le Ballet national de Vienne danse Gustav Mahler

Jeudi 22 août 2024 sur Arte à 03h20
Lea Desandre, récital baroque - Amazone

Dimanche 25 août 2024 sur France 3 à 00h10
La Méditerranée en fête : Alexandre Kantorow

Dimanche 25 août 2024 sur France 5 à 14h30
Prades 2022- Festival Pablo Casal

Dimanche 25 août 2024 sur Arte à 18h45
Gala Puccini à Venise

Lundi 26 août 2024 sur Arte à 01h15
Young Euro Classic 2023 - Ukraine et Estonie

Dimanche 01 septembre 2024 sur France 3 à 00h30
Prades 2022- Festival Pablo Casal


A compléter ultérieurement

TV-Web Juillet-Août 2024 Lyrique et Musique

Mezzo et Mezzo HD

Mercredi 03 juillet 2024 sur Mezzo à 20h30
Berlioz : La Damnation de Faust - Pene Pati, Aude Extremo - Monte-Carlo

Vendredi 05 juillet 2024 sur Mezzo HD à 21h00
'Adelaide di Borgogna' de Rossini à Pesaro

Vendredi 05 juillet 2024 sur Mezzo à 23h05
Rameau : Hippolyte et Aricie - Simon Rattle

Samedi 06 juillet 2024 sur Mezzo à 20h30
Puccini : Madama Butterfly - Opéra National Grec

Dimanche 07 juillet 2024 sur Mezzo HD à 21h00
Wagner : Das Rheingold - Opernhaus Zurich

Mercredi 10 juillet 2024 sur Mezzo à 20h30
'Le Rossignol' de Stravinsky et 'Les Mamelles de Tirésias' de Poulenc au Théâtre des Champs-Elysées

Vendredi 12 juillet 2024 sur Mezzo HD à 21h00
Janácek : Káta Kabanová - Festival de Salzbourg

Vendredi 12 juillet 2024 sur Mezzo à 23h05
Jonas Kaufmann chante 'Werther' de Massenet à l'Opéra de Paris

Samedi 13 juillet 2024 sur Mezzo à 20h30
'La Sonnambula' de Bellini à l'Opéra Royal de Wallonie Liège

Dimanche 14 juillet 2024 sur Mezzo HD à 21h00
Wagner : Die Walküre - Opernhaus Zurich

Mardi 16 juillet 2024 sur Mezzo à 22h45
Richard Coeur de Lion de Grétry à l'Opéra Royal de Versailles

Mercredi 17 juillet 2024 sur Mezzo à 20h30
Verdi: I Lombardi alla prima crociata - Opéra Royal de Wallonie-Liège

Vendredi 19 juillet 2024 sur Mezzo HD à 21h00
Puccini : Turandot - Vérone

Vendredi 19 juillet 2024 sur Mezzo à 23h40
Gluck : Iphigénie en Aulide

Samedi 20 juillet 2024 sur Mezzo à 20h30
Sartorio: L'Orfeo - Philippe Jaroussky - Opéra de Montpellier

Samedi 20 juillet 2024 sur Mezzo HD à 21h
Wagner : Siegfried - Opernhaus Zurich

Mardi 23 juillet 2024 sur Mezzo à 23h05
Berlioz : La Damnation de Faust - Pene Pati, Aude Extremo - Monte-Carlo

Mercredi 24 juillet 2024 sur Mezzo à 20h30
Haendel: Flavio - Festival Baroque de Bayreuth

Vendredi 26 juillet 2024 sur Mezzo HD à 23h10
Mozart : La Flûte enchantée - Festival de Salzbourg

Samedi 27 juillet 2024 sur Mezzo à 20h30
Massenet : Thaïs - Opéra de Monte-Carlo

Dimanche 28 juillet 2024 sur Mezzo HD à 21h00
Wagner : Götterdämmerung - Opernhaus Zurich

Mardi 30 juillet 2024 sur Mezzo à 23h00
'Le Rossignol' de Stravinsky et 'Les Mamelles de Tirésias' de Poulenc au Théâtre des Champs-Elysées

Mercredi 31 juillet 2024 sur Mezzo à 20h30
Donizetti : La Fille du régiment - La Fenice de Venise

Vendredi 02 août 2024 sur Mezzo HD à 21h00
'Adelaide di Borgogna' de Rossini à Pesaro

Vendredi 02 août 2024 sur Mezzo à 23h30
Bellini : La Sonnambula - Opéra Royal de Wallonie Liège

Samedi 03 août 2024 sur Mezzo à 20h30
Die Tote Stadt de Korngold au Staatsoper de Munich

Dimanche 04 août 2024 sur Mezzo HD à 21h00
'Le nozze di Figaro' de Mozart au Festival de Salzbourg

Mardi 06 août 2024 sur Mezzo à 23h45
Verdi: I Lombardi alla prima crociata - Opéra Royal de Wallonie-Liège

Mercredi 07 août 2024 sur Mezzo à 20h30
Mozart : Idomeneo - Opéra Royal de Wallonie-Liège

Vendredi 09 août 2024 sur Mezzo HD à 21h00
Verdi : Le Trouvère - Maggio Musicale Fiorentino

Samedi 10 août 2024 sur Mezzo à 20h30
Haendel: Giulio Cesare - Jaroussky, Arquez, Devieilhe

Dimanche 11 août 2024 sur Mezzo HD à 21h00
Mozart : La Flûte enchantée - Festival de Salzbourg

Mardi 13 août 2024 sur Mezzo à 23h50
Haendel: Flavio - Festival Baroque de Bayreuth

Mercredi 14 août 2024 sur Mezzo à 20h30
'Serse' de Haendel à l'Opéra de Rouen

Vendredi 16 août 2024 sur Mezzo HD à 21h00
Janáček : Káťa Kabanová - Festival de Salzbourg

Vendredi 16 août 2024 sur Mezzo à 23h45
Massenet : Thaïs - Opéra de Monte-Carlo

Samedi 17 août 2024 sur Mezzo à 20h30
Mozart : Don Giovanni - Staatsoper Berlin

Dimanche 18 août 2024 sur Mezzo HD à 21h00
Verdi : Le Trouvère - Maggio Musicale Fiorentino

Mardi 20 août 2024 sur Mezzo à 23h00
Donizetti : La Fille du régiment - La Fenice de Venise

Mercredi 21 août 2024 sur Mezzo à 20h30
'Saul' de Haendel au Theater an der Wien

Vendredi 23 août 2024 sur Mezzo HD à 21h00
Puccini : Turandot - Vérone

Vendredi 23 août 2024 sur Mezzo à 22h35
Die Tote Stadt de Korngold au Staatsoper de Munich

Samedi 24 août 2024 sur Mezzo à 20h30
Jonas Kaufmann chante 'Werther' de Massenet à l'Opéra de Paris

Dimanche 25 août 2024 sur Mezzo HD à 21h00
Prokofiev: Le Joueur - Festival de Salzbourg

Mardi 27 août 2024 sur Mezzo à 23h45
Mozart : Idomeneo - Opéra Royal de Wallonie-Liège

Mercredi 28 août 2024 sur Mezzo à 20h30
Le Chevalier à la rose de Richard Strauss

Vendredi 30 août 2024 sur Mezzo HD à 21h00
'Le nozze di Figaro' de Mozart au Festival de Salzbourg

Vendredi 30 août 2024 sur Mezzo à 23h20
Haendel: Giulio Cesare - Jaroussky, Arquez, Devieilhe

Samedi 31 août 2024 sur Mezzo à 20h30
Berlioz : La Damnation de Faust - Pene Pati, Aude Extremo - Monte-Carlo

TV-Web Juillet-Août 2024 Lyrique et Musique

Web : Opéras en accès libre (cliquez sur les titres pour les liens directs avec les vidéos)

Sur Operavision, Culturebox, Arte Concert etc...

                            Illimité

Placido Domingo, l'homme aux mille vies

La Traviata (Chorégies d'Orange 2016) avec Domingo, Jaho, Meli

Le Requiem de Verdi (Chorégies d'Orange)

Le Barbier de Séville (Chorégies d'Orange 2018) avec Peretyatko, Sempey, Hotea

Roberto Alagna - Ma vie est un opéra

Le Royaume des Deux-Siciles (Roberto Alagna)

Patrick Dupond, un danseur chez les étoiles

Michaël Denard, le « prince » de l'Opéra de Paris

Le Lac des Cygnes, l'Ambitieux projet de Tchaïkovski

Maria Callas - Il était une voix

Body and Soul (Opéra national de Paris)

Dans les coulisses de Casse-Noisette

Dans les coulisses de Roméo et Juliette

Dans les coulisses de La Fille mal gardée

Dans les coulisses de Don Quichotte

Accès Live avec Rim'K à l'Opéra Bastille pour « Le Lac des Cygnes »

Accès live à l'Opéra Garnier dans les coulisses de « La Cenerentola »

 

Maria Callas - Il était une voix

A la mémoire de Jodie Devos

                           Juillet 2024

Innocence (Festival d'Aix-en-Provence 2021) jusqu'au 01 juillet 2024

La Fiancée vendue (Théâtre national de Prague) jusqu'au 01 juillet 2024

Innocence (Festival d'Aix-en-Provence 2021) jusqu'au 01 juillet 2024

Grace Bumbry est Carmen jusqu'au 08 juillet 2024

La Chauve-Souris (Croatian national Theatre in Zagreb) jusqu'au 09 juillet 2024

L'incoronazione di Poppea  (Gran Theatre del Liceu de Barcelone) jusqu'au 11 juillet 2024

Andrea Chénier (Teatro Comunale di Bologna) jusqu'au 12 juillet 2024

Wozzeck (Festival d'Aix-en-Provence 2023) jusqu'au 12 juillet 2024

Richard Siegal : Ballet of (Dis)Obedience jusqu'au 12 juillet 2024

L'opéra de quat'sous (Festival d'Aix-en-Provence 2023) jusqu'au 12 juillet 2024

Picture a day like this (Festival d'Aix-en-Provence 2023) jusqu'au 13 juillet 2024

Gala d'opéra - Classic Open Air Hannover jusqu'au 14 juillet 2024

Concours Reine Elisabeth 2014 - Chant - La finale avec Jodie Devos jusqu'au 18 juillet 2024

Valuska (Hungarian State Opera) jusqu'au 19 juillet 2024

Klaus Mäkelä, vers la flamme jusqu'au 20 juillet 2024

Idomeneo (Aix-en-Provence 2022) jusqu'au 23 juillet 2024

                          Août 2024

Nereydas (Festival de Grenade 2023) jusqu'au 02 août 2024

E.Garanca et J.D. Florez (Festival de Salzbourg 2020) jusqu'au 02 août 2024

Artifacts Assembly (Palau des Les Arts Reina Sofia) jusqu'au 02 août 2024

Orchestre des Champs-Elysées (Festival de Grenade 2023) jusqu'au 02 août 2024

Le cinéma de Maurice Jarre jusqu'au 06 août 2024

Picture a day like this (Festival d'Aix-en-Provence 2023) jusqu'au 06 août 2024

Theodora (MusikTheater an der Wien) jusqu'au 12 août 2024

Carmen (Opernhaus Zürich) jusqu'au 15 août 2024

Mantoue en musiques - Lea Desandre jusqu'au 17 août 2024

Le Diable chantant (Theater Bonn) jusqu'au 17 août 2024

Opera in Love - Yoncheva / Grigolo (Arènes de Vérone) jusqu'au 18 août 2024

Hyuk Lee (Palais Royal) jusqu'au 27 août 2024

Le 'Ring' du centenaire (Bayreuth) jusqu'au 27 août 2024

                           Septembre 2024

Carmen (Opéra de Rouen) jusqu'au 03 septembre 2024

Nadine Sierra et Pretty Yende (Philharmonie) jusqu'au 04 septembre 2024

Lise Davidsen (Den Norske Opera & Ballett) jusqu'au 08 septembre 2024

Dalibor (Théâtre national de Prague) jusqu'au 10 septembre 2024

Valer Sabadus (Bayreuth Baroque 2023) jusqu'au 14 septembre 2024

Cambio madre (Muziehtheater Transparant, Flanders Festival Ghent) jusqu'au 15 septembre 2024

La Fille mal gardée (Opéra de paris) jusqu'au 21 septembre 2024

Eugène Onéguine (Deutsche Oper Am Rhein) jusqu'au 23 septembre 2024

Bruno de Sa (Festival d'Ambronay 2023) jusqu'au 24 septembre 2024

Il était une fois Casse-Noisette (Karl Paquette - Châtelet) jusqu'au 25 septembre 2024

Serse (Opéra de Rouen) jusqu'au 26 septembre 2024

John Neumeier - Une vie pour la danse jusqu'au 28 septembre 2024

John Neumeier - La Menagerie de verre (Opéra de Hambourg)jusqu'au 28 septembre 2024

Télémaque et Calypso (Festival d'Ambronay 2023) jusqu'au 29 septembre 2024

Rivoluzione (La Monnaie) jusqu'au 29 septembre 2024

Nostalgia (La Monnaie) jusqu'au 30 septembre 2024

                          Octobre 2024

Intimate Portraits (Polish National Opera and Ballet) jusqu'au 01 octobre 2024

Pietari Inkinen dirige Caplet, Ravel et Rimski-Korsakov - Avec Fatma Saïd jusqu'au 4 octobre 2024

Orlando Furioso (Teatro Comunale di Ferrara) jusqu'au 05 octobre 2024

Requiem de Mozart (Festival d'Ambronay) jusqu'au 06 octobre 2024

Viva Napoli! (Festival d'Ambronay) jusqu'au 07 octobre 2024

Les Chemins de Bach / Un Voyage à Lübeck (Chapelle royale de Versailles) jusqu'au 10 octobre 2024

Idomeneo (Grand Théâtre de Genève) jusqu'au 14 octobre 2024

Concours Long-Thibaud 2023 (Université d'Assas) jusqu'au 16 octobre 2024

Britten - War Requiem (Château de Prague) jusqu'au 16 octobre 2024

Salomé (Irish National Opera) jusqu'au 19 octobre 2024

Eden (Joyce DiDonato à Olympie) jusqu'au 19 octobre 2024

Mirga Gražinytė-Tyla dirige Bruckner, Boulanger et Gražinis jusqu'au 25 octobre 2024

Ariane à Naxos (Garsington Opera) jusqu'au 26 octobre 2024

Les Chevaux de feu (Lviv National Opera) jusqu'au 29 octobre 2024

                          Novembre 2024

Turandot (Scala de Milan) jusqu'au 03 novembre 2024

Don Giovanni (Opéra de Lille) jusqu'au 06 novembre 2024

Fidelio (Dutch National Opera & Ballet) jusqu'au 06 novembre 2024

On Danse Chez Vous : Mehdi Kerkouche (Chaillot) jusqu'au 08 novembre 2024

La Sonnambula (Teatro dell'opera di Roma) jusqu'au 10 novembre 2024

Roméo, Juliette, Thomas et les autres (Opéra national de Paris) jusqu'au 11 novembre 2024

Les Contes d'Hoffmann (Festival de Salzburg) jusqu'au 14 novembre 2024

Marco Tutino : La ciociara (Wexford Festival Opera 2023) jusqu'au 18 novembre 2024

Pablo Heras-Casado dirige Schubert, Goldmark et Brahms jusqu'au 18 novembre 2024

Les Maîtres chanteurs de Nuremberg (Teatro Real de Madrid) jusqu'au 18 novembre 2024

Don Quichotte - Massenet (Opéra national de Paris) jusqu'au 23 novembre 2024

Guercoeur (Opéra national du Rhin) jusqu'au 25 novembre 2024

Alfred, Alfred / La serva padrona (Teatri di Reggio Emilia) jusqu'au 26 novembre 2024

                          Décembre 2024

Tosca (Teatro Regio di Parma) jusqu'au 01 décembre 2024

Requiem de Mozart (Palau de la Musica de Barcelone) jusqu'au 04 décembre 2024

Manon Lescaut (Poznan Opera) jusqu'au 08 décembre 2024

Grand concert symphonique Saint-Saëns (Auditorium de Radio France) jusqu'au 14 décembre 2024

Ballet National de España (Festival de Grenade 2023) jusqu'au 18 décembre 2024

Concert de Noël (Philharmonique de Radio France) jusqu'au 21 décembre 2024

Albert Herring (Opera North) jusqu'au 21 décembre 2024

Hommage à Patrick Dupond jusqu'au 26 décembre 2024

Masterclasse Lawrence Brownlee et Brian Jagde jusqu'au 28 décembre 2024

Le Concert de Paris 2024 jusqu'au 31 décembre 2024

 

                           Janvier 2025

Samson (Festival d'Aix-en-Provence 2024) jusqu'au 11 janvier 2025

L'Olimpiade (Théâtre des Champs-Elysées) jusqu'au 12 janvier 2025

Pinocchio - Weinberg (Polish National Opera and Ballet) jusqu'au 12 janvier 2025

Le Baiser (National Moravian-Silesian Theatre) jusqu'au 19 janvier 2025

Gala Puccini à Venise jusqu'au 19 janvier 2025

Gala Puccini (Place Saint-Marc de Venise) jusqu'au 19 janvier 2025

Apaches au Palais Garnier (Opéra national de Paris) jusqu'au 24 janvier 2025

Les deux Veuves (National Moravian-Silesian Theatre) jusqu'au 26 janvier 2025

Hélène Grimaud & Konstantin Krimmel (Festival de piano de la Ruhr 2024) jusqu'au 28 janvier 2025

                           Février 2025

Operatic Oniricon (Polish National Opera and Ballet) jusqu'au 02 février 2025

Colorature, Mrs Jenkins et son pianiste - Opéra Grand Avignon jusqu'au 09 février 2025

La Walkyrie (LongBorough Festival Opera) jusqu'au 09 février 2025

Charpentier à l'honneur - Festival de musique sacrée à Madrid jusqu'au 14 février 2025

Il viaggio a Reims (Rossini Opera Festival) jusqu'au 16 février 2025

Voix des Outre-mer (Amphithéâtre de l'Opéra Bastille) jusqu'au 20 février 2025

Le Comte Ory (Rossini in Wildbad) jusqu'au 23 février 2025

                           Mars 2025

Fidelio courte animation jusqu'au 01 mars 2025

Maria Callas au cinéma jusqu'au 03 mars 2025

Fauteuils d'orchestre (Anne Sinclair) jusqu'au 21 mars 2025

Car/Men (Théâtre municipal de Béthune) jusqu'au 22 mars 2025

Vivaldi et Mozart au musée du Louvre jusqu'au 24 mars 2025

 

                            Mai 2025

Médée (Opéra national de Paris) jusqu'au 30 mai 2025

                           Juin 2025

Adriana Lecouvreur (Opéra national de Lettonie, Riga) jusqu'au 15 juin 2025

Jour de fête chez Offenbach (Radio France) jusqu'au 22 juin 2025

 

                       Juillet 2025

Alain Altinoglu et Stéphane Degout (Festival de Colmar) jusqu'au 04 juillet 2025

                         Septembre 2025

Angelin Preljocaj : La visite (Picasso Danse) jusqu'au 19 septembre 2025

 

                         Novembre 2025

Le Ring sans paroles (Philharmonique de Strasbourg) jusqu'au 05 septembre 2025

 

                           Janvier 2026

Iphigénie en Aulide - Iphigénie en Tauride (Festival d'Aix-en-Provence 2024) jusqu'au 11 janvier 2026

                           Février 2026

Voix des Outre-Mer 2023 (Amphithéâtre Bastille) jusqu'au 22 février 2026

                           Mars 2026

Concert en soutien au peuple ukrainien (Maison de Radio France) jusqu'au 04 mars 2026

                           Mai 2026

Barry Lyndon Tribute jusqu'au 13 mai 2026

Michel Legrand, la musique enchantée (Dessay, Bertault) jusqu'au 13 mai 2026

                           Juillet 2026

Kiev, un opéra en guerre (1/4) - Danser pour résister jusqu'au 11 juillet 2026

 

                           Septembre2026

Kiev, un opéra en guerre (2/4) - Exister ou disparaître jusqu'au 12 septembre 2026

 

                         Novembre 2026

Les trois ballets de Stravinsky (Théâtre des Champs-Elysées) jusqu'au 25 novembre 2026

                         Décembre 2026

Concert du nouvel an de l'Orchestre national de France (Radio France) jusqu'au 30 décembre 2026

   

                          Janvier 2027

Samson (Festival d'Aix-en-Provence 2024) jusqu'au 11 janvier 2027

Madame Butterfly (Festival d'Aix-en-Provence 2024) jusqu'au 13 janvier 2027

 

                         Juin 2028

Dream Requiem - Rufus Wainwright (Radio France) jusqu'au 13 juin 2028

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Rédigé par David

Publié dans #TV Lyrique

Publié le 30 Juin 2024

Il Trovatore (Giuseppe Verdi – 19 janvier 1853, Rome)
Représentation du 29 juin 2024

Münchner Opernfestspiele 2024 - Bayerische Staatsoper

Ferrando Tareq Nazmi
Inez Erika Baikoff

Leonora Marina Rebeka
Count di Luna George Petean
Manrico Vittorio Grigolo
Azucena Yulia Matochkina
Ruiz Granit Musliu

Direction musicale Francesco Ivan Ciampa
Mise en scène Olivier Py (2013)

Production qui fit l’ouverture du Festival lyrique de l’Opéra de Munich le 27 juin 2013, et qui est régulièrement reprise tous les 2 ou 3 ans, la vision macabre du 'Trouvère' par Olivier Py a pour elle de laisser planer en permanence la malédiction du meurtre de la mère d’Azucena dans un décor industriel sombre dont la complexité interroge encore, d’autant plus qu’il imbrique une scène théâtrale, l’histoire étant une narration. 

Marina Rebeka (Leonora)

Marina Rebeka (Leonora)

La mort est un acteur omniprésent qui prend la forme de figurants aux têtes d’Anubis, ou bien se revêt d’un corps totalement noir lorsque Leonora songe au suicide.

Manrico est dépeint comme un fanatique dont la ferveur atteindra son paroxysme devant une croix enflammée, et l’on peut dire que Vittorio Grigolo représente à outrance ce personnage animé par une flamme intérieure destructrice. Car le ténor italien affiche un rayonnement, une clarté et une richesse de couleurs d’une très grande insolence qui arrivent à susciter l’admiration malgré un jeu exacerbé et un rythme personnel qui ne doivent sûrement pas faciliter la tâche du chef d’orchestre. Rien ne résiste à son chant sanguin d’une implacable efficacité, comme si le chanteur était en recherche d'une rupture.

Vittorio Grigolo (Manrico) et Marina Rebeka (Leonora)

Vittorio Grigolo (Manrico) et Marina Rebeka (Leonora)

Ainsi, on ne peut pas trouver plus opposé de caractère que celui de Marina Rebeka, dont la technique sophistiquée fait entendre à quel point l’écriture verdienne est d’une grande finesse, parcellée de progressifs changements de teintes toujours chargées d’éclat.

Et comme très souvent chez cette élégante artiste, le panache dans la souffrance ne cède en rien aux effets mélodramatiques, comme si la retenue dans l’expression des tendres sentiments de Leonora était la manifestation d’une inséparable maîtrise de soi.

Yulia Matochkina (Azucena) et Vittorio Grigolo (Manrico)

Yulia Matochkina (Azucena) et Vittorio Grigolo (Manrico)

Grand interprète du style verdien également, George Petean porte avec lui l’essence de la vitalité italienne, un chant chargé d’une terre de caractère, ce qui s’entend le mieux lorsqu’il est en dialogue avec la salle. Toutefois, dans les ensembles où l’orchestre prédomine, son timbre se dilue plus nettement que ses partenaires, ce qui lui fait perdre en impact, notamment lorsqu’il est en duo avec le Manrico galvanisant de Vittorio Grigolo.
Mais cela humanise aussi  le portrait du Conte di Luna.

Et sans sembler trop forcer sur ses moyens, Yulia Matochkina inspire en Azucena un personnage d’un grand raffinement, capable autant de puiser dans une noirceur nobiliaire que d’extérioriser des aigus brillants.

Il Trovatore (Rebeka Grigolo Matochkina Petean Ciampa Py) Munich

Parmi les seconds rôles, Tareq Nazmi n’a aucun problème à donner du corps à ce Ferrando qui se révélera être le meurtrier de Manrico, et si le chant profondément moiré d’Erika Baikoff (Inès) a un contour trop flou, c’est d’une belle prestance et d’une forte coloration de timbre que Granit Musliu dote le personnage de Ruiz. Ce jeune chanteur découvert l’année dernière au Festival de Sanxay en Don Ottavio, n’a pas fini d’imprimer sa marque.

George Petean (Le Comte di Luna)

George Petean (Le Comte di Luna)

Avec ces personnalités vocales assez disparates – seules Marina Rebeka et Yulia Matochkina sont les plus proches, stylistiquement parlant -, l’unité d’ensemble est confortée par la direction de Francesco Ivan Ciampa qui, non seulement insuffle un courant orchestral d’une grande puissance, mais combine aussi avec talent les différentes lignes de l’ouvrage afin d’en faire ressortir les traits dramatiques et sombres, comme pour faire ressentir une force sous-jacente à la manœuvre.

Le son de l'Orchestre de l'Opéra de Bavière conserve une excellente souplesse mêlée à une fougue italianisante qui ne vire jamais au vulgaire, et les cuivres sont très chaleureux. Le public n’en est que plus survolté, et avec un chœur d’une grande présence et très bien chantant, tous les ingrédients sont réunis pour faire de cette soirée une interprétation d’une grande générosité.

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